retour Retour


 

(La séance, suspendue à douze heures cinquante minutes, est reprise à quatorze heures trente minutes, sous la présidence de Mme la Maire de Paris).

Mme LA MAIRE DE PARIS. - Mes chers collègues, Monsieur le Préfet de police, Mesdames et Messieurs, je vous propose de prendre place. Examen des questions d'actualité.

Mme LA MAIRE DE PARIS. - Nous entamons donc notre séance de questions d?actualité.

Je vous demande de fermer la porte, s?il vous plaît. Merci. I - Question d'actualité posée par le groupe Communiste et Citoyen à Mme la Maire de Paris relative à la dégradation de l'offre de transports pour les bus, métro et RER.

Mme LA MAIRE DE PARIS. - La première question d'actualité est posée par le groupe Communiste et Citoyen.

Je crois que c?est Jean-Philippe GILLET qui pose cette question.

M. Jean-Philippe GILLET. - Merci, Madame la Maire.

Chers collègues, nous observons depuis plusieurs semaines un certain retour à la normale en matière de mobilité : les épisodes de confinement sont pour l?instant derrière nous, le télétravail se fait plus rare et des millions de Franciliens se déplacent à nouveau quotidiennement dans Paris.

Pour autant, tout n?est pas revenu à la normale en matière d?offre de transports. Lors de son conseil d?administration du 11 octobre dernier, "I.D.F. Mobilités", instance présidée par la droite régionale, a ainsi décidé de réduire pour une durée indéterminée les fréquences de 13 lignes de métro, de 165 lignes de bus dont plus d?un tiers dessert Paris, de 6 lignes de R.E.R. et de transiliens, ainsi que de 4 lignes de tramway. Toute la région est concernée par cette décision, Paris en premier lieu.

Mme PÉCRESSE justifie cette décision en s?appuyant sur la fréquentation observée avant l?été 2021, mais il suffit d?emprunter les transports en commun aux heures de pointe ou de regarder certaines vidéos partagées sur les réseaux sociaux pour se rendre compte de la saturation des bus, métros et R.E.R. Résultat : pannes et incidents se succèdent sans cesse.

Depuis quelques jours, les contaminations au Covid repartent malheureusement à la hausse. Le bon sens voudrait donc que l?offre de transports augmente pour protéger les usagers et leur permettre de respecter les gestes barrières. L?offre réduite de transports se répercute aussi sur le trafic routier et la qualité de l?air. Conséquence directe des difficultés à se déplacer en transports en commun, le trafic routier atteint des niveaux records en Ile-de-France, parfois supérieurs aux chiffres observés avant le confinement.

Par ailleurs, cette décision de réduction durable de l?offre s?inscrit dans un contexte global où la politique menée par Mme PÉCRESSE fragilise et déstabilise les transports en Ile-de-France. Cette politique est celle de la disparition des tickets physiques qui pourrait se faire au détriment des sorties scolaires et pénaliserait les usagers les moins à l?aise avec le numérique. C?est aussi celle des travaux inutiles et dévastateurs du Charles-de-Gaulle Express ; celle également de la mise en concurrence de nos réseaux de bus au détriment des agents et des usagers.

Madame la Maire, nos questions sont multiples tant les choix de la présidence d?"I.D.F. Mobilités" en matière de réorganisation d?offres de transport sont importants.

Comptez-vous mettre en place la gratuité pour les sorties scolaires, car seule cette gratuité pourra permettre à tous les écoliers de participer à l?ensemble de l?offre scolaire parisienne ?

Madame la Maire, porterez-vous la voix des Parisiennes et Parisiens au sein d?"I.D.F. Mobilités" afin de revenir à une offre de transport à 100 % pour les bus, métros et R.E.R. ? Je vous remercie.

Mme LA MAIRE DE PARIS. - Merci à vous, Monsieur GILLET.

Je donne la parole à David BELLIARD, pour vous répondre.

M. David BELLIARD, adjoint. - Merci, Madame la Maire, Monsieur le Préfet.

Merci, Monsieur GILLET, cher collègue, pour votre question importante. "I.D.F. Mobilités" et sa présidente ont en effet décidé de maintenir une offre réduite de transports en commun sur l?ensemble de ses réseaux en 2021 et en 2022 pour, je cite : "s?adapter à des fréquentations en baisse par rapport à la période pré-Covid", et j?ajoute d?ailleurs pour ma part : réduire la voilure pour faire des économies.

Ainsi, la réduction peut être significative, vous l?avez rappelé : aujourd?hui, 53 % des bus circulent en mode "vacances scolaires", ce qui fait quand même 165 lignes de bus ; des métros circulent à 90 % de leur capacité ; ou encore, un niveau d?offre pour le tramway dégradé à hauteur de 94 % en moyenne.

Je le redis ici : cette décision a été prise contre l?avis des administrateurs représentants de la Ville. En effet, elle pénalise d?abord les usagères et les usagers qui pâtissent d?un service dégradé tout en payant le même prix qu?avant la crise Covid. En outre, cette décision est une aberration à un moment où malheureusement, et vous l?avez rappelé, les indicateurs de l?épidémie de Covid repartent à la hausse. L?impératif de santé publique exigerait au contraire une fréquence accrue et des amplitudes horaires élargies pour justement permettre au maximum le respect des distanciations sociales.

La réduction pendant deux ans de l?offre de transports en commun n?intègre d?ailleurs pas le retour progressif à la normale prévu par "I.D.F. Mobilités" elle-même. Pour 2022, l?autorité organisatrice nous annonce un niveau de fréquentation de 90 % lorsqu?il est à 76 % environ aujourd?hui.

Pour toutes ces raisons, nous demandons un retour à l?offre à 100 % au même niveau que celle d?avant la crise Covid.

Enfin, il faut le dire : cette décision marque aussi et surtout une incapacité de Valérie PÉCRESSE et de la majorité régionale à anticiper et à gérer "I.D.F. Mobilités", aujourd?hui plombée par d?énormes difficultés financières sans précédent.

Alors, oui, la crise Covid, du fait d?une baisse de la fréquentation, a entraîné des pertes estimées à 4 milliards d?euros. Non, Valérie PÉCRESSE n?a pas pris la mesure du problème ni anticipé les effets de la désaffection des usagères et des usagers pour les transports en commun pendant cette crise. Nous sommes aujourd?hui contraints de négocier - pour ne pas dire quémander ! - des avances remboursables à l?Etat, au coup par coup, ce qui augmente de facto l?endettement d?"I.D.F. Mobilités".

D?ailleurs, je constate que l?opposition municipale n?aura pas eu un mot sur l?explosion de cet endettement. Comme quoi, pour eux, toutes les dettes ne se valent pas.

Résultat : aujourd?hui, il n?est pas exclu que Valérie PÉCRESSE fasse porter une partie du remboursement de cette dette par les usagers eux-mêmes, ce qui serait inacceptable !

A ce jour, enfin, aucun travail prospectif sérieux n?a été porté au sein du conseil d?administration d?"I.D.F. Mobilités" intégrant la nouvelle donne climatique, les enjeux de santé publique, ni d?ailleurs les nouveaux modèles de mobilité qui se profilent depuis quelques années : développement du vélo et du télétravail, renforcement ou création de zones à faibles émissions ou à trafic limité. Nous sommes au c?ur d?une transformation profonde des usages en termes de mobilité où les transports en commun sont au centre, ce qui constitue à ce jour un angle mort des décisions prises par la présidente d?"I.D.F. Mobilités".

Enfin, juste un petit point et un petit mot sur la raréfaction des tickets papiers. Je partage en partie vos préoccupations. Cela pose un certain nombre de difficultés pour les personnes qui n?ont pas de téléphone, qui sont peu à l?aise avec les outils numériques ou qui souhaitent tout simplement conserver des tickets papier. En tout cas, soyez assurés que nous serons attentifs à ce que puissent être achetés à l?unité des tickets papiers. Ce sera toujours le cas dans les stations de métro afin de permettre, par exemple, aux enfants et aux accompagnateurs d?en bénéficier pour les sorties scolaires. Je vous remercie.

Mme LA MAIRE DE PARIS. - Merci à vous, David BELLIARD. Excellente réponse. C?est très préoccupant car, en plus de tout ce qui a été dit, il s?agit aussi d?un problème de pollution atmosphérique puisque le report se fait en grande partie sur la route. Nous voyons bien que ce n?est pas possible. Ce n?est pas le chemin que doivent prendre les grandes métropoles en Europe ou dans le monde et ce n?est d?ailleurs pas du tout celui qu?elles prennent. Nous sommes face à une très grande difficulté dans cette gestion d?"I.D.F. Mobilités", dans laquelle nous siégeons. C?est donc bien un sujet qui relève aussi de cette Assemblée et qui concerne les Parisiennes et Parisiens, soit 2,2 millions d?habitants concernés par cette offre de transport. Monsieur GILLET, je vous redonne la parole.

M. Jean-Philippe GILLET. - Au nom du groupe Communiste et Citoyen, j?ai peu à ajouter à ce que vous venez de dire, Madame la Maire et Monsieur BELLIARD.

Un mot toutefois pour insister, au nom du groupe Communiste, sur ce que rappelaient ce matin dans un autre débat, Barbara et Nicolas : nous sommes très attentifs au fait que le service public et les statuts du personnel sont une réponse à toute la problématique que nous venons d?évoquer. Nous serons donc d?autant plus attentifs à la possibilité de lutter contre la privatisation éventuelle des services de bus, comme nous l?avons rappelé hier.

