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44 - 1998, DAUC 222 - Communication de M. le Maire de Paris sur l'exercice du droit de préemption


M. Patrick TR�M�GE, adjoint, pr�sident. - Chers coll�gues, nous passons � l'examen de la communication sur l'exercice du droit de pr�emption.
Je donne la parole au premier orateur inscrit, Madame SCHNEITER.
Mme Laure SCHNEITER. - Monsieur le Maire, le droit de pr�emption, judicieusement employ� lorsqu'il s'agit de r�aliser des op�rations servant � l'int�r�t g�n�ral, ne l'est plus quand il devient un pr�texte � la sp�culation et � la surdensification. Le Mouvement �cologiste ind�pendant l'a souvent d�nonc�.
Le l�gislateur a pourtant fix� une liste pr�cise et limitative des cas en vue desquels il est possible de pr�empter. Cette liste, � premi�re vue, para�t justifi�e mais l'interpr�tation que la Ville de Paris en a fait, dans un grand nombre de cas, ne l'est pas. Sur les 7 cas de figure o� le droit de pr�emption est autoris�, trois de ces points sont tellement vagues, que la Ville en a us� et abus� :
- permettre la restructuration urbaine ;
- permettre la mise en oeuvre d'une politique locale de l'habitat ;
- lutter contre l'insalubrit�.
Dans ces 3 cas, le droit de pr�emption a contribu� � d�velopper un urbanisme destructeur � Paris. La restructuration urbaine est pass�e par les Z.A.C., ces zones surdensifi�es, artificielles, isol�es du tissu urbain existant. Comme chacun sait, parler de ces grandes op�rations � Paris, c'est surtout parler de destruction et les nombreuses pr�emptions effectu�es par la Ville, ont port� essentiellement sur ces zones (il suffit de regarder la liste des endroits concern�s dans les registres analytiques, ann�e apr�s ann�e, pour en �tre convaincu).
Le droit de pr�emption est autoris� pour permettre la restructuration urbaine.
Le d�passement des hauteurs et des densifications pour r�aliser des �quipements publics ou priv�s � caract�re social ont �t� autoris�s. Il n'y avait pourtant aucune raison, sauf pour de tr�s rares exceptions, que de tels �quipements ne soient pas soumis � un minimum d'obligations. La modification de l'article 15 du P.O.S. a encore facilit� les pr�emptions et, de ce fait, les destructions abusives.
Vous soulignez que la pr�emption n'est pas un mode d'acquisition coercitif et que le propri�taire peut � tout moment renoncer � vendre. La r�alit� a �t� tout autre ; vous l'avouez vous-m�me dans votre rapport, page 6 : " il est rare que la Ville puisse acqu�rir par pr�emption la totalit� des biens n�cessaires et les acquisitions r�siduelles devront donc �tre effectu�es par expropriation, apr�s intervention d'une enqu�te d'utilit� publique ".
La mise en oeuvre d'une politique de l'habitat.
Les pr�emptions sont all�es bon train gr�ce � la mise en oeuvre d'une politique locale de l'habitat. Elles ont facilit� �galement cet urbanisme destructeur qui s'amplifiera � la faveur des derni�res modifications du P.O.S.
La r�vision du P.O.S. de 1989, telle qu'elle a �t� propos�e, a pr�sent� de nombreux pi�ges, d'autant qu'elle pouvait aboutir � des r�sultats diff�rents � partir d'un m�me principe (la pr�emption men�e par la Ville de Paris � partir de 89 a co�ncid� avec la mise en place de la r�vision du P.O.S.). Est-ce une co�ncidence ?
La d�fense de la fonction " habitat " aurait pu se traduire par des r�glements d'urbanisme plus stricts pour emp�cher, par exemple, qu'une trop forte densification ne continue � envahir les arrondissements p�riph�riques ; elle aurait pu se concr�tiser, dans les faits, par une volont� de pr�servation ou de r�habilitation du parc immobilier parisien, chaque fois que faire se peut.
La d�fense de la fonction " habitat " a malheureusement recouvert d'autres objectifs : la r�novation bulldozer au lieu de la r�habilitation, le r�am�nagement complet des secteurs dans Paris, o� l'on a pu reconstruire, en doublant, triplant le nombre de m�tres carr�s existants, car les nouveaux C.O.S. " habitat " de 89 l'ont autoris� - ( le C.O.S. de 1,5 est pass� � 3, il a donc doubl�).
La Ville ne peut pr�tendre, � quelques exceptions pr�s, avoir d�fendu cette fonction " habitat ". Elle a cr�� plus de logements, c'est vrai, mais sans se soucier des bouleversements enregistr�s dans de nombreux quartiers ou sans penser que des logements ne sont agr�ables que si l'environnement imm�diat l'est �galement.
