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2010, DAJ 25 - Protocole d'indemnisation de la Ville de Paris par l'Union pour la majorité présidentielle (UMP) d'une part et M. Jacques CHIRAC d'autre part.


M. LE MAIRE DE PARIS. - Nous passons maintenant � l'examen du projet de d�lib�ration DAJ 25 relatif au protocole d'indemnisation de la Ville de Paris par l'Union pour la majorit� pr�sidentielle (UMP) d'une part et M. Jacques CHIRAC d'autre part.

Mes chers coll�gues, je soumets ce matin � notre Conseil le protocole par lequel l'Union pour un Mouvement Populaire et M. Jacques CHIRAC proposent d'indemniser la Ville de Paris dans le dossier dit "des emplois fictifs".

Avant que le d�bat ne s'engage sur ce projet, je souhaite vous faire part des raisons qui me conduisent � vous inviter � l?approuver.

Je veux aussi, disons-le, vous donner mon sentiment sur les approximations et les contrev�rit�s qui se sont exprim�es au cours des derni�res semaines.

Depuis 2001, nous avons constamment appliqu� sur ce sujet la m�me position, d'abord d�fendre l'honneur, je dis bien l'honneur, et les int�r�ts de notre Ville, ce qui nous a conduits dans ce dossier et dans d'autres � saisir la justice.

Tout au long des proc�dures, nous avons ?uvr� sans rel�che pour faire �tablir la v�rit� et obtenir r�paration.

Ainsi, dans ce dossier particulier, au fil de ces neuf ann�es, nos avocats ont plaid� � cinq reprises devant les Cours d'appel de Versailles et de Paris et trois fois devant la Chambre criminelle de la Cour de cassation. Ils ont plaid� afin d'�viter que les proc�dures engag�es ne soient annul�es.

Il y a encore un an exactement, lors de la cl�ture de l'instruction conduite par la juge Xavi�re SIMEONI, la Ville a produit un dernier m�moire pour r�pondre point par point au r�quisitoire de non-lieu du Procureur de Paris.

Je vous le dis, mes chers coll�gues, si nous sommes aujourd'hui en mesure d'obtenir r�paration de notre pr�judice, tel que l'instruction l?a �tabli, c'est parce que la Ville a agi inlassablement au service de la v�rit� dans des conditions souvent tr�s difficiles.

Je souhaite d'ailleurs en remercier ici notre Direction des Affaires juridiques et les avocats qui nous ont accompagn�s.

Notre d�termination, parce qu'il y fallait de la d�termination, pas le temps d'une s�ance, notre d�termination, et ma d�termination, s'est articul�e autour d'un triple objectif dont nous n'avons jamais d�vi� : v�rit�, reconnaissance des faits et r�paration.

C'est pr�cis�ment ce � quoi r�pond aujourd'hui le projet de protocole qui vous est soumis.

V�rit� car les faits sont �tablis sur la base de l'ordonnance de la juge d'instruction.

Reconnaissance car, s'il y a restitution, c'est bien qu'il y a eu spoliation.

R�paration enfin, puisque les Parisiens qui avaient �t� l�s�s vont �tre rembours�s du pr�judice subi.

Cela am�ne � rectifier un certain nombre d'inexactitudes lues et entendues depuis un mois, provenant d'�lus ou de commentateurs, les uns de bonne foi, les autres sans doute beaucoup moins.

Ce protocole n'a fait l'objet d'aucune tractation, contrairement � ce que beaucoup ont voulu pr�tendre. La somme de 2.200.000 euros ne proc�de d'aucun arbitraire. Elle correspond strictement au montant inscrit dans l'ordonnance de renvoi de la juge.

Ce protocole ne traduit pas davantage je ne sais quelle proc�dure d'exception. Ceux qui ont parl� d'une justice pour les puissants ont rat� une bonne occasion de r�viser leur droit.

Il s'agit au contraire d'une proc�dure ordinaire, explicitement pr�vue par le titre 15, article 20-44 du Code civil, et ouverte � n'importe quel citoyen. Personne ici n'est au-dessus des lois, c'est justement la loi que nous appliquons.

Enfin, s'agirait-il d'une approche in�dite ? Non, et parmi ceux qui l'affirment, beaucoup si�geaient dans cette Assembl�e quand, en f�vrier 2003, la conf�d�ration Force Ouvri�re, dont le Secr�taire g�n�ral avait b�n�fici� ind�ment d'un chauffeur r�mun�r� par la Ville, proposait de rembourser 280.000 euros � notre collectivit�.

