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2009, Vœu déposé par M. Georges SARRE et M. Michel CHARZAT relatif à l'attribution du nom de Robespierre à une rue de Paris.


M. Christophe NAJDOVSKI, adjoint, pr�sident. - Le v?u n� 36, relatif � l'attribution du nom de Robespierre � une rue de Paris, a �t� d�pos� par M. Georges SARRE et M. Michel CHARZAT.

La parole est � M. Georges SARRE.

M. Georges SARRE, adjoint. - Chers coll�gues, Clemenceau avait l'habitude de dire, je le cite : "La R�volution forme un bloc."

Oui, toutes ces femmes, tous ces hommes m�ritent d'�tre respect�s et honor�s.

J'ai observ� qu'aucune rue de Paris ne porte le nom de Robespierre. Ce n'est pas un oubli, c'est un choix. C'est un choix puisque, apr�s la Seconde Guerre mondiale, alors que le nom de Robespierre �tait honor�, on crut devoir le retirer.

C'est donc un choix, mais pourquoi ?

Qui est Robespierre ? La caricature du bourreau sanguinaire � laquelle seuls les pi�tres connaisseurs de la R�volution peuvent encore croire.

Non, Robespierre, c'est d'abord un r�volutionnaire p�tri des id�aux de la philosophie des lumi�res.

Robespierre, c'est un d�put� du Tiers Etat qui se bat pour le suffrage universel, le droit de vote des juifs et des gens de couleur, l?abolition de l'esclavage. Robespierre, c'est un des principaux r�dacteurs de la d�claration des droits de l'Homme et du Citoyen.

Alors, que lui reproche-t-on ?

D'avoir agi face � la contre-r�volution ? D'avoir encourag� une insurrection populaire ? D'avoir soutenu des mesures d'exception quand la R�publique �tait menac�e, en particulier par les soul�vements de Vend�e ou de Lyon ?

Je n'ai pas le temps d'aller plus loin, chers coll�gues.

Mais, de gr�ce, n'opposez pas les poncifs qui circulent. Il est �tabli d�sormais que Robespierre n'�tait pas le dictateur que l'on caricature pour mieux jeter l'opprobre sur les id�aux r�volutionnaires et r�publicains qu'il portait.

J'en veux pour preuve qu'il refusa, � la veille de sa mort, alors qu'il avait �t� bless� d'un coup de feu par un gendarme et qu'il avait �t� avec les autres arr�t�, plac� � l?H�tel de Ville, quand ses amis et ceux qui venaient pour le lib�rer se manifest�rent, Robespierre d�clara : "Non, non, nous n'allons pas partir, car ce serait enfreindre tout simplement nos responsabilit�s et l'�tat de droit."

Et puis, il se refusait de sortir de la l�galit�.

Je citerai, pour conclure, Jaur�s, car Jaur�s a exprim� une id�e forte. Il disait dans son histoire socialiste de la R�volution fran�aise : "Robespierre, le jour o� je serai mort, devant le tribunal de l'Histoire, c'est � c�t� de lui que j'irai m'asseoir".

Je voudrais �galement vous dire : si, d'aventure, notre Conseil r�cusait Robespierre, alors que nous avons donn� le nom de Jean-Paul II � une place � Paris, je consid�rerais qu'il y a l� un hiatus grave de la part de la R�publique.

Enfin et puisque nous parlons des id�aux de la R�publique, je rappelle la collecte en faveur des salari�s de Continental, qui sera aussi un bon barom�tre de la gauche parisienne.

Je vous remercie.

M. Christophe NAJDOVSKI, adjoint, pr�sident. - Pour r�pondre, la parole est � Mme Anne HIDALGO.

Mme Anne HIDALGO, premi�re adjointe. - La t�che est rude. J'esp�re que je ne terminerai pas...

M. Christophe NAJDOVSKI, adjoint, pr�sident. - Un rappel au r�glement de Mme DOUVIN.

Allez-y, Madame, tr�s rapidement !

Mme Laurence DOUVIN. - Tr�s rapidement, ce que le v?u aurait d� �tre, si c?est un v?u non rattach�, ce qu?il me semble. Il aurait d� �tre nettement plus court que les 4 minutes et demie que nous avons d� entendre.

M. Christophe NAJDOVSKI, adjoint, pr�sident. - Non. Il y a eu une intervention qui a dur� 3 minutes.

Effectivement, M. SARRE est all� au bout de son intervention.

Si vous voulez, je peux comptabiliser effectivement et respecter scrupuleusement le chronom�tre. Auquel cas, je l'appliquerai � tout le monde. Je peux vous dire que j'ai �t� particuli�rement g�n�reux en termes de temps, notamment pour votre groupe, Madame.

La parole est � Mme Anne HIDALGO.

Mme Anne HIDALGO, premi�re adjointe. - Oui.

