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2015 SG 93 - Subvention (37.000 euros) et convention avec l’association "Médecins du Monde" (18e).


Mme Alexandra CORDEBARD, adjointe, pr�sidente. - Nous passons � l?examen du projet de d�lib�ration SG 93�: subvention et convention avec "M�decins du Monde". La parole est � M. Herv� B�GU� pour 5 minutes.

M. Herv� B�GU�. - Madame la Maire, mes chers coll�gues. Ce projet de d�lib�ration a mis notre groupe dans un grand embarras et je vais tenter de vous dire ce qui nous g�ne. A la lecture de l?expos� des motifs, nous ne pouvons qu?�tre d?accord avec les objectifs et les motivations qui conduisent � aider cette association. Qui pourrait remettre en cause le r�le de "M�decins du Monde" sur tous les fronts depuis des ann�es, dans les lieux les plus difficiles ou d?autres ont renonc� � aller�? A Calais, avec les migrants, dans les camps de r�fugi�s � la fronti�re syrienne, etc. Cette association attire le respect et l?admiration de tous, mais il est un sujet pour nous essentiel qui doit sous-tendre l?action d?une association qui s?occupe des personnes prostitu�es. A-t-elle comme objectif de tout faire, de tout proposer pour que la personne sorte de sa situation de prostitu�e, qu?elle aide ces personnes � d�noncer ceux qui profitent de leur situation de faiblesse, leur indique les parcours qui permettent � ces femmes de sortir de la clandestinit� et de la violence, ou bien renonce-t-elle de prime abord � ce choix�? Nous avons plus que des doutes sur le "Lotus Bus", non pas dans le travail accompli en mati�re sanitaire mais en mati�re d?information et d?aiguillage de ces personnes vers une sortie de leur condition. Je sais bien que la chose n?est pas simple et que, peut-�tre plus que d?autres, le ph�nom�ne de la prostitution chinoise est encore largement m�connu. Mais quand ces femmes parlent, que disent-elles�? Qu?elles se prostituent pour rembourser les passeurs ou les faussaires qui les ont "aid�es" � venir ici. Elles disent que leur famille et parfois leurs enfants rest�s en Chine sont victimes de chantages ou de menaces. Que devons-nous faire�? Renoncer � les aider�? Certainement pas. Elles ne sont en rien responsables et elles disent, toutes ou presque, qu?elles n?ont pas le choix et, si elles l?avaient, elles ne se prostitueraient pas. La France s?enorgueillirait de voter d�finitivement le texte issu du Parlement sur la p�nalisation du client, car il remet les choses dans le bon sens�: ce n?est pas la prostitu�e qu?il faut d�noncer mais bien celui qui consid�re que s?acheter un corps est une action comme une autre. Nous ne pouvons nous y r�soudre. Bien entendu, il faut �tre d?une grande s�v�rit� � l?�gard de ceux qui organisent ces r�seaux de trafic d?�tres humains, car le march� prostitutionnel a explos� dans le monde, il est d�sormais aussi important que le trafic d?armes ou de stup�fiants. Nous souhaiterions vivement que nous r�orientions notre aide vers des associations qui ont clairement pris ce parti, celui de l?�tre humain et celui de la sortie de la prostitution, plut�t que vers celles qui sont pour le moins ambigu�s sur le sujet. Il existe plusieurs associations qui r�pondent � cette philosophie, c?est donc pour ces raisons que notre groupe votera contre ce projet de d�lib�ration. Je vous remercie.

Mme Alexandra CORDEBARD, adjointe, pr�sidente. - Merci, Monsieur B�GU�. M. Bernard JOMIER, pour vous r�pondre.