Dans les 9 comptes rendus analytiques des pr�emptions exerc�es que nous avons re�us, nous voyons quelles ont �t�, h�las, ses priorit�s : en 1989, 1.775 m�tres carr�s ont �t� pr�empt�s pour r�aliser des espaces verts et 28.378 m�tres carr�s l'ont �t� pour les constructions !
Le droit de pr�emption est autoris� pour lutter contre l'insalubrit�.
Quant � la lutte contre l'insalubrit�, elle a �galement �t� pr�texte � pouvoir d�truire des quartiers pittoresques entiers dans Paris en laissant immeubles et maisons se d�grader. Je ne prendrai qu'un exemple ; la " Moskowa ". Cette charmante enclave, avec des maisons individuelles d�passant rarement deux �tages, des voies �troites et des petits jardins imbriqu�s, �tait une insulte � votre conception de l'harmonie urbaine ! Votre strat�gie a �t� simple et usera de ses alli�s les plus pr�cieux : la pr�emption et le temps !
Dans cette Z.A.C., chaque immeuble, acquis par pr�emption (car il n'y avait pas encore de proc�dure d'expropriation) a �t� d�truit quand il pr�sentait un bon �tat d'entretien et laiss� sur pied, en l'�tat, quand il �tait d�grad�. De fait, au fil des ans, le quartier a chang� peu � peu d'aspect, les b�timents d�grad�s arrivant � d�passer en nombre les b�timents sains.
La S.E.M.A.V.I.P., charg�e de la Z.A.C., n'a plus eu qu'� clamer que, pour lutter contre ces logements insalubres, il fallait tout raser ou presque pour reconstruire ! Combien de quartiers ont v�cu une exp�rience analogue (de grandes op�rations comme la Goutte d'Or, le bas Belleville, la Z.A.C. des " Amandiers "...) comme des op�rations plus ponctuelles dans le Faubourg Saint-Antoine ou de minuscules op�rations comme le Soleil d'Or dans le 15e.
La pr�emption, au nom de l'insalubrit�, est une d�cision que vous prenez aussi pour imposer vos projets, sans tenter de trouver de meilleures solutions. Un exemple ancien qui avait fait du bruit en son temps, l'h�tel Gu�n�gaud, l'un des plus beaux h�tels particuliers de Paris, que la Ville avait rachet� et voulait d�molir pour construire une �cole, sous pr�texte qu'il tombait en ruines, ce qui n'�tait que tr�s partiellement vrai ; la meilleure preuve qu'il y avait d'autres solutions, c'est qu'apr�s bien des p�rip�ties, cet h�tel a �t� sauv� de la destruction et r�nov�.
La crise de l'immobilier, une transparence plus grande exig�e pour les enqu�tes publiques, une moins mauvaise concertation, ainsi que le r�sultat tangible d'op�rations d�sastreuses, ont fait que vous �tes revenu progressivement vers un urbanisme un peu plus � taille humaine, respectant un tout petit peu l'histoire, la g�ographie, la sociologie et les sp�cificit�s de chaque quartier de Paris.
En conclusion, si le syst�me de pr�emption quasi automatique tel qu'il fonctionnait, a �t� en partie abandonn�, il n'en reste pas moins que, mal exerc�, il a fait plus de ravages que de bien. Je n'aurai malheureusement pas le temps de parler des diff�rentes proc�dures concernant les acquisitions des biens pr�empt�s.
M. Patrick TR�M�GE, adjoint, pr�sident. - Merci. La parole est � M. MANO.
M. Jean-Yves MANO. - Merci, Monsieur le Maire.
La caract�ristique principale de l'exercice du droit de pr�emption � Paris est une baisse extr�mement importante de l'action de pr�emption exerc�e par la Ville.
Quelques chiffres :
794 en 1991 pour 667 millions de francs ;
240 en 1996 pour 438 millions de francs ;
167 en 1997 pour 127 millions de francs.
Le l�gislateur a eu le souci de fixer une liste limitative des buts en vue desquels il est possible de pr�empter dans l'article L 210 du code de l'urbanisme : la mise en oeuvre d'une politique locale de l'habitat, la r�alisation des �quipements collectifs, la lutte contre l'insalubrit�.
Ces objectifs doivent rester � nos yeux essentiels dans la politique de la Ville, compte tenu du nombre de demandeurs de logements, compte tenu de la n�cessit� d'adapter en permanence les �quipements publics � l'�volution de la population, et compte tenu du nombre extr�mement �lev� d'immeubles parisiens consid�r�s comme insalubres.
Il est donc indispensable de d�velopper l'exercice du droit de pr�emption dans le respect de l'environnement car � nos yeux il ne s'agit pas syst�matiquement de d�molir pour reconstruire mais d'acqu�rir et de r�habiliter quand cela est possible.
