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2008, III - Question d’actualité posée par le groupe socialiste, radical de gauche et apparentés à M. le Maire de paris relative au projet de loi dit de “mordernisation de l’économie”.


M. LE MAIRE DE PARIS. - Monsieur Pierre AIDENBAUM, vous avez la parole pour la question d?actualit� du groupe socialiste, radical de gauche et apparent�s.

M. Pierre AIDENBAUM, maire du 3e arrondissement. - La nouvelle loi dite de modernisation de l?�conomie change le mode de fonctionnement des Commissions d�partementales d?Equipement commercial. Les C.D.E.C. sont, jusqu?� aujourd?hui, un des rares instruments dont les collectivit�s locales disposent pour influer sur l?installation des commerces en ville car elles permettent aux �lus de donner un avis d�terminant pour toute autorisation d?implantation de commerces de plus de 300 m�tres carr�s.

Or, la nouvelle loi stipule que la commission donnera dor�navant son avis uniquement sur l?installation des commerces de plus de 1.000 m�tres carr�s.

A Paris, c?est plus d?un tiers des dossiers sur lesquels la commission ne pourra plus statuer. Cela expose plus particuli�rement les petits commerces de centre ville � l?arriv�e de moyennes surfaces et de hard discounters et enl�ve un pouvoir de d�cision aux �lus, confront�s quotidiennement aux attentes des Parisiens.

Je me permets de rappeler que la France reste le pays europ�en qui poss�de sur son territoire le plus grand nombre d?hypermarch�s, trois fois plus qu?en Allemagne, par exemple. Voil� le bilan d?une loi que le Gouvernement, par ailleurs, taxe de liberticide.

De plus, � l?avenir, ni les chambres consulaires ni les associations de consommateurs ne pourront si�ger � la commission. Les travaux entre �lus, professionnels et consommateurs, comme les sch�mas d?am�nagement commercial, dispara�tront donc tout simplement.

Elu du centre de Paris, je peux t�moigner des difficult�s que nous �prouvons quotidiennement pour y maintenir des petits commerces de proximit�, essentiels � la vitalit� et � l?animation de nos quartiers.

Alors que l?Etat a fait annuler les dispositions du P.L.U. que nous avons vot� et qui prot�geaient les commerces sur plus de 260 kilom�tres de rue, ce qui �tait une avanc�e consid�rable, la loi DUTREIL, dor�navant, se r�v�le difficilement applicable.

Malgr� les besoins de pr�emption de baux, il ne reste � la Ville comme seule arme pour pr�server le petit commerce dans ses quartiers, que ce qui a �t� fait dans la pr�c�dente mandature avec la S.E.M.A.E.S.T. dont je voudrais aujourd?hui particuli�rement saluer le travail, mais dont la marge de man?uvre reste limit�e � quelques quartiers tant sont co�teuses les proc�dures engag�es.

Dans la droite ligne, les d�put�s socialistes qui ont d�pos� � l?Assembl�e Nationale deux amendements � cette loi en proposant d?identifier et de d�limiter les quartiers, �lots, voies, dans lesquels doit �tre pr�serv�e ou d�velopp�e la diversit� commerciale, notamment � travers les commerces de d�tail et de proximit�.

J?insiste, Monsieur le Maire, sur le risque que nous, �lus de proximit�, percevons dans cette loi qui supprime un moyen essentiel pour les �lus de r�gulation des implantations commerciales pour respecter l?objectif de diversit� commerciale, notamment � travers la pr�servation ou le d�veloppement du commerce de d�tail et de proximit� dans les quartiers parisiens o�, nous le savons, la tension sp�culative est si tendue et qui nous permettent aussi, par ailleurs, de lutter contre la mono activit�.

Si tel devait �tre le cas, Monsieur le Maire, je vous dis en conclusion que ce serait un tr�s mauvais coup port� au petit commerce dans notre capitale.

Je vous remercie.

(Applaudissements sur les bancs des groupes socialiste, radical de gauche et apparent�s, communiste, du Mouvement r�publicain et citoyen et ?Les Verts?).

M. LE MAIRE DE PARIS. - La parole est � Mme Lyne COHEN-SOLAL.

Mme Lyne COHEN-SOLAL, adjointe. - Comme vous l?avez dit, Monsieur le Maire du 3e arrondissement, depuis sept ans, la Ville de Paris met en ?uvre une politique commerciale volontariste et dynamique qui se r�v�le efficace en faveur de la diversit� et de l?�quilibre entre les diff�rentes formes de commerces dans la Capitale.

Cette politique, naturellement, organise le soutien et l?encouragement des commerces les plus fragiles, les plus petits, les plus sujets aux effets de la mondialisation. Ce sont eux qu?il nous faut aider.

Vous l?avez rappel�, la Ville a ainsi mis en place des proc�dures innovantes avec la S.E.M.A.E.S.T. Nous avons aussi pr�vu des espaces ?commerce et artisanat? dans nos quartiers. Nous avons vot� un P.L.U. dont des dispositions prot�gent les lieux de commerce.

