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I - Question d'actualité posée par le groupe MoDem, Démocrates et Ecologistes à Mme la Maire de Paris relative à la situation du commerce à Paris.


 

Mme LA MAIRE DE PARIS. - Mes chers collègues, Monsieur le Préfet de police, Mesdames et Messieurs, je vois que les oratrices inscrites sont là pour les premières questions d?actualité de cette séance posées par le groupe MoDem, Démocrates et Ecologistes et déposées non pas par Madame mais M. Pierre CASANOVA. Pardon, je ne voyais que les dames du groupe et pas vous !

C?est à vous et je crois que c?est Olivia POLSKI qui vous répondra.

M. Pierre CASANOVA. - Merci, Madame la Maire, mais j?avais bien compris que l?emploi du terme "oratrices" était inclusif, donc je ne le prends pas mal.

Ma question porte sur le commerce parisien. Quelles que soient les travées dans lesquelles nous siégeons, nous avons tous, dans le cadre de nos mandats, des contacts réguliers avec les commerçants et je pense pouvoir dire sans exagération que nous sommes tous sensibles à leurs difficultés. Mais il nous semble qu?elles prennent aujourd?hui un tour plus grave, peut-être plus dramatique que jamais.

En juillet dernier, la Fédération des associations de commerçants et artisans parisiens, présidée par le dynamique Thierry VÉRON, a chiffré la baisse moyenne de chiffre d?affaires à Paris sur l?année à 21 %, avec des records de moins 39 % sur les Champs-Elysées, moins 21 % pour Rivoli - Forum des Halles, et c?est dans mon arrondissement, Saint-Germain et Saint-Michel moins 28 %.

Il y a quelques jours, la Chambre de commerce et d?industrie d?Ile-de-France a mené une étude auprès de 300 commerçants parisiens et elle a révélé des chiffres encore plus préoccupants. Ce matin, le journal "Le Parisien" s?en faisait l?écho et je voudrais citer deux passages, car au fond les chiffres sont parfois moins parlants que les témoignages humains.

Rachid, commerçant du boulevard Magenta, donne les chiffres suivants : une baisse de chiffre d?affaires de 30 à 40 % en janvier 2022 comparé à 2021. On ne peut donc pas imputer au Covid cet effondrement. M. KNAFO dans le Marais, gérant d?un commerce de vêtements, signale, en ce qui le concerne, une chute de 60 % de son chiffre d?affaires en janvier 2022. Il exprime son mécontentement dans les termes suivants : "Les banlieusards ne viennent plus à Paris. La fermeture de la rue de Rivoli et la disparition des places de stationnement, qui rend impossible l?accès au centre de Paris, viennent s?ajouter au développement d?Internet et aux modifications des comportements des consommateurs".

Nous avons soutenu au groupe centriste - vous le savez et nous nous revendiquons de l?écologie pour cette raison dans notre dénomination - la politique de lutte contre le tout automobile. Nous avons aussi soutenu, quand elles étaient approuvées par les différentes autorités, les facilités fiscales, voire les dispenses de paiement. Mais aujourd?hui la question se pose. Voyant l?arrivée de véhicules électriques propres et le changement de comportement des consommateurs, que pouvez-vous faire, Madame la Maire, pour faciliter l?accès des commerces parisiens aux Parisiens eux-mêmes et aux banlieusards ? Voici ma question.

Mme LA MAIRE DE PARIS. - Merci.

La parole est à Mme Olivia POLSKI, pour vous répondre.

Mme Olivia POLSKI, adjointe. - Madame la Maire, mes chers collègues, je veux d?abord remercier Pierre CASANOVA pour cette question d?actualité sur la situation du commerce à Paris. Il l?a dit lui-même, la crise sanitaire - cela fait maintenant deux ans - a particulièrement éprouvé les commerçants et elle s?ajoute aux nombreux événements dans Paris qui ont été auparavant les attentats, les grèves, les manifestations des "Gilets jaunes", etc., et qui ont évidemment eu un impact très fort.

La Maire a fait le choix, dès le mois de mars 2020, d?accompagner notamment nos commerçants et d?ailleurs toute l?économie parisienne au travers d?un plan de plus de 230 millions d?euros. Il faut aussi reconnaître l?accompagnement qui a été fait sur des questions d?exonération de loyers. Je pense qu?il aurait dû y avoir quelque chose du côté du Gouvernement, de ce point de vue, et c?est toujours un sujet. Vous n?en parlez pas et c?est dommage, mais la question des loyers est régulièrement évoquée et la situation parisienne sur les loyers commerciaux devrait interpeller le Gouvernement.

