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M. Christophe NAJDOVSKI, adjoint, pr�sident. - Nous examinons le projet de d�lib�ration DJS�98 relatif au budget participatif avec l'attribution d'une subvention de 800.000 euros et d'une convention avec "Paris and Co" pour l'am�nagement de Level 256, la premi�re plateforme d?innovation d�di�e � l'eSport.

Je donne la parole tout d'abord � Mme Jo�lle MOREL, pour le groupe Ecologiste de Paris.

Mme Jo�lle MOREL. - Merci, Monsieur le Maire.

Ce projet de d�lib�ration vise � subventionner l'am�nagement de Level 256, plateforme d'innovation d�di�e � l'eSport. Ce projet avait �t� d�pos� par un particulier au budget participatif et rattach� � un autre projet de budget participatif plus global, "Du sport pour toutes et tous dans les quartiers populaires", estim� � plus de 6 millions d'euros.

Le c?ur de ce projet global est surtout de pouvoir offrir aux Parisiens et aux Parisiennes davantage de lieux de sport accessibles � tous et � toutes�: de nouvelles tables de ping-pong, des couvertures de terrain, de nouveaux �quipements pour la pratique de nouveaux sports comme le cricket et un skatepark, par exemple. En fait, le projet ici est de mettre une tr�s grosse somme d'argent, presque un million d'euros, pour cette r�alisation qui ne profitera pas au plus grand nombre.

C'est vrai, cette pratique de l'eSport se d�veloppe, c'est une nouvelle pratique, mais il faudrait que la Ville de Paris se permette de l'accompagner davantage pour faire respecter la mixit� sociale. Nous nous inqui�tons de la r�elle plus-value sociale que rev�t le projet. Le projet de d�lib�ration annonce la volont� de faire de cette future salle d'eSport un lieu de rencontres interg�n�rationnelles et de mixit� sociale. Cependant, m�me suite � nos diff�rents �changes, nous restons sceptiques et trop peu inform�s sur les tarifs pour pouvoir acc�der � cette salle, qui sera surtout r�serv�e aux associations d�j� form�es et sp�cialis�es dans la pratique de l'eSport.

Nous voyons d?un ?il bienveillant l'annonce de soir�es gratuites et de d�couverte de l'eSport, mais sous quelle r�gularit�? Y aura-t-il des efforts faits pour former des jeunes issus des quartiers populaires � la pratique de l'eSport�? Pourquoi ne pas pr�f�rer des actions dans les maisons de jeunes, les centres "Paris Anim'" pour que ces jeunes disposent de l?atelier eSport dans des lieux qu'ils fr�quentent d�j�? Cela aurait permis la certitude de les toucher davantage. Quant aux �changes interg�n�rationnels, nous n'avons pas soulign� de r�elles initiatives qui vont dans ce sens dans le projet, alors que l'eSport pourrait regrouper des g�n�rations qui ont de plus en plus de mal � se rencontrer et � partager de nouvelles activit�s. Idem pour la question de la promotion de cette discipline chez les femmes.

Nous craignons que le domaine de l'eSport soit source de revenus et de gains pour les grosses firmes industrielles. Nous redoutons que le partenariat priv�/public qu'ent�rine ce dispositif d�tourne l'objectif social que pourrait prendre l'ouverture de cette salle.

Je repose la question�: quel sera le tarif de la salle pour deux heures de jeu�? De 15 � 30 euros pour 2 heures de jeu, comme dans une salle de jeux traditionnelle�? Si c'est le cas, ce tarif est bien trop on�reux pour nous.

C'est la raison pour laquelle les Ecologistes s'abstiendront sur ce projet de d�lib�ration.

M. Christophe NAJDOVSKI, adjoint, pr�sident. - La parole est � Mme Danielle SIMONNET.

Mme Danielle SIMONNET. - Je pense m�me qu'on pourrait voter contre ce projet de d�lib�ration.

En effet, d�j�, pour intervenir dessus, je ne suis pas s�re que tous les conseillers savent de quoi il s'agit. Avec l'eSport, on est vraiment sur la question des sports, de jeux vid�o, de comp�titions, notamment les gens en ligne, les streamings en ligne par exemple ou les comp�titions organis�es. On est vraiment sur toute cette nouvelle pratique de jeux en ligne qui commence � bien se d�mocratiser. Il y a des exemples un peu plus classiques, plus connus, de Counter-Strike, jeux de foot, F.P.S. multijoueurs, jeux de combat, cela se diversifie mais cela reste quand m�me une certaine identit� tr�s marqu�e de jeux en ligne.

C'est d'abord et avant tout une industrie, et cette industrie de l?eSport g�n�re �norm�ment - �norm�ment�! - de revenus. Voil�, on n'est pas sur? Ce sont surtout des revenus publicitaires, cela repose aussi en m�me temps beaucoup sur du travail gratuit de b�n�voles. C'est vraiment un syst�me extr�mement particulier � interroger.

