retour Retour

110 - Vœu n° 42 déposé par le groupe "Les Verts" visant à déposer une plainte contre X avec constitution de partie civile dans l'affaire des dépenses de bouche, avant 1995, d'un ancien Maire de Paris et de sa famille


M. Christophe CARESCHE, adjoint, pr�sident. - Je reviens un instant sur le v?u n� 42 d�pos� par le groupe des "Verts".
Monsieur RIOU, vous avez la parole.
M. Alain RIOU. - Monsieur le Maire, mes chers coll�gues, je vais r�sumer la situation.
Il se trouve qu'il y a quelques mois, a �t� r�v�l� que les archives de la Questure avaient en partie ou m�me peut-�tre totalement disparu.
La Ville de Paris - on en a discut� plusieurs fois dans cet h�micycle - a trouv� qu'il n'y avait sans doute rien d'ill�gal dans l'affaire et donc a consid�r� qu'il n'y avait pas lieu d'agir ni de transmettre au Parquet les informations en question, ni de porter plainte simple, ni avec constitution de partie civile.
Et puis, on a appris, apr�s qu'il y ai eu une fuite dans la presse, notamment au b�n�fice du "Canard Encha�n�", qu'un rapport avait �t� �labor� justement sur les d�penses, dont les documents de r�f�rence se trouveraient en partie dans les archives de la Questure - c'est un petit myst�re - qui avaient toutes disparu ou en partie.
Apparemment, il en restait suffisamment pour pouvoir �tablir un rapport sur les d�penses de bouche des maires pr�c�dents donc de la p�riode 1987-2000.
Il se trouve que ces informations ayant �t� r�v�l�es par la presse, le Pr�sident de la R�publique, qui �tait plus ou moins concern� puisque c'�taient les d�penses de bouche des �poux CHIRAC, a pris la parole pour dire que s'il y avait des dysfonctionnements et des malversations, ce qui apparemment apparaissait dans le rapport en question, il convenait de porter plainte.
Apr�s cette intervention du Pr�sident de la R�publique, on n'a plus beaucoup entendu parler de cette question, sinon que par des informations qui �taient elles-m�mes fournies de mani�re pas tout � fait officielle mais d�tourn�e ou en tout cas qui �taient obtenues avec difficult�, on a appris qu'il y avait d'abord un premier d�lai qui avait �t� donn� aux �lus qui �taient concern�s, � M. CHIRAC, � M. TIBERI ainsi qu'� certains collaborateurs comme MM. BLED, ROMANI et THOMAS.
Le rapport qui leur avait �t� envoy� devait faire l'objet d'une r�ponse de leur part dans un d�lai d'un mois ; autrement dit, le 25 avril de cette ann�e.
M. TIBERI - les informations que je donne sont �videmment sujettes � caution - aurait demand� un d�lai suppl�mentaire, ce qui portait la r�ponse demand�e au 25 mai.
Depuis cette date, le rapport est d�finitif et les r�ponses des personnes concern�es sauf celle de M. CHIRAC sont � la disposition du Maire de Paris.
Depuis cette p�riode, il ne se passait rien ; nous avons d�pos� un v?u et inform� que nous avions l'intention de le faire.
Le lendemain du jour o� ce v?u a �t� d�pos�, le Maire de Paris transmettait, comme lui en fait obligation l'article 40 du Code de proc�dure p�nale, le rapport en question avec une lettre qui suivait.
J'avoue que je ne comprends pas tr�s bien comment ce dossier a �t� g�r�. Je pense qu'en effet les informations sur la Questure on les a depuis tr�s longtemps. Il n'�tait pas absolument indispensable de faire faire un rapport par l'Inspection g�n�rale pour transmettre au Parquet au titre de l'article 40, les informations en question dont apparemment on dispose depuis plusieurs mois.
Ce rapport est d�finitif depuis plusieurs semaines et il ne faisait l'objet d'aucun traitement particulier.
Je pense que plut�t que de se borner � transmettre simplement ce rapport au Parquet, on aurait pu porter plainte pour que le Procureur soit au moins amen� � faire une enqu�te pr�liminaire, ou plus s�rement et c'est l'objet de ce v?u, porter plainte avec constitution de partie civile, tout simplement parce que c'est la seule solution pour qu'un magistrat instructeur, par d�finition ind�pendant de la Chancellerie, puisse instruire cette affaire, voire requalifier les faits, mais cela me semble indispensable pour une bonne administration de la Justice.
