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2010, Vœu déposé par le groupe socialiste, radical de gauche et apparentés relatif à la procédure de mise en garde à vue et à la politique sécuritaire de l'actuel Gouvernement.


M. Fran�ois DAGNAUD, adjoint, pr�sident. - Nous passons � l'examen du v?u n� 42 pr�sent� par le groupe socialiste, radical de gauche et apparent�s et rapport� par Patrick KLUGMAN en 6e Commission sur les gardes � vue.

Mme Pascale BOISTARD vous r�pondra, puis je donnerai la parole � M. le Repr�sentant du Pr�fet qui en profitera pour nous donner des �l�ments d?information sur l'incident qu'�voquait Mme CALANDRA tout � l'heure.

M. Patrick KLUGMAN. - Merci, Monsieur le Maire.

Monsieur le Repr�sentant du Pr�fet, effectivement, le Conseiller de Paris est une esp�ce tenace et apr�s un certain nombre de mes coll�gues, notamment Fr�d�rique CALANDRA, je reviens, � mon tour, vous interroger sur les conditions de la garde � vue sur le territoire parisien.

Je me permets d'insister une nouvelle fois sur cette nouvelle occurrence qui nous est donn�e avec cette jeune fille de 14 ans plac�e en garde � vue, alors qu?apparemment, rien ne le justifiait, et surtout menott�e, alors que c?est contraire, vous le savez, aux dispositions du Code de proc�dure p�nale.

Mais tr�s bri�vement, je voulais surtout rappeler deux ou trois choses qui nous ont �t� dites, ici, hier par M. le Pr�fet lui-m�me et qui, � mon avis, ne sont pas tout � fait exactes et j'aimerais avoir votre r�action.

En effet, il nous a �t� dit qu'il y a, de la part de l'officier de police judiciaire, une obligation de placement en garde � vue. Vous savez que la Cour de cassation a encore jug� r�cemment qu?hors des cas d'usage de la contrainte, il n'en est rien.

Il nous a �t� �galement dit ici que ce sont les avocats qui demandaient les placements en garde � vue. Or, vous savez que la m�me Cour de cassation nous a constamment r�affirm� qu?il n?y a pas de droit � la garde � vue ; c'est l'officier de police judiciaire et lui seul qui d�cide du placement, parfois sur instruction.

Enfin, il nous a �t� surtout parl� d'une transposition h�tive des r�gles de la jurisprudence de la cour europ�enne des Droits de l'Homme. Je tiens simplement � dire que cette transposition h�tive �tait d'abord le fait du tribunal de Bobigny le 30 novembre, du tribunal correctionnel de Paris le 28 janvier, de la cour d?appel de Nancy et, vous le savez, le parquet a maintenant saisi la cour de cassation. Cette transposition h�tive dont M. le Pr�fet faisait �tat est aujourd'hui le fait de juridictions bien fran�aises et y compris parisiennes.

C'est pourquoi, Monsieur le Repr�sentant du Pr�fet, je vous interroge � nouveau sur la pratique g�n�ralis�e de la garde � vue � la fran�aise qui frappe tout le monde � tout bout de champ et, en tout cas, en dehors du cadre pos� par le Code de proc�dure p�nale dont je rappelle l'article pr�liminaire qui dispose que "les mesures prises � l?encontre de la personne suspect�e doivent �tre strictement limit�es aux n�cessit�s de la proc�dure, proportionnelles � la gravit� de l'infraction reproch�e et ne pas porter atteinte � la dignit� de la personne".

C'est pourquoi...

M. Fran�ois DAGNAUD, adjoint, pr�sident. - Je vous demande de conclure, pardonnez-moi.

M. Patrick KLUGMAN. - ? je formule le v?u que M. le Pr�fet de police rappelle aux fonctionnaires plac�s sous son autorit� le contenu de la loi et de la jurisprudence en vigueur.

Je vous remercie.

(Applaudissements sur les bancs de la majorit�).

M. Fran�ois DAGNAUD, adjoint, pr�sident. - Merci.

Monsieur le Repr�sentant du Pr�fet de police, vous avez la parole.

M. LE REPR�SENTANT DU PR�FET DE POLICE. Merci, Monsieur le Maire.

Vous demandez au Pr�fet de police d?empi�ter directement sur les pr�rogatives exclusives du Procureur de la R�publique, puisqu?il appartient � ce dernier et � lui seul de d�terminer la conduite des officiers de police judiciaire. Bien �videmment, particuli�rement soucieux de la s�paration des pouvoirs entre les autorit�s judiciaires et administratives pr�vue par la Constitution, le Pr�fet de police s'abstiendra de le faire.

La confiance plac�e dans les services publics se mesure pr�cis�ment dans les situations un peu compliqu�es qui m�lent l'urgence, des points de vue contradictoires et des strat�gies d?acteurs parfois m�diatiques.

Dans l?affaire qui nous occupe dans le 20e arrondissement, le d�roulement des choses est le suivant.

Une fin d'apr�s-midi de la semaine derni�re, il y a d�j� huit jours, ce qui ne justifie en rien l?�ruption volcanique m�diatique de ce matin, les policiers re�oivent une plainte, suite � une bagarre de jeunes scolaris�s dans le m�me �tablissement scolaire. Cette Assembl�e a r�guli�rement rappel� son souhait et son attachement � la sanctuarisation des �tablissements scolaires. Les policiers, particuli�rement diligents, m�nent l'enqu�te tout de suite. Je pr�cise d?ailleurs qu?il y a un jour d?I.T.T. (interruption temporaire de travail) de chaque c�t� de la bagarre.

