retour Retour

14 - 2011, II - Question d’actualité posée par le groupe E.E.L.V.A. à M. le Préfet de police, relative au passage d’un train de déchets hautement radioactifs en Ile-de-France.



M. LE MAIRE DE PARIS. - Maintenant, nous passons � la question d?actualit� pos�e par le groupe E.E.L.V.A.

La parole est � M. BAUPIN.

M. Denis BAUPIN, adjoint. - Monsieur le Pr�fet, la semaine pass�e, un train de d�chets hautement radioactifs a travers� la France. Il transportait des d�chets issus de centrales italiennes � destination de la gare de Valognes, pour �tre transf�r�s � l?usine Areva de La Hague.

Sur ce parcours, ce train a transit� six heures en Ile-de-France pendant la matin�e du mardi 10 mai. Il a utilis� les voies du RER et a travers� pr�s de quarante gares, parmi lesquelles des agglom�rations importantes comme Melun, Villeneuve-Saint-Georges, Longjumeau, Massy, Versailles ou Mantes-la-Jolie.

J?�tais moi-m�me � la gare de Versailles Chantiers vers 7 h 30 du matin, en pleine heure de pointe, quand le train a travers� la gare � grande vitesse, � quelques centim�tres des usagers des transports collectifs attendant sur les quais, au milieu du va-et-vient des RER et trains de banlieue transitant par cette gare.

En dehors de celle diffus�e par les militants antinucl�aires pr�sents, aucune information n?�tait donn�e aux usagers, aucune pr�caution particuli�re n?�tait prise pour leur protection et leur s�curit�. Rien n?entravait la possibilit� d?incursion sur les voies, voire d?atteintes malveillantes au chargement, alors m�me qu?une semaine plus t�t les autorit�s fran�aises ne cessaient de nous alerter sur les risques de terrorisme mena�ant la France, au nom desquels le plan Vigie Pirate est au niveau rouge renforc�.

Pourtant, le chargement de ce train �tait tout sauf inoffensif. Le combustible us� �tait compos� majoritairement d?uranium mais aussi de plutonium. Il d�gageait de grandes quantit�s de chaleur et �mettait des rayonnements radioactifs gamma, se propageant � plusieurs dizaines de m�tres autour des wagons, exposant � des radiations ionisantes les personnes situ�es � proximit�, � des niveaux potentiels au vu des normes en vigueur, pouvant atteindre 20.000 fois la radioactivit� naturelle.

Pour prot�ger notre sant�, heureusement les haut-parleurs �mettaient r�guli�rement des messages d?alerte, pr�cisant que, pour des raisons sanitaires, il �tait interdit de fumer dans la gare. Mais sur la radioactivit�, rien !

Pr�cisons, par ailleurs, que ces transports, qui traversent notre agglom�ration plusieurs fois par an, sont totalement inutiles pour la production �lectrique. C?est pourtant au nom de celle-ci que la population fran�aise est expos�e au risque nucl�aire.

Non seulement ces milliers de kilom�tres � haut risque ne contribuent pas � produire le moindre kilowatt/heure d?�lectricit� mais ils ne permettent m�me pas de r�duire la quantit� de d�chets hautement radioactifs, ni de r�duire leur radioactivit�. Ces d�chets italiens sont d?ailleurs suppos�s repartir en Italie entre 2020 et 2025, o� rien n?est pr�vu pour les accueillir, cela au titre d?un contrat entre Areva et son homologue italien, sur la l�galit� duquel l?autorit� fran�aise de s�ret� nucl�aire a tenu � rappeler publiquement ses r�serves.

Au vu de ces �l�ments, Monsieur le Pr�fet, notre groupe aimerait savoir quelle information a �t� transmise � la population et aux �lus de l?agglom�ration parisienne sur ce transport de d�chets et ses risques.

Nous aimerions savoir pour quelles raisons un transport aussi dangereux traverse la principale agglom�ration fran�aise � l?heure de pointe, au moment o� les risques sont les plus importants.

Enfin, pouvez-vous nous indiquer quel dispositif pr�ventif a �t� mis en place, au titre de Vigie Pirate, pour �viter tout acte terroriste et quel dispositif d?alerte, de r�action et d?�vacuation est pr�vu dans le cas d?un accident ferroviaire ou d?une action terroriste frappant ce train ?

