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2016 DDCT 40 - Subventions (230.000 euros) à dix associations, conventions et avenants à conventions au titre de la prévention, mise à l’abri et la lutte contre la traite des êtres humains. Vœu déposé par le Groupe Ecologiste de Paris relatif à la "loi visant à renforcer la lutte contre le système prostitutionnel". Vœu déposé par l'Exécutif.


M. Mao PENINOU, adjoint, pr�sident. - Nous examinons maintenant le projet de d�lib�ration DDCT 40 et le v?u n��76 qui y est rattach�. Il s?agit de subventions � 10 associations au titre de la pr�vention, de la mise � l'abri et de la lutte contre la traite des �tres humains. La parole est � Jean-Bernard BROS, puis Anne SOUYRIS, puis Buon Huong TAN, puis Herv� B�GU�.

M. Jean-Bernard BROS. - Merci, Monsieur le Maire. Mes chers coll�gues, dans ce projet de d�lib�ration, notre Ville apporte son soutien � diverses associations intervenant pour la pr�vention et la mise � l'abri des personnes prostitu�es � Paris. Les personnes prostitu�es sont tr�s souvent dans des situations de vuln�rabilit� sociale et sanitaire contre lesquelles nous devrons ?uvrer. Toutefois, des divergences id�ologiques demeurent en France sur les modalit�s de lutte contre les prostitutions, divergences que l'on retrouve dans le tissu associatif. Aussi, une association parmi les 10 que le projet de d�lib�ration propose de subventionner a attir� notre attention�: le Mouvement du Nid, pr�sent� comme une association - je cite - "abolitionniste et f�ministe". Nous partageons la volont� de prot�ger l'int�grit� physique et psychologique des personnes prostitu�es. Nous consid�rons qu'une l�gislation abolitionniste ne fait qu'augmenter la clandestinit� des personnes prostitu�es et complique le travail de pr�vention. Ainsi, au regard de nos propres propositions sur la question de la prostitution, nous ne souhaitons pas que notre Ville accorde une subvention � cette association qui poursuit ouvertement un projet aux marqueurs forts dont nous ne partageons pas la vis�e politique. Voici, mes chers coll�gues, pourquoi nous nous abstiendrons sur ce projet de d�lib�ration. Je vous remercie.

M. Mao PENINOU, adjoint, pr�sident. - Merci. La parole est � Anne SOUYRIS.

Mme Anne SOUYRIS. - Monsieur le Maire, chers coll�gues, ce projet de d�lib�ration qui traite de subventions au titre de la pr�vention, mise � l'abri et lutte contre la traite des �tres humains, nous incite � parler d'un sujet qui s'invite assez r�guli�rement dans notre Conseil - la prostitution sur le territoire parisien - sujet sensible qui touche chacun et chacune parce qu?il parle de sexualit�, mais qui touche surtout la vie des personnes prostitu�es elles-m�mes. C?est cela, et il est important de nous en souvenir, qui doit nous importer ici. Ainsi, regrettons-nous une fois de plus de voir le peu de cas fait de ce sujet, notamment au vu de l'empilement de subventions au sein de quelques pauvres d�lib�rations chapeaux. En effet, cela nous emp�che de regarder pr�cis�ment l'efficacit� et la qualit� de chacune face aux dures r�alit�s de la prostitution de rue. Car il ne s'agit pas de sujets anodins ou consensuels, loin de l�, mais de questions suffisamment graves pour mettre en cause la sant�, les droits, la vie m�me de ces personnes actuellement plus que jamais malmen�es. Nous souhaitons ainsi souligner � quel point il nous semblerait pertinent d'envisager d�sormais un fonctionnement plus attentif et plus diff�renci� sur la question. Pour cette fois, les �lus �cologistes demandent un vote diff�renci�, comme Jean-Bernard BROS. En l'occurrence, nous souhaitons sortir la subvention du Mouvement du Nid de ce projet de d�lib�ration. Cette subvention nous semble, en effet, d'un autre type que les autres. Si nous voterons pour les autres subventions pr�sentes dans le projet de d�lib�ration, c'est parce qu?elles concernent tr�s directement le terrain, quel que soit leur avis sur la question de la prostitution. Celle du Mouvement du Nid se situant sur celui de la pure id�ologie ne nous semble pas pertinente. En effet, pour le Mouvement du Nid, il n'est pas question d'actions de terrain, pas d'aides directes aux personnes prostitu�es. Il s'agit l� d'interventions au sein d?�coles, ce qui a certes son importance, mais qui nous interroge pour le moins de la part d'une association qui a souvent �t� d'une tr�s grande violence � l'�gard des personnes prostitu�es et qui - rappelons-nous-en�- se refusait de donner des pr�servatifs aux prostitu�es parce que, selon elle, c'�tait une incitation (sic) � la prostitution. Toujours sur cette question, nous avons souhait� d�poser un v?u relatif � l'application sur le territoire parisien de la loi visant � renforcer la lutte contre le syst�me prostitutionnel et � accompagner les personnes prostitu�es. N'�tant pas �lus au Parlement, notre r�le n'est absolument pas de refaire les d�bats parlementaires. Nous posons simplement les jalons d'une application de la loi qui permettrait de ne pas pr�cariser plus grandement les personnes prostitu�es. C'est pourquoi nous demandons � ce que son application ne conduise pas � une mise en danger des prostitu�es en les condamnant � exercer leur activit� dans des lieux recul�s et sans plus aucun choix sur les clients, �tant donn� le risque de baisse de leurs revenus et la peur des clients de se faire voir. Nous demandons aussi � ce que Paris mette en place un dispositif permettant d'expliquer � chaque personne prostitu�e les nouvelles dispositions de la loi dans une langue intelligible par la personne concern�e afin qu?elle puisse, le cas �ch�ant et si elle le souhaite, �tre accompagn�e dans le parcours de sortie de la prostitution contenu dans la nouvelle loi. Bien �videmment, nous demandons que Paris continue � financer les associations de terrain qui accompagnent et informent les personnes prostitu�es dans leurs d�marches administratives, sociales, juridiques et sanitaires, qu'elles restent ou qu?elles sortent de la prostitution. Je vous remercie.