Il faut savoir que sur ce nouveau secteur florissant, il y a tout de m�me de nombreux probl�mes de structures v�reuses, qui se montent, ne sont pas toujours bien g�r�es, avec des propri�taires qui partent avec la caisse. Il y a eu beaucoup d'exemples assez sulfureux dans ce domaine, et j'esp�re que l� nous faisons attention. Il y a aussi les probl�matiques de joueurs professionnels qui, eux, estiment qu'ils devraient �tre r�mun�r�s et qui ne le sont pas. Il y a d?ailleurs un mouvement de revendications, de syndicalisation de ces "pro players" aux U.S.A.

Je voudrais rappeler que sur cette th�matique, il y a eu un scandale au Conseil r�gional d'Ile-de-France. En effet, Mme Val�rie P�CRESSE voulait allouer une �norme subvention de 200.000�euros - vous me direz, �norme, mais quatre fois moins importante que celle qu?on va attribuer aujourd?hui -, pour une structure eSport g�r�e en fait par Webedia, qui est un g�ant du Web, qui poss�de d�j� plusieurs sites principaux de presse, de jeux vid�o. A juste titre, le groupe Alternative �cologique et sociale du Conseil r�gional avait fait une d�marche aupr�s du tribunal administratif pour casser cette subvention et je pense qu?ils ont eu bien raison. On n'est pas dans le m�me cadre puisqu'on n'est pas sur une subvention � Webedia, mais on est quand m�me sur un montage assez �trange.

On donne 800.000 euros - je ne sais pas si vous vous en rendez compte, c?est une somme colossale, presque un million d'euros - pour une structure dont pour l'instant on ne sait pas grand-chose�; le projet de d�lib�ration est quand m�me bien court. Il y a des bonnes intentions dans le projet de d�lib�ration vis-�-vis de l'inclusivit�, de la mixit� hommes/femmes, mais cela me semble �tre plut�t des v?ux pieux. L'eSport est un milieu connu pour �tre assez en retard sur ces questions et je me demande quels sont les moyens dont on va se doter pour mettre en place, avec cette association, les actions qui permettraient d'atteindre ces objectifs.

Il n'y a aucune pr�cision sur la politique tarifaire, aucune pr�cision, du coup, sur les publics qui fr�quenteront ce lieu, leur ouverture sur l'ext�rieur, quelle articulation avec des d�marches �ducatives, p�dagogiques, avec par exemple les centres de loisirs, les centres d'animation. On est simplement sur un affichage, 800.000 euros pour le jeu vid�o en ligne�; je ne peux pas �tre convaincue par cela.

J?aimerais aussi enfin qu'on se pose la question de toute la r�alit� du droit du travail qu'il y a dans ce secteur. Quand j'�tais intervenue ici, l'an dernier, sur les scandales de droit du travail dans un certain nombre d'entreprises du jeu vid�o, on m'avait rigol� au nez. Or, depuis, il y a eu suffisamment d'articles dans la presse pour en parler. Cela ne touche pas qu'une seule entreprise, cela touche plusieurs entreprises o� il y a des probl�matiques de harc�lement sexuel, des probl�matiques de discrimination au travail, des probl�matiques de tr�s fortes pressions o� sous pr�texte qu'on est sur des jeunes cr�ateurs, qu?on est dans une dimension ludique de jeu vid�o, dans une certaine modernit�, le Code du travail n'est absolument pas respect�. Les gens sont mis sous pression au m�pris de leurs droits �l�mentaires. L�, il n'y a bien s�r aucun �l�ment sur cette face, sur ce probl�me.

Pour toutes ces raisons, je trouve qu'on ne nous donne pas assez d'�l�ments pour pouvoir soutenir un tel projet. En plus, ce qui nous a �t� pr�sent�, c'est que dans le budget participatif on n'�tait pas uniquement sous cet angle-l�, et finalement 800.000 euros sur un budget participatif vont �tre allou�s � l?eSport. C?est donc un peu de l?ordre du d�tournement du budget participatif. Ainsi, je voterai contre et je vous appelle � voter contre.

M. Christophe NAJDOVSKI, adjoint, pr�sident. - Pour r�pondre, la parole est � M. Jean-Fran�ois MARTINS.

M. Jean-Fran�ois MARTINS, adjoint. - Merci, Monsieur le Maire.

Je vais essayer de remettre de la rationalit� dans ce d�bat.

D?abord, parce qu'il s'agit d'un vote du budget participatif, et contrairement � ce que Mme�SIMONNET vient de dire, le libell� du projet qui a remport� la somme de 6 millions d?euros mentionnait la cr�ation ad hoc d'une salle de pratique amateur de l'eSport.

Je vais prendre pour Mme MOREL et Mme SIMONNET une explication tr�s claire comme analogie. C'est comme si nous construisions un gymnase, sauf qu?au lieu d?y pratiquer du basket, on va y pratiquer de l?eSport. S?y opposer reviendrait � dire "oui, mais si vous construisez un gymnase, les gens vont acheter des baskets, cela va enrichir Nike". Votre raisonnement qui consiste � dire que construire une ar�na va enrichir les �diteurs de logiciels est exactement du m�me ordre. Nous construisons une salle d�di�e � la pratique sportive, oui, sans doute que quelqu?un va s?enrichir � la fin, mais comme quand on fait du sport, les gens ach�tent des baskets�; nous ne pourrons pas encore municipaliser l?ensemble de la cha�ne �conomique.