Au moment o� le pr�sident de la R�publique ne cesse de nous r�p�ter que le nucl�aire fran�ais est le plus s�r du monde, nous attendons impatiemment vos r�ponses.

M. LE MAIRE DE PARIS. - Merci.

Monsieur le Pr�fet de police, vous avez la parole.

M. LE PREFET DE POLICE. - Monsieur le Maire, Mesdames et Messieurs les Conseillers, Monsieur le Conseiller, en vertu d?accords internationaux pass�s avec certains pays europ�ens, comme l?Italie - l?accord dont vous venez de parler et l?Allemagne, la fili�re nucl�aire fran�aise assure le retraitement et conditionnement de combustibles nucl�aires us�s.

Dans le contexte �nerg�tique mondial et compte tenu des perspectives technologiques existantes, il est tout � fait loisible � un quelconque groupe politique d?avoir une opinion sur l?opportunit� de recourir ou non � l?�nergie nucl�aire, ainsi que sur les moyens de r�duire la part du nucl�aire, voire - je crois que c?est votre position - d?y renoncer.

Les d�monstrations publiques sont �galement libres, � condition qu?elles respectent les lois et r�glements, ce qui n?est pas toujours le cas en la mati�re. C?est d?ailleurs assez paradoxal, puisque quelquefois des convois dont on nous dit qu?ils sont tr�s dangereux sont bloqu�s pendant des heures. Cela n?a pas �t� le cas, mais cela explique aussi la fa�on dont les choses sont organis�es.

A partir du moment o� nous nous situons dans un contexte national et europ�en, dans lequel l?�nergie nucl�aire fournit une large part des ressources �nerg�tiques, nous avons le devoir et nous devons avoir la maturit� institutionnelle de traiter de mani�re industrielle et s�re les combustibles us�s dans des lieux adapt�s et �quip�s ; c?est le cas de l?usine de retraitement de La Hague.

C?est donc dans ce contexte que, tr�s ponctuellement, des convois ferroviaires sp�cialis�s interviennent. Le train est, � cet �gard, consid�r� comme le moyen de transport le plus s�r. Bien �videmment, les convois ferroviaires des mati�res en question s?effectuent dans des wagons s�curis�s, que vous connaissez bien s�r. Ces wagons sont g�olocalis�s en temps r�el. Ils sont prot�g�s dans le strict respect des normes nationales et europ�ennes en vigueur, ainsi que celles �dict�es par l?AIEA (Agence internationale de l?�nergie atomique).

L?Institut de radioprotection et de s�ret� nucl�aire dispose d?un centre op�rationnel de suivi, ce qui r�pond � votre pr�occupation, puisque nous savons � chaque instant, avec la g�olocalisation, � partir de ce centre op�rationnel, o� se trouve le chargement. Et ce centre op�rationnel est en liaison �troite avec les services de police et de gendarmerie qui assurent la surveillance.

Pour des raisons de s�curit�, les itin�raires et les horaires emprunt�s font l?objet d?une classification de d�fense, de surveillance et patrouille. Cette surveillance est au besoin h�liport�e gr�ce aux h�licopt�res de la gendarmerie.

De ce point de vue, les blocages inopin�s de convois n?apparaissent pas dans notre pays comme la m�thode la plus opportune pour contester, comme je le disais, les choix qui sont op�r�s.

Bien �videmment, inutile de dire - m�me si ces choses sont, comme je l?indiquais, en cat�gorie classement confidentiel - que nous sommes avertis, que la Direction g�n�rale de la police suit l?avancement de ces transports, dans la partie ferroviaire mais aussi dans la partie routi�re, puisqu?� partir de Valognes le chargement passe par la voie routi�re.

Depuis quelques temps, ayant appris qu?il y avait ces stationnements en r�gion parisienne, je me suis pr�occup� de cette situation et je pense que l?on pourrait �viter les grandes agglom�rations, et pas seulement Paris parce qu?il ne s?agit pas tout simplement de repasser le mistigri � d?autres, mais aussi voir comment on pourrait faire en sorte avec la compagnie ferroviaire que les stationnements ne soient pas prolong�s dans les zones qui sont les plus urbanis�es.

Voil� ce que je pouvais dire en r�ponse � votre question.

