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2021 DU 143 - Vente à l’organisme de foncier solidaire "La Foncière" de la Ville de Paris d’un terrain 30, rue Cavé (18e) en vue de réaliser des logements faisant l’objet de baux réels solidaires.


 

M. Patrick BLOCHE, adjoint, président. - Nous examinons maintenant le projet de délibération DU 143 concernant la vente à l?organisme de foncier solidaire "La Foncière" de la Ville de Paris d?un terrain, 30, rue Cavé, dans le 18e arrondissement, en vue de réaliser des logements faisant l?objet de baux réels solidaires.

La parole est à Rudolph GRANIER.

M. Rudolph GRANIER. - Merci, Monsieur le Maire.

Mes chers collègues, ce projet de délibération a bien entendu été évoqué en Conseil d?arrondissement il y a une semaine.

Monsieur l?adjoint, à cette occasion, lors du Conseil d?arrondissement, Mario GONZALEZ a répondu en évoquant le propriétaire évincé, alors que je parlais de l?acquéreur évincé. Selon nous, la Ville porte un risque juridique puisqu?elle a précipité les choses, étant entendu que l?acquéreur évincé n?avait pas exercé ses droits. Vous le savez, la date limite était le 13 et Mario GONZALEZ m?a répondu sur les droits du propriétaire.

Vos qualités juridiques, Monsieur l?adjoint, sont meilleures que votre collègue GONZALEZ en Conseil d?arrondissement - en tout cas, j?espère qu?elles sont meilleures que vos qualités de communication - et je souhaiterais que vous puissiez nous éclairer sur ce point car, à mon sens, un risque juridique certain pèse sur cette opération.

Au-delà de ces risques techniques, l?opération prévue par "La Foncière" de la Ville de Paris au 30, rue Cavé constitue à nos yeux un problème sur la surdensification de la Goutte-d?Or en général et de cet îlot en particulier. Encore une fois, ajoutant des étages et des mètres carrés en volume et en surface, ce projet de "La Foncière" de la Ville de Paris, Monsieur l?adjoint, ne peut être que rejeté en raison de la santé publique et de la surdensification qu?il va encore augmenter. Le rapport de "La foncière" et le projet de délibération nous permettent d?en juger.

Par contre, dans l?actualité directe qui nous concerne - je regrette le départ de mon collègue Émile MEUNIER, mais d?autres collègues écologistes à lui ne manqueront pas de lui faire part de mes propos -, nous sommes en pleine contradiction avec le vote sur le P.L.U. ayant eu lieu hier.

Si vous voulez d?ores et déjà interdire ou ne pas autoriser ou ne pas exécuter des choses que vous allez empêcher à travers le prochain P.L.U., vous en avez l?opportunité. Vous avez cette opportunité également, au titre du 18e arrondissement, je vous rappellerai, sur la rue Muller, sur la rue Ramey, la rue du Chevalier-de-La-Barre, la rue des Trois-Frères et la rue Feutrier.

Pour que tout le monde nous comprenne bien, monter en étages et en mètres carrés ne permet pas d?aérer le quartier ni de créer des conditions de vie qui nous paraissent ultra-nécessaires dans un quartier dont la densification n?est absolument pas à démontrer.

Monsieur l?adjoint, je souhaite pouvoir obtenir des réponses sur l?aspect juridique de cette opération. Votre vision urbanistique est suffisamment connue et très orientée, encore une fois, sur une surdensification à outrance que je vous absous des commentaires sur ce point dans votre réponse. Merci beaucoup.

M. Patrick BLOCHE, adjoint, président. - Merci, Rudolph GRANIER.

La parole est au maire du 18e arrondissement, Éric LEJOINDRE.

Monsieur le Maire ?

