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Suspension et reprise de la séance.


(La s�ance, suspendue � douze heures, est reprise � quinze heures, sous la pr�sidence de Mme la Maire de Paris).

Mme�LA MAIRE DE PARIS.- Mes chers coll�gues, nous passons � nos travaux. Hommage � Roger Fichtenberg.

Mme�LA MAIRE DE PARIS. - Nous nous retrouvons pour un hommage � Roger Fichtenberg, dont nous avons appris la disparition il y a une semaine.

Roger Fichtenberg �tait ce qu?on appelle commun�ment une figure fran�aise et parisienne. Celles et ceux qui l?ont connu gardent de lui l?image d?un homme discret mais qui ne manquait jamais d?attention pour les autres. Roger, ces autres, il les rendait meilleurs sans jamais vouloir en recevoir un quelconque honneur. En fait, c?�tait un trait de sa personnalit�, cette humilit� qui est l?apanage des grands hommes, car Roger Fichtenberg faisait partie de ces hommes.

Homme de conviction, il a d�ploy� toute son �nergie pendant la Seconde Guerre mondiale dans les r�seaux de r�sistance. R�fugi� avec sa famille dans le Sud-Ouest de la France, il s?est engag� aupr�s des Eclaireurs isra�lites de France d�s 1941 et il a contribu� � sauver des milliers d?enfants juifs d?une mort plus que probable. Apr�s les rafles survenues dans la zone libre � l?�t� 1942, il fonde avec d?autres camarades la branche clandestine du mouvement "la Sixi�me" et adopte le nom de clandestin de "Jaguar", en r�f�rence � son totem chez les scouts, "Jaguar d�licat". C?est le temps des allers-retours en Suisse, en Espagne et bien souvent en Afrique du Nord, assorti pour les candidats au d�part de la fabrication de faux papiers.

Tout ce temps, Roger Fichtenberg a tenu un journal cod� qui l?a aid� � r�diger ses m�moires�; il les avait publi�s en 2014 � la Fondation pour la M�moire de la Shoah. "On ne pensait pas � l?avenir, alors on �tait dans l?action", �crivait celui qui a particip� � la lib�ration d?Agen au c�t� des Forces fran�aises de l?int�rieur.

R�sistant, Roger Fichtenberg ne se plaignait jamais. Il avait le courage des grands h�ros de l?histoire, de ceux qui laissent une trace dans les livres, mais aussi la droiture et l?int�grit� des hommes simples. Il a toute sa vie continu� d??uvrer pour la R�publique et pour la transmission de ses valeurs aux jeunes g�n�rations. "L?ennemi d?un jour n?est pas l?ennemi d?une vie", avait-il coutume de dire aux �l�ves des coll�ges et lyc�es o� il se rendait. Roger �tait un passeur, et avec lui, gr�ce � lui, la m�moire �tait vivante, passionnante.

C?est le t�moin qu?il nous passe aujourd?hui, la responsabilit� qui incombe � toutes celles et ceux qui l?ont connu, faire vivre sa m�moire et, � travers sa m�moire, faire vivre l?histoire de notre pays et de notre ville, Paris qu?il a tant aim�e. Pr�sident de l?Union des associations des anciens combattants et victimes de guerre du 11e arrondissement, membre du Conseil d�partemental de l?O.N.A.C., il mettait beaucoup d?�nergie � organiser chaque ann�e, et jusqu?� il y a quelques mois encore, les c�r�monies m�morielles dans son arrondissement.

Roger Fichtenberg �tait un ami, un homme d?exception, un grand humaniste, quelqu?un qui nous manquera. Nos pens�es vont aujourd?hui � sa famille, � ses proches, auxquels nous adressons nos plus sinc�res condol�ances.

Je vous demande, en sa m�moire, d?observer une minute de silence.

(L'Assembl�e, debout, observe une minute de silence).

Je vous remercie. Je vais donner la parole � plusieurs orateurs qui l?ont connu, qui l?ont bien connu pour beaucoup d?entre eux - c?�tait un amoureux du 11e arrondissement. Je vais donner la parole en premier lieu � Mme�Laurence GOLDGRAB, pr�sidente du groupe Radical de Gauche, Centre et Ind�pendants.

Mme�Laurence GOLDGRAB. - Merci, Madame la Maire.

Madame la Maire, mes chers coll�gues, dimanche 22�septembre, un grand homme s?est �teint � l?aube de son 98e anniversaire, Roger Fichtenberg.

