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51 - 2001, DAUC 205 - Attribution de la dénomination "avenue Pierre-Mendès-France" à une partie de l'avenue de France située dans le 13e arrondissement


M. LE MAIRE DE PARIS. - Mes chers coll�gues, nous passons au dossier DAUC 205, page 10 de l'ordre du jour : attribution de la d�nomination "avenue Pierre-Mend�s-France" � une partie de l'avenue de France situ�e dans le 13e arrondissement.
Mes chers coll�gues, il est des sujets qui, au-del� de nos diff�rences, peuvent nous rassembler, peut-�tre aussi nous faire travailler dans la s�r�nit�.
L'hommage que nous souhaitons voir enfin rendu par Paris � Pierre Mend�s-France me para�t �tre de ceux-l�.
Pierre Mend�s-France a en effet marqu� notre histoire politique et laiss� un souvenir durable et tr�s fort dans la m�moire collective des Fran�ais. Personne semble-t-il ne pourra contester qu'il fut un grand homme. G�n�reux dans ses convictions, courageux dans son action et d'une extr�me rigueur dans sa pratique politique.
Lui rendre hommage, c'est aussi honorer le courage politique, le refus de toute r�signation, de toute compromission, de toute abn�gation.
Courage que d'avoir �t� le seul d�put� en 1936 � se prononcer au nom de ses valeurs, contre la participation de la France aux Jeux olympiques de Berlin.
Courage encore que d'avoir refus� les avantages que lui procurait son mandat de d�put� pour demander volontairement � se battre en 1939 dans l'Arm�e de l'air.
Courage enfin que d'avoir, aux c�t�s du G�n�ral de Gaulle r�sist� au r�gime de Vichy.
Dans sa pratique politique, Pierre Mend�s-France est parvenu � r�ussir la difficile conciliation entre �thique de conviction et �thique de responsabilit� alors que trop souvent la premi�re est reni�e au nom de la seconde.
C'est en effet au nom de cette �thique de responsabilit� que Pierre Mend�s-France a su mettre fin au d�sastreux conflit de l'Indochine, par la conclusion des accords de Gen�ve du 20 juillet 1954.
Il fut aussi l'artisan d�termin� de la d�colonisation en Tunisie, son discours � Carthage d'octobre 1954 traduisant avec brio la puissance de ses convictions.
Serviteur de la n�cessaire r�conciliation franco-allemande, il fit montre du m�me courage, de la m�me lucidit� dans les choix �conomiques qu'il sugg�ra d�s 1945, et qui furent d'ailleurs rejet�s.
Honorer Pierre Mend�s-France, c'est honorer aussi une intelligence en politique. Il fut par exemple l'un des tr�s rares acteurs de la vie publique de son �poque � conna�tre l'�conomie, � y r�fl�chir et avec p�dagogie � expliquer ses enjeux aux Fran�ais.
Cette intelligence fonda une nouvelle pratique politique ancr�e dans la culture de v�rit�, et de respect des �lecteurs.
Pierre Mend�s-France disait : "L'�l�ment fondamental du syst�me d�mocratique, c'est la v�rit�. S'il n'y a pas d'honn�tet� de la part de ceux qui jouent un r�le dans le jeu des institutions, il ne peut y avoir de d�mocratie".
A l'heure o� beaucoup dissertent sur la crise du politique, Pierre Mend�s-France a montr� qu'au-del� des enjeux de pouvoirs et des rivalit�s, il existe une v�ritable noblesse de l'action. Il le r�sumait notamment par cette formule : "Toute politique n'est pas sale, toute action n'est pas vaine".
V�rit�, �thique, conviction.
R�aliste, le "mend�sisme" demeure la r�f�rence d'une pratique politique moderne et inspir�e.
Je vous propose de donner son nom � une partie de l'avenue de France sur un axe o� le tr�s faible nombre d'habitations nous pr�servera d'autant plus des d�sagr�ments classiques li�s � ce type d'initiative.
Oui, il �tait temps que Paris rende hommage � celui qui fut l'une des figures les plus marquantes de notre histoire politique contemporaine et qui symbolise des valeurs en harmonie totale avec celles de notre cit�.
(Applaudissements).
Madame TA�EB, vous avez la parole.
Mme Karen TA�EB. - Monsieur le Maire, mes chers coll�gues, enfin une avenue Pierre Mend�s-France ! Voil� bient�t vingt ans que l'ancien Pr�sident du Conseil nous a quitt� et je vous remercie de me donner ce soir l'occasion de lui rendre hommage.
Pierre Mend�s-France fut un homme politique au sens le plus noble du terme, sa vie, son itin�raire sont empreints d'un profond humanisme.
