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2010, Vœu déposé par le groupe "Les Verts" relatif au port du pantalon par les femmes à Paris. Vœu déposé par le groupe Communiste et élus du Parti de Gauche relatif à l'interdiction administrative du port du pantalon.


M. Christian SAUTTER, adjoint, pr�sident. - Nous passons � l'examen des v?ux r�f�renc�s n� 14 et n� 15 dans le fascicule, d�pos�s par le groupe "Les Verts" d'un c�t� et le groupe Communiste et �lus du Parti de Gauche de l'autre, relatifs � l'interdiction du port du pantalon par les femmes � Paris.

La parole est � M. CONTASSOT d'abord, puis � M. BROSSAT qui vont pr�senter leur v?u, et Mme Fatima LALEM donnera la r�ponse de l'Ex�cutif sur chacun de ces deux v?ux.

Monsieur CONTASSOT, vous avez la parole.

M. Yves CONTASSOT. - Merci, Monsieur le Maire.

Evidemment, c?est un v?u qui s?adresse au Pr�fet de police, puisque c'est lui qui a le pouvoir en la mati�re. J?allais dire que l?on a du mal � comprendre comment une ordonnance aussi d�su�te est encore en vigueur.

Elle est juridiquement toujours en vigueur. La meilleure preuve est qu'il y a encore peu de temps, dans un proc�s, elle a �t� utilis�e dans la proc�dure. Vous n?avez pas l?air de le savoir, alors je vous renvoie � un excellent article qui figure � la fin de notre v?u, qui est une analyse des archives de la Pr�fecture de police de Paris et dans laquelle vous trouverez toutes les r�f�rences d?utilisation de cette ordonnance. Vous verrez qu?il y a encore tr�s peu d?ann�es, elle a �t� utilis�e.

On vous demande �videmment d'abroger cette ordonnance, qui n'a plus aucun sens, sinon d?ailleurs beaucoup de femmes dans cet h�micycle n'auraient pas le droit d?y si�ger dans leur tenue. Vous savez, y compris juridiquement, que les pr�f�tes n'ont pas le droit de porter le pantalon dans leur tenue officielle, lorsqu'elles sont en repr�sentation. Cela leur est toujours interdit. On voit bien que c'est une forme d'archa�sme qui n'a plus de sens. Allez, vite, autorisez les femmes � porter le pantalon, si elles en ont envie, et abrogez cette ordonnance.

(Applaudissements sur les bancs des groupes "Les Verts", socialiste, radical de gauche et apparent�s et Communiste et �lus du Parti de Gauche).

M. Christian SAUTTER, adjoint, pr�sident. - Merci, Monsieur CONTASSOT, vous avez �t� vivement applaudi par les conseill�res d'arrondissement. Les conseill�res de Paris, pardon.

On pr�sente le deuxi�me v?u, celui de M. Ian BROSSAT. Je rappelle qu'il s'agit d'une ordonnance qui remonte � 1800, ce qui est tout de m�me assez remarquable, le 16 brumaire en IX !

M. Ian BROSSAT. - Pour expliquer, un strict principe de parit�, c?est Catherine VIEU-CHARIER qui va le pr�senter.

M. Christian SAUTTER, adjoint, pr�sident. - Madame VIEU-CHARIER, vous avez donc la parole.

Mme Catherine VIEU-CHARIER, adjointe. - Je porte exceptionnellement une robe aujourd?hui, mais cela ne m?emp�che pas de pr�senter ce v?u. Cela fait rire tout le monde, mais vous savez, c'est tr�s compliqu� ces histoires. D'abord parce qu'effectivement, cette ordonnance de 1799 a beaucoup de sens dans la mesure o� les r�volutionnaires, vous le savez, ont d�laiss� la culotte qui �tait port�e par les bourgeois, pour se mettre en pantalon et bien �videmment, dans la foul�e les femmes ont r�clam� le port du pantalon, ce qui leur a �t� �videmment interdit d�s 1799.

Comme l?a rappel� mon coll�gue Yves CONTASSOT, il n'y a pas si longtemps, cela a fait l'objet d'un probl�me aupr�s d'une femme. Je voudrais rappeler qu'il n'y a pas si longtemps que cela, une d�put�e communiste s'est vu interdire l?h�micycle de l'Assembl�e nationale parce qu'elle portait le pantalon.