Nous lui avons rendu un dernier hommage, mercredi 25�septembre, lors d?une belle c�r�monie organis�e en la mairie du 11e arrondissement, l?arrondissement qui l?a vu na�tre et s?�teindre, une c�r�monie qu?il aurait sans doute appr�ci�e, lui, le pr�sident, depuis des dizaines d?ann�es, de l?Union des associations des anciens combattants et victimes de guerre du 11e arrondissement, l?organisateur en chef des c�r�monies de son arrondissement.

Vous l?avez rappel� avant moi, le destin de Roger fut hors du commun. D?un petit Parisien du 11e, il est devenu une grande figure de la R�sistance, membre de la Sixi�me, d�cor� de l?ordre national du M�rite et de la L�gion d?honneur, dont il fut pour chacune de ces distinctions �lev� au grade d?officier. Il re�ut �galement la croix du combattant volontaire et la croix du combattant volontaire de la R�sistance, et fut �lev� au rang de chevalier des Palmes acad�miques. Et pour ses 90�ans, c?est avec beaucoup d?�motion qu?il re�ut des mains de Bertrand DELANO� et de Patrick BLOCHE la m�daille Grand Vermeil de la Ville de Paris, cette ville qu?il a tant aim�e et pour laquelle il a tant donn�.

Roger Fichtenberg, vous l?avez rappel�, Madame la Maire, �tait un homme d?engagement. Ce mot fut la ligne conductrice de son destin, le fil d?Ariane de sa vie�; tout au long de sa vie, il s?est engag�. Cela a commenc� au c?ur de la Seconde Guerre mondiale quand il d�couvrit le scoutisme et devint Eclaireur isra�lite de France, adoptant alors le totem de "Jaguar d�licat". Son engagement pendant les plus sombres ann�es de notre histoire contemporaine, il l?a mis au service des autres et en particulier des enfants juifs, qu?il sauva de la d�portation au p�ril de sa propre vie. Lors de l?hommage � la mairie du 11e, l?un d?entre eux qui lui devait la vie a t�moign� de son immense courage�; ce fut un grand moment d?�motion.

A la fin de la guerre, apr�s avoir contribu� � la Lib�ration et avoir sauv� de nombreuses vies, il s?est engag� au Cojasor et avec son m�tier au Minist�re pour aider ceux qui revenaient de l?enfer.

Dans sa vie personnelle, son engagement a pris la forme d?un amour profond de sa ch�re et tendre �pouse Sarah, avec qui il partagea 47�ans de vie commune avant que la vie, ou plut�t la mort, n?en d�cide autrement. On ne les croisait jamais l?un sans l?autre. C?�tait incroyable, ce couple �tait absolument fusionnel, je m?en souviens avec beaucoup d?�motion et j?aimais beaucoup Sarah aussi.

Son engagement, il l?a poursuivi en consacrant du temps et de l?�nergie � la transmission de la m�moire, pour ne jamais oublier, pour ne plus jamais recommencer les horreurs du pass� qu?il avait combattues, en intervenant dans les coll�ges, en racontant son histoire mais aussi en tant que pr�sident de l?Union des associations des anciens combattants et victimes du 11e. Son engagement a �galement �t� celui d?un �lu local, l?engagement pour la chose publique. Il fut conseiller du 11e arrondissement de 1983 � 1995, le premier �lu parisien radical de gauche, et il nous a incontestablement ouvert la voie. Il fut �galement conseiller r�gional d?Ile-de-France entre 1986 et 1992, puis en 1997 et 1998.

Il avait un grand amour pour le 11e arrondissement, un arrondissement qu?il connaissait comme sa poche et qu?il arpentait quotidiennement. Il entrait dans le magasin de mon oncle dans le 11e arrondissement pour "papoter", et lorsqu?un client arrivait, il repartait et revenait le lendemain, et ainsi de suite tous les jours. Et m�me apr�s ses mandats, il continuait � se rendre tous les jours � la mairie du 11e o� il faisait le tour des bureaux, bavardant et blaguant - il �tait chez lui. C?est ainsi aussi qu?au fil des ann�es il devint une figure incontournable du 11e arrondissement.

C?est pour cette raison que je souhaite vous proposer, au nom des �lus radicaux de gauche et en particulier de Jean-Christophe MIKHAILOFF, �lu radical du 11e ici pr�sent et qui a �t� un compagnon politique et un v�ritable ami de Roger jusqu?au dernier moment, d?attribuer son nom � une rue ou � un lieu du 11e arrondissement.