La t�che est difficile. J'entends les arguments de Georges SARRE et, ils ne se sont pas exprim�s, mais aussi des coll�gues du groupe Communiste.

Il est vrai qu?il est toujours d�licat de dire qui a le droit de laisser une trace dans les rues de Paris et qui n'en a pas le droit. Il est toujours extr�mement d�licat de dire quelle est la part de la vie personnelle et de l'histoire de telle ou telle personnalit� que l'on retient le plus.

Il est clair qu?en ce qui concerne Robespierre, il y a deux aspects particuli�rement forts.

Le premier aspect, c'est toute sa participation? enfin, plus que sa participation, l'inspiration de la R�volution fran�aise.

Mais le deuxi�me aspect de sa personnalit�, c'est quand m�me "la Terreur" !

Face � ce personnage si controvers�, je rappelle aussi au Conseil que cette d�nomination a �t�, pour m�moire, la plus vive pol�mique d'apr�s-guerre au Conseil de Paris. Le Conseil de Paris, � l'�poque, avait vot�, � l'instigation d'ailleurs du groupe communiste, le principe d'une place Robespierre en 1946, et qu'ensuite, suite � un changement de majorit�, en 1950, elle a �t� d�baptis�e.

C'est une vieille histoire l'histoire de Robespierre avec Paris et ses �lus et le peuple de Paris.

Oui, peut-�tre comme celle de 89?

J'en appelle � la sagesse de notre Assembl�e, je me dis que compte tenu de ces positions extr�mement contrast�es encore sur cette personnalit� de Robespierre, j?�mets un avis n�gatif au nom de l?Ex�cutif � ce v?u.

Travaillons sur des propositions qui nous rassemblent, des propositions qui permettent, et on le fait tous les jours, � Paris, de r�inscrire dans ses rues, dans ses places, dans ses lieux, le nom de personnages extr�mement importants, plus ou moins connus d'ailleurs, qui ont marqu� la vie sociale, la vie syndicale, la vie politique.

D?ailleurs, tout � l?heure, quand on a vot� le v?u pr�c�dent, nos coll�gues de droite ont vot� contre.

Il y a un combat que nous continuons � mener, la majorit� de cette assembl�e, pour qu?effectivement, l'histoire sociale, politique et syndicale d'un certain nombre de personnages qui ont fait l'histoire de notre pays et l?histoire de Paris soit effectivement honor�e, mais en ce qui concerne Robespierre, cette personnalit� extr�mement complexe et controvers�e, nous ne sentons pas, aujourd'hui, les conditions d'un consensus dans lequel nous pourrions accepter ce v?u.

M. Christophe NAJDOVSKI, adjoint, pr�sident. - M. CORBI�RE pour une explication de vote, puis M. CAFFET.

M. Alexis CORBI�RE. - A plusieurs reprises, dans le pass�, le groupe auquel j?appartiens a pr�sent� d�j�, cela a �t� dit, h�las en vain, des v?ux identiques � celui dont nous d�battons � nouveau aujourd'hui.

Pour nous, c'est clair, Paris s'honorera en attribuant le nom d'une rue ou d?un lieu � Maximilien Robespierre, car c'est une injustice historique que celui qui se pronon�a parmi les premiers pour l?abolition de l?esclavage, la fin des colonies, le droit de p�tition, le droit de vote en faveur des com�diens et des juifs, qui se pronon�a contre la peine de mort et qui joua un r�le d�cisif � un moment important de notre histoire, � savoir la naissance de la R�publique, soit effac� de notre Capitale, puisque, pour l'instant, aucun lieu ne porte son nom, alors que d?autres communes limitrophes lui ont attribu� depuis longtemps des rues, des biblioth�ques, des stations de m�tro.

Cet homme fut un grand r�publicain, un grand r�volutionnaire?

(Brouhaha dans l'h�micycle).

Oui, des communes de gauche l'ont fait et nous sommes, me semble-t-il, ici, une majorit� de gauche. Donc il faut repartir de l�. Il y a peut-�tre des gens qui ne seront jamais convaincus, mais il s'agit aussi, en responsabilit�, de voir quelle majorit� nous sommes.

D'autres communes l'ont fait.

Il fut un grand r�publicain, un grand r�volutionnaire, un grand patriote, et je consid�re m�me qu'il fut un grand citoyen d'honneur de la Ville de Paris dont il fut le d�put�.

Une certaine histoire officielle, il est vrai, d'abord �crite par les Thermidoriens, les contre-r�volutionnaires, le repr�sente depuis deux si�cles comme l?�me de la terreur, ce qui est faux. Cet acharnement � le salir a sans doute pour but de faire dispara�tre les promesses d'�galit� et de justice de la grande R�volution.

Ceux qui montrent Robespierre comme un tyran responsable de la brutalit� de la p�riode se trompent et ignorent les d�tails. Pour comprendre les actes de tous ces acteurs, il faut se rappeler le moment historique dans lequel il �tait, mais cela a �t� dit par mon coll�gue Georges SARRE.