Plus jeune bachelier de France, plus jeune avocat, il fut aussi le plus jeune D�put� de France, �lu de Louviers, aux �lections l�gislatives de 1932, il fut le Maire de cette m�me ville en 1935. R��lu le 3 mai 1936, il fut - vous le disiez - le seul d�put� � se prononcer la m�me ann�e contre la participation de la France aux Jeux olympiques de Berlin.
Il fera partie des rares �lus en f�vrier 1942 � rejoindre le G�n�ral de Gaulle avant de devenir le Ministre de l'Economie nationale dans le Gouvernement provisoire. Il sera � ce titre partisan d'une politique financi�re fond�e sur l'intervention de l'Etat et acceptant, pour assurer le plein emploi, le recours au d�ficit budg�taire.
Aux yeux des jeunes g�n�rations, Pierre Mend�s-France est principalement connu pour avoir mis un terme � la guerre en Indochine. Il manifestera tr�s t�t le souhait que la France accompagne le d�sir d'�mancipation de ses colonies, y compris en Afrique du Nord.
Son refus d'accepter les institutions de la Ve R�publique et les difficult�s � r�nover le parti radical socialiste l'ont amen� � s'�carter de la vie politique. Pour autant, son autorit� morale sur la gauche est rest�e intacte.
En 1965, il soutient le principe d'une candidature unique de la gauche face au G�n�ral de Gaulle et d�fend la strat�gie d'union des socialistes � Epinay et de la gauche avec le programme commun.
Dans son premier discours d'investiture, en 1981, Fran�ois Mitterrand dira de Pierre Mend�s-France : "Sans lui, rien n'aurait �t� possible".
Il revenait � la premi�re majorit� de gauche � Paris d'honorer la m�moire d'un homme qui a tant apport� au courant du progr�s.
C'est donc avec une immense joie que les �lus du Mouvement des citoyens voteront ce projet de d�lib�ration.
Je vous remercie.
(Applaudissements sur les bancs des groupes du Mouvement des citoyens, socialiste et radical de gauche, communiste et "Les Verts").
M. LE MAIRE DE PARIS. - Merci.
La parole est � M. BLISKO.
M. Serge BLISKO, maire du 13e arrondissement. - Merci, Monsieur le Maire de Paris.
Vous nous proposez de rendre hommage � Pierre Mend�s-France en attribuant son nom � la partie de l'avenue de France comprise entre le boulevard Vincent-Auriol et la Seine et nous vous en remercions.
Chacun conna�t en effet ici le parcours politique de Pierre Mend�s-France : plus jeune d�put� de France en 1932, maire de Louviers, r�sistant de premier plan, d�put�, combattant en 1940, vous l'avez rappel�, Ministre des Finances du G�n�ral de Gaulle en 1944.
Je voudrais �voquer en quelques mots une p�riode courte mais marquante qui formera toute une g�n�ration : son passage � la pr�sidence du Conseil.
Investi par la Chambre des d�put�s � un moment difficile, au lendemain de la d�faite de Dien-Bien-Phu, Pierre Mend�s-France mit en place un style et une m�thode politiques nouveaux, refusant les combinaisons politiciennes, �tablissant un lien direct avec les Fran�ais par ses c�l�bres entretiens � la radio et fixant des �ch�ances pour chaque probl�me qu'il voulait voir r�solu.
Je voudrais reprendre ici les termes de Michel Rocard qui, mieux que quiconque, rappelle cette p�riode dans l'article qu'il publiait dans "Le Monde" en octobre 1982, lors du d�c�s de Pierre Mend�s-France. Je cite Michel Rocard :
"Il n'emp�che que ces quelques mois, de juin 1954 � f�vrier 1955, sont rest�s longtemps dans les esprits et aujourd'hui dans l'histoire de la 4e R�publique une r�f�rence mobilisatrice par une succession d'initiatives audacieuses, la clart� des choix, la rapidit� d'ex�cution, le respect des promesses annonc�es... Quel contraste avec ce qu'on appelait alors "le syst�me"".
Michel Rocard ajoutait : "Etonnant destin en v�rit� que celui de cet homme qui, en toutes circonstances, choisit de dire la v�rit�, m�me la plus dure, d'aller jusqu'au bout de ses convictions, m�me les moins populaires, et qui se distingua toujours par son refus de la d�magogie et de la compromission. Il reste jusqu'au bout un symbole d'esp�rance".
Aussi, Monsieur le Maire de Paris, je voudrais vous remercier, au nom du groupe socialiste, d'avoir choisi Pierre Mend�s-France comme l'une des premi�res personnalit�s que vous avez souhait� honorer. Je d�plore d'ailleurs que, dans le 13e, l'opposition ait vot� contre cette d�lib�ration en Conseil d'arrondissement...