Je crois qu?il faut aussi voir les situations. Vous l?avez dit sur la question des soldes, ce sont vraiment des situations typologie de commerce par typologie de commerce. L?habillement est partout un secteur en grande souffrance et si vous êtes un tout petit peu honnête, il n?y a pas que le Marais qui est concerné et vous savez que cela n?a rien à voir avec ce qui a pu se faire à certains endroits.

Par ailleurs, David BELLIARD le sait, sur la question des mobilités douces, il est prouvé que c?est favorable aux commerces de proximité, je ne pense pas que ce soit le sujet, donc il faut aussi à un moment donné reconnaître les choses. L?habillement et le prêt-à-porter sont un vrai sujet aujourd?hui dans Paris en termes de commerce ; c?est un secteur en très grande souffrance, qui n?a pas été aidé parce qu?ils ont pu ouvrir. Par exemple, pour les soldes, nous voyons qu?il y a un vrai sujet sur la consommation. Il faut un plan spécifique pour la question de l?habillement et du prêt-à-porter, et d?ailleurs la Fédération le réclame. En ce qui concerne le H.C.R., nous voyons bien, là aussi, que nous avons des difficultés. Après le "quoi qu?il en coûte", cela commence doucement et ils sont très, très inquiets aussi parce qu?ils souffrent du télétravail et d?un certain nombre de choses. Il est donc un peu facile d?imputer ces difficultés à la question de l?accès. Nous continuerons de soutenir, nous avons fait ce plan de plus de 130 millions d?euros et nous nous mobilisons, avec Emmanuel GRÉGOIRE qui en a parlé hier, sur la question des "dark stores" et des "dark kitchens". Le P.L.U., qui est en préparation, est aussi en train de travailler la question de la sauvegarde du commerce de proximité. Nous l?avons évoqué à plusieurs reprises, nous créerons, à la demande de la Maire de Paris, un opérateur commerce pour pouvoir continuer, nous aussi sur tout le territoire parisien, de sauver notre commerce de proximité auquel nous sommes très attachés.

Mme LA MAIRE DE PARIS. - Merci beaucoup, chère Olivia POLSKI. Monsieur CASANOVA, je vous redonne la parole.

M. Pierre CASANOVA. - Merci. Quitte à me répéter, signe de mon grand âge, j?ai reconnu les aides financières et j?ai reconnu que Mme HIDALGO n?était pas responsable du Covid. Ma question portait sur l?accessibilité.

Mme LA MAIRE DE PARIS. - C?est déjà cela de pris, merci pour l?honnêteté intellectuelle !

M. Pierre CASANOVA. - Vous m?avez fait le crédit d?un tout petit peu d?honnêteté, alors je vous réponds avec le peu d?honnêteté que vous m?accordez. Ma question porte sur l?accessibilité, Madame, rien d?autre, pas plus, pas moins. Si quelqu?un voulait m?y répondre, je serais très heureux.

Mme LA MAIRE DE PARIS. - Merci, mais la réponse est claire. Nous considérons que l?accessibilité pour les Parisiennes et les Parisiens se fait aussi par d?autres modes d?accès, toutes ces mobilités actives, douces que nous promouvons et qui sont d?ailleurs ce qui se passe dans toutes les grandes villes du monde. On peut tourner le dos à ce qui se passe dans les autres grandes villes du monde, mais je pense que nous sommes plutôt dans le sens de l?histoire. En tous les cas, les Parisiennes et les Parisiens ont envie que cela continue comme cela. II - Question d'actualité posée par le groupe Paris en commun à Mme la Maire de Paris et à M. le Préfet de police relative à la politique des pouvoirs publics face au trafic et à la consommation de "crack" à Paris.

Mme LA MAIRE DE PARIS. - Nous continuons avec la question d'actualité posée par le groupe Paris en commun.

C?est le Président du groupe, M. Rémi FÉRAUD, qui pose cette question.

M. Rémi FÉRAUD. - Madame la Maire, Monsieur le Préfet de police, chers collègues, mardi dernier s?est tenue la réunion du comité institutionnel du Plan "crack", en présence des services de l?Etat comme de la Ville de Paris. Elle s?est tenue à la suite de la demande insistante de la Ville, au regard de la gravité et de la pérennisation d?une situation inacceptable, tant pour les habitants du 19e arrondissement, de Pantin et d?Aubervilliers que pour les consommateurs de drogue livrés à eux-mêmes dans des conditions épouvantables.

Je voudrais d?ailleurs saluer ici l?engagement et l?implication constante des élus de proximité et en particulier de François DAGNAUD aux côtés des habitants de son arrondissement.

