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2010, IV - Question d'actualité déposée par le groupe socialiste, radical de gauche et apparentés, à M. le Préfet de police relative aux chiffres de la délinquance à Paris.


M. LE MAIRE DE PARIS. - Nous passons � la question d'actualit� pos�e par le groupe socialiste, radical de gauche et apparent�s � M. le Pr�fet de police.

La parole est � M. Gilles ALAYRAC.

M. Gilles ALAYRAC. - Le 14 septembre, dans un communiqu�, la Pr�fecture de police se f�licitait de "la r�ussite" de la police d'agglom�ration mise en place un an plut�t sous son autorit�. Elle annon�ait que le potentiel des commissariats en �tait "sorti renforc�".

Dans le m�me temps, les Parisiens apprenaient que sur les huit derniers mois, la d�linquance dans la Capitale progressait de 1,2 % alors qu'elle reculait dans le reste de l'agglom�ration. Le bilan est-il donc positif pour les Parisiens ?

La Pr�fecture de police a reconnu que ces chiffres ne sont pas acceptables, constat sur lequel nous nous accordons. C'est la premi�re fois depuis huit ans que la situation se d�grade � ce point.

La flamb�e des vols violents sans arme, plus 29 %, celle des atteintes aux personnes, plus 9 %, confirment ce que les �lus et les maires d'arrondissement en particulier savent depuis longtemps : la violence s'installe dans les quartiers ; les indicateurs sont au rouge.

Paris fait donc exception au tableau idyllique que dressait en ao�t le Ministre de l'Int�rieur qui se f�licitait du recul des violences aux personnes dans notre pays.

Les Parisiens ont plus que jamais besoin d'une pr�sence visible et rassurante de la police. Les effectifs en Ile-de-France ne sont pas � la hauteur, ni de cette exigence, ni des enjeux r�gionaux.

� Paris, nous avons constat� que les patrouilles de nuit semblent �tre revue � la baisse faute d'effectifs suffisants. Notre groupe r�affirme la n�cessit� d'une pr�sence physique continue des policiers sur le territoire parisien, engagement pris par la Pr�fecture lors du d�bat sur la mise en place de la vid�oprotection.

Nous croyons r�solument qu'un tel dispositif permettra � moyen terme d'�viter les drames comme celui qui a frapp� la semaine derni�re ce jeune lyc�en de 17 ans, agress� sauvagement dans le 13e arrondissement. Car cela, nous ne l'acceptons pas et nous ne nous y r�soudrons pas.

Au titre de la loi relative � la pr�vention de la d�linquance de 2007, la Mairie de Paris met tout en ?uvre pour d�velopper les meilleures solutions pr�ventives et rem�dier � cette mont�e de la d�linquance.

Monsieur le Pr�fet, pouvez-vous donc aujourd'hui nous fournir les chiffres les plus pr�cis et assumer cette comp�tence partag�e en nous transmettant les statistiques des diff�rents agr�gats constituant la d�linquance g�n�rale, en nous fournissant aussi les effectifs des policiers affect�s � Paris et effectivement pr�sents sur le terrain, et en informant automatiquement et r�guli�rement le Maire de la Capitale ?

Merci.

M. LE MAIRE DE PARIS. - La parole est � M. le Pr�fet de police.

M. LE PR�FET DE POLICE. - Monsieur le Maire, Messieurs les Conseillers.

Monsieur le Conseiller, vous venez de faire part de vos inqui�tudes relatives � la d�linquance parisienne. Je vais m'efforcer de r�pondre � la question que vous posez mais elle justifierait aussi beaucoup plus que la simple r�ponse � une question d'actualit�. N�anmoins, je vais m'efforcer de vous r�pondre le plus rapidement possible.

Apr�s huit ann�es ininterrompues, et vous venez de le dire, ce qui pour nous est une grande satisfaction, soit un cumul de moins 25 %, il est exact qu'au cours des huit premiers mois de l'ann�e, la d�linquance g�n�rale a augment� l�g�rement, de 1,2 % � Paris.

Puisque vous m'invitez � donner les agr�gats, si on prend les indicateurs de l'Observatoire de la d�linquance, les atteintes aux biens ont augment� de 5 %, les atteintes aux personnes, et c'est notre inqui�tude, de 9 %, tandis que la d�linquance �conomique continue de baisser avec moins 6,9 %.

Si j'ai bien pr�cis� � Paris, c'est que, comme vous l'avez dit, cette �volution ne se retrouve pas en petite couronne, o� la d�linquance reste favorablement orient�e ou bien a trouv� une orientation favorable depuis la mise en place de la police d'agglom�ration, avec moins 1,6 %.