Bien �videmment, le groupe socialiste vous soutient enti�rement dans cette d�marche.
Merci, Monsieur le Maire de Paris.
(Applaudissements sur les bancs des groupes socialiste et radical de gauche, communiste, "Les Verts" et du Mouvement des citoyens).
M. LE MAIRE DE PARIS. - Merci.
Madame CONSTANTIN, vous avez la parole.
Mme Myriam CONSTANTIN, adjointe. - Merci, Monsieur le Maire.
Je vais raccourcir mon intervention pour m'associer � ce qui vient d'�tre dit...
M. LE MAIRE DE PARIS. - Je pense que beaucoup maintenant vont se r�p�ter, donc c'est une bonne id�e.
Mme Myriam CONSTANTIN, adjointe. - Absolument, je ne veux pas r�p�ter ce qui vient d'�tre dit, je m'y associe totalement et je voudrais dire que Pierre Mend�s-France, pour moi, c'est surtout une �thique, une attitude, une r�f�rence et une conscience pour toute une g�n�ration.
Il a incarn�, bien avant les exigences de notre soci�t� d'aujourd'hui, un nouveau style de gouvernement, une action politique moderne en ce qu'elle exige de rigueur, de courage, de transparence, de v�rit� et de dialogue avec la Nation et les citoyens, une action politique reposant sur la confiance et sur le contrat, o� l'on dit ce que l'on va faire et o� l'on fait ce que l'on dit.
Alors, en citant l'hommage de Fran�ois Mitterrand � la mort de Pierre Mend�s-France ("Pierre Mend�s-France nous laisse une foi, une m�thode, un exemple. Sa foi, la R�publique. Sa m�thode, la v�rit�. Son exemple, l'inlassable combat pour la paix et pour le progr�s"), je me demande comment h�siter aujourd'hui, comme certains dans le 13e arrondissement, � honorer sa m�moire en donnant son nom � une avenue nouvelle dans un quartier nouveau, dans le 13e arrondissement ?
Pour moi, je salue cette nouvelle avec une grande joie.
(Applaudissements sur les bancs des groupes socialiste et radical de gauche, communiste, "Les Verts" et du Mouvement des citoyens).
M. LE MAIRE DE PARIS. - La parole est � M. Jean-Bernard BROS.
M. Jean-Bernard BROS, adjoint. - Pardonnez-moi, moi aussi je vais �tre oblig� de raccourcir. Et pourtant...
C'est � la fois en ma qualit� d'�lu du 13e arrondissement mais, surtout, en tant qu'�lu radical de gauche que je tiens � rendre hommage � l'heureuse initiative qu'a prise le Maire de Paris, dont nous d�battons aujourd'hui.
Pierre Mend�s-France �tait et demeure une r�f�rence de notre vie politique. Que ce soit au gouvernement de la France, � l'Assembl�e nationale, dans sa mairie de Louviers, il sut rester � chaque instant un homme digne et int�gre dont la hauteur de vue est aujourd'hui reconnue par l'immense majorit� de nos concitoyens.
Grand serviteur de l'Etat et de la France, militant r�publicain acharn�, grand d�fenseur des libert�s publiques, celui qui fut Pr�sident du Parti radical sut incarner pour plusieurs g�n�rations de femmes et d'hommes la rigueur dans le raisonnement, la volont�, le courage dans l'action au service de l'id�al humaniste et la�que qui est le fondement de la doctrine radicale.
Monsieur le Maire, mes chers coll�gues, � l'heure o�, si vous le d�cidez, la figure de Pierre Mend�s-France fait son entr�e � Paris, faisant ainsi �cho � la proposition du Parti radical de gauche de transf�rer ses cendres au Panth�on de la R�publique, je souhaite qu'au-del� de l'honneur qui lui est fait, la d�marche voulue par le Maire de Paris soit l'occasion de m�diter son message.
Je vous remercie.
(Applaudissements sur les bancs des groupes socialiste et radical de gauche, communiste, "Les Verts" et du Mouvement des citoyens).
M. LE MAIRE DE PARIS. - La parole est � M. CHARON.
M. Pierre CHARON. - Monsieur le Maire, mes chers coll�gues, je voudrais rassurer d'abord M. BLISKO puisque le groupe R.P.R. votera pour le projet de d�lib�ration que vous nous pr�sentez...
Plusieurs Conseillers � gauche. - Ah ! Ah !
M. LE MAIRE DE PARIS. - Je vous en prie ! Ce n'est pas un sujet pour faire de l'ironie ! Je suis tr�s heureux que le groupe R.P.R. vote ce projet de d�lib�ration, cela ne me fait pas sourire, cela me fait plaisir.