Deuxi�me �l�ment? Non, mais alors laisse-moi? Je vais r�pondre aux autres? Danielle, tu n'as pas dit que cela comme n'importe quoi, je vais r�pondre aux autres, ne t'inqui�te pas.

Est-ce qu?il s?agit d?un partenariat public/priv�? C?est une subvention � une association qui s?appelle Paris and Co, dont j'esp�re que tous les conseillers de Paris connaissent l'existence. C'est l'Agence de d�veloppement �conomique et d?innovation de la Ville de Paris, qui a un incubateur d�di� au d�veloppement de l'�conomie du jeu vid�o et de l'eSport � Paris, et cet incubateur? Ainsi, Paris and Co, notre agence de d�veloppement, ce n?est pas le grand capital. C?est de Paris and Co que l?on parle, qui sera l'op�rateur d?une plateforme d�di�e � l?innovation et � l'incubation, dont des m�tres carr�s �taient pr�vus depuis le d�part pour la d�monstration des innovations port�es par les acteurs parisiens et pour la pratique amateur.

Dernier �l�ment, qu'est-ce que qui va se passer dans cette salle, combien cela va co�ter�? Je vous r�pondrai�: comme si je cr�e un gymnase. Ce sera la politique des associations qui auront des cr�neaux dans le gymnase en question. Aujourd'hui, si je prends par exemple le Paris Universit� Club, club centenaire, associatif, club de sport, omnisports du sud de Paris, qui a d�cid� d'avoir des stages d?eSport pendant les vacances scolaires, ces stages �taient gratuits pendant les vacances scolaires. Si je prends le C.A. Paris, tr�s cher � la maire du 14e, qui d�cide de faire des stages de foot, de compl�menter le foot r�el par du foot en jouant � l'une des deux licences c�l�bres de foot sur jeu vid�o, l� encore ces stages suppl�mentaires sont gratuits. Il y a d'autres associations pour lesquelles ce sera une licence comme dans un club sportif. On va veiller, nous, comme on le fait dans nos gymnases, comme on le fait dans nos piscines, � attribuer � des associations que nous connaissons, qui ont des projets sportifs, que nous soutenons. On est exactement dans cette logique.

Ainsi, 800.000 euros, �videmment c'est important, c'est une subvention d'investissement pour cr�er un lieu sportif, qui sera ensuite anim� avec des cr�neaux pour des associations, comme nos gymnases.

Je termine par un dernier �l�ment. Ce que je ne partage pas, Madame MOREL, c?est quand vous dites que cela ne profitera pas � tous. Il n'y a pas une activit� de loisir plus universelle aujourd'hui sur les moins de 25�ans que le jeu vid�o. C'est le produit culturel le plus consomm� par les jeunes, c'est la pratique de loisir la plus consomm�e chez les jeunes. Et je le dis � tous, en particulier � Mme�SIMONNET qui donne en permanence des le�ons de culture populaire, le snobisme qu'elle a � l'�gard du jeu vid�o est une attaque contre les classes populaires qui, elles?

Eh bien, oui, mais dans ces cas-l�, Madame SIMONNET? Mais dans ces cas-l�, Madame SIMONNET, ne faisons plus rien�! Ne faisons pas de sport, parce que des gens en Chine fabriquent des chaussures�! Ne faisons pas? Je suis exigeant, Madame SIMONNET, et c'est pourquoi nous le faisons avec des associations qui ont pignon sur rue, qui sont des associations d?int�r�t g�n�ral, dont certaines sont membres de f�d�rations de clubs omnisports, de f�d�rations associatives. Et c?est avec elles que nous construisons ce projet qui fera de Paris une premi�re en France, un lieu qui aura � la fois une salle amateur o� les associations pourront proposer de la pratique comme n'importe quel autre sport, un lieu plus professionnel pour d�velopper les activit�s �conomiques avec nos formats d'incubation traditionnels, et enfin une salle d?exp�rimentation pour d�montrer ce que les cr�ateurs parisiens, qu?ils soient associatifs ou entrepreneurs, sont capables de faire dans ce grand loisir populaire de la jeunesse parisienne qu'est l'eSport et que nous devons soutenir.

M. Christophe NAJDOVSKI, adjoint, pr�sident. - Apr�s ces interventions et la r�ponse de M. MARTINS au nom de l'Ex�cutif, nous allons passer au vote.

Je mets donc aux voix, � main lev�e, le projet de d�lib�ration DJS 98.

Qui est pour�?

Contre�?

Abstentions�? Le projet de d�lib�ration est adopt�. (2019, DJS 98).

Avril 2019
Débat
Conseil municipal
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