Le Conseil de Paris avait alors approuv� � l'unanimit�, � la fois la r�paration et le retrait de la plainte.

Car, dans ce dossier comme dans d'autres, j'ai toujours appliqu� les m�mes principes, quels que soient le nom, la fonction ou l'orientation politique des personnes impliqu�es.

Notre vocation de partie civile n'est pas la vengeance politique. J'invite d'ailleurs chacun � plus de clart� et d'honn�tet� intellectuelle, en particulier ceux qui connaissent bien le fonctionnement de la Justice.

La partie civile d�fend ses int�r�ts, en l'occurrence ceux des contribuables parisiens. Elle n'a pas � intervenir en lieu et place du Parquet ni des juges, seuls habilit�s � agir au nom de la soci�t�.

Certains me parlent de morale et d'�thique. Justement, ma conception de la morale, de l'�thique et de la Justice m'a toujours inspir� la m�me position.

Quand les responsabilit�s sont reconnues et assum�es, quand il est propos� de rembourser int�gralement la victime de son pr�judice, quand cette indemnisation intervient dans un cadre juridique totalement incontestable, au nom de quoi devrions-nous refuser ?

Pire, au nom de quelle morale, au nom de quelle �thique, au nom de quelle justice devrait-on accepter pour l'un en 2003 et refuser pour les autres aujourd'hui ?

Je le dis tr�s clairement, ce n'est pas ma conception de l?honneur, ni en politique ni tout simplement dans la vie et je ne dis l� rien qui devrait surprendre. Cette position qui est de principe et non de circonstance, je l'ai exprim�e d�j� � plusieurs reprises publiquement au cours des derni�res ann�es.

Deux arguments ont �t�, par ailleurs, utilis�s pour critiquer le principe de ce protocole. Je tiens � les �voquer, car ils rel�vent, l'un comme l'autre, d'une d�sinformation.

Le premier est que la participation financi�re de l'U.M.P. � l'indemnisation de la Ville reviendrait � l�ser une nouvelle fois le contribuable, au motif que cette formation politique re�oit, comme la loi le pr�voit, des financements publics.

La participation de l'U.M.P. est pourtant parfaitement conforme aux termes m�me de l'ordonnance de la juge, qui indique explicitement que les faits renvoy�s devant le Tribunal correctionnel servaient aussi bien les int�r�ts de l'ancien Maire de Paris que ceux de son propre parti, le R.P.R., dont l'U.M.P. est le prolongement.

En avril 2005, dans le cadre du dossier "Jupp�", l'U.M.P. avait d'ailleurs d�j� rembours� la Ville � hauteur de 900.000 euros et ce protocole d'accord avait �t� vot� par tous les groupes - je dis bien tous les groupes - de notre Assembl�e. Comment l'argument du contribuable victime de la double peine, que personne n'avait invoqu� � l'�poque, deviendrait-il pertinent aujourd'hui ?

Oui, l'U.M.P. est comme toutes les formations politiques financ�es par des fonds publics et des fonds priv�s. En l'esp�ce, la contribution que l'U.M.P. versera � la Ville sera strictement soustraite de son budget, sans, bien s�r, que cela n'entra�ne une dotation suppl�mentaire de l'Etat.

Cela n'enl�vera donc pas un centime de la poche du contribuable. D'ailleurs, faudrait-il consid�rer qu'un parti politique, d�s lors qu'il re�oit de l'argent de l'Etat, devrait �tre dispens� de remboursement quand sa responsabilit� civile ou p�nale est mise en cause ? Je laisse aux tenants de cet argument le soin de m�diter sur l'absence de logique d'une telle position.

Deuxi�me contrev�rit� : ce protocole permettrait � M. Jacques CHIRAC d'�chapper � ses juges. Mais un proc�s se tiendra bien dans les prochains mois, contrairement � ce que beaucoup ont laiss� croire ou martel�. Il concernera d'ailleurs �galement M. BLONDEL, qui a pourtant rembours� la Ville depuis longtemps, car le r�glement du volet civil de ce dossier n'�teint nullement l'action judiciaire en cours et la justice se prononcera souverainement.