Aujourd'hui, il n'y a pas de Procureur de Paris. Celui qui va remplacer le procureur actuel - il ne faut jamais faire de proc�s d'intention - sera d�sign� par le Pr�sident de la R�publique nous le savons et c'est toujours tr�s d�licat, �tant plac� � cette fonction, de faire une enqu�te pr�liminaire sur celui qui vous a nomm�.
Ce serait beaucoup plus sain, � la fois politiquement et judiciairement, de porter plainte avec constitution de partie civile dans la mesure ou s'il y a des faits qui sont av�r�s, le magistrat instructeur pourra dans tous les �l�ments et dans tous les lieux o� des faits r�pr�hensibles ont pu �tre commis, commencer � faire interroger l'ensemble de ceux qui ont �t� m�l�s � ces affaires.
C'est pourquoi nous regrettons qu'aujourd'hui on ait retenu la main en faisant une simple transmission au Parquet.
Il est indispensable, me semble-t-il, d�s maintenant et pour perdre le moins de temps possible, de porter plainte avec constitution de partie civile dans cette affaire.
M. Christophe CARESCHE, adjoint, pr�sident. - Je vous rappellerai tout d'abord que c'est le Maire de Paris qui a d�cid� de saisir l'Inspection g�n�rale de la Ville du fonctionnement de la Questure d�s la rentr�e 2001.
Ce rapport ne r�sulte pas de l'op�ration du Saint-Esprit, comme je l'ai entendu ou lu. A l'�poque, je vous le rappelle, Monsieur RIOU, le Parlement discutait de sa suppression, notamment � l'initiative des parlementaires socialistes parisiens.
Un rapport provisoire a �t� remis au Maire en mars dernier. Contrairement aux pratiques anciennes qui avaient cours � la Ville, le Maire a souhait� que toutes les garanties qui s'attachent � la proc�dure contradictoire soient mises en ?uvre, nous en avons parl� dans le cadre notamment de l'Inspection g�n�rale. Certaines des personnalit�s concern�es ont m�me demand� � b�n�ficier d'un d�lai plus long pour pouvoir pr�senter leurs observations. Cela leur a �t� accord�. Le rapport d�finitif a �t� remis au Maire de Paris il y a quelques jours.
Imm�diatement, celui-ci a saisi la justice, conform�ment � l'article 40 du Code de proc�dure p�nale.
Vous savez, Monsieur RIOU, que cet article fait obligation � toute autorit� publique de d�noncer au minist�re public les �ventuels d�lits dont il a connaissance. Le Maire de Paris a appliqu� strictement ce principe.
Vous savez aussi, Monsieur RIOU, qu'il existe des d�lais de prescription, que la caract�risation des infractions n'est pas toujours ais�e et que le partage entre les d�penses d'int�r�t communal et celles d'int�r�t national m�rite un examen attentif. Or le Maire de Paris ne souhaite pas exposer la collectivit� parisienne � des proc�dures pour d�nonciation calomnieuse en se portant partie civile � la l�g�re.
C'est d'ailleurs pr�cis�ment parce que la qualification p�nale des faits est parfois difficile � �tablir que le Procureur de la R�publique est le mieux � m�me de diriger l'action publique et de d�clencher des poursuites.
En m�me temps, nous savons bien qu'il peut y avoir des enqu�tes pr�liminaires qui durent et qui se perdent dans les oubliettes du Parquet.
C'est pourquoi, Monsieur RIOU, dans sa lettre de transmission au Parquet, le Maire de Paris demande explicitement au Procureur de l'informer dans un d�lai raisonnable des suites qu'il compte r�server � cette affaire.
S'il ouvre une information judiciaire sur tout ou partie des questions dont il est saisi, la collectivit� parisienne se constituera partie civile, elle peut le faire � n'importe quel stade.
S'il ne prend pas de d�cision, alors le Maire de Paris se r�serve le droit d'agir en justice pour pr�server les int�r�ts des Parisiens et de la collectivit�, comme il l'a indiqu� dans sa lettre.
Nous n'avons pas � soup�onner a priori, comme vous venez de le faire, le Parquet dans cette affaire. Le Code de proc�dure p�nale lui donne l'opportunit� des poursuites, c'est sa responsabilit�.
Laissons la justice faire son travail, mais nous avons pris date par rapport � un �ventuel "enterrement" des poursuites.
Voil� la r�ponse que je voulais vous faire et qui motive de ma part une demande de retrait de votre v?u.
La parole est � M. S�GUIN.
M. Philippe S�GUIN. - Monsieur le Maire, c'est sans �tonnement, je dois le dire, que nous avons pris connaissance du v?u de M. RIOU et de ses coll�gues. M. RIOU nous a dit lui-m�me que les informations sur lesquelles il basait sa diatribe �taient sujettes � caution. Ce sont donc moins ses propos qui pourraient nous pr�occuper qu'une partie au moins de ceux de l'Ex�cutif.