Faut-il le rappeler, la sécurité publique, comme la prise en charge sanitaire et sociale des usagers de drogues relève de la compétence exclusive de l?Etat. Pour autant et comme chacun le sait, depuis des années la Ville de Paris met en ?uvre de nombreuses actions en dehors de son champ de compétences, parce que la situation le nécessite et que c?est notre responsabilité. Le moins que l?on puisse dire, c?est que la Ville prend sa part sur un sujet qui nécessiterait un pilotage bien plus affirmé de la part de l?Etat et la mobilisation collective de l?ensemble des acteurs publics.

Comme maire du 10e arrondissement, j?ai d?ailleurs connu un temps où l?Etat avait une parole et une action cohérentes, et donc une action plus efficace, où l?objectif de la santé publique et celui de la tranquillité publique allaient de pair, où la réduction des risques, si souvent et si injustement décriée parfois, était un objectif politique que l?action de la police elle-même contribuait à mettre en ?uvre. Voilà ce qui manque aujourd?hui : une action globale, cohérente, déterminée de l?Etat dans son ensemble, c?est-à-dire du Gouvernement, car si l?action de la police est indispensable, elle ne peut à elle seule résoudre le problème.

Alors, du fait de cette absence de politique globale face à la toxicomanie, et pour la troisième fois consécutive en quelques mois, la seule réponse apportée a été celle, de manière non concertée, de tenter de déplacer la scène de consommation et de trafic à ciel ouvert du square Forceval dans le 19e vers le site du triangle de Bercy-Charenton dans le 12e, avant que l?Etat ne se rétracte face à l?opposition de très nombreux acteurs. Déplacer le problème sans accompagnement adapté ne peut pas être une solution et le laisser s?incruster porte de la Villette, nous en convenons bien tous ensemble, n?en est pas une non plus. Donc, nous souhaiterions, Madame la Maire, que vous interpelliez le Premier Ministre pour que le Gouvernement dans son ensemble nous dise comment il compte prendre en charge les usagers de drogues, pour qu?il définisse une vraie politique en ce sens et qu?il nous dise aussi comment il entend lutter plus efficacement contre les trafics et démanteler les réseaux qui se développent. Je vous remercie.

Mme LA MAIRE DE PARIS. - Merci beaucoup à vous. Monsieur le Préfet de police, puis je donnerai la parole à Anne SOUYRIS et à Nicolas NORDMAN.

M. LE PRÉFET DE POLICE. - Merci, Madame la Maire.

Je n?ai pas d?avis sur le v?u puisqu?il vous demande d?intervenir auprès du Gouvernement. Que puis-je vous dire ?

(Intervention hors micro inaudible).

Non, je ne suis pas le représentant de l?Etat dans cette assistance, je suis votre Exécutif sur certaines de vos compétences.

Très bien, je pense qu?on en a discuté lors du comité. C?est toujours le même sujet qui me préoccupe, d?ailleurs ce n?est pas très loin de certaines de vos préoccupations. Je ne suis pas en charge d?un certain nombre de solutions, mais tout ce que je peux observer c?est que les résultats vont être longs à atteindre et donc longs à attendre, et que nous ne sommes pas devant des possibilités médicales, sociales ou de toute nature que l?on envisagerait à court terme.

Donc, je pense qu?il faut dire la vérité et c?est ce que j?ai entrepris, comme vous, de dire aux habitants concernés que cela risque d?être long. Et j?en reviens à ma position qui consiste à dire qu?on ne peut pas faire peser à l?infini sur les mêmes toujours la même pression. On en a débattu de façon épistolaire, nous ne sommes pas d?accord, je constate le désaccord, mais je pense qu?il faut dire aux gens que cela risque d?être long, du fait de l?extrême difficulté du sujet. Donc, l?interpellation du Gouvernement ne peut que servir en la matière, je le reconnais.

Mme LA MAIRE DE PARIS. - Merci.

Je vais donner la parole à Anne SOUYRIS, puis à Nicolas NORDMAN.

Mme Anne SOUYRIS, adjointe. - Merci, Madame la Maire, et merci à cette question du groupe PEC parce que la réalité, c?est deux choses.

Premièrement, oui, c?est une compétence de l?Etat : la prise en charge de la toxicomanie, la prévention et vraiment toute la réinsertion. En revanche, depuis que je suis ici et même avant que j?arrive, la Ville a toujours pris ses responsabilités, a toujours été au service de l?Etat pour faire en sorte que ces questions sanitaires et d?insertion soient prises en charge, à chaque fois que cela a été nécessaire. C?est pour cela que lorsque nous avons mis en place le Plan "crack" en 2018 et que nous avons commencé à auditionner tous les acteurs de terrain, avec les institutions que vous êtes, avec le Préfet de l?époque, le Préfet d?Ile-de-France également, l?Agence régionale de santé, la C.P.A.M., avec tous les acteurs nous avons monté ensemble un plan.

