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Vœu déposé par Mmes Violette BARANDA, Véronique DUBARRY, M. Sylvain GAREL et les membres du groupe “Les Verts”, Mme Nicole BORVO, M. Jean VUILLERMOZ et Mme Catherine GÉGOUT en vue d’une remise en liberté des anciens membres d’Action directe toujours incarcérés, notamment en application de loi Kouchner.


M. Christophe CARESCHE, adjoint, pr�sident. - Nous passons maintenant � l?examen du v?u r�f�renc� n� 66 dans le fascicule, qui concerne la remise en libert� des anciens membres d?Action directe, toujours incarc�r�s notamment en application de la loi Kouchner?

Non, ils ne sont pas incarc�r�s en application de la loi Kouchner !

(Rires dans l?h�micycle).

C?est le contraire. Il y a une virgule. Sur ce sujet �minemment parisien, Madame BARANDA, vous avez la parole.

Mme Violette BARANDA. - Monsieur le Maire, il nous concerne tous. Je pense que quand la vie de personnes est en danger, il faut savoir passer l?�ponge.

Le 20 f�vrier dernier, ont �t� rendus publics les noms des signataires de la p�tition en faveur de la lib�ration des anciens militants d?Action directe. Cette p�tition forte de 1.000 signatures de personnalit�s, parmi elles celles de Raymond et Lucie Aubrac, de nombreux responsables politiques parisiens, de personnalit�s parisiennes du monde de la culture. Incarc�r�s depuis le 26 f�vrier 1987, Jean-Marc ROUILLAN, Nathalie MENIGON, Jo�l AUBRON et Georges CIPRIANI, dirigeants dits historiques d?Action directe, ont �t� condamn�s � la r�clusion criminelle � perp�tuit� assortie pour chacun d?eux d?une peine de s�ret� de 18 ans.

Jo�lle AUBRON, op�r�e d?une tumeur au cerveau, a �t� lib�r�e de prison le 14 juin 2004 apr�s 17 ans de d�tention. Elle a b�n�fici� ainsi d?une suspension de peine pour raisons m�dicales. Elle restait n�anmoins soumise � un r�gime de semilibert�. Tout d�placement hors de son d�partement d?h�bergement lui �tait interdit.

Sachez qu?aujourd?hui celle-ci est en soins palliatifs et en phase terminale.

Nathalie MENIGON, �g�e de 47 ans, est toujours d�tenue � Bapaume, dans des conditions discriminatoires, malgr� de graves probl�mes de sant�, tr�s diminu�e physiquement, apr�s deux accidents vasculaires c�r�braux. La justice lui a pour l?instant refus� par deux fois sa lib�ration conditionnelle pour raisons m�dicales.

Jean-Marc ROUILLAN, d�tenu � Lannemezan, est atteint d?un cancer du poumon, � un stade avanc�. Il s?est vu lui aussi refuser une demande de libert� conditionnelle pour raisons m�dicales naturellement.

Quant � Georges CIPRIANI, fragilis� psychiquement, il a �t� intern� � plusieurs reprises en h�pital psychiatrique. Il a r�int�gr� la prison de Vincennes.

Nous citerons aussi l?exemple de R�gis SCHLEICHER, incarc�r� depuis 23 ans. Il est le d�tenu qui a purg� la plus longue peine jamais subie par un politique depuis la cr�ation de la Cinqui�me R�publique.

La majorit� des ?Verts? sont pacifistes par conviction, c?est�-dire qu?ils refusent le recours � la violence comme moyen d?expression politique. Mais nous voulons le respect de la loi.

Or, la loi du 4 mars 2002, dite loi Kouchner sur les droits des malades, permet aux condamn�s de sortir de prison sur la base de crit�res exclusivement m�dicaux. La suspension de peine pour raisons m�dicales est ainsi d�finie par l?article 720-11 du Code de proc�dure p�nale : ?La suspension de peine peut �tre ordonn�e, quelle que soit la nature de la peine ou la dur�e de la peine restant � subir et pour une dur�e qui n?est pas � d�terminer pour les condamn�s dont il est �tabli qu?ils sont atteints d?une pathologie engageant le pronostic vital ou que leur �tat de sant� est incompatible avec le maintien en d�tention?.

Du point de vue de la stricte humanit�, nous consid�rons que les anciens militants d?Action directe ont pay� leur dette. Du point de vue du droit, nous savons qu?on ne peut pas maintenir des gens, pour la plupart malades, en prison, alors m�me que, selon le dispositif de la loi Kouchner, au moins deux d?entre eux, Nathalie MENIGON et Jean-Marc ROUILLAN, voire Georges CIPRIANI, auraient d� �tre lib�r�s pour de graves raisons de sant�.