En fait, ce qui nous pr�occupe surtout, je dois le dire, avec toute la mesure dont je suis capable, c'est la mani�re dont on para�t utiliser l'Inspection g�n�rale et ses rapports, depuis quelques mois, comme autant d'instruments de r�glements de comptes politiques.
Et cette affaire des suppos�s frais de bouches, eux-m�mes extraits des d�penses de la Questure nous en para�t une nouvelle illustration. Je dis une nouvelle illustration parce que je garde en m�moire la mise en cause par la m�me voie de deux de mes coll�gues du groupe R.P.R., et j'attends avec beaucoup d'int�r�t le d�nouement de la proc�dure qui a �t� enclench�e.
Je voudrais le dire tout net, Monsieur le Maire, cette instrumentalisation, si elle devait �tre confirm�e, est regrettable et dangereuse. Elle ne correspond pas du tout au souci que le Maire de Paris, M. DELANO�, affiche, je le cite, ce sont ses propos d'hier : "de ne pas mener de gu�rilla et de ne pas s'affaiblir par esprit politicien".
Cette instrumentalisation serait d'autant moins acceptable qu'on ferait d�raper l'Inspection g�n�rale en lui laissant ou en lui faisant prendre des initiatives que la loi lui interdit. Or, je crains que ce ne soit le cas en l'esp�ce.
La loi du 29 d�cembre 1986 dite de r�tablissement de la Questure organise tr�s pr�cis�ment les contr�les op�r�s sur la Questure. A tort ou � raison, n'entrons pas dans ce d�bat, la loi dit que ces contr�les appartiennent exclusivement aux �lus et � la Cour des Comptes.
Aux �lus d'abord : toutes les sensibilit�s politiques du Conseil de Paris �taient et restent repr�sent�es dans les commissions qui approuvent les contr�les des comptes. A l'inverse, les budgets de la Questure ont toujours �t� adopt�s � l'unanimit�, et ces contr�les appartiennent ensuite aux magistrats de la Cour des Comptes, pas seulement parce que la commission de v�rification est pr�sid�e par l'un deux, mais aussi parce que c'est la Cour des comptes elle-m�me qui est comp�tente au titre de ses droits d'�vocation et de r�formation pour contr�ler l'apurement qui est effectu� par la Commission de v�rification.
Or, il nous semble que le rapport consacr� au fonctionnement de la Questure d'o� sont extraites, je le r�p�te, les quelques observations sur les frais de bouche, ignore totalement ces principes.
En commandant ce rapport, l'Ex�cutif, selon nous, a empi�t� sur les droits et l'ind�pendance du Conseil de Paris. Il aurait d� au minimum demander express�ment l'accord du Conseil pour diligenter cette Inspection, et il empi�tait de surcro�t sur les pr�rogatives de la Cour des comptes.
En d'autres termes, l'Inspection g�n�rale n'avait, selon nous, aucun titre � proc�der � l'enqu�te en cause, et les interrogatoires auxquels elle a proc�d� nous semblent pouvoir relever en bon droit de la voie de faits.
Cette instrumentalisation est d'autant plus d�plorable que cette Inspection g�n�rale n'en est pas une, en d�pit des efforts consentis pour inventer une proc�dure contradictoire qui n'a aucune valeur juridique. Cette Inspection g�n�rale est et ne demeure qu'un service administratif rattach� au Maire de Paris pour l'informer du fonctionnement des autres services.
On me dira que cette Inspection g�n�rale a �t� cr��e du temps de M. CHIRAC, c'est vrai, mais lui, du moins, ne s'en servait pas contre ses adversaires politiques.
Il faut en finir avec ces m�thodes. Il existe une mani�re simple d'arranger les choses : il suffit de r�former l'Inspection g�n�rale et, si possible, par d�cret en Conseil d'Etat de lui donner une r�elle ind�pendance, d'ouvrir sa saisine, de pr�voir express�ment ses proc�dures.
Alors, et j'en terminerai par l�, et en ce sens ce voeu n'aura pas �t� inutile, ouvrons un d�bat que l'on a, malheureusement d� diff�rer depuis un certain nombre de mois. Je vous remercie.
(Applaudissements sur les bancs des groupes "Rassemblement pour la R�publique et apparent�s", "D�mocratie lib�rale et Ind�pendants", "Ensemble pour Paris" et Union pour la D�mocratie fran�aise).
