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relatif à l’expulsion des logements sociaux des membres de familles condamnés par la justice pour trafic de drogue. Vœu déposé par l'Exécutif.


 

M. Patrick BLOCHE, adjoint, président. - Nous examinons les v?ux référencés n° 62 et n° 62 bis relatifs à l?expulsion des logements sociaux des membres de familles condamnés par la justice pour trafic de drogue.

La parole est, je crois, à Nicolas JEANNETÉ pour le présenter, au nom de son groupe, le groupe Changer Paris.

M. Nicolas JEANNETÉ. - Merci, Monsieur le Maire.

Je voudrais en préambule demander l?attention et l?écoute de ce Conseil pour ne pas que mes propos soient déformés comme cela a été le cas lors de sa présentation dans le 15e arrondissement ayant provoqué de l?incompréhension, parfois même de la haine et des insultes sur les réseaux sociaux.

Il s?agit tout simplement de demander à la Ville de Paris et à la Préfecture de police d?aider les bailleurs sociaux à expulser un individu ou une famille qui a été condamnée par la justice pour trafic de drogue via son domicile et qui a donc justifié, outre l?aspect pénal, une violation grave de ses obligations locatives, entraînant de ce fait une résiliation de bail.

Je vous rappelle ici que l?on s?adresse essentiellement à ces familles, ces individus, qui font régner la terreur dans certains immeubles en s?installant dans les halls d?immeuble, en contrôlant les entrées et les sorties, demandant même dans certains cas les cartes d?identité aux visiteurs et menaçant de représailles les autres locataires en cas de dénonciation à la police.

Je demande donc que le Conseil de Paris soutienne la Ville de Paris, la Préfecture de police, le Parquet et les bailleurs sociaux dans l?exécution des décisions de justice quant à l?expulsion de leur logement social pour troubles de jouissance.

Je vous remercie.

M. Patrick BLOCHE, adjoint, président. - Merci beaucoup, Nicolas JEANNETÉ.

Je donne évidemment la parole à Ian BROSSAT, pour vous répondre.

M. Ian BROSSAT, adjoint. - Merci, Nicolas JEANNETÉ et au groupe Changer Paris, pour ce v?u.

Pour débuter, rappelons une chose simple qui devrait, je crois, réunir notre Assemblée : la tranquillité publique, la sécurité est un droit fondamental pour les habitants de nos logements sociaux. A Paris, 1 habitant sur 4 vit en logement social et il n?y a aucune raison que ces habitants, que ces habitantes aussi, subissent en permanence l?insécurité, ce qui est malheureusement parfois le cas.

Beaucoup est fait par nos bailleurs, dans nos résidences, pour que ce droit soit une réalité. Nous faisons des travaux lorsque nous constatons que l?architecture contribue parfois à ce que des poches d?insécurité se constituent. Nous faisons désormais signer systématiquement une charte des droits et des devoirs à l?ensemble des nouveaux locataires du parc social, rappelant à chacune et à chacun ses engagements et ses responsabilités. Par ailleurs, un travail fin et quotidien est mené par les bailleurs pour identifier, lorsque c?est malheureusement le cas, les fauteurs de troubles. Vous l?aurez compris, l?amélioration de la qualité de vie des locataires du parc social, leur sécurité, est une priorité des bailleurs sociaux.

Je souhaiterais également revenir sur deux dispositifs sur lesquels je travaille avec Nicolas NORDMAN, en réponse directe à votre v?u.

L?assermentation, d?abord. Il s?agit de permettre à des collaborateurs de bailleurs sociaux, notamment aux gardiens, d?obtenir le statut de garde assermenté. Désormais, les gardiens assermentés peuvent donc mettre des "prunes" aux locataires qui ne se conduisent pas correctement, et ils le font d?ailleurs régulièrement.

Deuxièmement, nous travaillons actuellement à une convention de partenariat - c?est écrit dans le v?u de l?Exécutif - entre la Ville de Paris, les bailleurs sociaux, la Préfecture de police et le Parquet de Paris. Son objectif est de travailler plus efficacement sur la prévention et de faciliter l?échange et la circulation d?informations.

Je le dis aussi : lorsque des familles sont complices, par exemple, de trafic dans un immeuble, elles n?ont pas vocation à rester dans le parc social. Je dis bien lorsqu?il est avéré que la famille est complice du "deal" qui est organisé. A ce moment-là, cela peut se traduire par un congé et cela ne me choque absolument pas. D?ailleurs, ce sont bien souvent les locataires des immeubles eux-mêmes qui nous le réclament. Les bailleurs sociaux font alors les démarches nécessaires et c?est évidemment à la justice de prendre ensuite ses responsabilités.