Il est indispensable de d�velopper le droit de pr�emption et les cr�dits y aff�rent, pour �laborer une politique de mixit� sociale, alli�e � une mixit� g�ographique du logement � Paris.
Au cours de la discussion budg�taire, le groupe socialiste vous a propos� de doubler l'effort initial et de d�gager un milliard de francs pour l'exercice du droit de pr�emption dans le Centre et l'Ouest parisien. A titre d'exemple, j'ai relev� les efforts de la Ville dans le 5e arrondissement pour r�aliser des logements et des �quipements collectifs :
- 1997, 6,2 millions de francs ;
- 1996, 23,7 millions de francs.
Monsieur le Maire, Paris n'est pas constitu� uniquement du 5e arrondissement ! Etendez vos pr�tentions sociales sur les autres arrondissements du Centre et de l'Ouest parisien, les milliers de demandeurs de logements de ces quartiers vous en sauront gr�.
Monsieur le Maire, illustrez-vous par une politique audacieuse, pr�emptez les immeubles r�quisitionn�s pour que ces derniers demeurent � vocation sociale. Pr�emptez les immeubles insalubres qui sont une honte pour Paris.
L'exercice du droit de pr�emption doit donc demeurer un axe essentiel de la volont� d'agir pour un urbanisme au service des Parisiens, dans le respect de l'environnement.
(Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste).
M. Patrick TR�M�GE, adjoint, pr�sident. - Monsieur MANO, je vous remercie.
M. FERRAND ?... Mme CAPELLE, qui le remplace, a la parole.
Mme Liliane CAPELLE. - Monsieur le Maire, la Municipalit� parisienne a �t�, au cours des ann�es pr�c�dentes, particuli�rement discr�te sur ce sujet, les �lus si�geant au Conseil de Paris n'ayant pas �t� destinataires d'une telle communication pour les ann�es ant�rieures � 1989. Cette discr�tion s'est accompagn�e d'ailleurs d'une opacit� compl�te pour ce qui concerne les bilans comptables des S.E.M. et les acquisitions fonci�res r�alis�es dans les Z.A.C., lesquelles ont concern� pourtant au moins 500 hectares entre 1983 et aujourd'hui.
En ce sens, le bilan 1989-1997 des pr�emptions qui nous est pr�sent� aujourd'hui ne peut �tre consid�r� en fait que comme la partie �mergente et r�cente d'un vaste ensemble d'op�rations lanc�es pour la plupart avant 1989.
Ce bilan des pr�emptions pour la p�riode 1989-1997 concerne en effet seulement 180 hectares en tenant compte des interventions en p�rim�tre de Z.A.C. Nous sommes donc loin des 500 hectares auxquels nous avons fait r�f�rence.
Aussi, si nous accueillons avec satisfaction cet effort de transparence, nous ne pouvons que regretter l'absence d'informations sur cette question des pr�emptions, notamment dans les p�rim�tres de Z.A.C., pour la p�riode 1984-1989.
Comment ne pas rappeler que, durant cette p�riode, les prix du foncier, des loyers des logements et des bureaux, ont justement commenc� � augmenter tr�s rapidement sous l'effet de la multiplication des op�rations d'urbanisme d'initiative municipale dans Paris, et en particulier des Z.A.C. qui ont exerc� une consid�rable pression sur le tissu urbain ?
Comment se r�partissent durant cette p�riode les 400 hectares concern�s par les op�rations de Z.A.C. ?
Vous n'abordez pas cette question pourtant essentielle, les arrondissements de l'Est parisien ayant �t� les premi�res victimes de cet urbanisme au service de la sp�culation.
(M. Jean-Fran�ois LEGARET, adjoint, remplace M. Patrick TR�M�GE, adjoint, au fauteuil de la pr�sidence).
Comment ne pas rappeler aussi que nous ne disposons toujours pas, malgr� les dispositions de la loi du 7 juillet 1983 relative aux soci�t�s d'�conomie mixte, des �l�ments financiers relatifs aux acquisitions fonci�res qui nous permettraient d'appr�cier avec pr�cision le r�le des S.E.M. dans cette politique d'intervention fonci�re de 1983 � 1994. Ce texte pr�voit, � son article 5.II, alin�a c, que les S.E.M. doivent fournir chaque ann�e un compte rendu financier comportant en annexe un tableau des acquisitions et cessions immobili�res r�alis�es pendant la dur�e de l'exercice, l'ensemble de ces documents devant �tre soumis � l'Assembl�e d�lib�rante de la collectivit�. Or, pendant plus de 10 ans, vous avez ignor� la loi.