Je voudrais rappeler qu?en ces temps o� les valeurs f�ministes reculent, il n'est pas trop tard, Monsieur le Pr�fet, pour abroger cette ordonnance, ce qui fera certainement plaisir aux gardiennes de la paix qui ont apparemment le droit de porter le pantalon, mais pas de fa�on officielle. Non ? Puisque l'ordonnance leur interdit de porter le pantalon. Il faudra donc vous mettre en conformit� avec la loi.

Monsieur le Pr�fet, je vous demande de vous mettre en conformit� avec la loi et d'abroger l'ordonnance de 1799.

M. Christian SAUTTER, adjoint, pr�sident. - Merci, Madame VIEU-CHARIER. L'adjointe � la m�moire �tait bien plac�e pour intervenir dans ce d�bat.

La parole est � Mme Fatima LALEM, la r�ponse � ces deux v?ux.

Mme Fatima LALEM, adjointe. - Merci, Monsieur le Maire, merci chers coll�gues, merci au groupe "Les Verts", ainsi qu'au groupe communiste et aux �lus du parti de gauche d'avoir port� ces deux v?ux qui sont d'une grande force symbolique, v?ux relatifs � l'interdiction du pantalon pour les femmes par une ordonnance qu?on dit d�su�te mais qui est toujours en application et qui est �videmment en totale opposition au principe d'�galit� entre les femmes et les hommes inscrit dans le pr�ambule de la Constitution de 1946.

Faut-il rappeler qu?aujourd'hui encore, dans certains pays, oser porter un pantalon est un acte de transgression passible d?exactions et de sanctions. C'est ce qui est arriv� � Loubna ALHUSSEIN, la journaliste soudanaise, flagell�e pour avoir brav� cet interdit.

Comme le souligne la chercheuse Christine BARD, "dans la volont� de diff�rencier les sexes par le v�tement, il y a aussi une volont� d'introduire une hi�rarchie. Historiquement, le sexe dominant s'est octroy� des v�tements plus faciles � porter, comme le pantalon. Ce n'est pas un hasard si on dit : porter la culotte". Rappelons aussi que jusque dans les ann�es 80, les parlementaires n'�taient pas admises en pantalon.

A contrario, aujourd'hui, je voudrais �galement profiter de ces deux v?ux pour souligner cet interdit aussi, qui ne dit pas son nom, mais qui p�se sur bon nombre de jeunes filles dans les quartiers et dans les coll�ges et qui ont d�, elles, abandonner la jupe pour �viter l'anath�me de filles faciles.

Oui, il n'est que temps d'abroger cette vieille ordonnance, mais nous devrons surtout g�n�raliser les actions d'�ducation au respect mutuel entre les sexes. Les violences sexistes et les clich�s scl�rosants emp�chent les filles comme les gar�ons de faire leur propre choix et bloquent tout r�el progr�s dans la r�partition des r�les sociaux.

L'�ducation � l'�galit� et � la sexualit� est un d�fi soci�tal majeur qui devrait mobiliser plus fortement les acteurs concern�s, et en tout premier lieu, ceux de l'�ducation nationale.

C'est pourquoi, en ce qui concerne l'espace parisien, la volont� du Maire de Paris et notre d�marche ont �t� de d�multiplier les lieux d'accueil et d'accompagnement des jeunes et de renforcer les actions �ducatives pour d�construire les st�r�otypes � l'?uvre et promouvoir des rapports non sexistes.

Je voudrais juste dire un dernier mot, rappelant que pr�s de 60.000 jeunes, depuis 2008, ont b�n�fici� de ces actions, et que nous allons amplifier ce mouvement et initier une d�marche partenariale in�dite � l'occasion des Etats g�n�raux que j'organise les 19 et 20 novembre prochains, qui permettront, je l'esp�re, de sortir du saupoudrage actuel, aussi inefficace que co�teux, et d'engager une mobilisation forte autour de cette n�cessaire �ducation.

Merci pour ces v?ux auxquels, �videmment, je ne peux que souscrire.

M. Christian SAUTTER, adjoint, pr�sident. - Merci, Madame LALEM.

Monsieur le repr�sentant du Pr�fet de police, vous avez la parole.

M. LE REPR�SENTANT DU PR�FET DE POLICE. - D�s 2004, � l'occasion d'un hommage � George Sand, un parlementaire proposait d?abroger l'ordonnance du 16 brumaire, an IX, et une nouvelle proposition de loi est enregistr�e sur le bureau de l'Assembl�e depuis avril.