Sauf qu?après, que s?est-il passé ? D?ailleurs, c?est ce qui est noté par la Cour régionale des comptes qui salue les résultats de ce Plan "crack", mais qui en regrette le manque de réalisation en disant qu?il s?est arrêté en cours de route. Or, ce qui s?est passé, c?est qu?à un moment donné l?Etat s?est arrêté, lui, d?être moteur dans cette situation. Donc c?est le premier point.

Le deuxième point et j?irai très vite sur ce sujet, c?est que vous parlez d?urgence. Oui, il y a une urgence, c?est absolument sûr. Il y a une urgence et il y a des solutions possibles d?urgence. Des solutions possibles d?urgence qui vous ont été, à vous et aux services de l?Etat, très souvent données par nous, en disant : extension des horaires, et même en l?état, sans rien changer ni dans la loi, c?est faire en sorte qu?enfin on puisse héberger, mettre à l?abri, prendre en charge ces personnes. C?est possible dans un temps court.

Quand on fait des déplacements de populations, quand on fait des évacuations de personnes Roms ou de migrants, comme cela a eu lieu à plusieurs reprises, on a toujours mis à l?abri les personnes. Là, cela n?a pas été le cas, vous voyez ? Et cela est possible. Et ce que l?on regrette et ce qui ne se passe pas, c?est qu?il n?y a pas cette action de l?Etat. Au lieu de cela, ce sont des déplacements qui sont de plus en plus terribles pour la population parisienne et pour les usagers de drogue. Voilà pourquoi il est effectivement nécessaire d?interpeller l?Etat pour qu?il puisse enfin y avoir une action de sauvegarde.

Mme LA MAIRE DE PARIS. - Merci beaucoup, Anne SOUYRIS.

La parole est à Nicolas NORDMAN.

M. Nicolas NORDMAN, adjoint. - Madame la Maire, chers collègues, Monsieur le Préfet, en effet, la situation du crack à Paris, en l?occurrence en ce moment à Forceval dans le 19e arrondissement et c?est aussi l?élu du 19e qui vous parle, est inacceptable. Inacceptable évidemment pour les personnes toxicomanes, qui sont dans de grandes situations de détresse sur ce site, mais aussi inacceptable pour les riverains qui en souffrent et qui sont exaspérés aujourd?hui par l?état dans lequel se trouve leur quartier.

Alors, comme vous l?avez dit, Monsieur FÉRAUD, il importe aujourd?hui que chacun assume ses responsabilités et les responsabilités qui sont liées à ses compétences. Cela a été dit. Il revient notamment à l?Etat d?assumer à la fois la prise en charge sociale et sanitaire des usagers de drogue, mais aussi d?assumer sa compétence en matière de lutte contre les trafics de sécurité et d?ordre public.

Pour cette raison, nous avons décidé, avec la Maire de Paris, les maires de Pantin et d?Aubervilliers et le Président du Conseil départemental de la Seine-Saint-Denis, de saisir conjointement le Tribunal administratif de Paris, territorialement compétent, d?une requête en référé mesures utiles, afin que l?Etat prenne des mesures d?urgence pour résoudre la situation très préoccupante à laquelle nous assistons depuis des mois porte de la Villette. Ce que nous demandons collectivement et de façon solidaire au tribunal administratif, c?est d?enjoindre l?Etat à proposer, à titre provisoire et conservatoire, un hébergement d?urgence permettant une prise en charge médico-sociale des toxicomanes installés dans le Nord-Est de Paris, ou à tout le moins de prendre toute mesure utile permettant de libérer l?espace public dans des conditions de nature à préserver la santé et la dignité des personnes concernées, mais aussi d?assurer la sécurité et la tranquillité publique de ces quartiers. Bien évidemment, comme cela a été dit, la Ville de Paris continuera ses actions sur le terrain, à la fois pour assurer des mesures de propreté et de salubrité, en lien avec Colombe BROSSEL, mais aussi de présence et de lien avec les habitants et la mairie d?arrondissement pour pouvoir, tant que ces mesures ne sont pas prises, soulager le quotidien des personnes qui vivent dans ces quartiers.

Mme LA MAIRE DE PARIS. - Merci beaucoup, Nicolas NORDMAN et aussi Anne SOUYRIS d?avoir rappelé cette action globale et cette action que nous allons mener conjointement devant le tribunal administratif avec les maires qui nous entourent d?Aubervilliers, de Pantin, ainsi que le Président du Conseil départemental.

Vous le savez et je crois que cette position est ici très largement soutenue, nous ne pouvons pas être d?accord pour le déplacement régulier de ces lieux de deal et de consommation, pour soulager une partie de la population et créer tous les trois mois des lieux de deal et de consommation, dans lesquels il y a finalement une démonstration d?impuissance totale des pouvoirs publics, une exaspération des riverains et une mise en danger pour eux-mêmes des personnes en situation de toxicomanie et pour les autres parce que nous savons qu?il y a aussi des comportements extrêmement violents. Notamment pour les femmes consommatrices de crack qui sont sur ces sites, nous savons très précisément ce qui se passe.