Il est temps de lever le voile sur ces diff�rents points et de vous conformer � la l�gislation en apportant aux �lus toutes les informations qui auraient d� �tre port�es � leur connaissance durant les pr�c�dentes mandatures afin qu'ils puissent appr�cier le co�t financier et l'impact de la multiplication des Z.A.C. dans Paris et de l'ensemble des interventions fonci�res.
Vous faites aujourd'hui, si je puis dire, " amende honorable " pour la p�riode r�cente, mais nous attendons que cet effort soit poursuivi et complet afin de pouvoir �clairer les Parisiens sur le poids de ce pass� dans la gestion municipale aujourd'hui, le poids financier de ces Z.A.C. lanc�es dans les ann�es 80 qui p�sent sur le budget de la Ville aujourd'hui et dont l'exemple le plus lamentable est celui de la Z.A.C. " Paris-Rive gauche ", cette op�ration faisant appara�tre un d�ficit comptable consid�rable de plus de 3,4 milliards de francs � la fin de 1997 !
Que ressort-il du contenu de votre communication ?
A vrai dire, peu d'�l�ments nous laissant esp�rer une am�lioration de la situation dans le domaine du logement social si l'on consid�re le recul des interventions fonci�res de la Ville, en particulier depuis 1995, � une �poque o� la situation n'�tait d�j� pas brillante. De ce point de vue, le d�but de votre mandature a engag� un recul sans pr�c�dent des interventions fonci�res. Li� � la diminution de l'effort d'investissement de la Ville, celui-ci ne concourt qu'� une chose : la r�duction du nombre de logements sociaux et d'�quipements r�alis�s dans Paris. Vous entretenez ainsi, sous couvert de cet " urbanisme � visage humain ", une p�nurie de plus en plus importante au d�triment des besoins des habitants et d'un secteur d'activit� professionnelle, celui du b�timent, qui conna�t de s�rieuses difficult�s puisqu'au niveau r�gional celui-ci aurait perdu en 6 ans plus de 40.000 emplois, selon une d�claration r�cente du directeur de la F�d�ration parisienne du b�timent. En observant la courbe fl�chissante des interventions fonci�res de la Ville de Paris depuis 1995, nous percevons mieux aujourd'hui une des causes de ce recul de l'emploi dans le secteur du b�timent et pourquoi les probl�mes de logement se posent avec autant d'acuit� dans Paris, notamment pour les sans-abri victimes de ce d�sengagement de la Ville.
D'apr�s votre communication, de 1989 � 1994 la moyenne annuelle des surfaces au sol pr�empt�es s'�levait � pr�s de 23.800 m�tres carr�s. Entre 1995 et 1997, elle tombe brutalement � pr�s de 13.000 m�tres carr�s, pour atteindre en 1997 moins de 5.600 m�tres carr�s, un record ! Un tel recul ne peut s'expliquer par le pr�tendu d�veloppement des r�habilitations de logements auquel vous faites r�f�rence. La seule explication s�rieuse � cette chute de l'effort de la Ville en mati�re d'interventions fonci�res r�side dans votre choix de r�duire les investissements, donc l'�quipement de Paris. Alors m�me que le secteur du logement devrait constituer un des pivots de l'action sociale, vous en r�duisez davantage la production, comme les �lus ont pu le constater � la lecture des derniers budgets de la Ville. Ce recul des interventions fonci�res vous permet de r�duire les d�penses et, � la marge, les imp�ts, dans une fuite en avant d�magogique.
Mais il s'agit l� d'une politique � courte vue qui ne peut qu'accro�tre les difficult�s auxquelles sont confront�s de nombreux Parisiens : raret� des logements sociaux et d'insertion, insuffisance des places en cr�ches, sous-�quipement en mati�re de r�sidences pour personnes �g�es d�pendantes, diminution du nombre d'emplois dans les secteurs li�s au b�timent.
Prenons un autre exemple tir� du bilan de ces pr�emptions : en 1989 - une ann�e au profil moyen pour la pr�c�dente mandature - la Ville a consacr� 8,3 millions de francs pour constituer 1.560 m�tres carr�s de r�serves pour espaces verts et 3,9 millions de francs pour l'acquisition de 600 m�tres carr�s destin�s � accueillir des �quipements scolaires. En 1997, son effort pour les espaces verts ne s'�l�ve plus d�sormais qu'� 2,2 millions de francs pour 333 m�tres carr�s de terrain, celui en faveur des �quipements scolaires passe � 16 m�tres carr�s ! Nous voulons bien croire que l'effort d'une collectivit� ne puisse pas �tre r�gulier, mais de telles contractions dans une ville de 2 millions d'habitants ne peuvent laisser indiff�rents, surtout lorsqu'on conna�t les efforts consentis dans d'autres secteurs.