Assur�ment, les travaux de Mme BARD sont une contribution importante � l'histoire des mentalit�s, et chacun mesure l'incongruit� actuelle d?une telle disposition juridique, le Pr�fet de police tout autant que quiconque.

Mais aujourd'hui, la prise d?un acte d?abrogation express a-t-elle un sens ?

D'abord, il est clair que ce texte est tomb� en d�su�tude et personne, pas m�me Mme BARD dans ces travaux que j'ai lus hier, ne sait exactement � quand remonte sa derni�re application, assur�ment plusieurs d�cennies.

Ensuite, il est fort probable que ce texte ait �t� implicitement abrog� par les constitutions de 1946 de 1958, ainsi que par l'article 14 de la Convention europ�enne des droits de l?homme et du citoyen.

Enfin, le fait que des propositions de lois soient d�pos�es par des parlementaires d�montre que son statut dans la hi�rarchie des normes reste discut�.

Bien �videmment, si des travaux juridiques incontestables mais qui restent � mener d�montraient que la jurisprudence du Conseil d'�tat Alitalia sur l?abrogation expresse des textes ill�gaux trouvait � s?appliquer, le Pr�fet de police serait heureux de le faire. N'a-t-il pas r�cemment abrog�, en 2007, l'ordonnance de 1927 sur les spectacles ?

Mais aujourd'hui, je voudrais souligner, s'agissant des violences faites aux femmes, qu?elles soient d?ordre symbolique ou corporel, que les priorit�s de la Pr�fecture de police sont sans doute ailleurs que dans l'arch�ologie juridique.

Chaque ann�e, la Pr�fecture traite plus de 3.000 proc�dures judiciaires de violences conjugales ou intrafamiliales. En quatre ans, nous avons d�ploy� un r�seau de dix psychologues sp�cialis�s aux c�t�s des r�f�rents policiers hautement qualifi�s.

Pour conclure enfin, je rejoindrai Mme LALEM sur ce point : les derniers travaux publi�s par Mme BARD en avril dernier portent sur la jupe, et il n'est pas exclu, par une sorte d?ironie de l?histoire, que nos institutions, aujourd'hui, et particuli�rement la Pr�fecture de police, soient amen�es � d�fendre aujourd'hui notre libert� vestimentaire, y compris par la voie judiciaire.

M. Christian SAUTTER, adjoint, pr�sident. - Merci, Monsieur le repr�sentant du Pr�fet.

M. CONTASSOT veut retirer son v?u ?

M. Yves CONTASSOT. - Certainement pas.

Monsieur le Pr�fet, vous ne pouvez pas dire que cela n'existe pas lorsque la Ministre que vous avez cit�e a d�clar� qu'elle �tait contre l'abrogation, en 2004, � l?Assembl�e, j?ai le texte exact !

Cela veut bien dire que vous, comme la ministre, vous maintenez la validit� de ce texte puisque vous refusez son abrogation.

Je trouve cela tout � fait inacceptable et je demande que l'ensemble de notre Assembl�e adopte un v?u unanime pour vous demander ce qui vous prendra dix minutes, et qui n?enl�vera rien � la capacit� d?intervention pour d�fendre les droits des femmes, et faire en sorte que le droit soit effectivement conforme � la r�alit�.

M. Christian SAUTTER, adjoint, pr�sident. - Monsieur CONTASSOT, je ne suis pas s�r que le ton va favoriser un v?u unanime, mais je vais mettre aux voix les deux v?ux, nos 14 et 15, avec un avis favorable de l'Ex�cutif.

Je mets donc aux voix, � main lev�e, la proposition de v?u d�pos�e par le groupe "Les Verts", assortie d'un avis favorable de l'Ex�cutif.

Qui est pour ?

Contre ?

Abstentions ?

Ah ! Il y a des abstentions !

La proposition de v?u est adopt�e. (2010, V. 217).

Je mets aux voix, � main lev�e, la proposition de v?u d�pos�e par le groupe Communiste et �lus du Parti de Gauche, assortie d'un avis favorable de l'Ex�cutif.

Qui est pour ?

Contre ?

Abstentions ?

La proposition de v?u est adopt�e � l'unanimit�. (2010, V. 218).

Septembre 2010
Débat
Conseil municipal
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