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Condoléances.


M. LE MAIRE DE PARIS. - Mes chers coll�gues, le Conseil de Paris a appris avec tristesse le d�c�s survenu le 9 d�cembre 2009, de M. Thad�e Mularski, ancien conseiller de Paris, ancien adjoint au Maire du 6e arrondissement.

(Les conseillers se l�vent).

Thad�e Mularski quitta la Pologne � la fin de la Seconde guerre mondiale et se tourna vers la France. Il choisit de s'engager en politique aupr�s de Pierre Bas, d�put�-maire du 6e arrondissement, et fut �lu conseiller du 6e en 1983, r��lu en 1989 et 1995. Il devint conseiller de Paris le 27 septembre 1994 et si�gea sur les bancs du groupe "Rassemblement pour Paris". De 1995 � 2001, il fut conseiller sp�cial charg� des affaires sociales aupr�s du Maire du 6e.

Ceux qui ont connu M. Mularski se souviennent de sa gentillesse, de son ouverture aux autres, de sa fid�lit� � ses id�aux et � sa patrie d'origine. Il �tait d'ailleurs Chevalier du M�rite polonais. Au nom du Conseil de Paris et en mon nom personnel, j'adresse � sa famille et � ses proches nos plus sinc�res condol�ances.

(L'Assembl�e, debout, observe une minute de silence).

Mes chers coll�gues, Philippe S�guin nous a quitt�s le 7 janvier dernier. Avec lui dispara�t un passionn� de l'id�e r�publicaine et une conscience rebelle aux compromissions.

(Les conseillers se l�vent).

Philippe S�guin �tait, au sens le plus noble du terme, un caract�re. Sa vaste culture, son exigence intellectuelle, son sens de l'honneur faisaient de lui un grand serviteur de l'Etat.

Toute sa vie, il aura port� le deuil de son p�re, un h�ros de la guerre tomb� pour la libert�.

Comment �tre digne de cet exemple, de cette absence ?

Philippe S�guin a d�clin� sa r�ponse � travers un parcours d�di� � la R�publique, � ses missions et � ses institutions.

En lui il portait une vertu essentielle : l'indignation.

Et si son temp�rament le conduisait parfois � des emportements, c'�tait au service d'une conviction plus que d'une ambition.

Cet engagement l?a amen� � d�fendre et m�me parfois � incarner une id�e � laquelle il �tait fondamentalement attach�, celle des contrepouvoirs. Il le savait : il n'y a pas de d�mocratie v�ritable si tous les pouvoirs se retrouvent entre les m�mes mains.

C'est dans cet esprit, et au nom de ce principe, qu'il a contribu� � redonner de l'�clat au Parlement.

Il fut un grand pr�sident de l'Assembl�e nationale, attentif aux d�bats, respectueux de l'opposition et surtout jaloux de la souverainet� des �lus du peuple. Notre d�mocratie lui doit d'avoir port� cette exigence.

C'est avec la m�me rigueur, avec le m�me sens du devoir que Philippe S�guin, � la t�te de la Cour des comptes, a ensuite analys� pendant cinq ans, sans concession, les comptes publics de notre pays. Pour lui, la gestion de l'argent public, c'est-�-dire du bien commun, interdisait la moindre l�g�ret�. La pr�sence attentive de cet observateur si peu accommodant �tait, pour un Etat qui en a tant besoin la meilleure �cole du scrupule.

Et il laissera une trace tr�s particuli�re dans le coeur des Parisiens, car Philippe S�guin avait nou� une relation sinc�re et intense avec notre ville.

Jeune, il �tait, selon la formule consacr�e, mont� � Paris comme on part � l'assaut de la vie et de ses promesses.

Et dans la trame de son existence, notre ville a toujours eu une place privil�gi�e.

L'histoire de Philippe S�guin et de Paris, c'est aussi la campagne municipale de mars 2001. Je conserve de cette bataille d�mocratique le souvenir d'une confrontation loyale et respectueuse. Philippe S�guin n'a jamais laiss� la controverse se d�placer jusqu'au point o� elle blesse les consciences, o� elle atteint l'honneur, o� elle offense les personnes.

Comme pr�sident du groupe R.P.R. apr�s mars 2001, il a �t� sur ces bancs le chef d'une opposition qui savait s'inscrire dans un registre toujours exigeant mais digne, tol�rant, et constructif.

Mais la grande aventure municipale de Philippe S�guin, c?est Epinal, dont il fut le maire pendant 14 ans, et avec laquelle il avait nou� une relation unique, comme il en existe rarement entre un homme et une cit�.

Et c'est aujourd'hui toute cette ville qui porte le deuil d'un maire qui sut si bien la comprendre, la servir et l'aimer.