Il se trouve que ces déplacements ne peuvent pas tenir lieu de politique publique. Hier soir, nous étions avec le Premier Ministre et le Préfet de Région Ile-de-France à un dîner, où vous nous avez beaucoup manqué, Madame DATI, puisque c?était le dîner de la communauté arménienne. Il se trouve qu?à l?occasion de ce dîner, nous avons pu évoquer ce sujet et j?ai pu mesurer, notamment avec le Préfet de Région et le Premier Ministre, combien le fait qu?il n?y ait pas un accord au sein du Gouvernement sur la position, pourtant arbitrée par le Premier Ministre, est notre problème parce que le Premier Ministre a arbitré une position. Jean CASTEX a arbitré une position qui consiste à dire qu?il faut cette approche globale.

Puis, comme cela l?a été très bien dit par Rémi FÉRAUD, nous avons un problème puisque cette position n?est pas soutenue par le Ministère de l?Intérieur et le Ministre de l?Intérieur. Donc, nous n?avons pas le soutien de la force de police nécessaire à faire vivre des lieux dans lesquels on peut à la fois sécuriser les riverains et accompagner les personnes toxicomanes?

Vous auriez dû être au dîner du C.C.A.F. C?est vrai que c?est difficile pour vous d?y être mais vous auriez dû être là. Vous auriez dû être là parce que vous auriez pu prendre part à cette conversation et vous nous avez vraiment manqué. Mais vous nous manquez à chaque fois, parce que c?est difficile pour vous d?y venir et on sait pourquoi. Et on sait pourquoi.

Mais je reviens au sujet du crack sur le Nord-Est parisien. Face à une situation dans laquelle le Premier Ministre de la France n?est pas en mesure d?obtenir, de la part de tous ses ministres, le soutien à une politique globale dans laquelle il y ait le volet sécurité et le volet prévention et accompagnement dans les soins vers la sortie de ces addictions, c?est le problème auquel nous sommes confrontés.

Par conséquent, le fait de saisir le tribunal administratif avec mes collègues d?Aubervilliers, de Pantin et de Saint-Denis, qui sont d?ailleurs de bords politiques différents, nous allons ensemble devant le tribunal administratif. C?est parce qu?ils ont compris que dans cette affaire, il valait mieux être unis pour obtenir, de la part de l?Etat dont c?est la compétence, de poser les actes nécessaires pour pouvoir à la fois accompagner les personnes, qui sont aujourd?hui dans ces situations d?addiction, et aussi et surtout les riverains qui subissent ces situations depuis des années dans le Nord-Est parisien.

Ces informations, je voulais vous les donner. Je sais, puisque nous avons pu faire front commun notamment avec le maire de Charenton, que lorsqu?on fait front commun, on est beaucoup plus utiles. Voilà les éléments de réponse que je voulais apporter. Monsieur le Préfet, je vous redonne la parole. Il n?y a pas de problème, même si vous avez très bien rapporté à juste titre dans votre début d?intervention que vous n?étiez pas là pour représenter le Gouvernement mais bien au titre de l?Exécutif municipal à mes côtés. Je vous donne la parole.

M. LE PRÉFET DE POLICE. - Merci, Madame la Maire.

Je suis certes là comme étant votre Exécutif, il n?en reste pas moins que je suis le Préfet de police. Je ne peux pas, Madame la Maire, vous laisser mettre en cause publiquement le Ministre de l?Intérieur. Vous n?avez aucun élément qui vous permette de juger de sa loyauté et vous n?êtes pas juge de sa loyauté au sein du Gouvernement.

D?autre part, je ne crois pas que les réunions gouvernementales ou les réunions interministérielles se tiennent dans les dîners, quand bien même y participeriez-vous.

Je comprends que l?on ne puisse pas être d?accord politiquement?

Attendez, Madame DATI, laissez-moi finir. Je comprends tout à fait que l?on puisse ne pas être d?accord politiquement, mais les mises en cause personnelles n?ont pas lieu d?être ici. Je vous le dis très sereinement et très calmement, ne mettez pas en cause M. DARMANIN, c?est un excellent Ministre de l?Intérieur qui fait son travail.

Mme LA MAIRE DE PARIS. - Excellentissime, oui ! Merci, Monsieur le Préfet.

(Brouhaha).

M. LE PRÉFET DE POLICE. - Je n?ai pas tout à fait fini mais j?attends que?

Mme LA MAIRE DE PARIS. - Terminez.