Ce bilan renforce les �lus du groupe du Mouvement des citoyens dans leur conviction. Il faut :
1�) Relancer en priorit� la r�alisation de logements et d'�quipements collectifs � Paris pour r�pondre aux besoins des Parisiens mais aussi au profit de l'emploi, en y consacrant des moyens financiers � la hauteur des enjeux et de la capacit� de la Ville � r�pondre � ces besoins. C'est la raison pour laquelle nous vous avons propos� un amendement au budget primitif pour 1999 visant � relancer les investissements � l'aide d'un accroissement de 300 millions de francs du compte foncier.
2�) Poursuivre l'effort de transparence esquiss� par votre communication :
- en pr�cisant ce que les pr�emptions ont permis concr�tement en termes de r�alisations de logements sociaux P.L.A. et d'insertion, de logements P.L.I., par arrondissement et par ann�e, car votre communication n'aborde pas ce point de fa�on pr�cise alors qu'il est essentiel pour saisir la r�partition spatiale de l'effort fait en faveur du logement aid� ;
- en levant le voile sur les acquisitions...
M. Jean-Fran�ois LEGARET, adjoint, pr�sident. - Il faut conclure.
Mme Liliane CAPELLE. - J'en ai pour une minute... les acquisitions fonci�res r�alis�es notamment dans les Z.A.C. pour la p�riode ant�rieure � 1989, afin que les Parisiens puissent juger de la politique conduite pendant pr�s de deux d�cennies par la Municipalit�, et appr�cier son poids sur la situation financi�re actuelle de la Ville, la contraction du budget d'investissement ;
- en pr�sentant enfin aux �lus un bilan des interventions fonci�res r�alis�es au profit du D�partement, en pr�cisant � quelles fins.
Une fois cet effort de transparence effectu�, il sera possible de d�battre s�rieusement des questions soulev�es par l'exercice du droit de pr�emption � Paris au cours des derni�res ann�es par la Municipalit� parisienne et de comprendre en quoi il a �t� un outil politique au service des d�s�quilibres dont souffre Paris actuellement.
Je vous remercie.
(Applaudissements sur les bancs des groupes du Mouvement des citoyens, socialiste et communiste).
M. Jean-Fran�ois LEGARET, adjoint, pr�sident. - Je donne la parole � M. MALBERG.
M. Henri MALBERG. - Mes chers coll�gues, Monsieur le Maire, je souhaite faire quelques br�ves remarques sur la communication qui fait le point de la politique de pr�emption de la Ville depuis presque 10 ans, 1989-1997.
Je trouve que ce texte est comme un coup de projecteur sur la politique de la ville.
Certes, la pr�emption n'est pas le seul indicateur de la politique urbaine, du logement et de l'�quipement de la Ville mais je trouve que la politique que le Maire a choisie s'y lit comme dans un livre ouvert.
On peut parler d'abandon de ce qui a �t� pendant toute une �poque, quoiqu'on en pense, une certaine mani�re de ma�trise urbaine par la Mairie du mouvement de la Ville.
Je sais bien que cette politique avait beaucoup de d�fauts. J'entends Mme SCHNEITER. Nous partageons ses critiques.
Mais il y avait une politique urbaine.
On ne peut plus dire que ce soit le cas. Le volume des acquisitions en 1997 est le plus bas depuis 9 ans. 9 ans ! Et m�me s'il faut tenir compte que les d�penses li�es aux acquisitions varient d'une ann�e sur l'autre, �coutez ce chiffre, elles ne repr�sentaient, l'ann�e derni�re, en 1997, que 27 % de ce qu'elles ont �t�, en moyenne, les 9 ann�es pr�c�dentes.
Je rappelle d'ailleurs que ce d�sengagement est confirm� dans le budget de cette ann�e avec une baisse de pr�s de 10 % des autorisations de programme nouvelles pour acquisitions. L'an dernier, c'�tait moins 24 %. Moins 10 % cette ann�e.
Aujourd'hui, vous venez de le revendiquer, la Ville r�duit ses r�serves fonci�res et se contente de pr�empter, dites-vous, un peu hors des secteurs d'am�nagement. C'est-�-dire que, comme nous l'avions pressenti d�s le fameux discours de Belleville de M. TIB�RI, derri�re " l'urbanisme � visage humain " (jolie formule, que nous revendiquons) il y a le renoncement, au nom de la rigueur budg�taire, � toute ambition de d�veloppement et d'am�nagement de notre ville.
Hier, les Z.A.C. Maintenant, laissez-faire et laissez-passer !
Le renoncement et l'abandon d'aujourd'hui produiront, demain, un recul encore plus massif des logements sociaux et des �quipements collectifs, pourtant indispensables.
De ce point de vue et contrairement � ce que vous laissez entendre, les op�rations de transformation de bureaux en logements, qui sont en plein essor et qui rendent bien service � ceux qui ont construit ind�ment et b�tement des bureaux inadapt�s, et qui repr�sentent �videmment une petite solution, ne rendent pas compte quand m�me de ce qu'il faudrait faire quand on a tant d'inscrits au fichier des mal log�s.