Mme LA MAIRE DE PARIS. - Merci beaucoup, Monsieur GILLET. II - Question d'actualité posée par le groupe "Indépendants et Progressistes" à Mme la Maire de Paris relative à la gouvernance de Paris.

Mme LA MAIRE DE PARIS. - Je donne la parole, au groupe "Indépendants et Progressistes", pour la question d?actualité posée par Mme BERTHOUT.

Mme Florence BERTHOUT, maire du 5e arrondissement. - Madame la Maire, Monsieur le Préfet, l?actualité jette une lumière crue sur votre manière d?administrer la Ville, ou peut-être d?ailleurs de ne pas l?administrer.

Le débat d?orientation budgétaire d?hier l?a bien montré : aucune boussole ne semble appuyer votre action. Il n?y a plus de repères !

Les élus demandent ainsi depuis de très longs mois un plan d?investissement pour la mandature. Où est ce plan, pourtant vital pour piloter une ville deux fois plus petite que Marseille, mais deux fois plus peuplée, et qui représente chaque année plus d?un tiers de la richesse nationale ? Où est ce plan, alors même qu?il est réclamé, comme l?a montré le débat budgétaire d?hier, par les élus de tous bords ?

Force est de constater, Madame la Maire, que ce plan n?existe pas et cela se voit. La Ville est deux fois plus endettée aujourd?hui qu?à votre arrivée en 2014 et chacun peut constater, hélas, la désorganisation patente de la gestion de la Ville.

Cette désorganisation, particulièrement criante dans les services qui opèrent sur l?espace public, complique chaque jour les conditions de vie des Parisiennes et des Parisiens. Vous n?avez d?ailleurs pas procédé à la réforme de l?administration parisienne que vous aviez pourtant annoncée, ni prévu les économies de fonctionnement indispensables.

Dans ces conditions, le groupe "Indépendants et Progressistes", comme d?autres collègues d?ailleurs, craint que le Pacte parisien de proximité que nous appelions de nos v?ux ne contribue pas à l?amélioration de la situation.

Comment comptez-vous gouverner la Ville sans plan d?investissement précis et sans vision claire d?une réorganisation, nécessaire à la bonne gestion de la Ville ?

Pourquoi donner la priorité, dans un tel contexte, à de gros projets d?investissement au détriment d?investissements, certes plus mineurs, mais qui se feraient en faveur de l?amélioration de la qualité de vie des Parisiennes et des Parisiens ?

Aujourd?hui, à Paris, les grands projets sont une aberration financière et écologique. Pourquoi, malgré les promesses de campagne et en dépit des annonces, densifier et continuer à bétonniser Paris à l?heure du réchauffement climatique ?

De grands projets dispendieux et hors de propos dans un contexte d?urgence climatique extrême mettent en péril les tissus urbains et leur vitalité urbaine : la Tour Triangle, le projet Trocadéro-Tour Eiffel-Champ-de-Mars, initialement estimé à 70 millions d?euros et coûtant désormais plus de 110 millions d?euros, ou encore la Z.A.C. "Austerlitz", dont il faut rappeler que c?est quand même 50.000 mètres carrés de bureaux et 20.000 mètres carrés de commerces pour seulement 11.500 mètres carrés de logements. A ce propos, j?ajoute d?ailleurs que, grâce à une opposition transpartisane, nous avons pu mettre à mal et suspendre ce projet.

Paris est une capitale qui rayonne bien au-delà de ses frontières, mais Paris est également une petite ville en termes de superficie et extrêmement dense. Sa gouvernance doit aujourd?hui être réinterrogée et orientée pour répondre aux défis qui l?attendent. Il faut privilégier une gouvernance de Paris contribuant à recoudre la ville au territoire francilien - avec lequel vous entretenez hélas, comme nous venons de le voir, des relations toujours conflictuelles - en construisant davantage de continuité géographique, en privilégiant des aménagements durables : végétalisation, investissements dans les équipements sportifs, culturels et commerces.

Mme LA MAIRE DE PARIS. - Il faut conclure, Madame BERTHOUT.

Mme Florence BERTHOUT, maire du 5e arrondissement. - Face à ce constat, quand allez-vous changer de gouvernance ?

Merci de votre écoute.

Mme LA MAIRE DE PARIS. - Merci beaucoup, Madame.

Pour vous répondre, la parole est à Emmanuel GRÉGOIRE.

M. Emmanuel GRÉGOIRE, premier adjoint. - Merci beaucoup, Madame la Maire.

J?avoue avoir eu un peu de mal à comprendre la question, mais j?ai vu que la fin finissait par un point d?interrogation. Du coup, vous comprendrez ma difficulté à répondre à autant de sujets abordés de la même façon.

D?abord, je vous le dis, Madame la Maire du 5e arrondissement, la façon dont vous exprimez un certain nombre de divergences sur les sujets et la façon dont l?Exécutif parisien les mène n?est pas tout à fait conforme aux échanges que nous avons au quotidien. Nous travaillons notamment sur les investissements qui concernent votre arrondissement, sur lesquels je crois avoir compris que nous avons bien travaillé collectivement.

Vous évoquez les sujets financiers. Ils ont été abondamment abordés hier lors du débat d?orientations budgétaires. Vous nous interrogez sur notre boussole. Je vous dirais qu?en démocratie, elle est simple : c?est le programme de mandature que nous mettons en ?uvre méthodiquement, et ce en dépit des circonstances exceptionnellement complexes, y compris dans leurs dimensions financières, que nous avons connues avec la crise sanitaire que nous traversons.

Petit rectificatif, mais j?imagine que c?est une erreur de langage de votre part : la ville ne pèse pas un tiers dans le P.I.B. Il s?agit de la région. La ville, elle, pèse 10 %. C?était une petite erreur factuelle que je souhaitais corriger.

Sur la gouvernance, pardon là aussi, mais la défiance dont vous témoignez dans votre expression sur le pacte de proximité ne me paraît pas conforme à nos échanges, mais nous aurons l?occasion d?y revenir pendant l?examen des travaux de la 5e Commission.

Enfin, vous faites des raccourcis dont je ne comprends pas exactement le sens, si ce n?est de vous rappeler la proximité avec le Gouvernement. Le projet Austerlitz - dont vous avez fait le seul exemple nommément cité des grands projets soi-disant aberrants - est un projet de l?Etat, par l?Etat, pour l?Etat, sur un permis délivré par le Préfet de Région. Excusez-moi, mais adressez-vous au Gouvernement !

Et pardon de le dire : en l?occurrence, sur ce projet, nous manifestons d?un soutien au Gouvernement un tout petit peu plus exigeant que vous n?avez l?air de le faire dans l?extrême caricature de vos propos en jetant cela en l?air, comme si c?était mal. Je ne savais pas que votre sensibilité politique considérait que les bureaux, c?est mal ; que le plein-emploi, c?est mal. En l?occurrence, sur les 50.000 mètres carrés que vous citez, nous parlons d?un seul preneur en totalité sur le bloc. De qui parle-t-on ? De l?Agence française de développement?

Si l?on en vient à faire le procès de toute chose, y compris des services publics de politique de développement et de rayonnement de notre pays dans le monde, je vais vous le dire : nous sommes du côté de l?attractivité, nous sommes du côté des intérêts de la Nation, nous sommes du côté de l?intérêt des Parisiens.

Je pensais que cela était un peu plus largement partagé sur nos bancs.

Mme LA MAIRE DE PARIS. - Merci beaucoup, Emmanuel GRÉGOIRE.

Madame BERTHOUT, vous pouvez reprendre la parole, pour deux minutes.

Mme Florence BERTHOUT, maire du 5e arrondissement. - Il y a un grand "scoop", cet après-midi : la Maire de Paris s?appelle Emmanuel GRÉGOIRE ! Je ne savais pas, cher Emmanuel GRÉGOIRE, que vous l?étiez. Par ailleurs, et je ne m?en cache pas, j?ai plutôt du plaisir à travailler avec vous. Je ne suis pas toujours d?accord, mais votre réponse est franchement hors de propos. Encore une fois, dans une assemblée démocratique, quand une question s?adresse au n° 1, il serait bon que le n° 1 y réponde.

Maintenant, Monsieur le premier adjoint, vous m?avez un peu attaquée sur le projet Austerlitz. Cela ne vous aura pas échappé : il s?avère que je suis assez indépendante. Vous regarderez mes votes. J?ai toujours été hostile à ce projet car je considère qu?il est totalement contraire aux exigences d?un réchauffement climatique extrême - tout le temps, "ne varietur" ! - comme j?étais hostile à la Tour Triangle.

Juste une chose : je n?ai toujours pas d?assurances, Monsieur le premier adjoint, comme les autres maires, sur les moyens financiers que vous allez mettre en face des projets sur lesquels je veux bien croire, à travers nos échanges, que vous les soutenez plutôt, mais vous n?êtes pas encore le Maire de Paris.

J?ai besoin d?avoir un plan d?investissement de la mandature. Je ne vous citerai qu?un exemple : je demande depuis six ans que nous puissions débitumer et végétaliser les grands boulevards. Allez-vous y consacrer des moyens dans le P.I.M. ? Voilà un beau projet !

Evidemment, le débat est plus large que ce qui se passe dans le 5e arrondissement mais, en tant que maire du 5e arrondissement, je n?ai toujours pas d?assurances que les projets vont être financés. Merci.