Enfin, il y eut cet engagement militant pour d�fendre et faire vivre les valeurs du radicalisme qui lui �tait cher, l?humanisme, la fraternit�, la d�fense de l?�cole publique, au Parti radical de gauche, au Parti radical-socialiste d?ailleurs, auquel il avait adh�r� en 1954, puis au MRG, Mouvement des radicaux de gauche, en 1973. Au cours de ce parcours militant, il c�toya les grandes figures de notre famille radicale, telles que Michel Cr�peau, Gaston Monnerville ou Pierre Mend�s France, des personnalit�s qu?il admirait au plus haut point.

Membre du comit� directeur du MRG, il fut l?un des fondateurs de la f�d�ration de Paris et son tr�sorier pendant plus de 20�ans - c?est l� que je l?ai connu. Si le radicalisme de gauche existe aujourd?hui � Paris, c?est en grande partie gr�ce � Roger Fichtenberg�; nous savons ce que nous lui devons. Personnellement, il m?a accueillie � la f�d�ration MRG de l?�poque et il m?a pouss�e � me pr�senter aux �lections, il a r�ussi � me convaincre. Au d�but, j?�tais un peu h�sitante, mais je me souviens de sa fiert� lorsque j?ai �t� �lue, de ses yeux brillants du bonheur qu?il avait vraiment �prouv� � ce moment-l�. C?�taient aussi les pr�mices pour moi d?une belle aventure�; je lui dois tout et je le remercie.

Nous pouvons �tre fiers, nous tous, d?avoir connu et c�toy� cet homme au regard rieur, jamais avare de bons mots, de blagues et d?humour, cet homme g�n�reux, ce h�ros modeste et tranquille, notre ami Roger Fichtenberg.

Merci, Roger.

Mme�LA MAIRE DE PARIS. - Merci beaucoup, ch�re Laurence GOLDGRAB.

Enfant du 11e, aimant le 11e, je donne la parole au maire du 11e, Fran�ois VAUGLIN.

M.�Fran�ois VAUGLIN, maire du 11e arrondissement. - Merci beaucoup, Madame la Maire, merci d?avoir accept� d?organiser ce moment � la m�moire de Roger Fichtenberg. Comme cela a �t� rappel�, c?�tait une figure incontournable et tr�s attachante de notre arrondissement et plus largement de notre ville.

Je ne vais pas retracer tout son parcours, car il a �t� longuement �voqu� lors de la c�r�monie que nous avons organis�e en mairie du 11e arrondissement et dont vous avez rappel� les principaux traits�: ce grand r�sistant qu?il fut et ces centaines d?enfants qu?il a sauv�s d?une d�portation plus que probable, � travers son engagement dans la Sixi�me, cette branche clandestine des E.I.F. sous le nom - cela a �t� rappel� - de Jaguar d�licat.

Je voudrais aussi rappeler qu?en 1944 il s?engagea dans l?Arm�e secr�te. Il fut affect� � l?�tat-major des Forces fran�aises de l?int�rieur et c?est en cette qualit� qu?il participa � la lib�ration d?Agen o� il occupa la Pr�fecture le 19�ao�t 1944. Alors nomm� adjoint au commandant de la pr�v�t� militaire du Lot-et-Garonne, il prit les premi�res mesures de maintien de l?ordre et de r�tablissement des libert�s r�publicaines. Car s?il est bien une chose qui caract�rise Roger, c?est la constance dans ses combats et dans les valeurs qu?il a port�es jusqu?au bout de sa vie.

Une fois d�mobilis�, c?est au Cojasor qu?il rencontra sa ch�re Sarah - merci d?avoir rappel� sa m�moire. Sa perte en 1994 lui causa une immense douleur et je sais qu?aujourd?hui il peut �tre heureux de retrouver Sarah, puisqu?il est enterr� � ses c�t�s.

Son engagement politique ensuite, comme cela a �t� rappel�, l?a conduit � �tre �lu du 11e arrondissement et conseiller r�gional d?Ile-de-France.

Au-del� de ses engagements, son combat permanent pour la transmission de la m�moire, pour que jamais l?histoire ne b�gaye, est tout � son honneur. Il nous a laiss� ce livre, ce magnifique livre, "Journal d?un r�sistant juif dans le Sud-Ouest", ainsi que de nombreux t�moignages film�s de son histoire.

Quarante et un ans durant, il a pr�sid� les c�r�monies patriotiques du 11e arrondissement et je voudrais terminer cet hommage en �voquant l?homme, l?homme amoureux de Sarah, cet homme bon vivant, cet homme amoureux, passionn� de la vie, plein d?humour, jamais avide d?une blague, juive de pr�f�rence, l??il rieur, et bien s�r cet homme engag� toute sa vie.