Et puis, tout le monde sait le manque d'�quipements collectifs. Il manque de cr�ches, il manque d'�coles.
Ne faut-il donc pas, au lieu de renoncer, envisager un nouveau plan de r�serves fonci�res pour r�aliser � moyen terme ces �quipements ?
Monsieur le Maire, je vais terminer parce que je crois qu'il n'est pas besoin d'une heure pour porter un jugement sur ce document pourtant long. La politique des Z.A.C. n'est pas, pour nous, automatiquement synonyme de b�ton mais elle a �t� et demeure essentielle ainsi que la politique qui vise � maintenir une ma�trise publique de l'am�nagement urbain.
Une ville, quelle qu'elle soit (quelle qu'elle soit !), quand elle renonce comme c'est votre cas et comme votre document le prouve, se condamne � ne plus construire ou � se d�charger de ses responsabilit�s sur le secteur priv� c'est-�-dire � nourrir la sp�culation. D'ailleurs, cela se sent, elle est repartie.
(Applaudissements sur les bancs des groupes communiste, socialiste et du Mouvement des citoyens).
M. Jean-Fran�ois LEGARET, adjoint, pr�sident. - Je donne la parole � M. BLET.
M. Jean-Fran�ois BLET. - Monsieur le Maire, sans l'action de l'association " Onze de Pique ", puis de l'association " Urbanisme et d�mocratie ", qui vous avaient mis en demeure de leur communiquer la liste des pr�emptions sur le 11e et le 14e arrondissements, ce d�bat n'aurait pu avoir lieu.
Accul� par les associations de la C.L.A.Q. et l�gitim� par la C.A.D.A. qui intimait � la Mairie de Paris, le 19 juin 1997, la publication de la liste des pr�emptions, poursuivi au Tribunal administratif o� vous avouiez piteusement ne pas avoir une telle liste, qu'il vous fallait la confectionner alors qu'elle concerne tout de m�me des d�penses publiques de plus de 4 milliards de francs sur Paris, vous �tiez donc clairement en infraction au regard de la loi du 17 juillet 1978 sur l'acc�s des citoyens aux documents administratifs, et �galement au regard des obligations de transparence en mati�re d'urbanisme.
Tardivement, poussivement, vous vous mettez en r�gle. Mieux vaut tard que jamais.
Quels sont les chiffres, alors ?
De 1989 � 1997, plus de 4,1 milliards d�pens�s, 18 hectares de surface au sol et 14,3 hectares de surface de plancher pr�empt�s. Un v�ritable cataclysme urbain.
Pourquoi cette fr�n�sie pr�emptrice ?
La mise en application du nouveau P.O.S. de 1989 a servi d'alibi � une politique aveugle et irresponsable. Au nom du P.O.S., dont on ne soulignera jamais assez � quel point il incite � la densification par son C.O.S. �lev�, vous avez institu� plus d'une centaine de secteurs de Droit de pr�emption urbain renforc�.
Ces p�rim�tres de D.P.U.R. repr�sentent une surface de 467 hectares, soit 8,33 % du territoire urbanis� parisien. Sur ces 467 hectares, 100 hectares couvraient les emplacements r�serv�s du P.O.S., et 40 hectares les D.U.P. Restent donc 346 hectares pour les secteurs d'am�nagement, 346 hectares soi-disant �tudi�s par les services municipaux pour la r�alisation de programmes de logements sociaux et d'�quipements collectifs.
Reportons-nous � la d�lib�ration du 29 f�vrier 1988 qui marque, selon vos termes, une �tape essentielle concernant les D.P.U.R. et qui n'instaure pas moins de 65 secteurs de D.P.U.R. Peu d'�lus ont alors saisi l'enjeu r�el de cette d�cision puisqu'aucun d'entre eux n'a cru n�cessaire de devoir intervenir en s�ance et qu'� l'exception des �lus communistes, il ne s'est trouv� personne pour voter contre. Les Verts n'existaient pas � l'�poque.
Dans cette d�lib�ration, vous dites que les objectifs d'am�nagement seraient pr�cis�s. Que dire du flou total de ces objectifs ?
Ainsi, pour le D.P.U.R. de la rue Emile-Duploy�, instaur� le 29 f�vrier 1988, les perspectives envisag�es se r�sument uniquement �, je cite : " recalibrage et ouverture sur la rue Ernestine, de la rue Emile-Duploy� ". Aucun programme n'�tait pr�vu alors que cette demande, c'est la loi et la jurisprudence du Conseil d'Etat qui l'imposent.
Tous ces D.P.U.R. semblent f�cheusement entach�s d'ill�galit�.