M. Mao PENINOU, adjoint, pr�sident. - Merci. La parole est � Herv� B�GU�.

M. Herv� B�GU�. - Merci, Monsieur le Maire.

Chers coll�gues, il faut du courage pour affronter la question de la prostitution. Cela demande une connaissance rigoureuse de la r�alit�, une r�alit� cach�e dans les bois, dans les camions ou dans des appartements miteux partag�s � plusieurs. Il s'agit d'aborder le parcours de femmes qui sont � la merci d'un r�seau qui ne leur laisse aucune �chappatoire. Le projet de d�lib�ration, port� par notre camarade et amie H�l�ne BIDARD, entend lutter contre les questions de traite des �tres humains et d'exploitation sexuelle. On nous dit souvent que lutter contre la prostitution, �tre abolitionniste - on l'a entendu ici -, pr�cariserait les personnes prostitu�es, les mettraient en danger. Ce n'est pas la prostitution qui rend pr�caire. C'est parce que l'on est pr�caire que l'on est prostitu�. La prostitution est le r�sultat d'une violence �conomique et symbolique forte qui p�se sur les femmes. C'est la violence ultime exerc�e sur des femmes pr�caris�es. C'est un moyen de survie paradoxalement dangereux et mortif�re. Il n'y a plus d'�chelle dans le danger � ce niveau. Je voulais, d'ailleurs, � ce sujet, souligner la campagne qui a �t� men�e par la Ville de Paris avec le Mouvement du Nid durant l'Euro 2016, et aussi la campagne de sensibilisation envers de potentiels clients sur les violences et les crimes dont sont victimes les personnes prostitu�es. Ces crimes et ces violences ne sont pas un mythe�: c'est une r�alit�. Ce qui est un mythe, c?est que les prostitu�es qui exercent depuis des dizaines d?ann�es dans une m�me rue et qui connaissent bien le terrain sont majoritaires. Elles reconnaissent, elles-m�mes, �tre une poign�e, 3�% tout au plus. Plus de 90�% des prostitu�es sont victimes de r�seau mafieux. Elles ne connaissent pas leurs clients. Elles sont choisies par les clients. Il ne peut y avoir de mise en danger des prostitu�es. La prostitution est un danger. Il n'existe pas de prostitution s�curis�e. Rien ne peut garantir la s�curit� totale d'une prostitu�e. Si l'on veut lutter contre les violences faites aux prostitu�es, il faut lutter contre la prostitution elle-m�me. Je me permets de citer un extrait de la circulaire du 22 janvier 2015 de politique p�nale en mati�re de lutte contre la traite des �tres humains, qui ne laisse aucun doute�: "La traite des �tres humains est une r�alit� tangible et massive qui d�place des millions d'individus d'un pays � un autre gr�ce � l'action de vastes r�seaux organis�s qui abusent de toutes les formes de vuln�rabilit� potentielle des personnes concern�es. La traite des �tres humains � des fins d'exploitation sexuelle est la forme d'exploitation humaine la plus ancienne et la plus r�pandue. En France, cette forme de traite est aujourd'hui principalement le fait de r�seaux �trangers". Nous le savons tous, les femmes, y compris des jeunes filles et des enfants, arrivent en masse en Europe, en France, dans certains quartiers de Paris � Ch�teau-Rouge ou � Belleville. Elles sont mineures, effray�es, se font violer, brutaliser et s�questrer. Savez-vous au moins que lorsque ces filles sont envoy�es en France pour �tre prostitu�es, on les habille d'une certaine couleur et d'une certaine mani�re pour que les prox�n�tes puissent les rep�rer et savoir lesquelles rapporteront davantage. Savez-vous dans quelles conditions meurent les femmes prostitu�es�? Elles sont tu�es � coup de poing am�ricain, d�fenestr�es, poignard�es � de multiples reprises, parfois br�l�es vives. Comment ne pas prendre cela en compte, la mise en danger est l�, la violence est l�, nous devons accepter de voir cette situation absolument intol�rable. C'est donc un devoir que de soutenir ce projet de d�lib�ration qui permettra � diverses associations d'assurer l'accompagnement social, juridique, sanitaire et psychologique de toutes ces femmes. Ce sont ces associations qui aident les personnes prostitu�es � s'en sortir en s�curit� et � se reconstruire. Il ne s'agit pas l� de choix purement id�ologique. C'est une r�alit� concr�te de tous les jours et sur le terrain. Une des solutions � apporter � toutes ces femmes dites sans papiers, ce n'est pas la prostitution, c'est la r�gularisation. Se prostituer, c'est �tre en danger, �tre r�gularis�, c'est le d�but d'une nouvelle vie faite enfin de choix r�els. Je conclus. Ces associations sont un appui pour les prostitu�es en question, au quotidien, mais cela ne les emp�che pas, pour certaines et pour nous, de lutter contre les perspectives de sortie, menant � terme � l'abolition de la prostitution. C'est pour cela que nous voterons ce projet de d�lib�ration de fa�on enthousiaste.