Le projet de lib�ration conditionnelle, et notamment les projets de domiciliation et d?insertion des d�tenus, sont bons. Une enqu�te de gendarmerie conclut dans les grandes lignes � l?absence de futurs troubles � l?ordre public en cas de lib�ration de ces militants. Elle est favorable � leur lib�ration.

Le groupe ?Les Verts? souhaite donc que le Gouvernement cesse de s?abriter derri�re la d�cision souveraine des commissions judiciaires ou d?un �ventuel trouble � l?ordre public comme cons�cutif � la remise en libert� de ces d�tenus.

A d�faut, nous serions responsables, par notre silence, d?un d�ni de justice et de d�mocratie. Or, la force de la d�mocratie que nous d�fendons est pr�cis�ment de savoir excuser, y compris ceux qui apparaissent un temps comme ennemis de cette d�mocratie. Le temps pr�cis�ment a pass� et le cas de la lib�ration conditionnelle n?est pas soumis � la repentance. Il s?agit l� d?un droit.

Nous pensons que la justice ne doit pas �tre le bras arm� et d�shumanis� de la vengeance de l?Etat. Elle ne doit pas r�server un traitement d?exception aux anciens membres d?Action directe qui ont purg� leur peine de s�ret�.

Tout autre d�tenu ayant purg� sa peine, homme et femme, membre d?Action directe, a aussi le droit � l?oubli.

Parce que, Monsieur le Maire, vous repr�sentez une autorit� morale importante de ce pays, parce que nous vous savons profond�ment attach� aux principes de d�mocratie, au droit et � la justice, parce qu?il est dans les traditions d?une capitale comme Paris de prendre fait et cause en faveur des Droits de l?Homme, pour ces raisons, Monsieur le Maire de Paris, sur notre proposition et celle �galement du groupe communiste, au nom du Conseil de Paris, nous nous associons � l?appel en faveur de la lib�ration des prisonniers d?Action directe, notamment en application des dispositions pr�vues par la loi Kouchner.

Je vous remercie.

M. Christophe CARESCHE, adjoint, pr�sident. Quelques mots sur un sujet qui n?est pas directement?

Oui ?

Je vous donnerai la parole pour les explications de vote.

Je donne d?abord l?avis de l?Ex�cutif.

Vous voulez aussi pr�senter le v?u ? Bien, veuillez m?excuser. Vous avez la parole, Madame G�GOUT.

Mme Catherine G�GOUT. - C?est un sujet qui entra�ne des passions importantes.

Je voulais r�affirmer simplement un point. Vous avez compris, dans l?intervention de Mme BARANDA, que faire cette demande n?implique aucune esp�ce d?adh�sion d?aucune sorte aux actes et aux id�ologies qui ont �t� port�s par Action directe. Il faut que cela se sache.

Il ne s?agit pas de pardon, comme l?a dit Violette BARANDA. Non, c?est une question d?exercice d?un droit qui se situe dans le cadre de nos lois sur les Droits de l?Homme.

Je voulais le pr�ciser.

M. Christophe CARESCHE, adjoint, pr�sident. - Je vais rapidement donner l?avis de l?Ex�cutif sur un sujet qui n?est pas v�ritablement de comp�tence municipale. Je le dis parce que nombre d?�lus m?interpellent et me demandent si le Conseil de Paris a vraiment vocation � se prononcer sur tous les sujets, y compris sur des sujets qui n?ont pas trait du tout � l?exercice de notre mandat parisien. Je le souligne.

Sur le fond, je donnerai un avis d�favorable � ce v?u pour une raison simple qui est le respect pr�cis�ment du principe de s�paration des pouvoirs. Cette d�cision, Madame BARANDA, n?appartient pas au Gouvernement. Cette d�cision, aujourd?hui, et c?est Mme GUIGOU qui l?a voulu ainsi, appartient au juge et c?est un juge ind�pendant qui statue sur la lib�ration ou pas des d�tenus en fin de peine, dans le cadre de cette loi dite loi Kouchner.

Si cette comp�tence a �t� confi�e au juge, c?est pr�cis�ment pour �viter les pol�miques, les pressions politiques qui avaient marqu� un certain nombre de cas qui, pr�c�demment, relevaient de la d�cision du Ministre.