Vous l?avez propos�, Madame la Maire, lors de la c�r�monie en mairie et aujourd?hui, cette proposition est renouvel�e�: qu?un lieu puisse accueillir sa m�moire, puisse porter sa m�moire. D?ores et d�j�, nous travaillons ensemble sur cette piste pour que prochainement nous puissions avancer sur des propositions concr�tes devant le Conseil de Paris.

Je vous remercie et je m?associe aux condol�ances qui ont �t� adress�es � sa famille et � tous ses proches. Merci beaucoup.

Mme�LA MAIRE DE PARIS. - Merci beaucoup, Monsieur le Maire. Je donne la parole � M.�BARGETON, pr�sident du groupe DP.

M.�Julien BARGETON. - Madame la Maire, chers coll�gues, comme beaucoup de Parisiens, notre groupe a �t� tr�s touch� par le d�c�s de Roger Fichtenberg, qui avait toujours r�ussi � allier engagement local et universalit� des valeurs humaines.

Il grandit et fit une partie de sa scolarit� dans le 11e arrondissement de Paris, et dut le quitter en 1940 � cause de l?invasion allemande, prendre le chemin de l?exode, mais il en devint �lu local des ann�es plus tard, en 1983 jusqu?� 1995. Toujours il y garda une profonde attache. Chaque ann�e, par exemple, il s?impliquait dans les c�r�monies en m�moire des r�sistants.

Il fut un grand r�sistant fran�ais. Gr�ce � son action et � celle de ses camarades, les Eclaireurs isra�lites de France, d�s 1941, des milliers de personnes purent �chapper � la d�portation, � l?horreur, � la mort gr�ce � la fabrication de faux papiers et � l?organisation d?un r�seau d?�vasion. "Jaguar d�licat", comment mieux d�crire sa personnalit�? Il s?engagea dans l?Arm�e secr�te puis dans les Forces fran�aises de l?int�rieur et participa � la lib�ration d?Agen. Outre son engagement pour la libert�, son engagement politique, il consacra une grande partie de sa vie � la transmission de la m�moire et de l?histoire, celle de la Shoah et de la R�sistance en particulier, pour que jamais nous n?oubliions ce que l?histoire a pu faire de pire comme de plus noble. Son t�moignage �crit, "Journal d?un r�sistant juif dans le Sud-Ouest", en est une parfaite illustration. Je suis n� et j?ai grandi dans le 11e arrondissement, et j?ai pu � plusieurs reprises croiser, rencontrer et saluer cette grande figure de l?Est parisien. En mon nom, au nom de notre groupe, nous adressons une pens�e � sa famille et � ses proches. Je vous remercie.

Mme�LA MAIRE DE PARIS. - Merci � vous. La parole est � M.�Nicolas BONNET pour le groupe Communiste et Front de Gauche.

M.�Nicolas BONNET-OULALDJ. - Merci, Madame la Maire.

Mes chers coll�gues, beaucoup de choses ont d�j� �t� dites, je ne vais donc pas �tre long.

Simplement, pour associer les �lus communistes � cet hommage � Roger Fichtenberg, je pense notamment aux �lus du 11e, � H�l�ne BIDARD, Adrien TIBERTI, Michel BILIS qui le connaissait bien et � Catherine VIEU-CHARIER, avec qui il avait beaucoup travaill� sur la m�moire.

Evidemment, cela a �t� dit, Roger Fichtenberg �tait tr�s attach� au 11e arrondissement, l� o� il est n�, l� o� il a v�cu, un arrondissement qu?il avait d� quitter durant la p�riode tragique de la guerre et de l?Occupation.

Nous saluons aussi, � travers sa m�moire, son engagement dans la R�sistance, dans la clandestinit�, dans l?Arm�e secr�te, dans l?Etat-major des F.F.I. et surtout dans la lib�ration d?Agen, et, enfin, le travail courageux qu?il a men� pour sauver et mettre � l?abri des jeunes enfants juifs. Travail de m�moire et de r�sistance, cela a �t� �voqu�, Roger Fichtenberg en tant qu?�lu a men� ce travail de mani�re remarquable dans le 11e arrondissement et aupr�s du Conseil de Paris. Nous voulons ainsi associer le groupe Communiste � sa m�moire et saluer bien s�r sa famille, ses proches et sa famille politique. Je vous remercie.

Mme�LA MAIRE DE PARIS. - Merci beaucoup, mes chers coll�gues, pour cet hommage rendu � notre ami Roger Fichtenberg, et bien s�r que nous travaillerons sur un lieu qui portera son nom.

Adoption de comptes rendus.

Septembre 2019
Débat
Conseil municipal
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