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2021 DAE 348 - Paris Boost Emploi. - Subvention (80.000 euros) et convention avec la coopérative "La Fabrique" de la Goutte d’Or.


 

Mme Laurence PATRICE, adjointe, présidente. - Nous passons à l?examen du projet de délibération DAE 348 : "Paris boost emploi" - Subvention de 80.000 euros et convention avec la coopérative La Fabrique de la Goutte d?Or.

La parole est à M. Rudolph GRANIER, pour le groupe Changer Paris.

M. Rudolph GRANIER. - Merci, Madame la Maire.

Cette subvention nous paraît ambiguë au moins à deux titres. Si elle vise à soutenir l?activité dans le quartier très difficile de la Goutte-d?Or, nous n?y sommes évidemment que très favorables. Mais en l?espèce, nous avons à délibérer d?une subvention à une entreprise privée pour la mise en place d?un poste de directeur de la coopérative et d?une ingénierie industrielle.

Dans l?exposé des motifs qui nous est présenté par la Ville, il est inscrit que la rentabilité financière de la filière n?est pas encore aujourd?hui assurée mais qu?elle présente des perspectives tout à fait positives. Cette rentabilité est étroitement corrélée à la capacité de la coopérative à mettre en place justement une ingénierie industrielle, à augmenter son chiffre d?affaires de façon sensible et par-là même de démarcher, produire plus et voir ses commandes se développer.

On sait d?ores et déjà que cette activité, malgré les aides reçues entre 2014 et 2019 pour plus de 43.000 euros, n?est toujours pas rentable : en 2019, elle affichait un déficit de 13.800 euros et de 21.000 euros en 2020. Pour autant, il est indiqué que l?activité s?est fortement accentuée pendant la pandémie grâce à des commandes de masques. En 2019, le chiffre d?affaires était de 80.000 euros. En 2020, il était de 253.000 euros, soit une augmentation de plus de 300 %.

J?ai deux questions assez simples à vous poser.

La Ville a-t-elle contribué à l?achat de ces masques par sa commande publique ? Ils sont produits localement et pas importés de l?autre bout de la planète, et nous ne pouvons encore une fois qu?y être favorables, mais je voudrais quand même vous interpeller sur le caractère légal d?une aide directe à une entreprise, qui est complètement interdite.

Deuxième élément assez simple, le montant pour la création de ce poste de directeur est de l?ordre de 80.000 euros. C?est présenté comme un projet dans le projet de délibération pour 80.000 euros et on lit que cette subvention publique représente 59,29 % dudit projet. Si je comprends bien et si on monte à 100 % dudit projet, on est sur un projet à 133.000 euros. Cela voudrait dire que le poste de directeur, que la Ville subventionne pour partie ici, serait rémunéré 133.000 euros par an.

Je ne préjuge pas, Madame GABELOTAUD, mais je demande simplement à avoir un éclaircissement précis. Parce qu?un poste de directeur à 133.000 euros, je pourrais peut-être envoyer mon C.V. car je ne trouve pas cela inintéressant comme job !

Je ne vous demande pas de me lire la fiche qui a été préparée par vos services, je vous demande simplement si la Ville commande à cette société qui est en déficit et donc apporte une contribution directe qui est à la limite de la légalité, et pour le poste de directeur, que vous appelez projet dans ce projet de délibération, à 133.000 euros par an, j?espère que les charges sont comprises pour ce prix-là !

Néanmoins, au-delà des éclaircissements, nous voterons favorablement ce projet de délibération.

Je vous remercie.

Mme Laurence PATRICE, adjointe, présidente. - Merci.

Je donne maintenant la parole à M. Frédéric BADINA-SERPETTE.

M. Frédéric BADINA-SERPETTE. - Merci, Madame la Maire.

L?Ecole de la maille, Les Récupérables, Maison Château Rouge, Chaussettes Orphelines, Peulh Vagabond, l?Atelier Maurice Arnoult, voici quelques-unes des signatures qui ont émergé et qui grandissent désormais dans le 18e et au c?ur de la Goutte-d?Or. Si elles se sont épanouies là, ce n?est pas un hasard, c?est bien parce qu?il y a un foisonnement de savoir-faire et une dynamique commune.