Je ne voudrais pas que le Conseil de Paris, collectivit� publique, s?immisce dans un domaine qui est celui de la justice et celui du juge. Je pense, au contraire, qu?il faut le respecter.

Si nous ne respections pas cela, alors, il faudrait aussi comprendre et admettre qu?un Ministre de la R�publique puisse, par exemple, ce que personnellement je juge inacceptable, mettre en cause un juge parce qu?il a, par exemple, lib�r� un d�tenu en libert� conditionnelle et que ce d�tenu, cela arrive, a r�cidiv�.

Je pense qu?il faut respecter ces principes et que lorsque Mme GUIGOU a voulu que ce soit le juge qui d�cide de ce type de mesure, elle l?a voulu pr�cis�ment pour mettre � l?abri, en quelque sorte, cette d�cision de toutes les pressions.

Je note d?ailleurs que cette d�cision a plut�t �t� dans votre sens, Madame BARANDA, puisqu?un des d�tenus appartenant � Action directe a �t� d?ores et d�j� lib�r�.

Je consid�re que c?est au juge de faire son travail, au vu du dossier m�dical, et que c?est � lui que revient la d�cision. Chaque �lu, chacun d?entre nous, peut avoir, en tant qu?�lu, une position et peut l?exprimer, cela ne me choque pas du tout. Mais qu?une collectivit� publique s?exprime par une d�cision sur cette question, je pense que c?est une atteinte au principe de s�paration des pouvoirs.

C?est pour cette raison que je vous proposerais de ne pas voter ce v?u.

J?ai plusieurs inscrits, MM. SARRE et LEGARET.

Monsieur SARRE, vous avez la parole.

M. Georges SARRE, pr�sident du groupe du Mouvement r�publicain et citoyen, maire du 11e arrondissement. - Monsieur le Maire, chers coll�gues.

Il nous est soumis, aujourd?hui, un v?u relatif � la remise en libert� des membres du groupe dit Action directe, condamn�s pour crime de sang.

Le groupe des �lus du Mouvement r�publicain et citoyen tient � faire remarquer, comme vous l?avez fait vous-m�me, Monsieur CARESCHE, que ce v?u n?entre pas dans les comp�tences du Conseil de Paris.

Nous voterons contre ce v?u car hormis pour le cas de Jean-Marc ROUILLAN, il semble qu?aucune expression d?un quelconque regret ou d?une renonciation � l?emploi de la violence et du crime n?ait �t� formul�e par les d�tenus concern�s. Si le voeu ne mentionne pas R�gis SCHLEICHER, nous devrons peut-�tre rappeler que ce dernier ne regrette rien des agissements du groupe Action directe.

La justice a tranch� et, pour �tre franc, l?histoire n?acquittera pas les assassins de Georges Besse. La gauche, les combats du mouvement ouvrier ne sauraient �tre salis par de pr�tendus r�volutionnaires qui n?ont jamais eu pour seul fait d?arme que d?abattre des hommes innocents et d�sarm�s. En outre, le groupe des �lus du M.R.C. d�posera au Conseil de Paris des 3 et 4 avril un v?u demandant que soit donn� � une rue ou un �difice de la Capitale le nom de Georges Besse, abattu l�chement en 1990, pour le seul motif qu?il �tait pr�sident de la r�gie Renault. Parisien et grand industriel, Georges Besse est de ceux qui ont beaucoup apport� � la France, � la R�publique. Il y aura bient�t 20 ans qu?un pr�tendu commando l?a l�chement assassin� dans le dos.

Sous r�serve de l?accord de la famille de Georges Besse, notre Capitale se doit bien de rendre hommage � l?une des innocentes victimes d?une folie meurtri�re qui a pris le masque de la r�volution pour camoufler un pur d�lire. A nos amis qui manifestent g�n�reusement en faveur d?Action directe, nous ne saurions poser qu?une question : Ont-ils enfin des nouvelles de C�sar BATTISTI ? Et je conclurai en rappelant, comme M. Christophe CARESCHE l?a fait il y a quelques minutes, que c?est aux juges de d�cider, sur rapport des m�decins. Voil� ce que dit le texte de la loi. Qui peut s?arroger le droit d?interf�rer dans un tel dossier ? Qui ? Au nom de quoi ?

Je vous remercie.

M. Christophe CARESCHE, adjoint, pr�sident. - Monsieur LEGARET, vous avez la parole.

M. Jean-Fran�ois LEGARET, maire du 1er arrondissement. - Je serais bref parce que je consid�re que vous avez bien r�pondu, Monsieur le Maire, et que M. Georges SARRE vient �galement de donner une excellente r�ponse.

