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VIII - Question d'actualité posée par le groupe Radical de Gauche, Centre et Indépendants à Mme la Maire de Paris et à M. le Préfet de police concernant l'efficacité des arrêtés limitant la consommation d'alcool.


Mme LA MAIRE DE PARIS. - Nous passons � la question d'actualit� suivante pos�e par Mme GOLDGRAB, pr�sidente du groupe RG-CI.

Mme Laurence GOLDGRAB. - Merci, Madame la Maire.

Madame la Maire, Monsieur le Pr�fet de police, mes chers coll�gues.

L?arr�t� du 28 janvier dernier vient �tendre les restrictions concernant la consommation d?alcool, notamment dans le 18e arrondissement, et pr�voit d�sormais une interdiction de la consommation d?alcool sur la voie publique entre 16 heures et 7 heures, et une interdiction de la vente � emporter d?alcool entre 20 heures et 8 heures du matin. Si l?arr�t� fait du 18e la zone la plus touch�e par l?interdiction, celle-ci s?�tend dans la plupart des arrondissements, des Champs-Elys�es � la Tour Eiffel, de Notre-Dame au Quartier Latin, en passant par Bastille et Oberkampf.

La question de la vitalit� nocturne de Paris est un sujet important, la pr�servation de la qui�tude des habitants aussi. Nous pouvons, nous devons imp�rativement conjuguer ces deux objectifs. Si nous partageons l?objectif �vident de lutte contre les multiples incidents, bagarres et nuisances, dus � une trop grande consommation d?alcool, nous souhaitons vous interroger sur l?efficience et l?efficacit� de ces mesures.

Ces arr�t�s emp�chent-ils les Parisiens qui souhaitent s?alcooliser de le faire�? N?encouragent-ils pas plus les ph�nom�nes de "binge drinking" ou biture expresse, ph�nom�ne assez r�pandu consistant en l?absorption de la plus grande quantit� d?alcool possible dans la plus courte p�riode possible�? L?impossibilit� de se fournir ou de consommer de l?alcool � l?ext�rieur, en effet, pourrait accentuer ce ph�nom�ne, en acc�l�rant la consommation � domicile et allant ainsi totalement � rebours du r�sultat escompt�.

D?autre part, constate-t-on des �volutions positives dans les quartiers�? La situation de certains quartiers demeure en effet insupportable, quand, dans d?autres, des progressions r�elles sont � constater et se font ressentir. La pr�vention autour de la question des nuisances a pu faire �voluer les situations. Vous le savez, les arr�t�s anti-alcool sont des textes restrictifs des libert�s. Or, � ce titre, l?interdiction ne doit �tre trop g�n�rale, ni trop absolue. Le tribunal administratif a d?ailleurs annul� de tels arr�t�s pr�fectoraux en 2013 et 2014, les magistrats ayant alors estim� que les risques de nuisance et de tapage qui avaient motiv� l?arr�t� ne suffisaient pas � justifier la prohibition nocturne. C?est dire qu?une interdiction doit �tre totalement justifi�e.

Aussi, nos questions sont les suivantes. Nous le savons, les arr�t�s anti-alcool ne sont pas pris au hasard�: ils sont motiv�s par des rapports de police et font suite � des plaintes. Aussi, quel est l?�tat de la verbalisation des consommateurs sur la voie publique, � l?heure actuelle, � Paris�? Par ailleurs, pouvez-vous t�moigner d?une r�elle efficacit� de ces arr�t�s�? Avez-vous constat� un recul des incidents depuis l?instauration de ce type d?arr�t�s�? Enfin, les arr�t�s anti-alcool sont-ils r�guli�rement rediscut�s selon l?�volution des situations locales�? Merci beaucoup des r�ponses que vous voudrez bien apporter.

Mme LA MAIRE DE PARIS. - Merci, Madame la Pr�sidente.

La parole est � Mme Colombe BROSSEL, puis M. le Repr�sentant du Pr�fet de police.

Mme Colombe BROSSEL, adjointe. - Merci beaucoup, ch�re Laurence GOLDGRAB pour votre question.

Vous faites r�f�rence � l?entr�e en vigueur, depuis le 28 janvier, de l?arr�t� anti-alcool pris par le Pr�fet de police sur une grande partie du 18e arrondissement. Ce type d?arr�t� est, vous l?avez dit, de sa comp�tence unique et peut viser � interdire la consommation d?alcool sur la voie publique, mais aussi l?interdiction de sa vente � emporter en soir�e sur un p�rim�tre d�fini.

La Maire de Paris a �t� inform�e de ce nouvel arr�t� le 25 janvier par courrier. Ce nouvel arr�t� couvre une grande partie du 18e, incluant les quartiers de la Chapelle, la Goutte d?Or, l?est de la Butte Montmartre et le nord du 18e. Je laisserai M. le Repr�sentant du Pr�fet de police pr�senter cette d�marche et r�pondre � vos interrogations, mais ces restrictions ne sont pas nouvelles, puisque trois arr�t�s existaient pr�c�demment. J?imagine que, ainsi pr�sent� et globalis�, cet arr�t� permet de gagner en lisibilit�.