Cette dynamique s?incarne au travers des Gouttes d?Or de la Mode & du Design et de la signature Made in Goutte d?Or. Cette signature, cette identité, nombre de petits créateurs et de petites créatrices du quartier y sont attachés. Mais pour un certain nombre, il faut réussir à produire en petite série et pouvoir répondre à des commandes conséquentes.

C?est dans cette perspective qu?un atelier coopératif a été créé en 2019, La Fabrique de la Goutte d?Or, pour donner accès aux créateurs et aux créatrices à des outils de confection mutualisés, l?atelier étant situé rue des Gardes. Cet atelier est emblématique de Paris qui entreprend pour développer une filière textile solidaire et relocalisée.

Après avoir ouvert et produit ses premières petites séries, cet atelier doit maintenant pouvoir se diversifier pour répondre à de nouveaux types de commandes, élargir son public, asseoir son modèle économique, déployer pourquoi pas un nouveau savoir-faire à l?image de celui développé à l?issue du premier confinement avec la production de masques en tissu.

Et ce n?est pas un hasard parce que, oui, à Paris, on décide de soutenir et d?accompagner ce type de filières. C?est une filière essentielle qui va dans le sens de nos politiques publiques en matière d?artisanat du textile, de développement local et d?économie sociale et solidaire. C?est une filière qui a besoin de se consolider, de changer d?échelle et de produire en plus grosse quantité, en s?ouvrant vers des nouveaux savoir-faire à l?écoute de nouveaux marchés. C?est ce que nous faisons aujourd?hui avec de nombreux acteurs dans ce domaine. Il faut l?assumer et nous l?assumons.

Cette subvention est essentielle pour que La Fabrique consolide son modèle, qu?elle recrute un cadre dédié à la direction et à l?ingénierie de production, et aussi pour qu?elle puisse entrer dans cette nouvelle phase de développement.

Je peux entendre les petits détails et les questions qui peuvent se poser. Les écologistes ont toujours été engagés auprès de cette structure dans le suivi et l?accompagnement, et nous continuerons à le faire dans les mois qui viennent pour faire en sorte que cette fabrique puisse s?épanouir comme il se doit.

Je vous remercie.

Mme Laurence PATRICE, adjointe, présidente. - Merci.

La parole est à Mme GABELOTAUD, pour la réponse.

Mme Afaf GABELOTAUD, adjointe. - Merci, Madame la Maire.

Mes chers collègues, je vous remercie de me permettre de m?exprimer sur ce formidable projet et je salue particulièrement Frédéric BADINA-SERPETTE qui, en élu de terrain, sait en reconnaître la valeur pour le développement du quartier et l?attractivité du 18e arrondissement.

Je ne referai pas l?histoire de La Fabrique de la Goutte d?Or. Pour tous ceux qui ont pu la visiter, la connaître, l?appréhender, c?est une aventure un peu particulière et merveilleuse. Mais pour vous convaincre de l?intérêt de soutenir cette coopérative, il me semble important de vous rappeler ici d?où nous partons.

Monsieur GRANIER, je vous en supplie, je vous invite - nous pourrions même y aller ensemble - à visiter cette aventure incroyable. Mais en toute sincérité, vraiment? Oui, mais en toute sincérité pour voir de l?intérieur ce qu?il s?y passe et ce que cela veut dire.

Il y a plus d?une dizaine d?années, un double constat est posé. D?abord qu?il y a à Paris une demande croissante de locaux pour des créateurs et artisans de la filière de la mode, du design et des accessoires, et des couturiers. Ensuite, il y a spécifiquement à la Goutte-d?Or une représentation d?une exceptionnelle densité des professionnels du textile et de la confection, rarissime et avec des particularités et des spécificités que l?on ne trouve nulle part ailleurs à Paris.

Une équation simple est alors faite par la Mairie du Paris et du 18e, au moment même où il s?agit de penser le développement de ce quartier en pleine rénovation, de renforcer une économie déjà existante en profitant de l?opportunité de locaux neufs chez les bailleurs, tout en captant le dynamisme d?un secteur émergent.