�videmment, et l� aussi, comme vous l'avait dit, soyez assur�s qu'en aucun cas je ne m'accommode de cette �volution parisienne. Mais ayant entendu qualifier d'historique ce qu'il est pr�matur� de consid�rer comme un retournement durable, il convient de fournir des �l�ments de contexte, et d'abord cette r�alit� : depuis 2001, la d�linquance parisienne a recul� en moyenne deux fois plus qu'en banlieue et de 11 points de plus qu'au niveau national, moins 25 % contre moins 14 % au niveau de la France enti�re.

Pour ma part, et l� aussi c'est une certaine satisfaction pour moi, dans les responsabilit�s que j'ai pu exerc�es ou que j'exerce actuellement en mati�re de s�curit�, j'ai toujours �t� un partisan convaincu de l'int�r�t du recours � la statistique pour rendre compte de l'action des agents plac�s sous ma responsabilit� parmi d'autres crit�res de jugement - ce n'est pas le seul. Alors je me r�jouis de certains ralliements � la culture de r�sultat que l'on trouve tr�s souvent caricatur�e sous la terminologie de politique du chiffre qui n'a absolument aucun sens - je pense par exemple aux quotas de contraventions qui nous sont reproch�s alors que nous n'en n'avons jamais demand�.

C'est la raison pour laquelle je n'esquiverai pas, et je n'esquiverai jamais de tels sujets. C'est pourquoi, dans chaque arrondissement, et tout r�cemment lors de la derni�re r�vision des contrats de s�curit�, les commissaires pr�sentent r�guli�rement des batteries de statistiques d�taill�es.

Comme vous le savez, depuis 2003, un organisme ind�pendant et pluraliste, l?O.N.D., publie les statistiques de la d�linquance d�partement par d�partement. Chaque rapport annuel consacre de longs d�veloppements � ces statistiques et bien s�r, plusieurs dizaines de pages concernent Paris. Je m'en f�licite pour la qualit� du d�bat. Encore est-il souhaitable qu'en mati�re de statistiques et de partenariat, la transparence conduise � une lecture �quilibr�e des choses.

Je prendrai un exemple. L'an pass�, beaucoup d'inqui�tude se sont manifest�es � propos de l'�volution des vols � main arm�e, alors en hausse de 20 % apr�s une diminution de moiti� en sept ans. Depuis le d�but de l'ann�e, cette situation est jugul�e ; nous pouvons tous nous en f�liciter : les vols � main arm�e reculent � nouveau � Paris de 16 %. Or, en d�pit du fait que nous avons rendu publics ces chiffres de la m�me fa�on que ceux qui �taient en augmentation, j'ai not� le caract�re tout � fait asym�trique de la fa�on dont il en est rendu compte, non pas d'ailleurs par vous-m�mes, bien s�r, mais de fa�on g�n�rale, notamment dans la presse.

Et c'est d'ailleurs ce que je regrette aujourd'hui avec l'�vocation assez fr�quente au cours de ces derni�res semaines d'un pr�tendu �chec de la politique de s�curit� alors que, si je me tiens aux violences enregistr�es � Paris en 2009, elles sont encore inf�rieures de 5,6 % au niveau enregistr� en 2001 et ce alors qu'elles avaient progress� - j'ai rarement fait r�f�rence � ces chiffres, mais on est bien oblig�, pour la clart� du d�bat, de le dire aujourd'hui - � Paris de 79,5 % dans les cinq ans qui avaient pr�c�d�.

Ce qui est important pour nous, c'est tout simplement de voir comment ces chiffres peuvent �tre utilis�s, car si vous dites que tous les clignotants sont au rouge, ce n'est pas le cas. Je ne m�connais pas qu'il y a des types de violences qui nous pr�occupent, mais il faut voir quels sont les diff�rents indicateurs.

Il y a un indicateur qui n'est jamais relev�, que je me permets de signaler : celui de la criminalit� organis�e, c'est-�-dire de la grande d�linquance. Cette criminalit� organis�e est encore en baisse depuis le d�but de l'ann�e de 9,2 % � Paris, faisant suite � une baisse qui a �t� de plus de 30 %, c'est-�-dire que nous sommes pass�s de 4.710 faits en 2001 � 2.952 en 2009 et que nous sommes toujours en baisse de 9,2 %.

Autre signe positif : les violences non crapuleuses, telles que les coups et blessures volontaires. Les coups et blessures volontaires ont beaucoup augment� depuis 2001. C'�tait, en ce qui concerne les violences aux personnes, et bien que dans le cadre d'un chiffre global qui restait en baisse, notre pr�occupation. Depuis le d�but de l'ann�e, les C.B.V. (coups et blessures volontaires) ont enfin diminu� de 2,1 %.

Si l?on regarde dans le d�tail, j'en arrive � ce qui est pr�occupant ; ce sont trois s�ries de choses.