M. LE MAIRE DE PARIS. - Merci.

Un mot de Denis.

M. Denis BAUPIN, adjoint. - Merci d?avoir reconnu que ces convois �taient tr�s dangereux. Vous avez utilis� vous-m�me ce terme et c?est en effet le cas.

Je suis tout de m�me un peu pr�occup� que vous nous disiez qu?ils ne font que respecter les normes en vigueur fran�aises et europ�ennes, alors que vous nous avez indiqu� � plusieurs reprises par ailleurs quels �taient les dangers terroristes aujourd?hui qui pouvaient menacer la France. Vous n?avez absolument pas r�pondu par rapport � ce point.

Franchement, � voir passer ce train en plein milieu de la gare, vraiment au bord des quais, comme si vous �tiez dans n?importe quelle gare au milieu des passagers, on se dit que vraiment rien n?est pr�vu pour ne serait-ce que pr�venir. On aurait pu le faire passer en dehors de la gare. On pourrait imaginer que l?on demande aux gens de s?�loigner des quais, de passer par exemple sur un quai d�saffect�, mais rien n?est pr�vu par rapport � ce type de situation. Je trouve cela tr�s pr�occupant dans une agglom�ration comme la n�tre o� il y a des millions d?habitants.

M. LE MAIRE DE PARIS. - Je vous invite � poursuivre votre �change l�-dessus. C?est un sujet tr�s s�rieux et cela implique que...

M. LE PREFET DE POLICE. - Je ne voudrais pas abuser de votre volont� pour me donner la parole.

M. LE MAIRE DE PARIS. - Vous constaterez, Monsieur LELLOUCHE, que je ne suis pas vraiment autoritaire. Alors, Monsieur le Pr�fet de police?

M. LE PREFET DE POLICE. - Je vous l?ai demand�e avec beaucoup de politesse?

M. LE MAIRE DE PARIS. - C?est � M. LELLOUCHE que je parle et pas � vous. Je voudrais lui rappeler que nous ne sommes pas sous tutelle : je donne la parole au pr�fet de police volontiers mais je ne suis pas sous tutelle.

Monsieur le Pr�fet de police, c?est avec grand plaisir que je vous donne la parole, et pas � d?autres.

M. LE PREFET DE POLICE. - Merci, Pr�sident.

Il y a un risque terroriste dans notre pays. Si vous pensez que le mieux est d?annoncer � son de trompes le passage des wagons pour faciliter la t�che des terroristes, je pense que c?est tout de m�me ce qui justifie le ?confidentiel d�fense?.

D?autre part, je ne voudrais pas contredire M. le Maire de Paris, mais je lui signale que les hauts fonctionnaires sont � la disposition du Gouvernement - il s?agit-l� de la premi�re question - et que je mets en ?uvre la politique du Gouvernement, quel que soit le Gouvernement que le peuple fran�ais choisit.

A l?heure actuelle, celui qu?il a choisi m?a amen� � appliquer sa politique.

M. LE MAIRE DE PARIS. - Monsieur le Pr�fet de police, g�rez les choses comme cela vous para�t bien. Surtout, je vous mets � l?aise !

Effectivement, un haut fonctionnaire est � la disposition du Gouvernement l�gitime, qui sort des urnes, et il applique sa politique.

Je voudrais vous faire remarquer que je disais justement que je ne voulais pas chercher la pol�mique avec un haut fonctionnaire, dont je respecte les fonctions, et que ma pol�mique �tait avec le Gouvernement.

Maintenant, si vous souhaitez que je pol�mique avec vous comme avec un membre du Gouvernement, vous me le direz, mais nous en reparlerons dans nos conversations habituellement cordiales et respectueuses de part et d?autre.

La parole est � Ian BROSSAT.

Je n?ai pas de le�on � recevoir de ceux qui, ici, mettaient en cause un Pr�fet de police (c?�tait M. MASSONI) en l?accusant d?�tre � la solde du Gouvernement. Il fallait que moi, �lu de l?opposition, je d�fende la neutralit� des hauts fonctionnaires de la R�publique.

Je n?ai rien oubli�, la vie est longue, elle a exist� longtemps avant, elle existera longtemps apr�s.

A bon entendeur, salut !

Mai 2011
Débat
Conseil municipal
retour Retour