Un mot : Robespierre n'est pas irr�prochable ; on pourrait notamment discuter du drame de Vent�se et de la mort des dirigeants du club des Cordeliers, mais il fut membre du Comit� de salut public �lu et il n'a jamais fait partie du tribunal r�volutionnaire, d?ailleurs en d�saccord avec lui et en d�saccord aussi sur la fin avec le Comit� de salut public, il ne si�gera plus dans cette instance, et ce m�me tribunal r�volutionnaire?

M. Christophe NAJDOVSKI, adjoint, pr�sident. - Vous concluez, Monsieur CORBI�RE.

M. Alexis CORBI�RE. - ? qui le condamna � mort.

Je termine sur une chose, je ne serai pas trop long. Il y a d?autres, notamment des contemporains de Robespierre, qui ont leur nom, et notamment tous les Thermidoriens : Carnot, Cambac�r�s, Fran�ois de Neufch�teau, y compris Mirabeau, qui �tait corrompu, Lafayette qui a �t� coupable d?actes de haute trahison.

Paris s'honorera, une fois de plus, et Paris sera plus grand en n?oubliant pas Robespierre.

Voil� pourquoi nous voterons ce v?u.

Merci.

M. Christophe NAJDOVSKI, adjoint, pr�sident. - La parole est � M. Jean-Pierre CAFFET pour le groupe socialiste.

M. Jean-Pierre CAFFET. - Merci, Monsieur le Maire.

Tr�s rapidement, je ne vais pas user de mes deux minutes et je ne vais surtout pas faire la le�on pour savoir qui est de gauche, qui ne l?est pas, etc. OK ?

Simplement pour vous dire que moi, personnellement, je m'en remettrai � la sagesse de cette Assembl�e, que mon groupe a libert� de vote en fonction de ce que chacun d�cidera en conscience.

J?ajouterai que Robespierre, �videmment, c?est certain, a �t� le personnage qui a �t� d�crit ; il a �t� aussi autre chose. Et si Robespierre a �t� oppos� � la peine de mort, je crois me rappeler quand m�me qu'il l'a fait appliquer � tour de bras.

M. Christophe NAJDOVSKI, adjoint, pr�sident. - La parole est � M. Pierre-Yves BOURNAZEL pour le groupe U.M.P.P.A.

M. Pierre-Yves BOURNAZEL. - Merci, Monsieur le Maire.

J?ai �cout� tous les orateurs avec calme et je vais dire des choses tr�s calmement.

J'ai entendu parler de la "R�publique des idiots" ; Fran�ois Furet �tait-il un historien idiot, lui qui a d�crit Robespierre comme l?homme de la terreur ? Est-ce que Robert Badinter �tait un idiot, lui, qui, dans son magnifique discours de l?abolition de la peine de mort, �crivait le 21 septembre 1981 que "cette p�riode de la France �tait terrible et sanguinaire et que la France aussi devait r�parer ses actes de cette p�riode de la terreur".

Oui, Robespierre �tait un grand criminel. Oui, les proc�s arbitraires, les proc�s truqu�s, la corruption des juges et des avocats, qui vont inspirer d'ailleurs les purges de Staline, oui, des centaines et des centaines d'innocents ex�cut�s, Danton ex�cut� par Robespierre, Brissot, Desmoulins, les r�volutionnaires ex�cut�s par Robespierre? Vous avez la m�moire un peu s�lective.

Dois-je rappeler qu?H�bert, qui �tait de la commune de Paris - vous parliez des valeurs de Paris -, qui �tait un ultra-r�volutionnaire, a eu la malchance de tomber sur Robespierre ? C?est Robespierre qui, �videmment, a �cart� H�bert.

Alors, Robespierre, ce n'est pas l'histoire de Paris, ce n'est pas cette ville lumi�re, cette ville de libert� et de tol�rance qu'il repr�sente. Ce criminel, jug� devant l'histoire, devant les plus grands historiens, quelles que soient leurs options politiques au d�part, ne peut pas avoir sa place � Paris, parce que nous devons regarder l'histoire avec les yeux de la v�rit� et de la lucidit� et je n'accepte pas que dans cette Assembl�e, on puisse faire du r�visionnisme !

(Applaudissements sur les bancs de l?opposition municipale).

M. Christophe NAJDOVSKI, adjoint, pr�sident. - Je mets aux voix, � main lev�e, le v?u d�pos� par le groupe du Mouvement r�publicain et citoyen assorti d'un avis d�favorable de l?Ex�cutif.

Qui est pour ?

Contre ?

Abstentions ?

Le v?u est rejet�.

(Applaudissements sur les bancs de l?opposition municipale).

Septembre 2009
Débat
Conseil municipal
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