M. LE PRÉFET DE POLICE. - Sur le fond du sujet, permettez-moi de m?étonner de l?intervention de M. NORDMAN. Comment peut-on contracter avec l?Etat dans le cadre du Plan "crack" et en même temps l?attaquer ? De deux choses l?une, soit on fait ensemble et on fait y compris les salles de repos, soit on va devant le tribunal.

J?ai noté que vous aviez changé d?ordre juridictionnel : vous êtes passés de la Cour européenne des droits de l?Homme au Tribunal administratif. Cela me paraît plus raisonnable comme niveau juridictionnel, mais quelle est votre position finalement ? Vous êtes dans une collaboration sur le Plan "crack", que je ne gère pas et encore une fois je le dis de façon très détendue, ou est-ce que vous êtes dans un conflit d?ordre juridictionnel avec l?Etat ? Vous ne pouvez pas à la fois appeler à des solutions communes et en même temps expliquer qu?il y a un débat devant les tribunaux. Très franchement, je ne comprends plus rien et j?en suis navré.

Mme LA MAIRE DE PARIS. - Ne soyez pas navré, Monsieur le Préfet, la chose est très simple à comprendre : nous mettons en cause la non-action de l?Etat et nous allons demander au Tribunal administratif de pouvoir en juger.

Effectivement, nous pourrons aller plus tard devant la Cour européenne des droits de l?Homme, ce que j?aurais fait si vous aviez, au-delà de la position que j?avais prise, décidé d?installer ce nouveau campement et ce nouvel espace de non-droit, de deal et de consommation, dans le 12e arrondissement. Là, oui, je serais allée devant la Cour européenne des droits de l?Homme. Là, nous allons devant le Tribunal administratif pour non-action de l?Etat et le Tribunal administratif jugera.

Merci beaucoup à vous, chers collègues.

Est-ce que Rémi FÉRAUD veut reprendre la parole ?

M. Rémi FÉRAUD. - Merci, Madame la Maire. Je crois que ce débat et cette discussion sont très intéressants - je ne parle pas des discussions politiciennes - parce que cela montre très bien que lorsqu?on veut confier une politique de lutte contre la toxicomanie et de prise en charge des victimes de la toxicomanie seulement par le biais de la police, c?est-à-dire du Ministère de l?Intérieur, et je n?en fais pas reproche au Préfet de police, cela ne peut pas fonctionner. C?est une politique qui doit être en fait pilotée par le Premier Ministre et dans laquelle le Ministère de la Santé doit être au premier rang, avec une action de la police qui accompagne une action sanitaire et sociale efficace. C?est de cela dont nous avons besoin et je remercie la Maire d?interpeller le Premier Ministre en notre nom en ce sens.

Mme LA MAIRE DE PARIS. - Merci beaucoup. III - Question d'actualité posée par le groupe Changer Paris à Mme la Maire de Paris relative à la dépendance à Paris.

Mme LA MAIRE DE PARIS. - Troisième question d?actualité pour le groupe Changer Paris, par Mme JACQUEMONT, si sa présidente de groupe accepte de lui laisser la possibilité de parler. Mais vous serez la bienvenue, je pense, à un dîner des Arméniens.

Mme Hélène JACQUEMONT. - Madame la Maire, la publication du livre "Les fossoyeurs" a suscité un électrochoc dans l?opinion, un de ces rares moments sans clivages d?indignation collective. Le scandale n?est pas nouveau, nous connaissions les difficultés auxquelles sont exposés les professionnels et plus particulièrement ceux qui accompagnent.

Je voudrais ici les remercier de leur immense dévouement. Leurs métiers sont beaux pour ce qu?ils demandent d?attention aux autres, de respect, d?abnégation et de savoir être. Ils doivent être valorisés, alors qu?ils sont coincés entre d?un côté l?opinion collective qui s?émeut de la maltraitance, et de l?autre de grands groupes privés qui maximisent leur rentabilité.

Ce serait trop facile de déplorer avec vous. Ce serait oublier qu?il y a dans ce pays des responsables politiques qui se doivent de protéger nos concitoyens, tout particulièrement les plus dépendants d?entre eux. Ce serait oublier que rentrer à l?E.H.P.A.D. n?est ni un droit ni le plus souvent un choix, que cela relève de notre responsabilité collective.

Madame la Maire, si comme le mot de Bossuet "Dieu se rit des hommes qui déplorent les effets dont ils chérissent les causes", il se rit de cette gauche apparentée qui se plaint que l?on ne se soit pas saisi de la question de la dépendance. Depuis dix ans qu?elle est au pouvoir, elle n?a eu de cesse de repousser tout projet de réforme pourtant promis à répétition.