Mme LA MAIRE DE PARIS. - Très bien. III - Question d'actualité posée par le groupe "Génération.s" à Mme la Maire de Paris relative au contrôle du "pass" sanitaire dans les bibliothèques parisiennes.

Mme LA MAIRE DE PARIS. - Nous passons à la question d'actualité suivante posée par Nathalie MAQUOI, présidente du groupe "Génération.s".

Non ?

Allez-y.

Mme Mélody TONOLLI. - C?est Mélody TONOLLI, pour le groupe "Génération.s". Merci, Madame la Maire.

Madame la Maire, chers collègues, plusieurs mois après la réouverture des lieux de culture, les personnels des bibliothèques et médiathèques de la Ville de Paris ont constaté une importante baisse de fréquentation de leurs établissements, tous publics confondus. Ils ont par ailleurs interpellé à ce sujet par courrier en octobre dernier Carine ROLLAND, adjointe en charge de la Culture.

Ainsi, 7 bibliothécaires sur 10 constatent une baisse de la fréquentation dans leurs rayons par rapport à 2020 depuis l?instauration du "pass" sanitaire dans les lieux accueillants du public, selon une enquête menée par l?"Association des bibliothécaires de France" et publiée en octobre dernier. Cette même enquête relève que près de 80 % des professionnels constatent une baisse de la fréquentation dans les bibliothèques, en grande partie liée à la demande de présentation du "pass" sanitaire à l?entrée des bibliothèques et médiathèques. Il est à craindre un impact durable sur la fréquentation de nos établissements avec un éloignement à long terme de certains publics et une détérioration des relations de confiance construites au quotidien avec les publics.

En outre, la mise en place du "pass" sanitaire à l?entrée des bibliothèques crée une inégalité d?accès à un service public, notamment pour les publics les plus précaires ou isolés, et ce, à rebours des valeurs que nous défendons : un service public en accès libre gratuit, ouvert à toutes et tous, sans discrimination et sans justification de l?usage qui en est fait.

Plusieurs communes ont d?ailleurs permis l?accès sans contrôle du "pass" dans leur bibliothèque, s?appuyant sur l?article 1 du décret 2021-955 indiquant que la présentation du "pass" sanitaire n?est pas obligatoire pour les personnes "accédant à ces établissements pour des motifs professionnels ou à des fins de recherche". Car les bibliothèques sont des lieux de savoir tout autant que des lieux de culture et de loisir. Elles sont des ressources indispensables tout au long de la vie pour accompagner à l?éducation à tous les âges de la vie, pendant la scolarité et au-delà, pour continuer à s?instruire et à se former gratuitement et sans condition.

Considérant que le contexte sanitaire et les évolutions du virus nous poussent à avoir une réflexion qui intègre sur le long terme l?adaptation et la vie avec le Covid, et qu?il n?y a pas eu à ce jour de contamination avérée au sein des bibliothèques dont l?accès est aussi conditionné aux gestes barrières et au port du masque, les élus "Génération.s" souhaiteraient que soient précisées les dispositions envisagées par la Ville de Paris pour un meilleur accueil du public dans les bibliothèques parisiennes dans le respect du cadre sanitaire législatif et réglementaire actuellement en vigueur. Merci.

Mme LA MAIRE DE PARIS. - Merci à vous, Mélody TONOLLI.

Je donne la parole à Carine ROLLAND, pour vous répondre.

Mme Carine ROLLAND, adjointe. - Merci, Madame la Maire.

Merci, chère Mélody TONOLLI, chère collègue, vous l?avez dit, les bibliothèques sont des lieux culturels essentiels. Nous ne le redirons jamais assez.

Les soixante établissements de lecture publique parisiens s?inscrivent pleinement, je crois, dans les recommandations du manifeste de l?Unesco daté de 1994 qui qualifie ces lieux de "force vivante" de l?éducation et de la culture.

Leur donner un cadre législatif protecteur est aussi l?objet d?une proposition de loi, actuellement portée par la sénatrice Sylvie ROBERT, qui s?appuie sur trois grands principes : la liberté d?accès, la gratuité et le pluralisme des collections.

Ce que nous pouvons dire, c?est que Paris assume pleinement et fièrement sa mission avec probablement le réseau de bibliothèques publiques le plus dense au monde.

Bien sûr, ces lieux, ce réseau évolue et n?existe que grâce aux équipes qui le font vivre. Je tiens ici à remercier vivement toutes les équipes pour tout ce qu?elles font au quotidien, pour tout ce qu?elles ont fait pendant ces longs mois où la culture était en grande partie empêchée. Leur rôle a été fondamental, fonctionnant comme des sentinelles dans la ville, permettant d?accéder aux ouvrages en prêt/retour, faisant également preuve de capacités d?adaptation immenses, notamment vis-à-vis de ce que le numérique permet de faire aujourd?hui.

Alors, où en sommes-nous actuellement ?

Du fait de l?instauration du contrôle du "pass" sanitaire, les bibliothèques doivent effectivement affecter en permanence au moins un agent pour ce contrôle. Une majorité des bibliothèques ont aussi dû adapter leurs horaires d?ouverture. Et oui, force est de constater que les fréquentations s?en ressentent, du fait de l?application du contrôle du passe sanitaire.

Lors du dernier Conseil de Paris, j?avais eu l?occasion de partager avec vous mon incompréhension face à l?obligation de demander le contrôle du "pass" sanitaire aux 12-17 ans à l?entrée des bibliothèques. Cela contrevient à l?accessibilité universelle que je viens d?évoquer et c?est aussi une incohérence avec la non-présentation du "pass", notamment pour les activités scolaires et périscolaires.

Néanmoins, nous respectons la loi.

Nous en échangeons au quotidien, avec les directrices et directeurs de bibliothèque. Ils m?ont effectivement écrit en octobre et je leur ai répondu. Les instances de dialogue social se tiennent très régulièrement et la direction des Affaires culturelles échange avec les organisations syndicales au quotidien. Nous avons également interpellé à la fois le cabinet de la Ministre de la Culture et la D.R.A.C. pour que la mesure concernant, en tout cas, les 12-17 ans soit réenvisagée. Telle est notre position sur le fond.

Néanmoins, il me faut la tempérer aujourd?hui, du fait que nous sommes face à ce qui ressemble à une reprise de l?épidémie, en tout cas à une forte hausse de la contamination ces jours-ci. C?est pourquoi il nous incombe bien sûr de respecter la loi?

Mme LA MAIRE DE PARIS. - Il va falloir conclure.

Mme Carine ROLLAND, adjointe. - Je termine.

? et, en la circonstance, de surseoir à cette demande de levée du contrôle du "pass" pour les plus jeunes, tant il est de notre devoir de protéger les équipes comme le public. Je vous remercie.

Mme LA MAIRE DE PARIS. - Merci beaucoup.

Mélody TONOLLI, souhaitez-vous reprendre la parole ?

Mme Mélody TONOLLI. - Merci beaucoup pour ces éléments de réponse. Je comprends que l?on reste extrêmement vigilant dans la période, c?est en effet essentiel.

Cela étant, malheureusement, je crois que nous allons devoir vivre avec ce virus pendant un certain temps et qu?il nous faut réussir à trouver des cadres permettant cet accès à la culture et au service public, même quand il y a des périodes de reprise du virus. Sans mettre des vies en danger, nous sommes évidemment d?accord, mais je rappelle tout de même que l?on garde son masque tout du long après être entré dans une bibliothèque. Il y a également les gestes barrières. Il me semble donc qu?il y a un chemin, une voie possible, pour permettre cet accès et éviter une discrimination des publics. Merci.

Mme LA MAIRE DE PARIS. - Merci. C?est le sens de l?action qui nous guide et des décisions que nous prenons et que nous adaptons à ce contexte très mouvant. Nous sommes complètement dans l?orientation que vous venez de poser et sur laquelle Carine ROLLAND vous a répondu. IV - Question d'actualité posée par le groupe MoDem, Démocrates et Ecologistes à Mme la Maire de Paris relative à l'état des lieux de la mise en ?uvre de la loi du 6 août 2019.

Mme LA MAIRE DE PARIS. - Nous passons à la question d'actualité posée par Mme Maud GATEL, au nom du groupe MoDem, Démocrates et Ecologistes.

Mme Maud GATEL. - Merci.

Madame la Maire, la loi du 6 août 2019 relative à la transformation de la fonction publique est le fruit d?une année entière de concertation avec les neuf organisations syndicales et les représentants des employeurs des trois fonctions publiques. Cette loi contient d?importants leviers de modernisation, parmi lesquelles la portabilité du compte personnel de formation en cas de mobilité ou encore la suppression du jour de carence pour les femmes enceintes. Ce texte prévoit également de mettre fin aux pratiques dérogatoires à la durée légale du travail dans un souci d?équité et de meilleurs services rendus au public.

Depuis le vote de la loi, 80 % des communes et intercommunalités ont délibéré afin de l?appliquer, comme la loi le prévoit, au 1er janvier 2022. Parmi ces villes, on peut citer Rennes, Nantes, Montpellier, Toulouse, Pau ou encore Bordeaux. Mais ce n?est toujours pas le cas de Paris. Or, la question des 1.607 heures n?est pas un sujet nouveau. Bien avant le vote de la loi, en octobre 2017, la Ville avait déjà été rappelée à l?ordre par la Chambre régionale des comptes qui estimait à près de 74 millions d?euros le coût du temps de travail réduit à la Ville de Paris. Les personnels de la Ville ?uvrent au quotidien pour les Parisiens. Leur rôle est au c?ur du déploiement des politiques publiques.