Je me bornerais simplement � rappeler que Jo�lle AUBRON, Nathalie MENIGON, Jean-Marc ROUILLAN, Georges CIPRIANI, Action directe, ont assassin�. Il s?agit d?assassins. Et Mme BARANDA a commenc� son intervention en nous disant, tout � l?heure, ?lorsque la vie d?hommes est en jeu?. Je rappelle que la vie d?hommes est en jeu lorsque des assassins sont remis en libert� quelle que soit la justification, mais oui. ?Lorsque la vie d?hommes est en danger?, c?est ce que vous nous proposez aujourd?hui par cette lib�ration.

Alors, je me retranche derri�re l?excellente position rappel�e par M. CARESCHE sur le plan juridique. Nous n?avons absolument pas � faire pression sur des d�cisions de justice et sur des actes d�livr�s par des m�decins. Mais je consid�re que notre Assembl�e s?honorerait en ne mettant pas en d�bat des v?ux qui n?entrent absolument pas dans ses comp�tences. Nous avons d�j� eu des d�bats sur ce sujet au sein de la conf�rence d?organisation.

Je dirais m�me que nous pourrions, si on en avait le loisir et la volont�, multiplier des sujets de v?ux sortant totalement des crit�res de comp�tence du Conseil de Paris. On donnerait une image encore plus caricaturale, - il n?y a qu?� voir l?assiduit� le mardi apr�s-midi -, encore plus caricaturale que celles que nous donnons habituellement de notre Conseil. On devrait collectivement faire un effort en n?inscrivant pas � la s�ance des v?ux de cette nature.

Nous voterons naturellement contre ce v?u.

M. Christophe CARESCHE, adjoint, pr�sident. - Merci.

Madame BROSSEL, vous avez la parole.

Mme Colombe BROSSEL. - Le r�le de notre Assembl�e n?est certainement pas de d�battre sur Action directe et sur la longueur des peines inflig�es. Le v?u qui nous �tait propos� �tait un voeu relatif � l?application de la loi Kouchner, loi que nous soutenons �videmment.

Mais vous avez rappel� le principe le plus �vident : nous ne pouvons pas, d?un c�t�, pousser des cris d?orfraie quand des pressions sont exerc�es sur des juges, quelle que soit la nature des faits qui leur sont reproch�s. Vous citez l?exemple de lib�rations anticip�es, on pourrait reprendre l?exemple des tribunes dans les journaux, c?est en train d?arriver � un juge en ce moment m�me. Et de l?autre c�t�, nous permettre en temps que collectivit� de leur adresser des messages.

Pour ceci, notamment parce que nous croyons beaucoup que le principe d?ind�pendance de la justice est un des principes qui permet de la faire mieux fonctionner, nous suivrons �videmment la position de l?Ex�cutif.

M. Christophe CARESCHE, adjoint, pr�sident. - Merci.

Oui, Madame BARANDA.

Mme Violette BARANDA. - Justement, nous faisons preuve d?une certaine intransigeance et je tenais � dire que la famille de Ren� Audran et celle de Georges Besse ont donn� leur accord � la lib�ration des d�tenus. Je tenais aussi � vous dire que leur projet de r�insertion a �t� valid� par la gendarmerie.

Bien s�r, on peut se r�fugier derri�re la justice mais n?oublions pas quand m�me qu?en France nous avons lib�r� d�j� 86 autres d�tenus pour raisons m�dicales. Cela ne fait pas si longtemps, une autre personne �tait �galement condamn�e � 10 ans de prison, Maurice PAPON, pour ne pas le nommer, et je ne crois pas que ce fut jug� choquant. Je suis d�sol�e, sa lib�ration fut choquante. C?�tait pour une cause m�dicale. Un grand homme l?a d�fendu, Georges BADINTER. Je lui ai donn� raison � ce moment-l�.

M. Christophe CARESCHE, adjoint, pr�sident. - Il ne s?appelle par tous Georges. Ils ne se pr�nomment pas tous Georges !

Je mets aux voix. Nous allons clore l�, gardons la dignit� � cette Assembl�e.

Je mets aux voix, � main lev�e, la proposition de v?u d�pos�e par les groupes ?Les Verts? et communiste.

Qui est pour ?

Contre ?

Abstentions ?

La proposition de v?u est repouss�e.

Février 2006
Débat
Conseil municipal
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