Nous accueillons, globalement, favorablement ces arr�t�s, afin que les policiers aient une action cibl�e sur des quartiers qui connaissent de gros rassemblements de personnes alcoolis�es, provoquant de nombreux incidents, bagarres et nuisances nocturnes. Ils doivent en effet permettre aux policiers d?agir plus efficacement pour verbaliser les consommateurs d?alcool sur la voie publique, ainsi que les commerces qui vendraient de l?alcool � emporter en dehors des horaires d�finis.

Cependant, rappelons deux choses. D?abord, ces arr�t�s ne sont qu?un outil parmi d?autres - vous avez raison de le rappeler - pour agir en faveur de la tranquillit� publique. Poser la question de leur efficacit� est, par principe, comme pour tout dispositif, pertinent et n�cessaire. Et puis, la force de l?exp�rience nous laisse � penser que, pour �tre efficaces, ces arr�t�s doivent r�pondre � trois conditions.

D?abord, cibler un secteur pr�cis et connu de tous qui permet d?accro�tre les capacit�s d?action des forces de l?ordre sur le terrain. C?est en ce sens que je crois important qu?une cartographie des arr�t�s parisiens et une communication large soit mise en place, proposition que je soumets �videmment au Repr�sentant du Pr�fet de police.

Bien entendu, ils doivent �tre associ�s de moyens n�cessaires � leur mise en ?uvre, notamment en mati�re d?effectifs de police pr�sents sur le terrain et fid�lis�s car rien n?est pire qu?un arr�t� qui n?est pas appliqu� ou qui produit, de fait, chez l?ensemble des riverains, un sentiment de d�couragement, lorsqu?ils ne voient pas la situation �voluer.

Enfin, ils doivent �tre pris en concertation avec les maires d?arrondissement, avec la Maire de Paris, avec �videmment mon coll�gue Fr�d�ric HOCQUARD, puisque la dimension "ville vivant la nuit" fait partie de ces sujets, et doivent faire l?objet de bilans et d?�ventuelles adaptations.

Aussi, je souscris pleinement � la fin de vos propos, disant qu?il pourrait �tre utile que la Pr�fecture de Police nous communique un bilan de la verbalisation. Cette communication est d?autant plus importante qu?elle est souhait�e par les collectifs d?habitants et associations de quartiers, qui attendent, �videmment, beaucoup de leur mise en ?uvre.

Nous serons en tout cas aux c�t�s de M. le Repr�sentant de la Pr�fecture de police pour les accompagner.

Mme LA MAIRE DE PARIS. - Merci beaucoup, Colombe BROSSEL.

La parole est � M. le Repr�sentant du Pr�fet de police.

M. LE REPR�SENTANT DU PR�FET DE POLICE. - Merci, Madame la Maire.

Madame la Pr�sidente, nous sommes, nous aussi, en permanence en train de nous poser la question de l?efficacit� des mesures que nous prenons. S?agissant des arr�t�s anti alcool, permettez-moi de r�pondre � vos diff�rentes interrogations en reprenant d?abord les constats ou les motifs � partir desquels nous prenons ces arr�t�s.

Dans les quartiers qui connaissent une forte fr�quentation - touristique ou pas, peu importe -, la consommation d?alcool sur la voie publique provoque des difficult�s�: ce sont des nuisances sonores, �ventuellement des risques, des d�gradations de l?espace urbain, de mobilier urbain autant que de biens priv�s�; ce sont parfois m�me des actes violents qui peuvent aller, dans certains cas, jusqu?au d�c�s des individus concern�s. C?est un constat qui n?est pas propre � Paris mais qui est, encore une fois, r�alis� par les services de police, par les riverains et par un certain nombre d?entre vous au quotidien. Voil� le constat sur lequel se fondent ces arr�t�s.

C?est au titre de ses pouvoirs de police g�n�rale que le Pr�fet peut, dans certaines circonstances, prendre des arr�t�s qui vont venir restreindre la consommation d?alcool sur la voie publique et la vente d?alcool � emporter. Vous l?avez rappel�, en droit, ces arr�t�s sont extr�mement encadr�s. Ils doivent concerner un territoire pr�cis�ment d�limit�, se fonder sur des faits ou des constats ant�rieurs qui montrent la n�cessit� de prendre ce type de mesures restrictives, en effet, des libert�s publiques, et, d?autre part, �tre r�guli�rement r�vis�s � l?occasion du temps, pour que ces mesures ne soient pas permanentes et d�finitives.

C?est ce travail qui est r�alis� avant chaque arr�t� pr�fectoral pris sur le ressort parisien, concernant la restriction de la consommation d?alcool et la vente � emporter. Ce travail pr�alable se fonde sur les signalements des individus, des riverains, des maires d?arrondissement, de la Ville de Paris, des services de police, bien �videmment, et, � partir de ces �l�ments, le Pr�fet de police peut prendre une mesure.