Alors que ce nouveau cadre législatif constituait une réelle opportunité de renforcer le dialogue social à la Ville, il n?en a rien été. Les discussions, sommaires, ne se sont ouvertes que début 2021, soit dix-huit mois après le vote de la loi - un dialogue social bâclé, centré sur la seule question du temps de travail. Or cette période aurait dû être mise à profit pour ouvrir un nouveau chapitre du dialogue social, assortir les discussions sur le temps de travail de négociations sur l?organisation du travail, source de qualité de vie au travail, d?égalité femmes-hommes, de pénibilité, de revalorisation des carrières et des salaires pour renforcer l?attractivité de la fonction publique parisienne.

Saisi par le Préfet, le tribunal administratif a suspendu l?exécution de votre délibération estimant qu?il existait un doute sérieux quant à la légalité de ce texte. C?est une décision inédite et extrêmement grave. Or, la semaine dernière, vous avez notifié au Préfet que vous ne feriez rien. Nous risquons donc d?arriver à une situation de flou total, une loi en vigueur et à respecter, une incertitude totale pour les agents.

Madame la Maire, nos questions sont simples. Alors que vous avez entamé un bras de fer avec l?Etat, sur fond de campagne présidentielle, comptez-vous continuer à jouer la montre aux dépens des personnels et du service rendu aux Parisiens ?

Alors que la réunion du comité technique central du 28 octobre dernier a été annulée, où en êtes-vous dans les discussions avec les syndicats ?

Globalement, Paris sera-t-elle la seule ville de France à ne pas respecter la loi au 1er janvier 2022 ?

Je vous remercie.

Mme LA MAIRE DE PARIS. - Merci à vous.

L?excellent Antoine GUILLOU a la parole pour vous répondre.

M. Antoine GUILLOU, adjoint. - Merci beaucoup, Madame la Maire.

Madame la députée Maud GATEL, je vous remercie pour votre interpellation qui me donne l?occasion de revenir encore une fois sur ce sujet important du temps de travail. Sur ce sujet, la Maire de Paris et l?Exécutif ont indiqué à plusieurs reprises deux choses.

D?une part, notre opposition - l?opposition de la majorité municipale - à ce qui est pour nous une régression, c?est-à-dire l?augmentation du temps de travail imposée par cette loi. Mais d?autre part, et je crois qu?il n?y a aucun doute sur le sujet, notre loyauté républicaine qui nous conduira évidemment à appliquer la loi. C?était d?ailleurs l?objet de la délibération - je pense que vous étiez là - qui a été votée au Conseil de Paris de juillet. Nous faisons donc partie des villes qui ont délibéré dans les délais pour nous mettre en conformité avec cette loi qui nous est imposée.

Le Préfet a décidé - en tout cas, c?est lui qui a signé le courrier - de déférer au tribunal administratif deux dispositions de notre délibération. L?une porte sur la date d?entrée en vigueur, qui nous semble être une disposition de bon sens, pour quelques centaines d?agents de la DASCO en lien avec le calendrier scolaire. Malheureusement, le bon sens n?est pas toujours la chose la mieux partagée du monde. La deuxième disposition contestée consiste à attribuer aux agents de la Ville trois jours de R.T.T. en utilisant le levier des sujétions, qui est un levier permis par la réglementation. C?est donc celui que nous avons utilisé et c?est la seule disposition qui est, au fond, désormais contestée - à notre grande surprise, puisque la Ministre de la Fonction publique elle-même nous avait encouragés à l?utiliser dans un courrier d?avril dernier !

En l?occurrence, nous respecterons de toute façon la loi. Aujourd?hui, c?est uniquement une décision en référé du tribunal administratif qui a été prise. Nous avons fait appel de cette décision. Nous continuerons dans l?intervalle à échanger avec les organisations syndicales. La décision du tribunal administratif, au fond, est prévue au premier trimestre 2022.

En tout cas, contrairement à ce que les réactions outrancières de la Ministre de la Fonction publique que j?ai pu entendre pouvaient à tort laisser penser, la Ville n?a jamais écrit nulle part qu?elle ne respecterait pas la loi pour la bonne raison qu?elle le fera, tout en cherchant à limiter au maximum l?impact de la loi sur ses agents, comme nous souhaitons le faire, dans le cadre du dialogue social.

Contrairement à la méthode du Gouvernement, le dialogue social n?est, pour nous, pas uniquement un mot que nous employons à tort et à travers. Il ne s?agit pas juste de faire passer la pilule, c?est-à-dire d?écrire dans la loi le résultat de ce que doit être le dialogue social, à savoir 1.607 heures, et de contraindre l?ensemble des leviers en réduisant toute autonomie de gestion aux collectivités locales. Dans ce cadre, le dialogue social ne peut guère que se résumer à tenter de faire passer pour des avancées, comme vous venez de le faire, ce qui sont pour les fonctionnaires territoriaux des régressions.

C?est sans doute pour cela que l?ensemble des organisations syndicales se sont opposées à cette loi au niveau national, vous avez omis, je crois, de le rappeler.

Mme LA MAIRE DE PARIS. - Merci beaucoup, cher Antoine GUILLOU.

Madame GATEL, vous pouvez reprendre la parole.

Mme Maud GATEL. - Je remercie Antoine GUILLOU de sa réponse. Si vous considérez que supprimer le délai de carence pour les femmes enceintes est une régression sociale, je pense que nous n?avons effectivement pas tout à fait la même vision des choses.

Par ailleurs, on parle quand même de trois jours de sujétion qui sont le c?ur du n?ud du problème. Vous ne m?avez pas répondu pour savoir concrètement comment les choses se feront au 1er janvier prochain. Si vous vous engagez, et je vous en remercie - cela me paraît tout à fait républicain -, à faire en sorte de respecter la loi au 1er janvier 2022, qu?en sera-t-il concrètement pour les personnels ? Quelle sera, à partir du 1er janvier 2022, l?organisation du temps de travail ?

Je voudrais quand même dire que de nombreuses collectivités locales - je citerai simplement la ville de Montpellier - ont assorti cette discussion relative au temps de travail de réelles améliorations dans le cadre de l?organisation du temps de travail, d?une part, mais également des conditions de revalorisation salariale. A partir du 1er janvier 2022, les catégories C verront leur rémunération revalorisée à l?initiative du Gouvernement. Je pense que nous pouvons tous nous en réjouir. Simplement, à Montpellier, on a assorti l?augmentation du temps de travail d?une revalorisation salariale.

Avec votre réponse, je vois simplement qu?en incapacité totale de faire quoique ce soit, compte tenu de la situation exsangue des finances de la Ville, vous reportez sur les autres votre propre incurie en matière de gestion des ressources humaines. Je rappelle que notre question reste pendante dans la mesure où je n?ai pas eu ma réponse concernant le 1er janvier 2022.

Je vous remercie.

Mme LA MAIRE DE PARIS. - Chère Madame GATEL, nous sommes dans un Etat de droit.

Dans un Etat de droit, une décision qui ne convient pas peut être contestée devant un tribunal, c?est d?ailleurs ce qu?a fait le Gouvernement, et nous sommes en droit de ne pas être d?accord avec cette contestation. Et que fait-on lorsque l?on n?est pas d?accord avec une contestation, car nous estimons que ce n?est pas une bonne interprétation de la loi ? On va devant les tribunaux et c?est cet Etat de droit qui va juger de la situation.

Nous espérons bien convaincre, parce que nous avons travaillé dans la négociation et la discussion avec les partenaires sociaux - que nous, nous considérons ! - sur des éléments d?amélioration de la situation des femmes et des carrières féminines dans notre Ville. Nous avons également eu à c?ur - et je remercie vraiment Marie VILLETTE, la Secrétaire générale et la DRH pour cette négociation - d?accompagner et de travailler sur les catégories professionnelles de notre Ville dans les travaux les plus pénibles.

Pénibilité, féminisation des emplois : ce sont les deux éléments qui nous ont motivés.

Chère Madame, que vous le vouliez ou non, nous ne sommes pas d?accord avec la décision du Gouvernement. Donc, où allons-nous ? Devant le tribunal. Le tribunal tranchera et nous appliquerons ensuite ce qu?il y a lieu d?appliquer, mais vous ne serez pas là pour empêcher l?Etat de droit qui permet à chacun de faire valoir ses droits devant un tribunal, nous y compris. Merci, Madame ! VI - Question d'actualité posée par le groupe Changer Paris à Mme la Maire de Paris relative aux opérations d'urbanisme de grande hauteur.

Mme LA MAIRE DE PARIS. - Je donne la parole au groupe Changer Paris - à moins qu?il ne la veuille pas - pour une question d'actualité posée par M. Philippe GOUJON.

M. Philippe GOUJON, maire du 15e arrondissement. - Madame la Maire, chers collègues, telle l?Hydre de Lerne, dont les têtes se régénèrent dès qu?elles sont tranchées, la Tour Triangle réapparaît à chaque fois qu?on la croit engloutie. Cette surdensification, annoncée le jour même de l?ouverture de la COP 26, va pourtant à contre-courant des ambitions du P.L.U. bioclimatique.