Il y a d'abord une hausse des vols, et notamment, comme vous l'avez soulign�, les vols violents sans arme � feu ; c'est notre premi�re pr�occupation.

Une seconde pr�occupation est la progression de la d�linquance des mineurs, plus 17 % des mises en cause depuis le d�but de l'ann�e, alors que le nombre de majeurs a, lui, baiss� de 4,4 %. Le Procureur de la R�publique, dans une r�union � laquelle assistait M. SARRE vendredi dernier, signalait que pr�s de la moiti� des auteurs de violences en r�union ou en bande �taient des mineurs de 16 ans, un vol avec violence sur deux commis � Paris l?est pour un mineur. Je tiens � la disposition des conseillers de Paris, j'en dirai sans doute un mot tout � l'heure en remerciant le Maire et cette Assembl�e qui s'est engag�e dans la vid�osurveillance, des images relev�es par la vid�o dans le 18e arrondissement hier, afin de vous montrer ce qu'est un vol sans arme avec violence � Paris,.

Ce que nous avons, et c?est le troisi�me point, � d�plorer � Paris depuis le d�but de l'ann�e, c'est l'aggravation tr�s sensible dans la capitale de la d�linquance itin�rante et tout particuli�rement dans les transports en commun.

Face � cela, puisque c'est votre question, Monsieur ALAYRAC, et elle est l�gitime, les services de police travaillent d'arrache-pied - le nombre de vols violents, de cambriolages et de vols � la tire �lucid�s a augment� de 15 %, 14 % et 38 % en un an - � un plan de lutte contre les bandes similaire � ce que nous faisons en mati�re de stup�fiants.

En mati�re de stup�fiants, vous savez que c'est quelque chose qui me pr�occupe, je regardais les chiffres avant de venir dans cette s�ance, nous avons fait 22 affaires par semaine depuis le d�but de l'ann�e - je dis bien 22 affaires -, ce qui est tout � fait consid�rable, puisque cela fait pratiquement, si l?on ne compte pas les jours ouvrables, 5 affaires de drogue par jour. Nous avons fait la m�me chose pour les bandes, et l�, nous travaillons avec la Ville.

Depuis 15 jours et jusqu'� la fin de l'ann�e au moins, compte tenu de cette analyse que nous avions faite sur ces vols violences, j'ai renforc� le dispositif sur les arrondissement du Nord et de l'Est parisien, les 10e, 11e, 18e, 19e et 20e et �galement dans le secteur des Champs-Elys�es, dans le 8e arrondissement.

Voil� ce que je voulais vous dire sur notre action et sur des chiffres qui sont les chiffres des grands agr�gats que vous souhaitiez.

S'agissant des effectifs, je confirme une nouvelle fois dans votre assembl�e qu'ils demeurent � un niveau historiquement �lev�. La Capitale, puisque vous souhaitez des chiffres pr�cis, compte, au 31 juillet, 18.356 policiers et adjoints de s�curit�, dont 16.148 grad�s et gardiens, soit un niveau sup�rieur � l'effectif de r�f�rence qui est, pour Paris, de 16.050.

Il faut ajouter � ce chiffre 260 policiers suppl�mentaires, 90 adjoints de s�curit� qui seront affect�s � Paris d'ici la fin de l'ann�e et d'autre part, compte tenu des nouvelles r�gles en mati�re d'A.R.T.T. et de prise en compte des heures suppl�mentaires, nous avons r�cup�r� 300 �quivalents temps plein en effectifs.

A l'heure o� � peine 40 % des d�linquants interpell�s � Paris y r�sident, la police d'agglom�ration est donc une bonne r�ponse, une bonne opportunit�, pour la s�curit� des Parisiens. Sa mise en ?uvre suppose des r�organisations structurelles, de nouvelles m�thodes de travail et c'est le cas de ce que nous mettons en place avec la volont� d'appuyer sur les deux piliers de l'action polici�re : la voie publique et l'investigation.

Il est vrai, puisque la d�linquance augmente, que la d�linquance �volue, et si elle augmente dans certains secteurs, il faut qu'on adapte, bien s�r, nos dispositifs et je suis de ceux qui pensent, m�me si j'y ai parfois particip�, qu'il faut revoir un certain nombre de brigades sp�cialis�es pour revenir � des patrouilles de terrain, notamment des patrouilles p�destres, puisque vous souhaitez une occupation de la voie publique, de telle sorte que l'on soit plus r�actif.

C'est ce qui doit compl�ter, pour la police de demain, le travail engag� sur la vid�oprotection.