Parmi les outils de cette politique figure la C.D.E.C. dont le Gouvernement propose de modifier tr�s largement les attributions dans le d�bat qui s?ouvre demain devant le Parlement.

Par ce texte dit de modernisation de l?�conomie, le Gouvernement propose de laisser s?installer les commerces de moins de 1.000 m�tres carr�s sans examen devant les C.D.E.C. Nous sommes inquiets, comme l?ensemble des �lus locaux, des effets d�vastateurs pr�visibles sur nos petits commerces.

Et ce n?est pas tout, car ce texte propose aussi d?en finir avec la loi GALLAND interdisant les ventes � perte, d?en finir avec la fermeture des commerces le dimanche, d?en finir avec la limitation des p�riodes de soldes. Des amendements se pr�pareraient m�me, si j?en crois le ?Journal du Dimanche?, contre le prix unique du livre qui a sauv� pourtant tant de nos librairies.

Nous estimons que ce texte pr�cipiterait notre soci�t� vers une consommation uniformis�e, standardis�e, privil�giant les grands groupes aux d�pens du commerce ind�pendant diversifi�, aux d�pens des artisans encore pr�sents dans nos villes.

Nous sommes aussi inquiets de nous voir dessaisis des outils de ma�trise de l?am�nagement de notre territoire commercial, comme vous l?avez dit, Monsieur AIDENBAUM.

Nous avons en effet une vision diff�rente de celle qui est propos�e par ce projet de loi. Nous savons que le commerce structure la vie en ville. Nous souhaitons pouvoir le d�velopper, en partenariat avec les commer�ants dans leur diversit�, comme nous le faisons � Paris.

Les partenaires de la Ville dans ce secteur, que je rencontre tr�s r�guli�rement et avec qui nous travaillons en bonne intelligence, se disent eux aussi tr�s inquiets de l?application de ce texte en l?�tat.

De fait, la situation actuelle n?a pas emp�ch� la cr�ation de nouveaux magasins, l?arriv�e de nouveaux concepts et des concepts innovants dans la capitale, mais elle a surtout permis de les pr�parer, de les orienter, en concertation avec les investisseurs. Elle a aussi permis d?exercer une fonction de veille, de surveillance au-dessus des 300 m�tres carr�s, une fonction importante, int�ressante et fructueuse pour les �lus que nous sommes.

Ce qui inqui�te les �lus de la Capitale, c?est de perdre peu � peu tous ces outils de gestion et de ma�trise commerciale. Quelle �trange co�ncidence en effet que de voir l?Etat attaquer le P.L.U. vot� par le Conseil de Paris sur les dispositions en faveur des commerces et de constater au m�me moment que la r�cente loi Dutreil, promise pour la pr�emption de baux commerciaux, se r�v�le tr�s difficilement applicable � cause de la lourdeur des proc�dures pr�vues et les dangers qu?elle fait courir aux finances locales. Nous y reviendrons, je crois, cet apr�s-midi.

Ce qui trouble les �lus de la capitale, c?est qu?en compensation de cette lib�ralisation de la concurrence en faveur des grandes enseignes et des hypermarch�s puissants, le Gouvernement proposerait la sauvegarde des commerces de centre ville par des subventions sur fonds publics, comme on le ferait, par exemple, pour des monuments historiques.

Ces subventions proviendraient soit de l?Etat soit des collectivit�s. Pour aider le commerce, le Gouvernement pr�f�re donc la d�pense publique � la r�glementation. Permettez-moi de m?interroger sur la coh�rence de cette conception de la libre entreprise, libert� pour les forts, subvention pour les petits. Quelle est donc cette vision pr�tendument moderne du commerce d?aujourd?hui ?

Pour notre part, nous pensons qu?il est l�gitime que le brutal jeu du march� soit encadr�, voire ma�tris� par la loi. Nous sommes pour la loi qui prot�ge les plus fragiles face aux exc�s de la mondialisation et nous souhaitons multiplier les lieux de travail en commun, de coproduction entre professionnels, consommateurs et �lus. Il y va de l?animation de notre vie urbaine. Il y va un peu, aussi, de notre choix de civilisation.

Dans notre Assembl�e, les d�lib�rations sur la S.E.M.A.E.S.T. en faveur du commerce de proximit� ont �t� vot�es � l?unanimit�, et nous souhaitons que les repr�sentants des Parisiens au Parlement s?expriment de la m�me fa�on, c?est-�-dire unanimement, pour une inflexion de cette loi en faveur de ce commerce le plus fragile, celui dont nous avons tant besoin pour notre Ville.

Cette loi, en effet, nous semble dangereuse, car elle oppose promoteurs et �lus, grand et petit commerce, comp�tence urbanistique et int�r�t commercial. Cette loi ent�rine les conflits. Nous sommes favorables � la compl�mentarit� du travail en commun, � la co-production, et nous d�montrons tous les jours avec vous que cela est possible et souhaitable en faveur de Paris.

Je vous remercie.

Mai 2008
Débat
Conseil municipal
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