Il se rit de cette gauche qui accuse le privé quand on sait que le public n?est pas épargné. Notamment à Paris dans certains E.H.P.A.D. du C.A.S.-V.P., il est douloureux de rappeler ici que la crise sanitaire a déjà sonné le glas, notamment à l?E.H.P.A.D. du Jardin des Plantes.

Il se rit de cette gauche qui déplore la dérégulation du secteur quand elle a laissé faire, voire encouragé, l?abandon de l?action publique et quand elle n?a rien fait pour contrôler un marché pourtant largement dépendant de nos dépenses d?aide sociale.

Car oui, Madame la Maire, la responsabilité de la Ville de Paris est engagée. Les E.H.P.A.D. bénéficient d?un financement tripartite, auquel vous contribuez largement au titre de la prise en charge de l?autonomie, notamment par le versement de l?A.P.A. et de l?A.S.H.

Que faites-vous donc pour contrôler ces établissements et vous assurer que les faits de maltraitance ne se produisent plus jamais dans aucun des 62 E.H.P.A.D. parisiens, ou du moins dans ceux dans lesquels vous opérez en direct ? Sans doute rien car les vieux, du moins ceux qui sont incapables de monter sur un vélo, ne vous intéressent pas.

Enfin, Madame la Maire, que dire des orientations stratégiques de l?A.P.-H.P. dont vous êtes présidente ? En 2013, l?A.P.-H.P. a reçu 58 millions d?euros de subventions pour humaniser et maintenir, et non pas diminuer, les capacités d?unités de soins en longue durée. Hélas, à l?inverse, dès 2019, on prévoit de baisser le nombre de lits en U.S.L.D. par centaines, en contrepartie d?une création de place en E.H.P.A.D. équipés avec de l?hospitalisation à domicile. Un jeu d?écriture, en somme, pour faire l?illusion que le niveau de prise en charge reste stable quand en réalité vous le diminuez, car de créations de places d?E.H.P.A.D., il n?y en a pas eu.

Rentrer en E.H.P.A.D. n?est ni un droit ni le plus souvent un choix, cela relève de notre responsabilité collective. Madame la Maire, que comptez-vous faire pour qu?à Paris les plus âgés et les plus fragiles d?entre nous puissent vieillir en se sentant toujours bienvenus chez eux ? Je vous remercie.

Mme LA MAIRE DE PARIS. - Merci, Madame.

La parole est à Véronique LEVIEUX, pour vous répondre.

Mme Véronique LEVIEUX, adjointe. - Merci, Madame la Maire.

Alors, Madame JACQUEMONT, vous qui êtes membre du Centre d?action sociale de la Ville de Paris, me semble-t-il, vous devez avoir les moyens de savoir ce qui se passe dans les établissements, et également en tant qu?élue d?arrondissement en charge des personnes âgées.

A l?évidence, compte tenu de la nature des propos assez indignes et méprisants à l?égard du personnel des établissements du C.A.S.-V.P., vous insinuez que rien n?est fait pour l?accueil des personnes âgées, en particulier des personnes âgées les plus dépendantes. Je ne sais pas à quoi vous passez votre mandat, mais je ne peux que vous inviter à aller au contact des centres d?action sociaux d?arrondissement, d?aller dans les résidences appartements et les résidences autonomie gérées par le Centre d?action sociale de la Ville de Paris, et aussi de vous rendre dans les établissements gérés par le Centre d?action sociale pour les E.H.P.A.D. pour y exposer votre analyse de la situation, ils seront ravis de vous répondre.

Néanmoins, à l?origine de votre propos, comme du v?u que vous avez déposé et auquel j?aurai à nouveau le plaisir de continuer à répondre demain, vous évoquez le travail d?enquête et de journalisme fait par Victor CASTANET qui a donné lieu à la publication du livre "Les fossoyeurs". Fort heureusement, la publication de cet ouvrage a créé un débat, a amené et contraint les autorités nationales de ce pays à intervenir et à diligenter des enquêtes via l?I.G.A.S. et l?I.G.F. à la hauteur de l?ensemble du groupe Orpea, au titre de la gestion de ces E.H.P.A.D. Je rappelle que 8 établissements d?Orpea sont présents sur le territoire parisien.