M. Éric LEJOINDRE, maire du 18e arrondissement. - Merci, Monsieur le Maire.

Mes chers collègues, je ne peux commencer mon intervention sans saluer les diverses interventions de notre collègue Rudolph GRANIER qui a illustré avec beaucoup de talent ce que Jean-François MARTINS a exprimé avec autant de talent encore ce matin. C?est en effet une illustration très nette de ce qu?il a qualifié, à juste raison, comme la tartuferie de la droite parisienne. Je pense que cette série d?interventions en est, s?il en était encore besoin, une belle démonstration.

Il est en effet difficile à la fois d?expliquer qu?il faut préserver la place des classes moyennes dans le 18e et dans Paris et de repousser en même temps la possibilité pour les Parisiens d?acquérir à Paris des logements à moitié prix. A Paris, "à moitié prix", cela tourne quand même autour de 5.000 euros du mètre carré. Nous reprocher en même temps de ne pas loger les classes moyennes tout en nous empêchant de les loger, cela s?appelle de la tartuferie.

De la même façon, je le rappelle, et je le rappellerai avec constance, que le logement social n?est pas un logement pour gens à problème. Cette vision que vous avez - consistant à considérer qu?à chaque fois que l?on fait du logement social, on crée un problème - est une vision éloignée de la réalité, c?est peu de le dire, et méprisante pour l?immense proportion des locataires du logement social à Paris qui sont des gens très bien et méritent de pouvoir vivre à Paris. C?est aussi une insulte pour toutes celles et ceux des Parisiens qui rêveraient d?avoir accès au logement social à Paris.

Nous sommes donc bien là dans l?illustration la plus parfaite de ce que mon collègue a appelé "cette tartuferie".

Au-delà, je ne reviendrai pas sur le principe de ce projet de délibération, si ce n?est pour dire que je me réjouis que nous puissions, par exemple, dans le 18e, permettre à des familles parisiennes d?acheter des logements moitié moins cher que ce qu?ils coûtent sur le marché privé et je m?étonne que ce projet de délibération ne soit pas voté avec l?unanimité qui s?impose.

M. Patrick BLOCHE, adjoint, président. - Merci, Monsieur le Maire du 18e arrondissement.

Dans le plus grand silence, la parole est maintenant à Barbara GOMES.

Mme Barbara GOMES. - Monsieur le Maire, mes chers collègues, le prix du logement est indécent à Paris, effectivement. Si nous n?agissons pas comme nous le faisons aux côtés de notre collègue Ian BROSSAT, la Ville ne sera bientôt plus du tout accessible aux classes populaires et aux classes modestes. Alors, ne laissons pas Paris devenir un écrin réservé aux gens très riches et à leurs héritiers n?acceptant en son sein les plus modestes qu?à condition qu?elles et ils rentrent bien chez eux après - chez eux, de plus en plus loin, à mesure que le temps avance.

C?est pour cela que, durant la campagne municipale, nous avions annoncé la création d?une "Foncière" de la Ville de Paris pour justement permettre aux Parisiennes et aux Parisiens d?accéder à la propriété à moindre coût.

Après la parole, nous sommes passés aux actes.

Le 6 avril dernier, la Ville a annoncé la commercialisation de ces premiers logements en bail réel solidaire et le nombre de candidatures que nous avons reçues prouve à lui seul le succès de cette démarche. La popularité de ce dispositif appelle forcément à sa poursuite et à son amplification. C?est ce que nous engageons ici.

Aujourd?hui, nous votons la cession d?une parcelle de la Ville de Paris à la foncière solidaire. L?aménagement de cette parcelle permettra concrètement la réalisation de neuf logements qui y seront commercialisés en bail réel solidaire. Cette foncière solidaire va permettre une fois de plus d?accéder à un logement à prix, comme le disait Éric LEJOINDRE, moitié moins cher que celui du marché. Même ainsi, c?est 4.900 euros du mètre carré en moyenne.