Mes chers coll�gues, en 2001, l'�quipe que j'ai l'honneur de conduire a mis un terme au syst�me des emplois fictifs. Elle a, depuis, inlassablement ?uvr� au service de la v�rit�. Elle obtient aujourd'hui la r�paration � laquelle aspiraient l�gitimement les contribuables parisiens.

En leur nom, je vous demande d'en prendre acte et d'approuver ce protocole d'indemnisation.

(Applaudissements sur les bancs des groupes socialiste, radical de gauche et apparent�s, Communiste et �lus du Parti de Gauche et "Les Verts").

Je donne maintenant la parole � M. Jean-Fran�ois LAMOUR.

M. Jean-Fran�ois LAMOUR. - Merci, Monsieur le Maire.

Mes chers coll�gues, il y a des moments dans la vie politique o� il faut savoir d�passer les clivages et regarder le pass� avec s�r�nit�. C'est le choix que vous avez fait, Monsieur le Maire, un choix juste, qui vous honore et que vous avez courageusement d�fendu, un choix juste � l'�gard d'un ancien Maire de Paris et d'un ancien Pr�sident de la R�publique qui a beaucoup servi notre pays, un choix qui exprime finalement la volont� partag�e de tous les acteurs en pr�sence, celle de la Ville par votre voix, celle de Jacques CHIRAC lui-m�me, et celle de l'U.M.P., dont le bureau politique s'est prononc� � la quasi-unanimit� en faveur de cette d�cision, envoyant ainsi un message fort de rassemblement et de solidarit� envers Jacques CHIRAC.

Ce protocole, soumis � notre vote aujourd'hui, garantit, et c'est l� l'essentiel, la r�paration d'�ventuelles erreurs mat�rielles et le remboursement de tous les frais li�s aux emplois litigieux. Les int�r�ts des Parisiens seront donc totalement pr�serv�s, quelle que soit la qualification ult�rieure des actes concern�s. C'est pourquoi la Ville, � juste titre, renonce � se constituer partie civile.

Je rappelle, en outre, que ce protocole ne met pas fin � l'action judiciaire. Le proc�s aura bien lieu et la date en sera fix�e prochainement. Cet accord est une proc�dure normale, ordinaire, m�me banale ; la loi y incite, des milliers de justiciables y recourent et il est fr�quent que des parties civiles obtiennent r�paration avant le proc�s lui-m�me. Dois-je rappeler que dans notre droit, le r�le de la partie civile est uniquement d'obtenir r�paration, rien de moins mais rien de plus.

Ceux qui s'insurgent aujourd'hui contre le projet de protocole, notamment les �lus "Verts", avaient d�j� approuv� le principe de l'indemnisation par le R.P.R. de la Ville de Paris, indemnisation d'ailleurs impos�e par la Cour d'appel de Versailles. On ne passe pas � c�t� de l'action judiciaire, on reste dans le cadre de l'Etat de Droit et l'accord entre les parties, s'il n'entrave en aucun cas le travail de la Justice, va dans le sens de l?apaisement d'une pol�mique pr�judiciable � tous, � Paris et � ses habitants en particulier, quelles que soient leurs opinions politiques.

Les montants litigieux seront recouvr�s, mettant fin � l'action civile, et, le moment venu, l'ancien Maire de Paris s'expliquera devant le tribunal sur l'absence d'infraction p�nale.

Refuser une telle solution serait apparue comme une attitude purement politicienne, comme une sorte de volont� de vengeance politique.

Jacques CHIRAC a maintenant mis fin � ses activit�s politiques. Il a eu une grande carri�re, il a �t� le premier Maire de Paris �lu par ses habitants. Comme Pr�sident de la R�publique, il a incarn� la France, il a rendu de grands services avec ses conceptions de la R�publique et de notre pays dans le monde ; je pense en particulier � sa volont� de ne pas engager notre arm�e dans le conflit irakien. Il est parfaitement l�gitime que l'U.M.P. se montre � la fois solidaire et responsable, en assumant le pass�, comme elle a d�j� �t� amen�e � le faire pr�c�demment, exprimant ainsi sa reconnaissance envers Jacques CHIRAC pour toute son action.

Il est aussi honorable de la part du Maire de Paris d'avoir su transcender les antagonismes pour prendre une position sage.

D�fendre les int�r�ts des Parisiens est notre premi�re mission et en tant que responsables politiques, nous sommes aujourd'hui en mesure d'adresser � tous les citoyens un message de s�r�nit� et de responsabilit� qui m�rite le soutien du plus grand nombre d'entre nous.