M. Bernard JOMIER, adjoint. - Merci, Madame la Maire. Monsieur B�GU�, j?ai entendu votre embarras. Je vous ai entendu parler de "M�decins du Monde" comme d?une association qui allait dans les lieux les plus difficiles du monde et je crois que, au c?ur de notre ville, travailler avec les prostitu�es, et particuli�rement les femmes prostitu�es chinoises, fait partie des lieux les plus difficiles de notre ville. Cette association, le "Lotus Bus" est une association qui travaille aupr�s de personnes. Ce n?est pas une association qui a pr�tention, et "M�decins du Monde" ne l?a pas, � r�gler un d�bat sur la question globale de la prostitution, des r�seaux et de cet affrontement que je connais bien, qui existe, entre une vision dite abolitionniste et une vision dite de r�duction des risques. La r�alit�, c?est celle des femmes qui sont prises en charge par le "Lotus Bus". La r�alit�, c?est qu?elles sont prises en charge par des m�decins, des infirmi�res, des travailleurs sociaux, des programmes sociaux. La r�alit�, c?est qu?elles sont accompagn�es et orient�es, plus de 200 d?entre elles, vers notre syst�me de prise en charge sociale et d?accompagnement. La r�alit�, c?est qu?elles trouvent au "Lotus Bus" une entr�e dans le syst�me de sant� et dans le syst�me social, qui est le premier pas � l?�chelon individuel pour sortir de la prostitution. Car c?est le maintien dans l?isolement, c?est le maintien coup� de notre soci�t� qui entretient la d�pendance au syst�me prostitutionnel mafieux. Et le travail de lien que fait le "Lotus Bus", le travail de pr�vention est au fond un travail de lutte contre le syst�me prostitutionnel comme il est un travail d?appui � ces femmes. Monsieur B�GU�, 85�% des femmes prostitu�es chinoises sont victimes de violences. Devons-nous les laisser face � ces violences�? Ces femmes sont accueillies au "Lotus Bus" et elles y trouvent des r�ponses. Plus de 60 d'entre elles, en 2014, ont pu, victimes de violences, �tre accompagn�es jusqu'au d�p�t de plainte contre ceux qui les maintiennent dans ce syst�me violent. Vous voyez donc que ce travail difficile, quotidien est un travail qui vient en appui � des femmes particuli�rement fragiles et ce travail, il faut le soutenir. Enfin, j'en terminerai par l�, � l'heure o� avec la Maire nous avons lanc� le programme de notre ville sans Sida, les femmes prostitu�es font partie de celles qui sont victimes de l'�pid�mie de VIH. Le fait de pouvoir maintenir le contact avec ces femmes, de pouvoir leur proposer le d�pistage est essentiel. En 2014, ce sont 23.000 passages qui ont eu lieu au "Lotus Bus", concernant plus d?un millier de femmes. En 2015, ce sera moins, suite � des op�rations de police dont je ne discute pas ici la l�gitimit�. Mais attention, moins le "Lotus Bus" sera en contact avec ces femmes, plus elles seront isol�es, plus elles seront victimes de violence et plus elles seront expos�es � des risques sanitaires et sociaux. Je vous appelle vraiment, en responsabilit�, � approuver cette subvention. Je vous remercie.

Mme Alexandra CORDEBARD, adjointe, pr�sidente. - Merci, Monsieur JOMIER. La parole est � Fr�d�rique CALANDRA, maire du 20e arrondissement, puis � Fran�ois DAGNAUD, maire du 19e arrondissement.