Les fonctionnaires de police commencent l'enqu�te et s?aper�oivent qu?il y a un mineur mis en cause, il est imm�diatement auditionn�, ainsi que trois autres mineurs dont une jeune femme, la jeune femme en question.

Ils ne se pr�cipitent point, puisque la nuit est laiss�e tranquillement aux autres protagonistes et c'est le lendemain matin, � 10 heures et non pas en pleine nuit, qu'ils se pr�sentent au domicile de la protagoniste pour lui demander de les suivre et l'interroger au commissariat, en pr�sence des autres jeunes impliqu�s. Celle-ci est interrog�e au commissariat. Conform�ment � la loi, elle est plac�e en garde � vue ; pour respecter ses droits, un avocat qui ne fait strictement aucune remarque l'assiste et vient la voir ; on voit tout � fait que la proc�dure a �t� respect�e.

Enfin, je pr�cise qu?elle n?a absolument pas �t� menott�e lors de son interpellation, contrairement � ce qui a �t� dit dans la presse ; cela a �t� v�rifi� dans les �l�ments de proc�dure que l'on m?a communiqu�s.

Cette affaire montre effectivement qu'il y a une proc�dure tout � fait normale, que les services de police du 20e arrondissement se pr�occupent des violences dans les �tablissements scolaires et que force doit rester � la loi.

Mme Colombe BROSSEL, adjointe. - A 14 ans, on n'est pas une jeune femme, juste une jeune fille !

M. LE REPR�SENTANT DU PR�FET DE POLICE. Faudrait-il ne pas r�pondre � des plaintes d�pos�es par d'autres adolescents lors d?une bagarre ?

(Mouvements divers dans l'h�micycle).

M. Fran�ois DAGNAUD, adjoint, pr�sident. - Madame BOISTARD, vous r�pondez pour l?Ex�cutif sur ce v?u.

Mme Pascale BOISTARD, adjointe. - Oui. Merci, Monsieur le Maire.

Chers coll�gues, certains �valuent � 580.108 le nombre des gardes � vue qui ont �t� prononc�es en France en 2008, d'autres approchent les chiffres de pr�s de 800.000.

Ce chiffre ne cesse d'augmenter ann�e apr�s ann�e et n'int�gre m�me pas les gardes � vue prononc�es pour les d�lits routiers estim�es � plus de 250.000 proc�dures.

Comme l?a indiqu� d�s 2005 le commissaire aux Droits de l?Homme du Conseil de l?Europe, la situation est choquante. Ces statistiques t�moignent des d�rives de la politique du chiffre pr�n�e par le Gouvernement qui ne prend en compte ni les r�alit�s du terrain ni les v�ritables solutions � apporter aux questions de s�curit� en France.

Aujourd'hui, nous estimons que les libert�s fondamentales sont menac�es quand des gardes � vue ne sont visiblement pas proportionn�es � la gravit� de l'infraction et que les suspects ne b�n�ficient pas d'une d�fense d�s la premi�re minute, m�me si, en aucun cas, il s'agit de contester le principe de la garde � vue.

Vous faisiez r�f�rence � un �v�nement du 14e ; je pourrais aussi faire r�f�rence � un �v�nement du 18e arrondissement o� un enfant de 9 ans a �t� interpell� au sein de son �tablissement scolaire, et si j'ai bien suivi cette affaire, la hi�rarchie en question qui avait donn� cet ordre a re�u un bl�me.

Dans ce contexte, il serait l�gitime que la Pr�fecture de police rappelle aux fonctionnaires plac�s sous sa responsabilit� que les mesures prises � l'encontre des suspects doivent, conform�ment au Code de proc�dure p�nale, �tre proportionn�es � la gravit� de l?infraction reproch�e et ne pas porter atteinte � la dignit� des personnes.

Par ailleurs, la France doit prendre en compte les r�centes d�cisions de la Cour europ�enne des droits de l'homme, qui insistent sur les moyens donn�s � la d�fense de s'exercer.

Il nous para�t de ce fait n�cessaire que M. le Pr�fet de police et les fonctionnaires sous ses ordres prennent en consid�ration les mises en garde de l'Europe sur ce sujet.

Il est de notre responsabilit� en effet de veiller � ce que le droit des citoyens et les libert�s soient absolument respect�s partout sur notre territoire et � Paris, sans refuser le droit de tous � vivre en s�curit� et dans la tranquillit�.

Il n'existe pas de s�curit� sans respect des libert�s. Je suis donc favorable � ce v?u et je vous remercie de votre attention.

(Applaudissements sur les bancs des groupes de la majorit� municipale).

M. Fran�ois DAGNAUD, adjoint, pr�sident. - Je mets donc aux voix, � main lev�e, ce v?u assorti d'un avis favorable de l?Ex�cutif.

Qui est pour ?

Qui s?y oppose ?

Qui s'abstient ?

Le v?u est donc adopt�. (2010, V. 18).

Je vous remercie.

Février 2010
Débat
Conseil municipal
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