Aujourd?hui, sur Paris, nous comptons vingt-sept arr�t�s pr�fectoraux en vigueur. Ces vingt-sept arr�t�s pr�fectoraux peuvent �tre compl�t�s, de fa�on ponctuelle, par des arr�t�s temporaires qui concernent soit des p�riodes de l?ann�e marqu�e par des �v�nements susceptibles, encore une fois, de donner lieu � des consommations d?alcool importantes et excessives, ou pour faire face � des situations, au contraire, � certaines p�riodes de l?ann�e, je pense en particulier � un arr�t� r�guli�rement pris dans le 5e arrondissement pour la consommation d?alcool sur les quais de Seine.

Vous avez rappel� les r�gles�; je n?y reviendrai pas.

Nous avons cherch� � harmoniser les horaires de d�but et de fin de ces mesures r�glementaires pour qu?elles soient lisibles par les citoyens, autant que faciles � appliquer par les services de police.

Une petite pr�cision sur l?arr�t� du 18e arrondissement�: il couvre un p�rim�tre g�ographique en effet assez large, mais il correspond, pour une tr�s large part, � la fusion de sept arr�t�s pr�fectoraux jusqu?ici en vigueur, dont la superposition et la s�dimentation pouvaient poser des probl�mes d?efficacit�.

En termes d?efficacit� pr�cis�ment�: trois dimensions. La premi�re, c?est la fonction pr�ventive de ces arr�t�s�: c?est permettre par le signal envoy� la limitation des ventes � emporter, la limitation des cas o� les consommateurs seront amen�s � consommer de fa�on excessive de l?alcool sur la voie publique. La deuxi�me utilit� de ces arr�t�s est la vocation r�pressive�: en 2017, sur le ressort de Paris, les policiers, les services de la Pr�fecture de police ont �t� amen�s � proc�der � 717 verbalisations. Avec 717 verbalisations, on ne peut pas d�compter statistiquement, en revanche, le nombre de troubles �vit�s ou d?atteintes � la tranquillit� publique qui ont pu �tre �vit�es par l?interm�diaire de ces arr�t�s. Ils offrent �galement un int�r�t, c?est qu?ils permettent de proc�der � des contr�les d?identit�, et donc souvent de stopper la d�rive ou le d�rapage lorsqu?on sent qu?une situation impliquant plusieurs individus est susceptible de d�raper.

Troisi�me utilit� de ces arr�t�s, c?est qu?ils peuvent permettre de fonder des mesures de fermeture administrative des �tablissements qui auraient contrevenu � l?arr�t� pr�fectoral d?interdiction de vente d?alcool � emporter. Nous avons �t� amen�s � fermer dans certains cas des commerces qui g�n�raient des troubles � l?ordre public et � la tranquillit� publique en violant encore une fois ces arr�t�s pr�fectoraux.

Dernier �l�ment, je souscris aux propos de l?adjointe � la Maire en charge de la s�curit�. Ce n?est qu?un des outils qui participent � la pr�servation de la tranquillit� publique dans Paris. Il y a un certain nombre d?autres proc�dures, qu?elles soient administratives ou judiciaires qui peuvent participer � la pr�servation de ces deux objectifs�: tranquillit� et ordre public. Les proc�dures pour ivresse publique manifeste sont tr�s nombreuses dans Paris. Dans la mise en ?uvre des mesures r�glementaires concernant les d�bits de boisson, nous avons proc�d� en 2017 � 210 fermetures administratives sur le fondement du code de la sant� publique ou du code de la s�curit� int�rieure. Et je n?oublie pas toutes les actions de pr�vention et de sensibilisation qui associent aussi bien les consommateurs que les professionnels, qui sont destin�es � �viter d?en arriver � la situation o� la sanction, qu?elle soit administrative ou judiciaire, sera prise, ce qui constitue toujours un �chec.

La Pr�fecture de police participe aux travaux du Conseil de la nuit, aux r�unions des Conseils de s�curit� et de pr�vention des arrondissements qui �voquent r�guli�rement ces sujets, ainsi qu?aux Commissions de r�gulation des d�bits de boissons qui sont mises en place dans un certain nombre d?arrondissements. Dans le 5e arrondissement, c?�tait la derni�re commission � laquelle nous avons particip�.

En tout cas, nous sommes vigilants lorsque nous prenons ces mesures � concilier � la fois la n�cessit� pour chacun de pouvoir s?amuser mais aussi, et c?est le r�le du Pr�fet de police, la n�cessit� de pr�server la tranquillit� et l?ordre public.

Mme LA MAIRE DE PARIS. - Merci beaucoup.

Madame GOLDGRAB, je vous cherchais. Je vous donne la parole.

Mme Laurence GOLDGRAB. - Merci beaucoup pour ces �l�ments de r�ponse. Il faudrait appr�cier l?�volution de la situation dans les quartiers pour prendre la mesure de l?efficacit� de ces mesures.

Mme LA MAIRE DE PARIS. - Merci beaucoup.

Février 2018
Débat
Conseil municipal
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