Mme Fr�d�rique CALANDRA, maire du 20e arrondissement. - J'interviens comme maire d'un des 4 arrondissements concern�s par la pr�sence des prostitu�es � Belleville. Je connais tr�s bien la question de la pr�sence de ces prostitu�es pour la plupart d'origine chinoise. Je tiens � dire ceci�: je me suis toujours �lev�e contre la p�nalisation des prostitu�es, je me suis toujours battue comme f�ministe pour sortir les femmes de la prostitution, sans pour autant les stigmatiser ni les condamner. Je m'associe � la position courageuse d'Herv� B�GU� car je dis ceci�: j'ai le plus grand respect, la plus grande admiration pour le travail de "M�decins du Monde", pour le "Lotus Bus", mais l�, il y a trop d'ambigu�t�, et notamment dans le travail avec une association qui s?appelle "Les Roses d'acier" et qui, de fait, finit par entretenir le travail prostitutionnel et par d�fendre les souteneurs. A un moment donn�, je dis qu'il faut sortir les femmes de la prostitution, les aider et quand on se rend compte que certaines actions visent � entretenir, excusez-moi, � "maintenir le b�tail en bon �tat", cela finit par poser un probl�me. Autant la lutte contre le VIH est une priorit� et nous devons nous y associer, autant il y a trop d'ambigu�t� dans ce que finit par obtenir l'action du "Lotus Bus", ce qu'elle finit par produire. Je ne stigmatise pas les travailleurs du "Lotus Bus", je veux �tre tr�s claire. Je dis que le travail finit par entretenir le syst�me prostitutionnel � Belleville, "� l?insu de leur plein gr�". Et ce n'est pas une mauvaise blague que je fais. Donc, je vous dis que M. B�GU� a raison de soulever ce probl�me car il n'y a pas de r�ponses simples. Je veux travailler � sortir les femmes de la prostitution car elles sont les premi�res victimes et nous ne sommes pas l� pour seulement les maintenir en bonne sant� mais pour en finir avec l'esclavage et la traite des �tres humains.

Mme Alexandra CORDEBARD, adjointe, pr�sidente. - Merci, Madame CALANDRA. M. DAGNAUD a la parole.

M. Fran�ois DAGNAUD, maire du 19e arrondissement. - Rapidement, dans le droit fil, dans le m�me �tat d'esprit en tout cas que celui que vient d'exprimer Fr�d�rique CALANDRA, pour dire que Bernard JOMIER a r�pondu de fa�on tr�s convaincante, tr�s argument�e � une question qui n'est pas pos�e. La question n'est �videmment pas de savoir si nous devons ou pas, soutenir l'accompagnement des victimes de la prostitution, oui, nous devons accompagner, proposer un accompagnement en termes de pr�vention des risques sanitaires, d'acc�s aux droits en termes de protection face aux violences. Nous devons accompagner les femmes prostitu�es et, sur ce point, il y a unanimit� sur les bancs de ce Conseil. Mais le probl�me n?est pas l� et Fr�d�rique l?a tr�s bien dit. Nous sommes confront�s sur le terrain, nous qui sommes les maires et les �lus des quartiers directement concern�s par cette situation, �, pour le dire aimablement, l'extr�me ambigu�t� d'un certain nombre d'associations, financ�es en cascade par un jeu de soutien mutuel, qui, c'est vrai, nous le ressentons comme cela, en arrivent � l�gitimer et � justifier le business prostitutionnel. C'est une situation qui n'est pas tol�rable, et le Conseil du 19e arrondissement avait, � ma demande et sur ma proposition, adopt� un v?u � l'unanimit� qui demandait l� aussi � sortir de l'ambigu�t�. Nous ne pouvons pas nous r�signer � l'installation d'une sc�ne de prostitution � Belleville�! Oui, cent fois oui � la pr�vention, � l'accompagnement de ces femmes qui sont les premi�res victimes de la situation qui leur est faite. Non, cent fois non et r�solument non � la l�gitimation du business prostitutionnel.

Mme Alexandra CORDEBARD, adjointe, pr�sidente. - Bien. Nous avons donc recueilli l'avis de chacun. Je vous rappelle que l?Ex�cutif et la Maire de Paris sont tr�s largement favorables � ce projet de d�lib�ration. Je mets aux voix, � main lev�e, le projet de d�lib�ration SG 93. Qui est pour�? Qui est contre�? Qui s?abstient�? Le projet de d�lib�ration est donc adopt�. (2015, SG 93). Je vous remercie.

Décembre 2015
Débat
Conseil municipal
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