J'ai sign� le 21 janvier, et je remercie � nouveau solennellement le Maire de Paris et la majorit� de cette assembl�e qui ont accept� la vid�oprotection. J?invite - l'ensemble des directeurs de la Pr�fecture de police assistait la semaine derni�re � la pr�sentation de la maquette - M. le Maire et tous les conseillers � voir ce que nous souhaitons faire avec la vid�o. Ce n'est pas une vid�o � l'anglaise, mais un dispositif op�rationnel que nous souhaitons.

Alors aujourd'hui, face aux �volutions de la d�linquance des mineurs et de la violence, vous pouvez compter sur la mobilisation de la Pr�fecture de police, mais � c�t� de cette pr�sence sur la voie publique et de l'activit� de police judiciaire, un v�ritable renouveau de la politique pr�ventive est �galement n�cessaire.

Je sais que votre double collectivit�, puisque vous �tes un conseil municipal et un conseil g�n�ral, consacre beaucoup de ressources et d'�nergie � ces enjeux, de m�me que l'Education Nationale et la Justice, mais au regard de l'acquis de 15 ans de C.L.S. dans diff�rents centres urbains, notre action collective reste trop segment�e et insuffisamment partenariale, notamment dans le suivi des situations concr�tes.

C'est pr�cis�ment parce que depuis 1945, le mod�le r�publicain fran�ais accorde un r�le important au suivi social et aux actions �ducatives que nous devons tout faire pour am�liorer les signaux d'alerte et de prise en charge des situations pr�d�linquantes. Pour l'efficacit�, il faut le faire dans un cadre territorialis� de proximit�.

J'ai sign� la semaine derni�re avec vous, Monsieur le Maire, ou votre repr�sentant, avec le Recteur, avec l'Inspecteur d'acad�mie, avec le Procureur, le 17e C.L.S. d'arrondissement ; c'est dans ce cadre-l� que nous devons travailler.

Quand je dis cela, je pense � ces trois gar�ons de 16-17 ans qui sont en d�tention depuis hier soir pour la grave agression commise la semaine derni�re � la sortie d'un lyc�e dans le 13e arrondissement. Si nous avons pu les identifier et les interpeller rapidement, c'est que, h�las, nous les avions d�j� pr�alablement rep�r�s comme appartenant � une bande du 14e arrondissement, mais peut-�tre, et nous sommes, me semble-t-il, tous responsables, n'aurions-nous pas �vit� qu'ils retombent dans l'orni�re de la violence, je voudrais �tre certain n�anmoins que nos institutions respectives, y compris l'�tat, ont mis en ?uvre tout ce qui leur �tait possible de faire pour eux et pour tous les jeunes qui risquent d'emprunter le m�me chemin, c'est-�-dire un mauvais chemin � l'�ge de l'adolescence vers la d�linquance.

M. LE MAIRE DE PARIS. - Merci, Monsieur le Pr�fet.

Je crois que M. Georges SARRE souhaite ajouter de brefs commentaires ; je lui donne la parole. J?ai mis un peu en condition ton intervention : de brefs commentaires, mon cher Georges !

M. Georges SARRE, adjoint. - On me conditionne avant !

M. LE MAIRE DE PARIS. - Un peu.

M. Georges SARRE, adjoint. - Monsieur le Maire, Monsieur le Pr�fet de police, la question des violences est, bien entendu, un sujet aigu.

M. le Pr�fet de police ne sera pas vraiment �tonn� que je m?associe aux demandes d?information r�guli�re, compl�te et transparente du Maire de Paris, tant sur le diagnostic de la d�linquance, donc les statistiques d�taill�es selon les agr�gats et les quartiers, que sur les rem�des policiers, leurs effectifs, leur mobilisation, leurs interventions sur le terrain.

Notre bonne action partenariale est plus que jamais d'actualit�. De son c�t�, la Ville de Paris agit, avec ses moyens et dans le cadre de ses pr�rogatives. Nous avons, je le rappelle, d�ploy� deux nouvelles �quipes de correspondants de nuit en 2009. Nous avons cr�� un poste d'intervenant de proximit� en commissariat dans le 13e arrondissement. Nous avons surtout commenc� par red�finir la carte strat�gique, avec un nouveau contrat parisien de s�curit� et 17 nouveaux contrats d'arrondissement. Il y a trois retardataires qui signeront prochainement.

Nous ferons davantage : la subvention de la Ville au groupement parisien inter-bailleurs de surveillance augmentera en 2011, ainsi que les subventions aux actions associatives. Chacun, dans ses pr�rogatives et avec une solide articulation partenariale, nous ferons face. L'Etat doit bien entendu, au premier chef, assumer ses responsabilit�s r�galiennes et c'est ainsi que les choses avanceront.

Je vous remercie.

M. LE MAIRE DE PARIS. - Merci.

Septembre 2010
Débat
Conseil municipal
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