La d�lib�ration du 29 f�vrier 1988 instituant 65 D.P.U.R. d�finissait les crit�res suivants :
- zones du territoire parisien dans lesquelles les charges fonci�res demeurent compatibles avec les contraintes de financement d'op�rations � caract�re social ;
- configuration du parcellaire : ensembles immobiliers dont les caract�ristiques excluent tout espoir pour un op�rateur priv� de r�unir des emprises suffisantes dans des conditions acceptables ; seule la Ville, par ses moyens d'intervention, peut proc�der aux acquisitions n�cessaires ;
- �tat d'occupation : parcelles faiblement b�tis et d'un �tat m�diocre ou mauvais.
C'est, en fait, une description tr�s pertinente des tissus faubouriens les plus remarquables de la Capitale, peu denses, compos�s d'impasses bord�es de constructions basses, d'un parcellaire en lani�re, comportant des cours int�rieures, des petits espaces verts et compos� pour sa tr�s grande majorit� ou sa quasi majorit� d'habitat social de fait. Tissus faubouriens dont Jean-Louis SUBILEAU, nagu�re en charge de l'A.P.U.R., demandait qu'ils soient prot�g�s et mis en valeur pour leur caract�re remarquable.
En fait, en 9 ans, le Nord-est parisien, � savoir les 18e, 19e et 20e arrondissements, ont eu l'insigne privil�ge de repr�senter � eux seuls 61,6 % de la surface de plancher totale pr�empt�e sur Paris, 50 % de la surface au sol et 50 % des d�penses. Quel acharnement !
A titre de comparaison, les 8 arrondissements centraux et le 16e arrondissement ne repr�sentent en tout et pour tout que 0,15 % du total de la surface de plancher, 5,41 % des surfaces au sol et 6,32 % des d�penses totales.
Le r�sultat de la pr�emption syst�matique exerc�e dans l'Est parisien fut catastrophique. Combien de quartiers ont �t� " taudifi�s " par votre voracit� pr�datrice !
Le total des pr�emptions sur la rue Riquet dans le 18e de 1990 � 1995 s'�l�ve � 70.772.000 F. Toujours dans le 18e, le total des pr�emptions du p�rim�tre de D.P.U.R. " Caill�-Aubervilliers ", de 1990 � 1998, s'�l�ve � 33.372.000 F. Faut-il rappeler que les sommes allou�es actuellement aux O.P.A.H. pour 1998 s'�l�vent � peine � 26 millions de francs pour tout Paris ?
Avec de telles sommes - 70 millions de francs rue Riquet, 33 millions de francs sur le D.P.U.R. " Caill�-Aubervilliers " -, tous les immeubles de ces secteurs pourraient �tre superbement r�habilit�s.
En fait, et vos documents en apportent enfin la preuve irr�futable, le recours syst�matique � la pr�emption a �t� le fer de lance de ce que le conseiller, l'avocat, l'ami de Jacques CHIRAC, le d�put� R.P.R. Patrick DEVEDJAN a appel� la " purification ethnique de Paris ".
De 1989 � nos jours, et � de rares exceptions pr�s, l'abus massif du droit de pr�emption a �t� l'instrument de la destruction des quartiers populaires du Nord-est parisien, la destruction du tissu faubourien, de l'habitat ouvrier et de sa m�moire. C'est un choix de classe. Pour vous la pr�emption a �t� purement et simplement de la spoliation.
M. Jean-Fran�ois LEGARET, adjoint, pr�sident. - Pour r�pondre aux intervenants, je donne la parole � M. Michel BULT�.
M. Michel BULT�, adjoint, au nom de la 6e Commission. - Merci, Monsieur le Maire.
Je rappellerai que le droit de pr�emption a pour objet de permettre aux communes de r�aliser les acquisitions fonci�res n�cessaires � la r�alisation d'actions et d'op�rations d'am�nagement ainsi que la constitution de r�serves.
Jusqu'en 1991, une politique de pr�emption syst�matique tant dans les r�serves que dans les p�rim�tres de D.P.U.R., c'est-�-dire droit de pr�emption urbain renforc�, avait �t� instaur�e dans le but de mettre en coh�rence cette action fonci�re avec le plan d'occupation des sols, et de r�pondre � deux priorit�s d�finies par la Municipalit�, � savoir : la r�alisation de logements sociaux et celle d'�quipements publics.
794 pr�emptions dont 251 dans les emplacements r�serv�s ont �t� r�alis�es en 1991, contre 533 en 1989 dont 65 dans les r�serves.
Depuis 1992, le nombre de pr�emptions a constamment diminu� afin de se limiter aux op�rations jug�es prioritaires.
Ainsi, un examen des r�serves de voirie a contenu l'intervention fonci�re de la Municipalit� aux op�rations r�alisables rapidement. De 198 pr�emptions d'emplacement r�serv� en 1992, on est pass� � 99 en 1995.