Les tours, au bilan carbone catastrophique, représentent un total non-sens environnemental. Ce mastodonte énergivore jamais rassasié de 15.000 tonnes de béton, de verre et d?acier, n?est finalement qu?un gigantesque îlot de chaleur.

Et puis, alors que la signature de Paris, ville horizontale forgée par les siècles, demeure unique au monde, vous la gâchez en faisant de Paris une ville qui imite toutes ces mégalopoles mondialisées, impersonnelles et d?une commune banalité à tel point que l?Unesco a rejeté votre plan de protection des rives de Seine à cause d?une tour visible jusque depuis la Concorde.

Il aura donc fallu attendre l?arrivée de la gauche et des "Verts" à Paris pour que réapparaissent les tours tant abhorrées. Vous avez même usé d?une mystification, celle de l?attractivité et de la compétitivité du parc pour faire croire à un besoin économique. En cela, vous avez été désavouée par le commissaire enquêteur qui arguait, je le cite : "le premier projet en phase, lui, avec les activités du parc a été remplacé sans autre forme de procès par une tour de bureaux en blanc à 75 % sans quasiment aucun lien avec les activités du parc".

La modernité, l?attractivité ne s?inscrivent pas forcément dans des I.G.H., concept de l?ancien monde depuis que les entreprises repensent leur mode de fonctionnement post-Covid.

Déni démocratique aussi : en plein "big bang" territorial, vous ignorez carrément les 81 % d?habitants hostiles recensés dans l?enquête publique, les deux conseils de quartier concernés, les votes contraires du Conseil d?arrondissement du 15e, les avis défavorables au permis de construire du maire d?arrondissement, et l?opposition de toutes les associations environnementales et de riverains.

Enfin, concernant le montage foncier, on ne saurait dire que les intérêts des Parisiens ont été bien défendus : pas d?appel à candidatures ni concours d?architecture s?agissant pourtant d?une concession de la Ville, un bail à construire économiquement aberrant alors que la Ville est sortie de tous les baux à construction. D?ailleurs, à son issue, dans 80 ans, la Ville en deviendra propriétaire, mais dans quel état sera-t-elle ?

En raison de la mauvaise gestion dénoncée par la C.R.C, de la légalité douteuse des actes liés à la passation des marchés et d?indemnisation du concessionnaire - Rachida DATI a d?ailleurs saisi la justice et une commission rogatoire a même été délivrée, mais la sévérité du rapport de la Chambre régionale des comptes et l?autosaisine du Parquet national financier y suffiraient -, mais aussi pour toutes les autres raisons citées, allez-vous donc enfin renoncer à ce projet fragile sur le plan économique, impactant sur le plan environnemental, enlaidissant le paysage urbain, saturant les réseaux de transport, étendant ses ombres portées sur le voisinage et rejeté par les élus du 15e, les riverains et les associations ?

Madame la Maire, en conclusion, je dirai que l?on ne bâtit pas une ville contre son gré, ni contre la volonté de ses habitants.

Mme LA MAIRE DE PARIS. - La parole est à Emmanuel GRÉGOIRE, pour vous répondre.

M. Emmanuel GRÉGOIRE, premier adjoint. - Merci beaucoup, Madame la Maire.

Monsieur le Maire du 15e arrondissement, un sujet ancien de notre Assemblée que la Tour Triangle, bien avant 2014.

Comme les politiques urbaines sont des politiques du temps long, ce sont aussi des politiques qui ont de la mémoire. La mémoire, c?est rappeler que des gens ont changé d?avis sur la Tour Triangle. C?est d?ailleurs en soi?

Mais je suis heureux que vous reconnaissiez que vous avez, en la matière, changé d?avis. Et c?est un droit, de changer d?avis !

Simplement, sur le projet de Tour Triangle, et nous aurons l?occasion demain d?y revenir en détail lors des travaux de la 5e Commission. La réalité, c?est que?

Madame la Maire, c?est très compliqué. J?ai beau essayer de faire des efforts?

Mme LA MAIRE DE PARIS. - Avancez !

On va ouvrir tous les micros du groupe Changer Paris. Comme cela, nous aurons un concert.

M. Emmanuel GRÉGOIRE, premier adjoint. - C?est vraiment très compliqué.

Vous avez changé d?avis sur la Tour Triangle. C?est votre droit le plus strict ! Mais je rappelle?

En matière de droit de l?urbanisme, je rappelle qu?un vote souverain du Conseil de Paris est supérieur à vos changements d?humeur. Le Conseil de Paris a été saisi !

Pardon de vous le dire, et je le fais avec courtoisie, Monsieur le Maire, vous vous prévalez de la souveraineté populaire des Parisiens pour affirmer qu?ils seraient contre la Tour Triangle. C?est considérer avec bien peu d?égard notre Assemblée ; c?est dévaloriser considérablement votre fonction et notre Assemblée.

Si la Tour Triangle est construite, ce n?est pas parce que la Maire de Paris l?a décidé, ni parce que mon prédécesseur et moi-même l?avons décidé. C?est parce que le Conseil de Paris, par un vote à bulletin secret, l?a décidé. Donc, Mesdames et Messieurs les conseillers de Paris, cette Assemblée, avec la légitimité démocratique à laquelle nous sommes attachés, il me semble, a décidé en 2015 de construire la Tour Triangle.

Il y a beaucoup d?autres arguments, mais, comme de nombreux v?ux qui nous permettront d?y revenir demain en 5e Commission, nous aurons l?occasion d?y revenir.

Je forme simplement le souhait que non, comme l?Hydre de Lerne, quand on lui coupera la tête, il n?en repoussera pas deux.

Merci, Madame la Maire.

Mme LA MAIRE DE PARIS. - Merci beaucoup, Emmanuel GRÉGOIRE.

Monsieur Philippe GOUJON, avec qui j?ai eu tellement de bonheur avant même d?être Maire - vous étiez déjà maire du 15e, je n?étais pas encore Maire de Paris - de présider des réunions publiques dans lesquelles nous avons défendu ensemble la Tour Triangle.

Cher Philippe GOUJON, vous avez deux minutes pour reprendre la parole.

J?ai des photos ! Si peu compromettantes, mais j?ai des photos.

M. Philippe GOUJON, maire du 15e arrondissement. - Pas notre vie privée, pas notre vie intime quand même ! Ne dévoilez pas notre intimité quand même.

Vous savez, parmi ceux qui changent d?avis, je crois que nous avions récemment encore une Maire de Paris qui déclarait ne pas être candidate à la présidentielle. Excusez-moi !

Je ne voudrais pas politiser à l?excès cette affaire d?urbanisme importante. Au jeu des citations, je pourrais également vous citer, Madame, vous qui affirmiez - les dates sont précises - le 30 juin 2008 : "L?idée n?est pas de se retrouver avec des surfaces de bureau du type de celles que l?on retrouve à La Défense, mais bien d?avoir un site dont l?attractivité soit principalement tournée vers la valorisation des foires et des salons".

C?est cette dimension économique du site que nous avions approuvée à l?époque, voilà douze ans, dans un contexte environnemental très différent, alors qu?aucune modernisation du parc n?était envisagée. Il est donc erroné de dire que notre position a changé ; vous le savez bien, ce sont le projet et le contexte qui ont changé. Cela n?a rien à voir !

En plus, le rapport accusateur de la C.R.C. nous a fait quand même réfléchir. Ce n?est pas nous qui l?avons écrit ! Le P.N.F. s?est autosaisi. Vous pourriez au moins attendre ses conclusions. Le P.N.F. s?interroge : "Y a-t-il détournement de fonds publics ? Le bail emphytéotique administratif a-t-il pour objet de contourner une mise en concurrence ? Le concessionnaire a-t-il été indemnisé pour un préjudice qui n?existait pas ? L?incapacité de la Ville à contrôler ce gestionnaire est-elle une stratégie ?" Voilà les questions qu?il se pose et nous aimerions avoir les réponses avant de nous engager plus avant.

En tout cas, si la pertinence des enjeux environnementaux - la franche opposition de vos alliés "Verts" ne vous a même pas contrariée -, sociétaux et économiques de la Tour n?est pas avérée, à moins de mystérieuses raisons, renoncez à cette tour maudite.

Cessez de martyriser le 15e et d?enlaidir Paris !

Mme LA MAIRE DE PARIS. - Merci beaucoup. V - Question d'actualité posée par le groupe Paris en commun à Mme la Maire de Paris relative à la prise en charge des personnes à la rue.

Mme LA MAIRE DE PARIS. - La parole est à présent à Alexandra CORDEBARD, Madame la Maire, pour le groupe Paris en Commun.

Pardon, j?avais sauté une ligne tout à l?heure. C?est à vous.

Mme Alexandra CORDEBARD, maire du 10e arrondissement. - Merci beaucoup.

Madame la Maire, Monsieur le Préfet de police, mes chers collègues, à la crise sanitaire de 2020 s?est ajoutée une crise sociale sans précédent qui a vu basculer nombre de Parisiennes et de Parisiens - nous en avons déjà parlé plusieurs fois lors de ce Conseil - dans la grande précarité.

Je pense évidemment aux jeunes et aux étudiants qui se retrouvent aujourd?hui en nombre dans les distributions alimentaires. Je pense aux personnes dont l?activité a été réduite, voire détruite parfois par les confinements successifs et le ralentissement de notre économie, et qui n?ont pas bénéficié du "quoi qu?il en coûte". Je pense aux signalements de plus en plus nombreux qui nous parviennent, à mes collègues maires d?arrondissement et à moi-même, de familles avec enfants qui dorment à la rue ou dans les services d?urgence de nos hôpitaux, et qui sont sans solution d?hébergement.