C?est donc le sens du v?u de l?Exécutif et je vous prie de m?excuser si j?ai été un peu long.

M. Patrick BLOCHE, adjoint, président. - Alors, vraiment, ne vous excusez pas parce que vous êtes sans doute l?un des adjoints les plus brefs qui soit !

Écoutez, je trouve qu?il manque dans cet hémicycle ce genre de témoignage. Cela peut paraître affectueux, j?en suis sincèrement désolé, mais c?est objectivement un constat pour tout président de séance - en l?occurrence, moi, au moment où je vous parle.

Compte tenu de cet échange constructif, acceptez-vous, Nicolas JEANNETÉ, de retirer le v?u n° 62 au bénéfice du v?u n° 62 bis de l?Exécutif ?

M. Nicolas JEANNETÉ. - Je suis ravi de la réponse de Ian BROSSAT. Je retire donc mon v?u.

Je vous remercie.

M. Patrick BLOCHE, adjoint, président. - Merci beaucoup.

Je crois qu?Aminata NIAKATÉ souhaitait s?exprimer sur le v?u n° 62 bis de l?Exécutif ? Explication de vote au nom du groupe GEP ?

Mme Aminata NIAKATÉ. - Je vous remercie, Monsieur le Maire.

Chers collègues, je vous avoue que j?ai été assez étonnée, pour ne pas dire choquée, de découvrir ce v?u du groupe Changer Paris alors même que la trêve hivernale vient à peine de commencer.

Ce v?u demande l?expulsion de leurs logements sociaux, non seulement des personnes condamnées pour trafic de stupéfiants, ce qui peut se concevoir exclusivement après un débat judiciaire, mais également l?expulsion de tous les membres de leur famille quand bien même ils n?auraient pas été directement condamnés pour les faits incriminés, ce qui me semble en soi très contestable.

J?ai plusieurs difficultés avec ce v?u et même le v?u de l?Exécutif me paraît problématique. Le seul titre du v?u me paraît l?être : ce v?u évoque les familles condamnées par la justice comme si elle était un seul et même justiciable jugé et condamné en bloc par la justice, en contradiction totale avec les principes d?individualisation et de personnalisation des peines. On n?est pas coupable par ricochet des infractions commises par les membres de sa famille, et heureusement !

Ensuite, ce v?u demande à la Maire de Paris de faciliter les expulsions des personnes condamnées lorsqu?elles sont reconnues comme liées au trafic. Je vous rappelle que seules les juridictions peuvent prononcer des condamnations pénales ou des expulsions. Ce n?est pas à la Ville toute seule ou au Préfet de l?évaluer ou de les faciliter.

Autre difficulté d?un point de vue pratique : ce v?u demande l?accès aux données du casier judiciaire par les bailleurs sociaux - c?est ce que cela suppose. Ce sont des données personnelles extrêmement sensibles, protégées par la loi Informatique et libertés qui proscrit ce type de collecte.

Pour conclure mon propos, vous indiquez que le meilleur moyen de sortir un délinquant de la spirale des trafics de stupéfiant n?est certainement pas de mettre les familles entières à la rue, interrompre par la même occasion la scolarité du petit frère ou de la petite s?ur pour qui, peut-être, tout se passe bien. Je doute fort que cette politique soit le meilleur remède pour lutter contre ces trafics. Le logement est au contraire un vecteur d?insertion et une garantie de représentation en justice.

Vous l?aurez compris, nous n?avions pas prévu de voter le v?u du groupe Changer Paris, pas plus que nous ne voterons le v?u de l?Exécutif dont la réponse s?inscrit, à devenir un peu cynique, quasiment dans la même veine que celui du groupe Changer Paris.

M. Patrick BLOCHE, adjoint, président. - Merci, Aminata NIAKATÉ.

Je mets donc aux voix, à main levée, le projet de v?u référencé n° 62 bis déposé par l?Exécutif.

Qui est pour ?

Contre ?

Abstentions ?

Très bien, le projet de v?u est donc adopté. (2021, V. 337).

V?u déposé par le groupe Changer Paris

 

Novembre 2021
Débat
Conseil municipal
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