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2006, DAC 693 - Apposition d’une plaque commémorative à la mémoire de Malik Oussekine 20, rue Monsieur Le Prince (6e).


M. Christophe CARESCHE, adjoint, pr�sident. - Nous passons au projet de d�lib�ration DAC 693 concernant la position d?une plaque comm�morative � la m�moire de Malik Oussekine.

La parole est � M. CHERKI.

M. Pascal CHERKI, adjoint. - Oui, tr�s bri�vement parce que vu l?heure tardive? Mais il y aurait quand m�me beaucoup � dire sur cette initiative dont je voudrais f�liciter vraiment la collectivit� et notre coll�gue Sandrine MAZETIER de le faire.

Il est important que Paris honore les �v�nements joyeux et les �v�nements moins joyeux.

La mort de Malik Oussekine, battu � mort par les forces de police, � l?�poque le peloton des voltigeurs motocyclistes qui heureusement a �t� dissous depuis, est rest�e dans la m�moire d?une g�n�ration d?�tudiants et lyc�ens qui a fait l?important mouvement contre le projet de loi ?DEVAQUET? de l?�poque, qui a �t� un moment important de l?�ducation collective et en m�me temps de d�fense d?une certaine conception publique, la�que et gratuite de l?enseignement sup�rieur.

Et il �tait donc important que la Ville de Paris honore, 20 ans apr�s, la mort de ce jeune homme et adresse un signe qu?elle n?oublie pas ce qui s?est pass� � ce moment-l� et ce qui s?est pass� dans les rues de Paris, rue Monsieur le Prince, dans la nuit - de m�moire- du 5 � 6 d�cembre.

J?�tais dans le quartier latin quand cela s?est pass�. J?�tais moi-m�me militant � l?�poque, responsable d?une section de l?UNEF dans la Fac de Sceaux, et je peux vous dire que la mort de Malik Oussekine a �t� une �motion tr�s importante et qu?elle reste comme un des signes tangibles de cette mobilisation et du fait que peu de temps apr�s plusieurs centaines de milliers de jeunes manifestent dans la rue en criant ?plus jamais cela?.

Il �tait donc important que cette Municipalit� de gauche le fasse et je pense que c?est un geste fort.

Je voulais vous en remercier.

M. Christophe CARESCHE, adjoint, pr�sident. - Merci.

Je donne la parole � Mme MAZETIER. Puis il y aura une explication de vote de M. BLOCHE.

Melle Sandrine MAZETIER, adjointe, au nom de la 7e Commission. - Ce projet de d�lib�ration r�pond � un voeu du groupe socialiste d�pos� lors de notre derni�re s�ance.

Il est juste que Paris honore la m�moire de Malik Oussekine, �tudiant, victime de la r�pression du mouvement �tudiant de novembre-d�cembre 1986.

Ce mouvement a marqu� toute une g�n�ration. La mort de Malik Oussekine, sous les coups des voltigeurs, �tait un �v�nement impensable pour les lyc�ens et �tudiants qui manifestaient dans l?enthousiasme et la bonne humeur. Elle a fait suite � la terrible r�pression de la manifestation nationale du 4 d�cembre, qui avait d�j� vu les forces de maintien de l?ordre d�raper en utilisant, place des Invalides, des tirs tendus de grenades contre les manifestants. Avec les nombreux bless�s du 4 d�cembre et la mort de Malik Oussekine dans la nuit du 5 au 6 d�cembre, ce mouvement jeune et gai a soudain bascul� dans la gravit� et l?amertume.

Nous avons silencieusement et massivement manifest� le 10 d�cembre pour dire ?Plus jamais �a?. Et c?est aussi ce que veut signifier cette plaque � la m�moire de Malik Oussekine.

M. Christophe CARESCHE, adjoint, pr�sident. - M. BLOCHE a la parole.

M. Patrick BLOCHE. - Oui, je voulais m?inscrire totalement dans le cadre du R�glement de notre Assembl�e. Et je ne me permettrais, avec l?autorisation de notre pr�sident de s�ance, de lire comme explication de vote ce qui aurait pu �tre, s?il avait pu �tre l�, l?intervention de notre coll�gue David ASSOULINE.

C?est donc David ASSOULINE qui parle puisque je suis plus �g� que lui et que je n?�tais plus �tudiant en 1986, h�las.

?Monsieur le Maire, chers coll�gues, je vous avais d�j� fait part de mon �motion quand, au nom du groupe socialiste et radical de gauche, avec son pr�sident Patrick BLOCHE, je proposais � notre Conseil d?adopter un voeu demandant au Maire de Paris d?apposer une plaque en souvenir de Malik Oussekine frapp� � mort dans la nuit du 5 au 6 d�cembre 1986, rue Monsieur-le-Prince suite � la dispersion des occupants de la Sorbonne.

Elle est d?autant plus grande aujourd?hui au moment d?adopter ce projet de d�lib�ration propos� par le Maire, c?est-�-dire au moment de prendre cette d�cision qui permettra que concr�tement le 6 d�cembre prochain, dans moins d?un mois, soit inscrit sur les pierres de notre Capitale le souvenir de ce moment qui a marqu� pour toujours toute une g�n�ration, la mienne, comme celle de beaucoup d?�lus ici pr�sents ; le souvenir de ce jeune qui a eu la malchance de se trouver l� alors que se d�cha�nait de fa�on d�mesur�e une chasse � tout ce qui ressemblait � un �tudiant dans le quartier latin.

Je ressens aussi la m�me fiert� d?appartenir � cette majorit� municipale et de soutenir cet Ex�cutif parisien au m�me moment o� Bertrand DELANO� a de fa�on courageuse propos� d?apposer une plaque en souvenir des Alg�riens morts le 17 octobre 1961.