Avec cette foncière solidaire, la Ville s?engage activement en faveur de familles justement issues des classes moyennes et populaires que tout l?hémicycle est normalement censé favoriser aujourd?hui à Paris, au regard des coûts de la vie. Surtout en cette période où les salaires stagnent et les prix de l?énergie flambent, il faut vraiment saluer ce type d?initiative.

C?est donc ce que je vais faire : je veux saluer le travail très sérieux, décisif et d?avant-garde de notre collègue Ian BROSSAT, saluer l?engagement de Paris. Nous avons besoin de ces initiatives fortes en faveur des moins aisés, en faveur d?une ville plurielle, d?une ville vivante, en faveur du logement pour toutes et tous.

Je vous remercie.

M. Patrick BLOCHE, adjoint, président. - Merci beaucoup, Barbara GOMES.

La parole est à Ian BROSSAT, pour répondre aux intervenantes et intervenants.

M. Ian BROSSAT, adjoint. - Merci beaucoup aux trois orateurs, à Rudolph GRANIER, à Éric LEJOINDRE et à Barbara GOMES.

Très concrètement, de quoi s?agit-il ici ? D?une parcelle située rue Cavé dans le 18e arrondissement, à la Goutte-d?Or, sur laquelle nous allons créer du logement à 4.700 euros du mètre carré. Il s?agit d?un immeuble en R+5 qui comprendra 7 grands T3 et 2 T4, donc du logement familial à moitié prix si on le rapporte aux prix du marché, conformément à l?objet de "La Foncière" de la Ville de Paris qui a fait l?objet du débat précédent.

D?ailleurs, je note avec une assez grande satisfaction que, concernant les projets de cette foncière, il y a globalement une relative unanimité dans cette Assemblée. Je regrette simplement qu?elle se brise sur ce projet-ci de la rue Cavé. Ce n?est pas grave. Il y aura des votes unanimes sur ce projet et une majorité qui se dégagera sur celui-ci.

Simplement, Monsieur GRANIER, permettez-moi de relever au moins deux contradictions dans votre propos. Je vous respecte, et donc je voudrais mieux vous comprendre.

Vous dites : "Le problème de cette opération, c?est qu?elle est trop dense". Dans le même temps, vous prenez la défense de l?acquéreur évincé. Simplement, celui-ci n?avait pas l?intention de laisser cette parcelle vide. Le projet de l?acquéreur évincé était de faire un projet de promotion immobilière privé aussi dense que le projet que nous allons réaliser, nous. En réalité, nous n?avions pas un choix entre une parcelle vide d?une part et une parcelle construite d?autre part ; c?était un choix entre deux parcelles construites. Soit on avait du logement à 10.000 euros du mètre carré, soit on a du logement à 4.700 euros du mètre carré. Excusez-moi de vous le dire, nous préférons faire du logement à 4.700 euros du mètre carré et c?est précisément l?objet de ce projet de délibération.

Deuxième contradiction - je ne serai pas beaucoup plus long, rassurez-vous : à chaque fois que nous votons un projet de délibération qui concerne une préemption, vous dites : "C?est nul, cela ne crée pas de logements supplémentaires." Vous dites aussi : "C?est cher." C?est vrai, c?est parfois cher. Et donc, vous votez contre. Mais quand nous proposons de faire des logements neufs par le biais de constructions, vous dites : "Ah non, cela densifie !".

Si nous ne pouvons ni préempter ni densifier en faisant des logements neufs, excusez-moi de vous le dire, nous ne ferons jamais de logement social. C?est peut-être votre projet, mais ce n?est pas le nôtre !

M. Patrick BLOCHE, adjoint, président. - Merci, merci !

Avouons-le, le débat dans l?hémicycle sur ce sujet n?est pas nouveau?

Non, il a rappelé quelques fondamentaux, comme on dit.

Je mets aux voix, à main levée, le projet de délibération DU 143.

Qui est pour ?

Contre ?

Abstentions ?

Le projet de délibération est adopté. (2021, DU 143).

 

Novembre 2021
Débat
Conseil municipal
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