M. Mao PENINOU, adjoint, pr�sident. - Merci. H�l�ne BIDARD pour vous r�pondre.

Mme H�l�ne BIDARD, adjointe. - Chers coll�gues, merci aux orateurs. Je vous remercie de me donner encore une fois l'occasion de m'exprimer sur l'action de la Ville de Paris s'agissant de la prostitution. Deux constats s'imposent � moi, suite � mes rencontres avec des personnes prostitu�es, des associations, et notamment apr�s l'Euro 2016. D'abord, la prostitution, c'est un syst�me d'exploitation des plus vuln�rables�: 85�% sont des femmes qui sont � plus de 90�% des migrantes ou d'origine �trang�re. Il y a aussi malheureusement beaucoup de mineurs dans les rues parisiennes. Je remercie tous les adjoints qui, � mes c�t�s, soutiennent une action volontariste en leur direction: Colombe BROSSEL, Dominique VERSINI, Nawel OUMER, Bernard JOMIER, Ian BROSSAT entre autres. Il y a besoin de lisibilit� et c'est le second point sur le droit � vivre sans devoir faire de son corps une marchandise, ni subir la violence inh�rente aux rapports entre clients et personnes prostitu�es. La loi du 13 avril 2016, puisque vous en avez parl� et qu'on en parle dans le v?u, a permis de poser un cadre national afin de renforcer la lutte contre le syst�me prostitutionnel et de permettre l'accompagnement de ces personnes. Ces objectifs sont partag�s par la Ville de Paris depuis de nombreuses ann�es. C'est pourquoi nous avons fait le choix de soutenir l'action des associations de terrain et d'agir, dans une coordination parisienne des acteurs, rassemblant les services de police, de justice, des services de la Ville et les associations. L'objet de ce projet de d�lib�ration est le fruit d'�changes et d'analyses des bilans d'action des associations et de leur efficacit�. Avec certaines, nous allons porter de nouveaux projets et je pense par exemple � l'"Amicale du Nid". Il y a besoin d'amplifier l'aide aux associations qui agissent pour soustraire les personnes prostitu�es aux r�seaux de la traite, comme c'est le cas dans 95�% des situations. C'est le cas du travail que nous faisons avec "Les amis du bus des femmes" qui accompagnent les jeunes Nig�rianes, notamment mineures, ou encore du Foyer Jorbalan qui propose une mise � l'abri s�curis�e. On a �galement des associations qui accueillent du public en situation d'exclusion ou d'addiction � la drogue et qui ont d�cid� d'ouvrir des accueils sp�cifiques pour leurs publics en situation de prostitution. C'est le cas de "Alta�r" ou de l'"A.N.R.F." qui fait de la mise � l'abri des jeunes de 18 � 25 ans en situation de vuln�rabilit�. Enfin, c'est le cas du "Mouvement du Nid" qui r�alise des maraudes et de l'accompagnement de jeunes en situation de prostitution dont certaines leur sont orient�es directement par l'Aide sociale � l'enfance de Paris. Donc, je m'�tonne un peu de ce que M. BROS et Mme SOUYRIS ont pu dire puisque nous finan�ons le "Mouvement du Nid" au titre de cet accompagnement et de ce travail fait avec l'Aide sociale � l'enfance de Paris. Le "Mouvement du Nid" a aussi pu mesurer la n�cessit� de mener des actions de pr�vention afin de sensibiliser les jeunes � la lutte contre la marchandisation du corps et les violences sexuelles ainsi que sur l'achat d'actes sexuels. C'est comme cela que le "Mouvement du Nid" a accompagn� Paris pour une campagne tr�s forte durant l'Euro 2016, reprise m�me au plan national par le