M. Christophe CARESCHE, adjoint, pr�sident. - Monsieur RIOU, vous avez la parole.
M. Alain RIOU. - Je suis d'accord avec M. S�GUIN sur un point, c'est qu'en effet on pouvait tr�s bien transmettre au Parquet depuis plusieurs mois sans passer par l'Inspection g�n�rale. C'est ce que j'ai dit dans ma pr�c�dente intervention.
En revanche, sur les informations - sujettes � caution - que j'aurais eues, je vous signale que c'�tait uniquement sur les d�lais puisque, pour le reste, le contenu du rapport �tait diffus� dans un journal et le Pr�sident de la R�publique l'a comment� en disant que "si des malversations ou des dysfonctionnements ont eu lieu, il faut porter plainte".
Je r�ponds maintenant � M. le Maire en disant que si le Parquet, dans quelques mois, n'a rien fait ou a d�cid� de classer sans suite, je vois assez mal le Maire de Paris reprendre l'affaire puisque, par d�finition, ce dont vous parlez, la d�nonciation calomnieuse sera plus �vidente parce que par d�finition, le Parquet se sera d�j� prononc� sur la question. Je ne vois pas tr�s bien quelle est cette logique. Ce serait, et je le r�p�te, une bien meilleure administration de la justice que de porter plainte contre X avec constitution de partie civile. Cela permettrait � un magistrat ind�pendant de la chancellerie d'instruire d�s maintenant et d'interroger et de prot�ger les agents dont, aujourd'hui, l'on ne peut pas recueillir le t�moignage. Plus le temps passera, et plus les choses ne pourront pas �tre connues. C'est pourquoi je pense qu'il aurait fallu �tre plus efficace avant. D�sormais, il convient de ne pas attendre. C'est pour �a que le v?u est maintenu. Au demeurant, je consid�re que m�me ce v?u d�pos� en l'�tat, laisse la libert� totale au Maire de Paris de faire ce qu'il veut en dernier ressort, mais le dernier ressort sera le d�p�t d'une plainte avec constitution de partie civile. Il n'est pas contradictoire avec la position du Maire, � ceci pr�s qu'il lui indique qu'il faut finir par le faire alors que le Maire se r�serve le droit de r�fl�chir s'il va le faire ou non ce qui, je le r�p�te, n'est pas de bonne politique judiciaire.
M. Christophe CARESCHE, adjoint, pr�sident. - Je voudrais dire � M. RIOU qu'il tient un raisonnement que j'ai du mal � comprendre. Je suis charg� de la Questure depuis le d�but de cette mandature, je ne vois pas tr�s bien sur quoi le Maire de Paris ou moi-m�me aurions pu saisir la justice en l'absence d'�l�ments tangibles. Ces �l�ments ont �t� effectivement r�v�l�s par l'enqu�te de l'Inspection. Mais je n'avais pas, pour ce qui me concerne, d'�l�ments me permettant de saisir la justice. Je n'ai eu, � aucun moment, dans ma fonction, � conna�tre ce genre de choses. Je vous le dis tr�s sinc�rement, s'il n'y avait pas eu cette enqu�te de l'Inspection, un certain nombre de faits qui ont �t� effectivement r�v�l�s, semble-t-il, dans le rapport de l'Inspection, n'auraient pas �t� mis en lumi�re. C'est le premier point. Par cons�quent, c'est bien sur la base de ce travail que le Maire de Paris a cru devoir transmettre au Procureur de la R�publique un certain nombre d'�l�ments. Pour ce qui concerne l'intervention de M. S�GUIN, je ne vais pas, ici, improviser une r�ponse par rapport � des arguments qui sont tout � fait int�ressants et qui m�ritent d'�tre examin�s. Ce que je vous propose, c'est que les services juridiques de la Ville et peut-�tre ceux de l'Inspection r�pondent de mani�re tout � fait circonstanci�e et argument�e sur les �l�ments que vous avez soumis au d�bat.
Par ailleurs, nous aurons un d�bat sur l'Inspection g�n�rale en novembre � partir du premier rapport annuel d'activit� de l'inspection, qui portent d�bat sur les orientations, les missions, le mode de saisine. Bref, tout ce qui concerne l'Inspection g�n�rale. Voil� les �l�ments que je voulais vous communiquer en r�ponse. Le voeu est maintenu.
Nous allons passer au vote en donnant, pour ce qui me concerne, un avis d�favorable.
Je mets donc aux voix, � main lev�e, la proposition de v?u n� 42 d�pos�e par le groupe "Les Verts".
Qui est pour ?
Contre ?
Abstentions ?
La proposition de v?u n� 42 est repouss�e.
Je vous remercie.

Juillet 2002
Débat
Conseil municipal
retour Retour