Oui, cela fait maintenant dix-huit mois que notre quotidien est marqué par cette crise, par ces signalements, par ces tristes rencontres au coin de chaque rue, de chaque porche.

Si l?Etat a consenti, et il faut s?en féliciter, des efforts importants en ouvrant et en maintenant, depuis l?hiver dernier, plus de 32.000 places d?hébergement d?urgence, cela s?avère aujourd?hui manifestement tout à fait insuffisant. Insuffisant pour les presque 2.800 personnes dénombrées lors de la dernière "Nuit de la Solidarité" - sans doute davantage aujourd?hui - ou pour les personnes qui ne peuvent pas être orientées chaque soir par les services du Samu social vers un hébergement d?urgence.

Beaucoup de ces personnes laissées sans solution témoignent d?ailleurs du stress, de l?anxiété, de l?isolement qui est et a été accentué par la crise sanitaire.

Ce constat - je voudrais le partager avec vous tous - va malheureusement dans le même sens que le dernier rapport sur l?état du mal-logement de la "Fondation Abbé-Pierre". Celui-ci met en exergue, durant la même période, une chute de la production de logements notamment sociaux, une montée des impayés - nos bailleurs le constatent aussi -, l?accroissement de la précarité et du chômage, des ruptures des suivis sociaux, des destructions d?emploi et une explosion de l?endettement des ménages, bien entendu les plus fragiles, ceux qui n?ont pas bénéficié du "quoi qu?il en coûte" et désormais davantage encore susceptibles de perdre leur logement et de se retrouver à la rue.

C?est pour ces raisons, et en soutien à l?action déterminée de vous, Madame la Maire de Paris, de Léa FILOCHE et de Ian BROSSAT, pour accompagner la prise en charge des personnes précaires aujourd?hui sans solution, que l?ensemble des maires d?arrondissement de la majorité a souhaité interpeller le Préfet d?Ile-de-France pour lui rappeler la réalité de l?urgence sociale et la nécessité de renforcer les dispositifs d?hébergement d?urgence mis en ?uvre par l?Etat.

Ce renforcement est d?autant plus nécessaire que l?hiver est désormais installé et que nous constatons, avec les services sociaux, avec les maraudes, avec les associations de solidarité, avec la Mission S.D.F. du Secrétariat général, dont je salue d?ailleurs l?action tout à fait déterminée, les difficultés à mettre à l?abri, mais aussi à reloger toutes ces personnes aujourd?hui à la rue.

C?est maintenant, je crois, que nous devons agir.

Mme LA MAIRE DE PARIS. - Il faut terminer, Madame la Maire.

Mme Alexandra CORDEBARD, maire du 10e arrondissement. - Je souhaite avoir l?assurance que les services de l?Etat dans la Région Ile-de-France ont des moyens supplémentaires pour la mise à l?abri.

Merci, Madame la Maire.

Mme LA MAIRE DE PARIS. - Merci à vous.

Je donne la parole à Léa FILOCHE, pour vous répondre.

Mme Léa FILOCHE, adjointe. - Merci, Madame la Maire.

Merci, Madame la Maire du 10e arrondissement, chère Alexandre CORDEBARD, Mesdames et Messieurs les maires d?arrondissement, chers collègues, comme vous l?avez dit et comme nous le disons depuis maintenant plusieurs mois, la crise sociale impacte fortement le territoire parisien et l?accroissement des inégalités est malheureusement probablement plus important sur le territoire parisien qu?ailleurs.

Les situations de grande précarité sont de plus en plus nombreuses et l?ensemble des acteurs de la solidarité me font remonter leurs inquiétudes et leurs alertes. Les maires d?arrondissement voient le nombre de tentes installées sur l?espace public augmenter. Les institutions et les associations qui accueillent des personnes vulnérables nous font part de besoins nouveaux pour accueillir davantage de personnes. Mes homologues, même en région, voient également la précarité gagner du terrain sur leur territoire.

Je vous le dis, chers collègues, comme je le dis régulièrement à nos interlocuteurs et interlocutrices à la Préfecture de Région Ile-de-France, compétente en la matière, l?hiver va être très difficile. Mon collègue Ian BROSSAT reviendra lors d?un v?u sur le travail que nous menons ensemble mais, à titre d?illustration, sachez que nous avons participé depuis le début de l?année à 22 mises à l?abri de campements, permettant de prendre en charge près de 3.900 personnes.

Donc oui, Madame la Maire, nous continuerons d?agir dans la coordination de la mise à l?abri, dans la mise à disposition de lieux qui appartiennent à la Ville ou aux bailleurs pour produire de l?hébergement d?urgence. Nous continuerons d?interpeller le Préfet de Région, d?accompagner avec de nombreux dispositifs que nous soutenons ou que nous avons créés - l?aide alimentaire, la domiciliation, les bagageries, de l?accompagnement social, de l?hébergement, des bains-douches - de participer aux réflexions, à la coordination, à la construction de projets au niveau local, métropolitain, régional ou national afin que les droits fondamentaux des personnes à vivre et à s?insérer sur chacun des territoires, à Paris comme ailleurs, soient respectés et se fassent dans les bonnes conditions.

A l?occasion de cette question d?actualité, je tiens à mon tour à saluer encore et encore les professionnels, les bénévoles, les associatifs, les fonctionnaires, les élus qui ne lâchent rien au quotidien, tant sur le soutien au quotidien des publics que sur le fond, des interpellations et des défenses des valeurs de solidarité. Car oui, la solidarité n?est pas un délit ! La situation, ici comme ailleurs, doit nous le rappeler sans cesse.

Je tiens à remercier et à saluer le soutien des maires d?arrondissement et des membres de l?Exécutif pour que Paris reste une ville accueillante, une ville refuge, une ville respectueuse des droits fondamentaux. Je sais pouvoir compter sur votre engagement et votre détermination.

Je reviendrai vers vous, Madame la Maire, après le retour des services de l?Etat, sur les différentes interpellations pour anticiper au mieux au moins la période de l?hiver qui s?ouvre.

Mme LA MAIRE DE PARIS. - Merci beaucoup, Léa FILOCHE.

Madame CORDEBARD, souhaitez-vous reprendre la parole ?

Mme Alexandra CORDEBARD, maire du 10e arrondissement. - Merci beaucoup.

Merci pour cette réponse. Sachez que nous sommes prêts, comme nous l?avons écrit au Préfet, à ouvrir les portes de nos gymnases pour faire face à cette nouvelle période hivernale et à accompagner les actions qui seront engagées par l?Etat. Nous sommes complètement mobilisés, les maires d?arrondissement.

Mme LA MAIRE DE PARIS. - Merci beaucoup à vous. Je sais votre engagement. VII - Question d'actualité posée par le groupe Ecologiste de Paris à Mme la Maire de Paris et à M. le Préfet de police relative à l'accueil des femmes victimes de violences sexistes et sexuelles dans les commissariats.

Mme LA MAIRE DE PARIS. - Nous passons à la question d'actualité du groupe Ecologiste de Paris.

Madame RÉMY-LELEU, vous avez la parole.

Mme Raphaëlle RÉMY-LELEU. - Merci, Madame la Maire.

Chers collègues, Monsieur le Préfet de police de Paris, en 2019, dans un commissariat parisien, une femme dépose plainte pour cause de violences conjugales et est accueillie par une policière spécialiste des douanes qui lui dit n?avoir jamais été formée ni avoir jamais recueilli la parole d?une victime. En 2020, une femme dépose plainte pour viol à la direction de la Police judiciaire ; on lui demande comment elle était habillée, ainsi que les sous-vêtements qu?elle portait au moment des faits. En 2020, à l?extérieur d?un commissariat parisien, une femme est dissuadée de porter plainte parce qu?il serait trop compliqué de faire venir un interprète.

Ces témoignages auraient pu faire partie du mouvement "Double peine", lancé il y a quelques semaines par Anna TOUMAZOFF, mais combien de femmes ont dû faire face à des propos humiliants, culpabilisants, des questions contraires à toutes les directives, voire faire face à un refus de dépôt de plainte ?

Le danger est réel, celui d?une rupture entre les victimes et l?institution policière et judiciaire, en particulier quand les traumatismes ne sont pas accompagnés, mais empirés par ces dépôts de plainte. Alors, que faire ?

Première option : tout va bien, nous sommes sauvés. L?Etat s?en occupe, c?est la grande cause nationale ! Sauf que c?est faux : nous avons déjà déploré 101 féminicides en France cette année. A Paris, les chiffres de la délinquance ont baissé sur tous les postes, sauf les violences conjugales, +15 %.

Alors les Ecologistes font le choix d?agir. Ainsi, dans le 12e arrondissement, Emmanuelle PIERRE-MARIE et ses équipes ont mis en place, en lien avec le commissariat, une procédure de transmission des plaintes à l?association "Femmes solidaires". Une assistante sociale et un psychologue sont dédiés à l?accueil des victimes et sensibilisent, participent de la formation des forces de l?ordre. Enfin, une équipe est dédiée au dépôt de plainte à l?hôpital Saint-Antoine.