M. Pierre CHARON. - Merci, Monsieur le Maire.
Le vote de mes amis au Conseil du 13e arrondissement ne portait que sur le site.
Le groupe R.P.R. entend donc s'associer � l'hommage que vous souhaitez rendre � Pierre Mend�s-France, qui fut une figure marquante de l'histoire politique du XXe si�cle. Chacun mesure sur ces bancs l'�cho toujours vivace de l'action de Pierre Mend�s-France et de ses id�es, qu'il s'agisse de ses choix �conomiques ou de sa rigueur morale.
Nous sommes d'autant plus satisfaits du projet de d�lib�ration qui nous est soumis que, comme vous le savez, les gaullistes ont fait partie du gouvernement Mend�s, avec l'accord expr�s du G�n�ral de Gaulle.
Je m'en voudrais, � cet �gard, de ne pas vous rappeler qu'un des plus illustres d'entre eux, dont j'ai eu l'honneur d'�tre le collaborateur pendant quatorze ans, Jacques Chaban-Delmas, participa � cette �quipe minist�rielle.
Aussi, je profite de la circonstance pour r�it�rer le souhait formul� aupr�s de vous, Monsieur le Maire, par une lettre du Pr�sident S�GUIN du 10 d�cembre 2001 et rest�e malheureusement � ce jour sans r�ponse, de voir la Ville de Paris rendre � cet autre grand serviteur de la France l'hommage qu'il m�rite.
Notre Capitale s'honorerait, en effet, en c�l�brant la m�moire de celui qui ne fut pas seulement le Ministre de Pierre Mend�s-France, le Premier Ministre de Georges Pompidou, le Pr�sident de l'Assembl�e nationale et encore celui qui rendit � Bordeaux son honneur, mais aussi et d'abord le jeune G�n�ral de 29 ans, r�sistant de la premi�re heure.
Je suis s�r que vous aurez � c?ur de saluer comme il se doit la m�moire d'un artisan de la Lib�ration de Paris et d'un acteur de la vie publique de notre pays.
Il vous appartient, d�s lors que vous en serez d'accord, de retenir celui des lieux qui jalonnent la vie de Jacques Chaban-Delmas symbolisant le mieux son attachement � Paris pour y perp�tuer son souvenir. Dans cet esprit, je sugg�re, au nom de l'ensemble des Conseillers de Paris des groupes R.P.R. et apparent�s, "Ensemble pour Paris", D.L. et de l'U.D.F., d'ajouter � l'actuelle d�nomination "place du Palais-Bourbon" la mention "Jacques Chaban-Delmas" et de demander � la R.A.T.P. de faire de m�me pour ce qui concerne l'actuelle station de m�tro "Assembl�e nationale".
Je vous remercie.
(Applaudissements sur les bancs des groupes "Rassemblement pour la R�publique et apparent�s", "D�mocratie lib�rale et Ind�pendants", "Ensemble pour Paris" et Union pour la D�mocratie fran�aise).
M. LE MAIRE DE PARIS. - Monsieur CHARON, d'abord je vous remercie beaucoup de ce que vous avez dit sur le projet de d�lib�ration qui est en d�bat.
Souhaitez-vous que, sur la question de Jacques Chaban-Delmas je vous r�ponde maintenant ? Je sais qu'il y a un v?u tout � l'heure. Je suis pr�t � y r�pondre tout de suite, puisque vous l'avez abord� maintenant. Je compte dire publiquement ce que je vous ai dit ce matin, � vous et au Pr�sident S�GUIN.
Monsieur Jean-Pierre CAFFET, est-ce que vous voyez quelque chose � rajouter ?
M. Jean-Pierre CAFFET, adjoint, rapporteur. - Rien du tout.
M. LE MAIRE DE PARIS. - Merci.
Je mets donc aux voix, � main lev�e, le projet de d�lib�ration DAUC 205 qui va permettre d'attribuer le nom de Pierre Mend�s-France � cette portion de l'avenue de France.
Qui est pour ?
Qui est contre ?
Qui s'abstient ?
Le projet de d�lib�ration est adopt�. (2001, DAUC 205).
M. LE MAIRE DE PARIS. - Je crois que ce vote est acquis � l'unanimit� totale, sans aucune abstention, sans aucun refus de participation au vote. Je crois que cela honore Paris de se retrouver dans la m�moire de Pierre Mend�s-France. Je suis tr�s fier du Conseil de Paris � cet instant.
(Applaudissements sur tous les bancs de l'Assembl�e).

Janvier 2002
Débat
Conseil municipal
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