Minist�re des Droits des Femmes. Je remercie d'ailleurs Jean-Fran�ois MARTINS qui a �t� pr�sent pour nous accompagner dans ce projet r�alis�. Vous pouvez donc constater qu'au moment d'arbitrer les subventions, la question n'est pas de juger la dimension abolitionniste de telle ou telle association. Certaines affichent leurs avis sur ce sujet, d'autres non, mais toutes agissent pour lutter contre les violences inh�rentes � la prostitution et accompagnent ces personnes en respectant leur volont� d'en sortir. Le v?u du groupe Ecologiste de Paris demande � la Ville de prendre en charge des dispositifs qui rel�vent de l'Etat. Ce v?u sous-entend que l'ensemble des violences subies par les personnes prostitu�es viennent des forces polici�res ou du fait m�me de la loi. Pour ce qui est de la loi, je vous invite, encore une fois, � la relire. D'une part, elle met fin au d�lit de racolage et les personnes prostitu�es ne sont plus consid�r�es comme des d�linquantes, et ce au b�n�fice d'une p�nalisation des clients, ce qui est donc du ressort de la Pr�fecture de police. D'autre part, la loi, assortie de mesures dont nous attendons les d�crets d'application, va avoir un fonds d�di� pour le parcours de sortie de la prostitution et l'insertion sociale et professionnelle, la d�livrance d'autorisations de s�jour de 6 mois et droit au travail pour les personnes �trang�res et des actions de pr�vention et de sensibilisation, notamment aupr�s des plus jeunes. C'est pourquoi je vous invite � retirer ce v?u au b�n�fice d'un v?u de l'Ex�cutif qui a pour objet d'interpeller les services de l'Etat sur les voies et moyens pr�vus pour la mise en application de cette loi, et notamment pour tout le volet qui doit permettre de prot�ger les prostitu�es. Notre v?u, que nous voterons tous ensemble j'esp�re, revient �galement sur la n�cessit� de renforcer les moyens de lutte contre les r�seaux de prox�n�tes, pour endiguer la mont�e de la prostitution de rue ou via les r�seaux Internet, � propos duquel tout le monde fait le constat d'une pr�sence accrue de mineurs, mais aussi pour lutter et continuer � lutter contre les lieux de prostitution dissimul�s dans certains bars et salons de massage. Je vous invite donc, chers coll�gues, � voter pour l'ensemble de ce projet de d�lib�ration ainsi que pour le v?u de l'Ex�cutif. Je vous remercie.

M. Mao PENINOU, adjoint, pr�sident. - Merci. En r�ponse au v?u n��76, l'Ex�cutif a donc d�pos� le v?u n��76 bis. Le groupe Ecologiste de Paris maintient-il�?

Mme Anne SOUYRIS. - Nous acceptons le v?u de l'Ex�cutif auquel nous avons travaill� ensemble.

M. Mao PENINOU, adjoint, pr�sident. - Le v?u n��76 est retir�. Tr�s bien, merci. Je mets aux voix, � main lev�e, le v?u n��76 bis de l'Ex�cutif. Qui est pour�? Qui est contre�? Qui s'abstient�? Le v?u est adopt�. (2016, V. 283). Le groupe Ecologiste de Paris a demand� un vote dissoci� sur l'article 8 du projet DDCT 40. Je mets aux voix, � main lev�e, l'article 8 du projet de d�lib�ration DDCT 40. Qui est pour�? Qui est contre�? Qui s'abstient�? L'article 8 est adopt�. Je mets aux voix, � main lev�e, les autres articles du projet de d�lib�ration DDCT 40. Qui est pour�? Qui est contre�? Qui s'abstient�? Le projet de d�lib�ration est adopt�. Je vous en remercie. (2016, DDCT 40).

Septembre 2016
Débat
Conseil municipal
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