Le problème, c?est que la première étape pour mettre en place des dispositifs efficaces est de croire les victimes, de tirer des leçons de l?expertise féministe - ce que vous vous refusez de faire. Hier encore, le v?u du groupe Ecologiste sur la réponse pénale a été adopté à l?unanimité, alors que votre représentant semblait dire que tout allait bien dans les commissariats parisiens.

Alors, comme vous ne nous croyez pas, il faudrait les chiffres. Heureusement, une étude existe, réalisée en 2018 par le centre Hubertine-Auclert en partenariat avec la Préfecture de police, sur l?accueil des femmes victimes de violences conjugales et/ou sexuelles dans votre juridiction. Mais vous refusez de publier cette étude. Elle est pourtant indispensable pour agir avec méthode, protéger les victimes et assurer aux personnels de police et de gendarmerie que leur travail est pris au sérieux, que le lien de confiance avec la population fait partie inhérente de leur métier, et que vous entendez leur mal-être quand elles et ils n?ont pas les moyens d?accomplir correctement leur mission.

Monsieur le Préfet de police, il y a urgence.

Deux questions très simples. Tout d?abord, quand comptez-vous publier le rapport du centre Hubertine-Auclert ? Deuxièmement, quand comptez-vous agir contre les violences sexistes et sexuelles ?

Mme LA MAIRE DE PARIS. - Monsieur le Préfet de police, je vais vous donner la parole. Je demanderai ensuite à Hélène BIDARD d?ajouter des éléments sur la politique de la Ville.

Monsieur le Préfet ?

M. LE PRÉFET DE POLICE. - Merci, Madame la Maire.

Alors, il y a un certain nombre de choses sur lesquelles je serai d?accord et d?autres qui nécessitent certaines petites précisions.

Ce sur quoi je suis d?accord, parce que c?est tout simplement la réalité, et je me félicite d?ailleurs que vous la reconnaissiez comme telle : la délinquance baisse à Paris, à l?exception, vous avez raison de le dire, des violences faites aux femmes. Là-dessus, les chiffres sont extrêmement?

Des violences sexuelles, je veux dire d?une façon plus générale. Les chiffres sont assez spectaculaires, c?est tout à fait juste, dans ce contexte de baisse. Le nombre de viols sur les neuf premiers mois de l?année 2021 a déjà dépassé en constatation la totalité de l?année 2020. Même chose sur les agressions sexuelles enregistrées sur les premiers mois de 2021, et 2020 était une année qui succédait aux précédentes avec la même logique d?augmentation.

Sur ce point, nous sommes parfaitement d?accord.

C?est pour cela que, dès mon arrivée, j?ai essayé de prendre un certain nombre de mesures par rapport au constat que vous faites. Lorsque je suis arrivé, j?ai constaté que la formation des policiers - je vous le dis, parce qu?il n?y a pas de gendarmes à la Préfecture de Police - était sans doute insuffisante en la matière. Nous avons déjà conduit un certain nombre d?initiatives, et nous allons les poursuivre, notamment pour ce qui concerne les formations.

Vous avez raison là aussi de dire que ces formations sont faites avec le centre Hubertine-Auclert, du travail duquel nous nous félicitons. Déjà en 2021, ce sont les commissariats du 10e, du 11e, du 12e, du 16e, du 19e et 20e, c?est-à-dire un total de 400 policiers ayant des fonctions d?accueil, qui ont d?ores et déjà été formés. Nous allons continuer le travail en ce sens. Je ne vous parle pas des livrets d?accueil que nous faisons - tout cela n?est pas l?essentiel, mais c?est un phénomène d?accompagnement.

Sur les plaintes elles-mêmes, je crois que l?observation est largement partagée. Pour une victime, de quelque nature que soit l?agression, et en particulier sur les agressions sexuelles, se rendre à un guichet n?est pas quelque chose de très facile. Ce n?est d?ailleurs pas beaucoup plus facile pour la personne qui est au guichet, puisque c?est un service public dans lequel, vous le connaissez, il y a de nombreuses personnes et pas toujours les conditions matérielles de l?isolement permettant le dépôt de plainte dans des conditions "ad hoc".

Dès que je suis arrivé, j?ai essayé de faire en sorte que nous allions au-devant des victimes, notamment en le faisant avec l?A.P.-H.P. Vous avez cité ces initiatives : depuis octobre 2020, les policiers du 12e arrondissement recueillent les plaintes aux urgences de Saint-Antoine, mais nous le faisons aussi dans les maisons des femmes de Bichat depuis juillet 2021, Pitié-Salpêtrière depuis octobre 2021, et dans la maison des femmes de l?Hôtel-Dieu en janvier 2022. D?ailleurs, dans les jours qui viennent, d?autres initiatives seront annoncées sur la Préfecture de police en la matière. Je ne veux pas les anticiper, elles feront l?objet d?annonces de la ministre déléguée.

Il n?en reste pas moins que ce qui est fait là peut être amélioré au coup par coup. Je vous encourage donc, lorsque vous avez des éléments de la nature de ceux que vous décrivez et que nous n?avons pas toujours?

J?en connais un certain nombre. Celui sur la Police judiciaire a fait l?objet de sanction vis-à-vis de l?officier de police qui avait envoyé ce questionnaire tout à fait délirant. D?ailleurs, la sanction - j?y ai tenu - me paraît particulièrement nécessaire sur ce genre de comportement de la part d?un fonctionnaire qui a rompu avec son devoir d?exemplarité.

Il n?en reste pas moins que, si vous avez connaissance de choses - vous avez l?air d?en savoir plus que moi - sur ce qui se passerait dans un certain nombre de lieux d?accueil, de grâce, allez en parler aux différents commissaires ! Je suis prêt à ce que mon cabinet fasse l?intermédiation pour que les choses se corrigent au cas par cas si les conditions d?accueil n?étaient pas jugées satisfaisantes.

Encore une fois, c?est l?idée générale, et il n?y a aucune raison que nous ne le fassions pas. C?est vraiment un objectif sur lequel, Madame la conseillère, je pense que nous pouvons nous mettre d?accord. Il y a assez peu de sujets sur lequel c?est possible et je crois que celui-là en fait partie.

Dernière petite précision, mais pour votre bonne connaissance de l?administration, je ne suis que le Préfet de police, pas le Préfet de police de Paris. Je n?ai pas de juridiction, mais une circonscription d?action. Je vous remercie.

Mme LA MAIRE DE PARIS. - Merci, Monsieur le Préfet de police. Je donne la parole à Hélène BIDARD.

Mme Hélène BIDARD, adjointe. - Merci beaucoup, Madame la Maire.

Chers collègues, Monsieur le Préfet de police, en quelques mots pour être rapide.

D?abord, grâce à l?Observatoire parisien des violences faites aux femmes, nous avons des chiffres chaque année de la Préfecture, de la Préfecture de police, du Parquet et des associations et il y a toujours des gaps entre ces chiffres - entre ce qui est signalé par les associations, ce qui est signalé comme plainte et ce qui arrive au niveau du Parquet, et évidemment aussi entre les condamnations. Nous savons qu?il s?agit aussi du haut de l?iceberg.

Quand il y a des dépôts de plainte, cela a été montré par les associations, il faut toujours encourager les victimes et les accompagner au dépôt de plainte. C?est absolument nécessaire quand on parle d?agressions. Nous travaillons aussi avec Anna TOUMAZOFF et les militantes des associations féministes mobilisées qui accompagnent les femmes victimes de violences avec le hashtag "DoublePeine" qui permet aussi de faire émerger une parole sur cette situation.

Deux choses, peut-être.

D?abord, il y a besoin de moyens. Vous ne l?avez pas évoqué, Monsieur le Préfet de police, mais après "MeToo" il y a eu, en trois mois, 20 % de plaintes en plus à Paris. Le nombre de plaintes a augmenté systématiquement. Alors, on peut se demander s?il y a eu une augmentation des violences ou une augmentation des plaintes déposées suite à ces violences. En tout cas, il y a plus de plaintes déposées. Or, à ma connaissance, il n?y a pas eu de moyens supplémentaires pour la police, pour la justice, pour tous les fonctionnaires, quelles que soient les institutions qui accompagnent les femmes victimes de violences, pour traiter ces dossiers afin que cela puisse aboutir.

Il y a donc un vrai enjeu de moyens en termes de personnels, mais aussi de continuité des formations. Nous savons qu?il y a un "turn-over" important dans les personnels. Il y a besoin d?une continuité et d?une formation interprofessionnelle très large, non seulement sur le contexte des violences faites aux femmes, sur le patriarcat, sur le sexisme, mais aussi sur les dispositifs concrets. Des dispositifs fonctionnent bien, en partenariat entre la Préfecture de police, le Parquet, la Ville de Paris, comme le "Téléphone grave danger". Il en existe d?autres, comme les ordonnances de protection et les mesures d?accompagnements protégés, qui ont également besoin d?être renforcées.

Des choses fonctionnent bien, nous le savons, comme les intervenants sociaux en commissariat. Nous l?avons vu particulièrement pendant les confinements, ils permettent aussi un accompagnement et une continuité pour les victimes qui viennent déposer plainte. Il est donc important de renforcer également ces dispositifs.

Juste un dernier mot, parmi les solutions importantes sur lesquelles nous devons avancer ensemble se trouvent la formation interprofessionnelle et le travail entre les fonctions publiques, police, justice, Ville de Paris, Préfecture et les associations qui accompagnent les femmes victimes de violences.

