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2010, DAC 716 - Signature d'une convention avec l'Institut Mèvementmoires de l'Edition Contemporaine (14280 Saint-Germain-la-Blanche-Herbe) pour l'attribution d'une subvention. Montant : 35.000 euros.


M. Jean VUILLERMOZ, adjoint, pr�sident. - Nous examinons le projet de d�lib�ration DAC 716. Il s'agit d'une signature d'une convention avec l'Institut M�moire de l'�dition contemporaine.

La parole est � Mme Odette CHRISTIENNE.

Mme Odette CHRISTIENNE. - Merci, Monsieur le Pr�sident.

Dans l'ouvrage Paris allemand, au chapitre intitul� "activit�s culturelles, �vasion ou soumission", le grand historien Henri MICHEL observe : "A Paris, sous l'occupation, la vie culturelle a �t� brillante, f�conde, dans tous les domaines, y compris celui de la philosophie".

Les cours de la Sorbonne et du coll�ge de France ont continu� sans interruption. L'existentialisme s'est �panoui avec Gabriel Marcel et Merleau Ponty et Alain, Bach�lard, Henri Wallon ont continu� � �crire dans une totale indiff�rence de l'occupant � leur �gard.

Cela pose bien des questions car, comme il faut le remarquer, si l'occupant allemand l?avait voulu, toute activit� culturelle aurait disparu en France comme ce fut le cas en Pologne.

Concernant la culture scientifique, Joliot Curie, m�me, a re�u la visite au coll�ge de France de coll�gues allemands dont certains avaient �t� ses �l�ves, et finalement, la science ne connaissant pas de fronti�res, il accepta que son cyclotron refonctionn�t sous la direction de sp�cialistes allemands.

Comment mieux saisir ce que furent, en cette p�riode d'occupation, la culture et en particulier la vie litt�raire ?

Nous esp�rons d'appr�ciables �claircissements gr�ce � l?exposition dont il est question. Car, au-del� de l'aspect militaire, la Seconde Guerre mondiale a �t� analys�e dans ses dimensions politiques, Vichy, puis plus r�cemment culturelles (on pense aux travaux impuls�s par Pascal ORY notamment).

Il parait d�s lors aujourd?hui particuli�rement judicieux de croiser le politique et le culturel, pour aborder notamment la question de l?engagement des intellectuels. On a beaucoup �tudi� en effet "la naissance des intellectuels" avec l?affaire DREYFUS o� l?engagement de Sartre apr�s guerre, mais paradoxalement, assez peu les "ann�es noires".

Les informations dont nous disposons sont bien souvent parcellaires et diss�min�es. Un effort de reconstitution de cette mosa�que est donc n�cessaire. C'est � quoi nous invite le projet d'exposition � l'H�tel de Ville que propose l?I.M.E.C. (Institut des m�moires de l'�dition contemporaine) sur la vie litt�raire fran�aise sous l'Occupation.

Il s'agit d'une histoire singuli�re qui nous conduit � nous interroger sur le rapport des intellectuels et leur si�cle, le parcours d?un C�line qui s?est mis brutalement � �crire des pamphlets antis�mites, d?un Chardonne qui se r�jouissait de l?effondrement du vieux monde sous la botte nazie, d?un Drieu La Rochelle qui a fait basculer la NRF dans la collaboration, d'un Rebatet auteur des "les d�combres" ou d?un Brasillach exhortant la d�portation des enfants juifs, qui ne nous laissent pas de nous interroger sur la nature humaine.

A contrario, comment cacher notre admiration face � l?engagement de Vercors, auteur de l?inoubliable "Silence de la mer", et fondateur des �ditions de Minuit, d?un Paulhan qui organisa la r�sistance clandestine chez Gallimard - il en sera question � l'exposition - d'un Char qui cessa d'�crire de la po�sie pendant toute la guerre et maudit l'occupant de l'avoir contraint � la radicalit�, d?un Camus infatigable animateur de "Combat" ou d?un Aragon � la t�te des "Lettres fran�aises".

Certains conflits concernant le th��tre, m�me s'ils apparaissent anecdotiques, sont aussi significatifs. Ils concernent la nature m�me des textes. On pense aux "Mouches" de Sartre, dont on peut dire en un raccourci brutal qu?elles r�cusent la notion de responsabilit� de Dieu et proclament le principe de la libert� humaine et la possibilit� de la r�volte. Il n?y eu pas de censure allemande, mais un manifeste d�plaisir des fervents de la collaboration europ�enne.

Dullin mit �galement en sc�ne six mois plus tard "Le soulier de satin" de Paul Claudel.

Tractations et d�saccords de metteurs en sc�nes, auteurs, acteurs, et finalement cela fut le pr�texte pour plonger le nez de l'auteur, qui a su flairer depuis le vent opportun de la victoire, dans le moutarde de son ode au Mar�chal. Et selon Henri Jeanson, Picasso, pressenti pour les d�cors r�pondit : "Moi, travailler pour Claudel, plut�t crever !"