Depuis maintenant plusieurs semaines, avec la Maire de Paris et les services de la DASES et du C.A.S.-V.P., nous sommes en lien avec l?ensemble des équipes. La problématique de la bienveillance et de la prévention de la maltraitance à l?égard des personnes âgées, et en particulier des plus vulnérables, fait partie du quotidien de l?ensemble des professionnels, et c?est le seul point sur lequel je vous rejoindrai, quel que soit leur lieu d?exercice, qu?ils soient au sein du Centre d?action sociale, des services de la DASES et de l?ensemble des gestionnaires présents sur le territoire. Forts de ce travail qui a été fait, nous considérons qu?il est de notre devoir, qu?il est de la responsabilité du Département de la Ville de Paris - c?est la commande qu?Anne HIDALGO a formulée très clairement - d?aller au-delà du début d?enquête lancé par l?Etat à travers l?A.R.S. et les missions que je viens d?évoquer. La Maire de Paris a sollicité l?Inspection générale de la Ville de Paris pour que, au-delà des enquêtes et des missions qui vont être mises en ?uvre, ce soit dans les mois à venir l?ensemble des établissements accueillant les personnes âgées dépendantes sur le territoire parisien qui fasse l?objet d?un travail de mission, pour que soit interpellée, interrogée, vérifiée la pertinence de nos systèmes de remontées et de traitement des différents signalements. Comme vous le savez, pour le Département du côté A.R.S., ce sont des autorités de tutelle, auxquelles les directeurs des E.H.P.A.D. sont dans l?obligation de faire remonter les événements dits indésirables et un certain nombre l?est chaque année? Ecoutez, vous m?avez posé la question.

Mme LA MAIRE DE PARIS. - Continuez, Véronique LEVIEUX. Vu la perturbation qu?ils essaient de faire, continuez.

Mme Véronique LEVIEUX, adjointe. - Chaque année, ces événements indésirables sont traités avec les services du Département et les services de l?A.R.S.

Néanmoins, nous devons aller au-delà parce qu?à l?égard des personnes vulnérables, l?infaillibilité doit être recherchée au maximum. Nous devons nous assurer que l?ensemble de ces dispositifs est à la hauteur. Nous avons aussi besoin d?un regard extérieur pour interpeller les relations qui existent entre les établissements, les usagers, leurs proches et les familles.

C?est la raison pour laquelle Anne HIDALGO a demandé qu?une personnalité qualifiée soit missionnée pour établir un rapport en la matière et c?est M. Jean-Marc DELARUE qui sera missionné à cet effet, ce qui nous permettra de compléter ce travail.

Je vous invite, Madame JACQUEMONT, à contacter le C.A.S.-V.P. qui vous fera part des plans d?action de prévention et de lutte contre la malveillance, de tout le travail fait à l?égard de la bientraitance avec les actions de formation auprès du personnel. On vous invitera aussi à discuter du sujet de la maltraitance qui ne concerne pas que les établissements : il y a un vrai sujet devant nous en matière de domicile et de ce qui se passe.

Donc, nous mobilisons les moyens pour contrôler et renforcer nos dispositifs. Nous nous engageons à renforcer, si besoin est, les équipes qui travaillent auprès des personnes âgées. J?aurai l?occasion, dans le cadre d?un v?u de l?Exécutif que je vais vous communiquer dans les heures à venir, de lister l?ensemble des points sur ce sujet, mais je voulais déjà apporter ces éléments d?information. Je vous remercie.

Mme LA MAIRE DE PARIS. - Merci beaucoup, Véronique LEVIEUX, pour votre réponse complète, engagée, sur un sujet majeur, trop sérieux pour qu?il donne lieu à ce type de débordements auquel on vient d?assister.

Madame la représentante du groupe, vous reprenez la parole?

Oui, vous pouvez faire des rappels au règlement. Mais vous savez, tout le monde voit ce que vous faites. Justement, tout le monde voit ce que vous faites et vous vous rendez compte de l?image que vous donnez du rôle des élus de Paris sur un sujet aussi grave que celui qui fait l?objet aujourd?hui d?un débat public, d?une mise en cause publique de la question de l?accompagnement de nos aînés ?

Nous sommes là pour travailler sérieusement et j?attends de l?opposition évidemment qu?elle apporte des contributions utiles, parce que nous avons besoin tous ensemble de regarder, d?être au clair sur ce qui se passe et de progresser encore vis-à-vis de nos aînés, et là, vous donnez à voir un spectacle, où vous avez vociféré pendant toute l?intervention de mon adjointe. Moi j?entends ici, mais les personnes qui suivent à distance n?ont pas entendu le propos de Mme DATI qui, pendant que Mme LEVIEUX parlait, faisait : "Blablabla, blablabla, blablabla".

Voilà la contribution d?un groupe, que je respecte de droite républicaine, à un débat sur la question de la souffrance et de la grande dépendance. Alors oui, tout le monde voit ce que vous faites, Madame DATI, et je vous donne la parole pour votre rappel au règlement, parce que ce sera certainement encore très intéressant. Tant que vous ne dites pas "blablabla, blablabla, blablabla" dans votre rappel au règlement, je pense qu?on pourra essayer d?en tirer quelque chose.

Rappel au règlement.

 

Février 2022
Débat
Conseil municipal
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