Avec Philippe S�guin, nous avons assum� des diff�rences l�gitimes sur des sujets au coeur du d�bat public, mais je regretterai cette voix inimitable au service d'une id�e et d'une passion de la France. Je regretterai nos �changes simples et cordiaux quand nous nous croisions au Parc des Princes. Il vivait l� aussi avec l'ardeur d'un v�ritable expert, les prestations de son sport favori.

Et comment, dans ce moment, pourrais-je ne pas �voquer ce que nous avions d'essentiel en partage, ce fil d'or de l'enfance retrouv�e qu'est notre Tunisie natale dont je salue l'ambassadeur, qui nous fait ce matin l'honneur de sa pr�sence.

La Tunisie, ce n'�tait pas seulement pour nous le parfum et les couleurs d'un pays que nous aimons. C'�tait pour lui, comme pour moi, l'une des formes de la simple fid�lit� � soi-m�me. C'est sans doute quand nous �voquions ce sujet que nous nous comprenions le mieux.

Mes chers coll�gues, au nom de Paris, en notre nom � tous et en mon nom personnel, je veux dire � l'�pouse de Philippe S�guin, � ses enfants, � tous ses amis, notre respect et la fid�lit� de notre souvenir.

(L'Assembl�e, debout, observe une minute de silence).

M. Vincent ROGER ?

M. Vincent ROGER. - Monsieur le Maire, Madame, chers coll�gues, rendre hommage � Philippe S�guin, c'est saluer la m�moire d'un esprit libre de la R�publique, car il consid�rait que l'on ne pouvait pas faire de la politique honn�tement sans �tre libre.

Ce devoir de libert� qu'il m'a transmis, je tiens ce matin � en �tre digne.

Si je remercie avec amiti� M. Jean-Fran�ois LAMOUR de m'avoir propos� de prendre la parole au nom de mon groupe, il ne peut �tre question pour moi de m'exprimer au nom d'un parti fut-il le mien tant le Pr�sident S�guin refusait les approches partisanes, tant il �tait attach� au d�passement des clivages. Alors qu'� travers de nombreux discours il n'a pas �pargn� la Gauche fran�aise, beaucoup d?hommes et de femmes, dirigeants ou sympathisants de gauche ont su, souvent avec tact et sinc�rit�, partager notre peine immense.

Preuve ultime s'il en �tait besoin que Philippe S�guin savait transcender les clivages et toucher au c?ur, au-del� de leur sensibilit�, beaucoup de Fran�ais. Cet �tat d'esprit, Monsieur le Maire, vous en avez saisi le sens. Vous qui avez �t� son adversaire, vous avez su, ce matin, allier �l�gance et authenticit�.

Au-del� de vos diff�rences et de vos divergences, il �tait comme vous, Monsieur le Maire, lui aussi un enfant de Tunisie, comme vous je crois, jamais il ne l'a reni�, jamais il ne l'a oubli�. L�-bas �taient ses racines, l�-bas �tait n� plus grand que tout son d�sir de servir la France.

Mes chers coll�gues, dans son �loge fun�bre, le Pr�sident de la R�publique, s'adressant � Philippe S�guin, lui dit � juste titre : "De toi, il ne restera ni une th�orie ni une doctrine".

Il faisait ainsi �cho, sans doute, � l'un de ses plus beaux discours intitul� "de la R�publique" qu'il pronon�a le 8 d�cembre 1993.

Entendons-nous bien disait Philippe S�guin � propos de la R�publique, il ne s'agit pas d'id�ologie, il ne s'agit pas de doctrine, il n'y a pas d'id�ologie r�publicaine ni de doctrine r�publicaine, il n'y a rien dans la R�publique qui soit comparable au socialisme scientifique, � l'individualisme m�thodologique, ou � la doctrine utilitariste. La R�publique, c'est un id�al, c?est une morale.

Aujourd'hui, Philippe S�guin est parti, il nous l�gue bien plus qu'une doctrine, il nous laisse beaucoup.

Il nous laisse avant tout une haute conception de la politique.

Le respect d'abord, celui des institutions et des hommes qui les incarnent, j'ai en m�moire le d�bat t�l�vis� avec le Pr�sident Mitterrand, au moment du r�f�rendum de Maastricht. Il voulut s?en tenir � son r�le, celui d'un simple citoyen dialoguant avec le Pr�sident de la R�publique, non pas celui d'un politicien d�battant avec son adversaire.

La fid�lit� ensuite, celle qui le pla�a au moment de l'�lection pr�sidentielle de 1995 aux c�t�s de Jacques CHIRAC, quand bien d'autres s'en d�tournaient s�duits par la douce musique des sondages.

La libert� aussi, rappelons-nous de son proph�tique discours sur le Munich social, la crise internationale ne lui rend-elle pas raison, lui qui professait en 1993 d�j� que le sacrifice de l'�conomie r�elle � la bulle sp�culative portait en germe les pires catastrophes.