Sur la base de ces conditions réunies est né en 2014 le Pôle territorial de coopération économique, P.T.C.E., de La Goutte d?Or, de la Mode & du Design. Ce premier P.T.C.E. à Paris émerge grâce à l?implication de ces professionnels qui, rassemblés et avec le soutien de la Ville, arrivent à mettre autour de la table l?Etat, la Région et d?autres acteurs soutiens financiers ou d?expertise.

Le projet fait consensus pour tout le monde, c?est structurer la filière et se servir de ce moyen pour sortir certains professionnels de l?économie informelle, participer au développement de l?emploi et de l?insertion par la formation à la couture, à la langue française des couturiers, pour renforcer l?attractivité de la Goutte d?Or et structurer la gestion, et cela fonctionne. Aujourd?hui, la rue des gardes est placée sur la carte française de la confection et de la mode jusqu?à intégrer des programmes d?événements d?envergure internationale autour de la mode. Cela a été rendu possible parce que depuis 2014, nous n?avons eu de cesse collectivement de soutenir les actions du P.T.C.E.

Pour ne citer que mes collègues élus les plus récents sur le projet, Olivia POLSKI, Anne-Claire BOUX et Florentin LETISSIER, aujourd?hui le moteur économique du P.T.C.E., cette coopérative, tenue par des couturiers africains du quartier au savoir-faire reconnu, travaille sur des commandes aussi prestigieuses que celles des opéras nationaux comme de grandes maisons de couture, tout en sachant répondre aux enjeux d?urgence comme en 2020 par la confection de masques sanitaires. On était dans l?urgence et il y a eu effectivement des commandes, forcément directement de la Ville mais aussi de bailleurs sociaux et de différents satellites.

Il y a eu véritablement urgence. Je ne sais pas si vous vous rappelez, mais il n?y avait pas de masques ! Par la confection des masques sanitaires, cette coopérative a eu besoin d?un coup de pouce pour achever sa structuration et poursuivre sa croissance avant de gagner en autonomie. Cela passera nécessairement par le recrutement de compétences indispensables et par l?acquisition d?un savoir-faire particulier, celui de la fabrication de pièces en série.

A l?époque des discours sur le "Fabriqué à Paris" et la nécessité de relocaliser intra-muros des activités de production, alors que nous n?avons de cesse de promouvoir l?insertion et l?emploi local, à l?heure d?une crise mettant l?économie en berne, je vous propose d??uvrer très concrètement pour le soutien d?une seule entreprise au développement d?une filière économique d?importance à Paris, et je vous invite donc à voter ce projet de délibération.

Quant au poste, dont vous parliez tout à l?heure, celui-ci est effectivement chargé et à 80.000 euros. Je ne sais pas d?où vous sortez les 59 % et je veux bien revoir. En fait, ce n?est pas un poste de couturier mais de chef d?atelier avec différentes compétences. Nous les avons évaluées, nous avons fait un certain nombre de "benchmark" dessus et ce sont les prix actuels.

Je vous réponds juste sur ce que je sais et je vous laisserai vérifier et je laisserai vérifier?

Je vous réponds à la question, je vous dis que c?est un poste que nous avons évalué de 70.000 à 80.000 euros par an. Maintenant, sur les 59 %, peut-être s?agit-il d?une opération plus globale. Toujours est-il que ce projet était absolument fabuleux?

Effectivement, je me renseignerai et je vous répondrai, il n?y a pas de problème.

En tout cas, je vous invite à venir voir le P.T.C.E. de la Goutte d?Or?

Eh bien, pas assez, parce que je pense que vous devriez vraiment revenir, vraiment, et vous seriez passionnés.

Mme Laurence PATRICE, adjointe, présidente. - Je vous remercie.

Je mets aux voix, à main levée, le projet de délibération DAE 348.

Qui est pour ?

Contre ?

Abstentions ?

Le projet de délibération est adopté. (2021, DAE 348).

 

Décembre 2021
Débat
Conseil municipal
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