Comment mieux rendre les tensions inh�rentes aux relations artistiques de cette �poque ? L'int�r�t de l'exposition qui nous est propos�e est pr�cis�ment de mettre en exergue cette complexit� de la vie litt�raire, mais aussi et surtout le r�le des maisons d'�dition.

Sur ce point, face � la d�rive d'un Grasset ou des Nouvelles �ditions fran�aises, l'aventure de Minuit dans la clandestinit� para�t exemplaire. La connaissance de cette p�riode est irrempla�able pour mieux comprendre l?Humanit�, ses affres et son destin. Or, les phares que sont les �crivains n'ont-ils pas un devoir d?exemplarit�, notamment quand la patrie est en danger ?

Car les deux m�les pour reprendre l?expression du g�n�ral De Gaulle qui ont sauv� la France, l?un �tait le tranchant de l?�p�e, l?autre la pens�e fran�aise.

C'est pourquoi cette exposition me para�t devoir �tre particuli�rement soutenue.

Je vous remercie.

(Applaudissements sur les bancs des groupes socialiste, radical de gauche et apparent�s, Communiste et �lus du Parti de Gauche et EELVA).

M. Jean VUILLERMOZ, adjoint, pr�sident. - Merci beaucoup.

Pour vous r�pondre, je donne la parole � M. Christophe GIRARD, Mme VIEU-CHARIER �tant souffrante.

M. Christophe GIRARD, adjoint, au lieu et place de Mme Catherine VIEU-CHARIER, adjointe, au nom de la 9e Commission. - Mes chers coll�gues, on peut se f�liciter que la Ville de Paris pr�sente cette exposition sur le th�me de la vie litt�raire fran�aise sous l'occupation.

Serait-il possible d'avoir moins de brouhaha ? Parce qu?en plus je suis tent� d?�couter ce que vous dites. Cela a l?air tr�s int�ressant?

On est tr�s loin dans cette affaire, vous le reconna�trez, des approximations scandaleuses de l?exposition Zucca. On est bien l� sur un sujet de fond, organis� avec l?I.M.E.C., l?Institut des m�moires des �ditions contemporaines, et je vous rappelle que l'exposition se tiendra � l'H�tel de Ville. J?ai eu la chance de la voir � New York quand elle se tenait, en 2009, � la grande biblioth�que publique de la Cinqui�me avenue o� l?exposition �tait en effet d?une qualit� absolument remarquable. Et l?I.M.EC. fait un travail en effet exceptionnel.

D'ailleurs, hasard du calendrier, le vote de ce projet de d�lib�ration intervient - au moment o� on ferme les rideaux du Conseil de Paris - le lendemain m�me de l?inauguration d?une exposition aux Cordeliers, organis�e par le Comit� d?histoire de la Ville de Paris sur le th�me de la vie quotidienne des Parisiens sous l'Occupation.

Cette exposition nous permet de travailler avec l'Institut m�moires de l'�dition contemporaine qui pr�serve et met en valeur des fonds d'archives consacr�s aux diff�rents acteurs de la litt�rature, et contribue au d�veloppement de la connaissance de la vie litt�raire, artistique et intellectuelle contemporaine.

En 2011, l'H�tel de Ville accueillera une exposition qui a d�j� �t� pr�sent�e � New York, comme je viens de le dire, � travers des collections fran�aises, canadiennes, am�ricaines, et retracera les destin�es d?�crivains, artistes et intellectuels fran�ais, dont a si bien parl� � l'instant notre ch�re coll�gue Odette CHRISTIENNE, ancien proviseur d?Henri IV, ne l?oubliez jamais, ayant travers� la p�riode de l?Occupation dans toute sa complexit� et dont certains furent collaborateurs mais d?autres r�sistants.

L'objectif est de mieux conna�tre le r�le d�cisif jou� par ces hommes et ces femmes au c?ur de cette p�riode terrible.

D'Althusser � Marguerite Duras, d?ailleurs je signale � notre Assembl�e et je sais que cela �veillera l?attention d?H�l�ne MAC� de L�PINAY, la maison de Marguerite Duras est � vendre, et vraiment j'en appelle � l'Etat. Je sais que Marguerite Duras �tait une femme de gauche, mais la maison de Marguerite Duras �tant � vendre, il serait bien que l'Etat puisse la sauver et qu'elle devienne une maison que l'on puisse visiter, comme un beau mus�e, comme la maison de Victor Hugo ou comme la maison de Tolsto� � Moscou.

Donc, d'Althusser � Marguerite Duras, de Sartre � Aragon, ils seront tous pr�sents dans cette exposition que nous vous invitons �videmment � aller voir, et je souhaite � Catherine VIEU-CHARIER un prompt r�tablissement au nom du Conseil de Paris.

M. Jean VUILLERMOZ, adjoint, pr�sident. - Merci.

Je mets aux voix, � main lev�e, le projet de d�lib�ration DAC 716.

Qui est pour ?

Contre ?

Abstentions ?

Le projet de d�lib�ration est adopt�. (2010, DAC 716).

Décembre 2010
Débat
Conseil municipal
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