On le vit alors Cassandre, il n'�tait que r�aliste. L?intransigeance enfin, on ne badine pas avec l?essentiel, on ne vend pas son �me pour un si�ge ou pour une �lection. En 1998, en accord avec Jacques CHIRAC, il avait rejet� toute forme d'alliance du R.P.R. avec le Front national, des voix s'�taient �lev�es pour crier � l'inconscient, il va nous perdre, il tint bon, et si la droite r�publicaine perdit des r�gions, elle ne se perdit pas elle-m�me.

Monsieur le Maire, chers coll�gues, Philippe S�guin nous laisse une morale en politique, il nous laisse aussi des id�es que vous me permettrez de regrouper sous le nom de "s�guinisme", la rencontre peut-�tre improbable entre l'h�ritage du G�n�ral de Gaulle et celui de Pierre Mend�s France. Cette conception de l'action publique inspira et motiva sans doute sa d�cision de venir se pr�senter � Paris.

Comment ne pas l'�voquer dans cet h�micycle, m�me si je suis tr�s conscience que cet �pisode fut bien douloureux pour lui, pour mon mouvement, et pour chacun des membres de mon groupe. Dans sa lettre ouverte � ceux qui veulent encore croire � Paris, il appela sa famille politique au sursaut. Il �crivait : "Ils sont si nombreux ceux qui pr�f�rent �tre minoritaires plut�t que de voir progresser la cause dont ils sont les h�ros suppos�s, c'est le syndrome du colonel Nicholson, celui du Pont de la rivi�re Kwa�, on est si content d?�tre ensemble, de faire ce que l'on a fait, que l'on oublie l'objectif que l'on avait d�cid� d'atteindre". Cet appel, � regret, ne put �tre entendu par tous, pris que nous �tions dans le tourbillon de fid�lit�s oppos�es, aussi honorables que d�vastatrices.

Quoi que l'on ait pu dire de cette campagne, je retiendrai qu'il lan�a les bases de la r�novation de la droite parisienne. Il permit � une nouvelle g�n�ration d'�lus d'�merger. Chacun d'entre nous avons aujourd'hui, encore plus qu?hier, le devoir de perp�tuer dans la Capitale sa conception exigeante de la politique.

Je fus touch�, pour ma part, de voir certains de mes coll�gues qui n'avaient pas le choix de le suivre en 2001 assister avec sinc�rit� � l'hommage que la R�publique lui a rendu aux Invalides.

Philippe S�guin, comme nous l?a rappel� Fran�ois FILLON lors de son vibrant et �mouvant hommage � l'Assembl�e nationale, se voulut acteur d'une �pop�e mais il dut, comme chacun d'entre nous, se r�soudre � agir avec son �poque. Il y avait en lui du Cyrano de Bergerac. Oui, mes chers coll�gues, toute sa vie, Philippe S�guin aura �t� anim� par le panache, plume hors pair, homme d'une grande culture, f�ru d'histoire, p�tri de litt�rature, grand connaisseur du cin�ma, il savait allier �rudition et passion populaire. Son enthousiasme pour le football n'�tait pas vain, il en aimait la ferveur, la strat�gie et la dramaturgie.

D�sormais, au Parc des princes, dans la tribune Francis Borelli, un fauteuil sera vide.

Au sein de l'agora nationale, je sais que son regard tendre, parfois triste, son exigence intellectuelle, sa voix grave si particuli�re qui savait si bien dire non vont terriblement nous manquer. Au nom de mon groupe, j'adresse mes tr�s sinc�res condol�ances � son �pouse et sa famille. De toute mon affection, ch�re Catherine, je t'embrasse ainsi que ta s?ur Anne-Laure et tes fr�res Patrick et Pierre.

Je forme le v?u que la Ville honore la m�moire de Philippe S�guin, je vous soumets l?id�e que son nom soit associ� au Parc des princes, je vous propose en accord avec M. Jean-Fran�ois LAMOUR et M. Claude GOASGUEN, que nous y r�fl�chissions ensemble afin de trouver le meilleur emplacement dans l'enceinte m�me ou autour du stade.

Monsieur le Maire, mes chers coll�gues, associer le nom de Philippe S�guin au Parc des princes a du sens, car il demeurera � jamais dans l'esprit de beaucoup d'entre nous un prince de la R�publique.

Je vous remercie.

M. LE MAIRE DE PARIS. - Merci beaucoup.

J'ai aim� votre propos. Je n'avais pas pens� � la filiation de Gaulle/Mend�s France, mais ce n'est pas mal. Quant � votre derni�re proposition, vous m'en aviez fait part, je la trouve tr�s bonne, et je pense que ce serait bien et on en parlera avec M. Jean-Fran�ois LAMOUR, M. Claude GOASGUEN et avec les dirigeants du P.S.G. Ce serait tr�s bien que ce soit dans l?enceinte du Parc des Princes, car c?est une pr�sence � mon avis �vidente. Je vous remercie beaucoup.

Février 2010
Débat
Conseil municipal
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