Nous allons d?ailleurs mettre en place le 25 novembre le C.L.A.V., le Comité local d?aide aux femmes victimes de violences avec l?Etat à Paris. Le 23 novembre, nous aurons aussi la journée de l?Observatoire parisien des violences faites aux femmes. Nous avons vraiment besoin que les différentes fonctions publiques soient renforcées dans leurs moyens et travaillent en coopération. C?est à elles d?évoluer et de faire l?effort autour des victimes pour arrêter l?itinérance que beaucoup trop de victimes connaissent aujourd?hui.

Mme LA MAIRE DE PARIS. - Merci beaucoup, Hélène BIDARD, et merci pour votre travail.

Nicolas NORDMAN veut ajouter un point, puis je donnerai la parole à Mme RÉMY-LELEU.

M. Nicolas NORDMAN, adjoint. - Pour être très court et compléter la réponse d?Hélène BIDARD concernant la police municipale, nous avons fait de ce sujet un axe majeur dans les formations que nous allons dispenser et avons commencé à dispenser à nos policiers municipaux.

Dans le cadre de l?Ecole parisienne de tranquillité publique, nous organisons deux formations. La première : "Violences faites aux femmes, être en mesure de réaliser un primo-accueil des femmes victimes" puisque nous savons que nos policiers et policières peuvent être amenés dans l?espace public à rencontrer ou à être sollicités par un certain nombre de femmes victimes. La deuxième formation : "Harcèlement sexiste sur l?espace public, accompagner et réconforter les victimes et les orienter vers les organismes compétents".

Ces deux formations s?ajoutent aux formations de droit commun dispensées à toutes les polices municipales, mais nous tenons vraiment à faire de ce sujet un sujet majeur de mobilisation de nos policiers et policières municipales.

Mme LA MAIRE DE PARIS. - Merci beaucoup pour cette réponse.

Madame RÉMY-LELEU ?

Mme Raphaëlle RÉMY-LELEU. - Merci, Madame la Maire.

Pour répondre d?un mot à Nicolas NORDMAN, ne confondons pas les sujets. Il s?agit bien ici de la question de l?accueil lors du dépôt de plainte. Tant mieux si la police municipale est formée, mais évitons de mélanger. Cela faisait justement partie de nos craintes concernant la police municipale.

Monsieur le Préfet de police, je suis contente que nous puissions nous mettre d?accord sur des choses aussi simples que la réalité.

Vous m?excuserez cette légère confusion entre "juridiction" et "circonscription", mais je serais ravie de discuter prochainement avec vous de l?arrêté du 12 messidor an VIII duquel découle vos fonctions.

En fait, vous ne répondez pas sur la publication du centre Hubertine-Auclert et c?est d?ailleurs exactement à cause de ce rapport que je parle de gendarmerie. Le rapport comporte en effet aussi bien, dans les lieux où il y a eu évaluation, des commissariats à Paris que des gendarmeries. Vivement, donc, que vous puissiez publier ce rapport, éventuellement pour me donner tort !

Je crois qu?il s?agit d?une certaine forme de mépris que d?avoir cet outil prêt, fruit d?un travail en concertation avec la Région Ile-de-France, des commissaires et des expertes, et de refuser de le publier. Une certaine forme de mépris également vis-à-vis des agentes et des agents qui auraient bien besoin que l?on parle de la réalité objective de leur métier.

Bon, je n?irai pas en parler à votre supérieur hiérarchique dont j?espère qu?il sera également invité à démissionner le 25 novembre.

Nous avons peut-être un point d?accord sur la réalité des violences, mais certainement pas sur la manière de lutter contre elles. Je tenais simplement à vous préciser que, à cette fin, je vais me lever, mais ne vous sentez pas obligés d?applaudir.

Mme LA MAIRE DE PARIS. - Merci, Madame. VIII - Question d'actualité posée par M. Christophe GIRARD à Mme la Maire de Paris relative au bâtiment situé 19, rue des Frigos dans le 13e arrondissement.

Mme LA MAIRE DE PARIS. - Dernier orateur, dernière question d'actualité par un élu non-inscrit : Christophe GIRARD, vous avez la parole.

M. Christophe GIRARD. - Merci, Madame la Maire, Monsieur le Préfet de police et Madame la Secrétaire générale.

Paris, comme beaucoup de capitales du XXIe siècle, est en pleine mutation urbaine, sociale, sociétale et écologique - pour ne pas dire "révolution".

Dans le 13e arrondissement de Paris, au 19 rue des Frigos, un bâtiment imposant de 1921 accueille dans ses espaces 80 ateliers?

Mme LA MAIRE DE PARIS. - Un instant, s?il vous plaît, Christophe GIRARD, que l?on puisse vous écouter dans le calme.

Merci !

On ferme la porte, merci beaucoup. Vous pouvez poursuivre.

M. Christophe GIRARD. - Merci.

Madame SIMONNET, vous n?avez pas le monopole des interventions. Non, le Conseil de Paris, ce n?est pas vous toute seule !

Ce bâtiment, anciennement propriété de la S.N.C.F., appartient à la Ville de Paris qui en assume l?entretien et l?attribution des ateliers, dont 80 ateliers où vivent peintres, architectes, céramistes, stylistes, photographes, vidéastes.

Aujourd?hui, 10 ateliers seraient inoccupés depuis deux ans. Au-delà du manque à gagner pour la Ville, cela prive une dizaine d?artistes d?un lieu de travail dont on sait qu?ils sont rares et très recherchés. Les directions de la Ville concernées savent que les demandes sont nombreuses et que la liste d?attente est importante. Ce lieu dorénavant sans gardiennage fait l?objet de dégradations régulières, voire de "tags" malveillants. Un filet protège depuis plusieurs mois la façade est des Frigos.

Ce lieu historique, polémique et emblématique, est régulièrement visité par des délégations culturelles étrangères comme récemment une délégation de la ville de Séoul, Monsieur MEUNIER.

Agnès Varda, en son temps, soutenait l?"Association des Frigos" présidée et inlassablement animée par le plasticien Jean-Paul RÉTI. Cette association s?est récemment enrichie du soutien de Natalie DESSAY venu y chanter.

Ma question est simple et bienveillante : quel présent, quel avenir - quel horizon, suis-je tenté de dire - la Ville de Paris envisage-t-elle pour ce lieu singulier à l?heure du numérique et des réseaux sociaux ? Je vous remercie.

Mme LA MAIRE DE PARIS. - Merci, Monsieur GIRARD.

Je donne la parole à Carine ROLLAND, pour vous répondre.

Pardon : Emmanuel GRÉGOIRE !

M. Emmanuel GRÉGOIRE, premier adjoint. - Merci beaucoup, Madame la Maire, mais Carine ROLLAND est évidemment aussi très concernée par ce site emblématique du 13e arrondissement.

Vous l?avez rappelé, Monsieur le conseiller, c?est un lieu de création important qui accueille autour de 80 ateliers avec des artistes, des artisans et des associations. Ce site a été racheté par la Ville de Paris à la S.N.C.F. en 2003. Sa gestion a d?abord été confiée à la Direction des Affaires culturelles puis à la Direction de l?attractivité et de l?emploi depuis 2011, avec un principe : promouvoir la création en permettant à des artistes et des artisans de pouvoir travailler dans des locaux aux tarifs avantageux hors du marché classique et, pour tous ceux qui connaissent le lieu, dans une atypie et un charme très spécifique à l?histoire de l?usage du lieu.

Des travaux importants d?entretien ont été réalisés ces dernières années : remise aux normes des ascenseurs, réfection de toitures, réfection aux normes électriques d?ateliers ou encore des reprises d?affaissement de sols, pour un investissement de plus de 2 millions d?euros sur les cinq dernières années. Mais il y a encore des choses à faire : le bon entretien, les conditions d?exercice des locataires et la vocation artistique et culturelle des Frigos restent une priorité pour la Ville. Datant de 1921, le bâtiment semble, et c?est normal, nécessiter des travaux de réfection que nous menons régulièrement.

En ce sens, les services de la Ville mènent actuellement une réflexion pour faire perdurer l?accompagnement des artistes et des artisans et l?évolution du site, en lien avec mes collègues de l?Exécutif concernés, Carine ROLLAND et Olivia POLSKI, ainsi qu?évidemment M. le maire d?arrondissement, Jérôme COUMET.

Nous aurons l?occasion de vous présenter plus en détail l?évolution de ce site dans les mois qui viennent.

Mme LA MAIRE DE PARIS. - Merci beaucoup, cher Emmanuel GRÉGOIRE.

Monsieur GIRARD, je vous redonne la parole.

M. Christophe GIRARD. - Merci beaucoup, Madame la Maire.

Merci au premier adjoint Emmanuel GRÉGOIRE pour sa réponse.

Tout en étant unis dans l?action et la recherche de valorisation de ce lieu historique avec le maire et les élus du 13e arrondissement, peut-être qu?un rapprochement avec la Station F pourrait être une piste pour que ce lieu ne disparaisse pas et soit dans la mémoire patrimoniale, et pour faire de ce lieu un grand lieu d?accueil des artistes à Paris, puisqu?ils viennent du monde entier. Merci beaucoup.

Mme LA MAIRE DE PARIS. - Merci beaucoup à vous.

Nous en avons terminé avec les questions d?actualité.

Monsieur le Préfet, merci.

 

Novembre 2021
Débat
Conseil municipal
retour Retour