C?�tait il y a 20 ans. Des centaines de milliers de jeunes, pr�s d?un million, � Paris, le 4 d�cembre, manifestaient pour le retrait de la loi ?DEVAQUET? �tablissant une s�lection sociale pour l?entr�e � l?universit�.

C?�tait dans chaque universit�, dans beaucoup de lyc�es des moments de rencontres, de d�bats, de prise de conscience, de f�te et de joie aussi, qui rassemblaient une g�n�ration g�n�reuse et �prise d?�galit�, comme un sursaut dans une France o� le Ministre de l?Int�rieur pouvait d�clarer qu?il couvrirait les bavures. Des mon�mes bon enfant o� l?on entendait crier ?CRS avec nous, vos enfants sont dans la rue?.

Puis suite � la fin de non recevoir du Gouvernement, des charges brutales, violentes, des tirs de grenades � f�t tendus, des jeunes gri�vement bless�s, comme J�r�me DUVAL, et la nuit tragique du 5 au 6 d�cembre o�, apr�s une �vacuation des occupants de la Sorbonne, les PVM d�cid�rent de nettoyer le quartier latin.

Malik finissait sa soir�e comme beaucoup de jeunes et moins jeunes et s?appr�tait � rentrer chez lui.

Des PVM le poursuivent. Il se r�fugie dans une cage d?escalier rue Monsieur-le-Prince.

Des PVM l�chent leurs motos, rentrent dans le hall, il se prot�ge. Il est battu ; son visage, son corps sont tum�fi�s.

Plus tard, il meurt. Il avait 22 ans.

Rien ne justifiait une telle violence.

?Ils sont devenus fous?, je r�p�tais cela au journaliste qui m?interrogeait au petit matin. Abasourdi, et ce poids de la responsabilit�, ne rien dire qui puisse inciter � r�pondre � la violence par la violence et notre appel � une gigantesque manifestation silencieuse derri�re cette unique affirmation ?Plus jamais �a?.

Et depuis 20 ans, ce sentiment contradictoire, souvenir d?un grand moment de symbiose, d?�change, de lutte, d?espoir, de conviction, d?�tre acteur de son histoire mais aussi l?amer-tume, la tristesse, que Malik y soit rest�.

En ce moment, je pense � sa m�re, � ses fr�res et s?urs, � tous ceux � qui il a �t� arrach�. Il nous manquera toujours. Avec lui, c?est un bout de nous-m�mes qui est parti le 6 d�cembre 1986.

En votant ce projet de d�lib�ration, notre Conseil fera un acte de justice et de m�moire qui honorera notre Ville. Pour moi, pour les socialistes, nous avons aussi simplement rempli notre devoir.

Je vous remercie.

M. Christophe CARESCHE, adjoint, pr�sident. - Merci.

Monsieur GOUJON, vous avez la parole.

M. Philippe GOUJON. - Monsieur le Maire, le drame survenu ce soir-l�, rue Monsieur-le-Prince, si terrible, si injuste n�cessite effectivement de condamner tr�s fermement et sans ambigu�t� les agissements qui y ont conduit, d?autant plus que ceux qui s?y sont livr�s disposaient de l?usage l�gitime de la force et que celle-ci ne doit �tre employ�e qu?� bon escient.

D?ailleurs, cela est si vrai que les deux policiers coupables ont �t� condamn�s, sanctionn�s administrativement, chass�s de la police et que le PVM a �t� lui-m�me dissous.

Vous savez combien la police fran�aise g�n�ralement, et plus sp�cialement la Pr�fecture de police, est exemplaire dans le domaine du maintien de l?ordre. Il n?y a qu?� voir d?ailleurs la fa�on dont se sont termin�s les �v�nements en banlieue, sans aucun d�c�s. La police fran�aise forme de nombreuses polices pour le maintien de l?ordre, dans le monde entier.

Mais une fois que j?ai exprim� cette indignation qui est la mienne aussi, je crois que l?expression qui est employ�e, celle de ?frapp� � mort?, cette formule choc, avec sa r�sonance criminelle, est inadapt�e car elle signifie l?intention qu?il y aurait eu de donner la mort, la volont� de tuer.

Alors, oui, il y a eu des violences tout � fait inadmissibles qui ont �t� sanctionn�es fortement, fermement, � juste titre, aussi bien par la police que par la justice. Mais on ne peut laisser dire qu?il y a eu intention de donner la mort.

D?ailleurs, la Cour d?Assises qui a condamn� les auteurs de ces coups mortels l?a fait sur le fondement de coups et blessures ayant entra�n� la mort sans l?intention de la donner. C?est la justice qui s?est prononc�e.

Il suffisait donc de reprendre la formule qui figure d?ailleurs sur le document qui est joint � ce projet de d�lib�ration et je ne comprends pas pourquoi la formule a �t� modifi�e. Cette formule figurait dans le document joint : ?D�c�d� suite � la manifestation du 6 d�cembre 1986?. Ce qui aurait permis � notre groupe de voter ce projet de d�lib�ration.

Si cette formule n?�tait pas r�tablie, malheureusement, et apr�s tout ce que j?ai dit, nous ne pourrions cautionner une telle formule qui ne correspond pas � la r�alit� telle qu?elle a �t� jug�e par la Cour d?Assises.

M. Christophe CARESCHE, adjoint, pr�sident. - Merci.

Je mets aux voix, � main lev�e, le projet de d�lib�ration DAC 693.

Qui est pour ?

Qui est contre ?

Qui s?abstient ?

Le projet de d�lib�ration est adopt�. (2006, DAC 693).

Novembre 2006
Débat
Conseil municipal
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