Par ailleurs, l'ensemble des secteurs a fait l'objet d'un r�examen afin de limiter l'intervention de la Ville aux op�rations dont la n�cessit� sur le plan de l'urbanisme apparaissait plus grande.
Depuis 1992, aucun nouveau secteur n'a �t� soumis au D.P.U.R. De 379 pr�emptions en secteur d'intervention D.P.U.R. enregistr�es en 1992, on est pass� � 175 en 1995.
Enfin, l'�volution des pr�emptions hors p�rim�tre de D.P.U.R. s'est relativement maintenue du fait de la volont� de la Municipalit� de privil�gier l'acquisition ponctuelle de l'emprise susceptible de se pr�ter � la r�alisation rapide d'op�rations de logements sociaux, notamment dans le cadre de transformations de bureaux en logements ou d'�quipements collectifs d'ailleurs.
Par exemple, en 1995, dans 7 immeubles � usage de bureau pr�empt�s en vue de leur transformation, 300 logements sociaux environ ont pu �tre r�alis�s.
Les nouvelles orientations d�finies par la Municipalit� en 1995 et 1996 ont conduit � privil�gier les r�habilitations par rapport aux d�molitions-constructions afin de mettre en oeuvre un urbanisme � visage humain et de pr�server le caract�re des quartiers. Cette nouvelle politique n�cessite une analyse fine du contexte architectural et s'appuie sur une concertation �largie.
Cette d�marche s'est concr�tis�e dans des secteurs comme Amandiers, Belleville, Didot et bien d'autres. Dans ces conditions, l'intervention fonci�re de la Ville a �t� restreinte, le syst�me de pr�emption quasi automatique abandonn� au profit d'une �tude syst�matique de chaque d�claration d'intention d'ali�ner en fonction d'objectifs actualis�s.
Actuellement, trois orientations se dessinent.
En premier lieu, l'examen des emplacements r�serv�s se poursuit afin de limiter l'intervention aux r�serves dont la pr�emption s'impose � court et moyen termes et doit conduire � engager des proc�dures de modification du Plan d'occupation des sols pour supprimer les r�serves d'�largissement en concertation avec les �lus locaux. Le cas des rues de Charonne ou Riquet peut �tre cit� en exemple.
Ensuite, l'examen des p�rim�tres de D.P.U.R. sera continu afin de mettre en oeuvre les op�rations dont la n�cessit� est confirm�e, et aussi afin de mettre � jour les secteurs pour lesquels l'op�ration est achev�e ou r�duite, voire parfois d'ailleurs abandonn�e.
Dans cette optique, les locaux acquis dans les secteurs o� la collectivit� n'intervient plus seront propos�s � la vente.
Enfin, sera maintenue la priorit� � l'acquisition d'immeubles entiers permettant la mise en oeuvre d'�quipements publics ou d'op�rations de logements sociaux en dehors des p�rim�tres de D.P.U.R. A ce titre, des op�rations sont d'ores et d�j� programm�es pour l'ann�e 1998-1999, comme l'�lot Francoeur dans le 18e, l'Institut de la soudure dans le 18e ou le 22, rue Vauquelin dans le 5e.
Pour r�pondre aux pr�occupations de M. MALBERG - je crois que M. MALBERG n'est plus l�, c'est dommage parce que je voulais lui r�pondre directement ainsi d'ailleurs qu'aux autres orateurs - � l'avenir un compte rendu sera soumis chaque ann�e au Conseil de Paris sur les proc�dures de pr�emption engag�es l'ann�e pr�c�dente.
Et ce que je voulais dire � M. MALBERG, c'est que loin d'un renoncement, vous apercevrez d'ailleurs tr�s prochainement quand nous informerons le Conseil de Paris des pr�emptions 1998, que ces derni�res auront doubl� par rapport � celles de 1997. Alors, ce n'est pas du tout un renoncement de la politique de la Ville de Paris, c'est au contraire je crois une politique beaucoup plus lucide et beaucoup plus compr�hensible.
Je rappellerai en outre � M. MALBERG que le droit de pr�emption n'est pas l'unique moyen d'acqu�rir des immeubles. Je citerai notamment les moyens compl�mentaires que repr�sentent les D.U.P. et un grand nombre d'acquisitions que je pourrai appeler acquisitions � l'amiable.
Voil� ce que je voulais r�pondre, Monsieur le Maire, � l'ensemble des intervenants.
M. Jean-Fran�ois LEGARET, adjoint, pr�sident. - Je remercie M. BULT�.
Je rappelle que s'agissant d'une communication, il n'y a pas lieu de proc�der � un vote.

Janvier 1999
Débat
Conseil municipal
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