Pour toutes ces raisons, mon groupe votera ce protocole d'accord.

(Applaudissements sur les bancs des groupes U.M.P.P.A. et Centre et Ind�pendants).

M. LE MAIRE DE PARIS. - La parole est � M. Ian BROSSAT.

M. Ian BROSSAT. - Merci, Monsieur le Maire.

Monsieur le Maire, chers coll�gues, il fut une �poque, � Paris, il n'y a pas si longtemps, o� la conduite des affaires publiques passait par des zones d'ombre et ne r�pugnait ni aux petits arrangements ni aux mensonges.

Incarn�es par Jacques CHIRAC, ces ann�es ont pris fin en 2001 avec l'�lection d'une nouvelle majorit� et un changement radical de comportement des �lus.

L'actuelle Municipalit� a soutenu la proc�dure judiciaire visant l?ancien Maire et s'est imm�diatement constitu�e partie civile. Malgr� les reports et les d�lais, la Ville a tenu bon, consid�rant que les Parisiens avaient �t� l�s�s et qu'ils entendaient que justice soit faite.

Cependant, j'entends certains dans cette Assembl�e, des partenaires, des amis, qui soutiennent que l'enjeu de ce protocole d'indemnisation d�passe largement la r�paration mat�rielle d'un pr�judice fait aux Parisiens par leur ancien Maire. Ils nous disent qu?il s?agit d?�thique, de morale et de politique, qu?il s'agit de justice, et je crois que c'est, en effet, ce dont il s'agit. Nous pensons qu'il est bel et bien question de politique, de morale et d'�thique et je suis d'accord avec ceux qui nous rappellent que les �lecteurs se d�tournent de leurs �lus et se m�fient d?eux aujourd?hui. Je suis d?accord avec ceux qui disent que l'exemple donn� aujourd'hui au sommet de l'Etat les incite plus que jamais � la d�fiance, voire � la col�re.

Tout cela est vrai, tout cela est indubitable. Les errements des Ministres, les scandales � r�p�tition, tout cela a des cons�quences d�sastreuses et creuse un foss� toujours plus profond entre le peuple et ses repr�sentants.

Ce n'est donc pas un hasard si le protocole d'indemnisation qui nous occupe aujourd'hui a tant fait parler de lui dans la presse et interroge un certain nombre de Parisiens. L'�re est au soup�on et cela n'a rien d'anormal car les blessures de la confiance sont � peine referm�es dans notre vie.

Depuis plusieurs semaines cependant, c'est un tintamarre de d�clarations d�finitives et d'exclamations outrag�es que nous entendons. Alors que - je veux le rappeler ici - ce protocole d'indemnisation n'a rien d?ill�gal et rien d'ill�gitime. Il est tout � fait courant, vous l'avez dit, dans les affaires de ce type, et la Ville y a d�j� eu recours pour d'autres affaires. Il ne repr�sente en aucun cas un arrangement avec Jacques CHIRAC, puisque la principale cons�quence, de ce que certains appellent � tort un accord, est d'affirmer pour la premi�re fois la culpabilit� de l'ancien Maire. Car payer, c?est avouer.

Gr�ce � ce protocole, la Ville obtient ses aveux. C'est un pas consid�rable, c'est un pas en direction de la justice, c'est la victoire de tous ceux qui se battent pour cela depuis des ann�es.

Ce tintamarre est en r�alit� un tour de passe-passe. Tout d'abord, il veut nous faire croire que les vessies sont des lanternes et que les aveux sont un arrangement. Il trace un signe d'�galit� grotesque et risible entre un maire et un autre, entre un Jacques CHIRAC et Bertrand DELANO�.

Celui qui s'est constitu� partie civile, celui qui mit fin, avec sa majorit�, au syst�me des passe-droits, des pr�bendes et des avantages de toute nature, est quasiment mis au banc des accus�s. Que certains � gauche tentent ainsi de faire passer Bertrand DELANO� et Jacques CHIRAC pour larrons en foire, c?est faux et c?est ridicule, c?est absurde.

Mais le tour de passe-passe ne s'arr�te pas l�. La suite est plus impressionnante encore. Alors que le printemps bruissait de mille r�v�lations consternantes concernant les int�r�ts tr�s particuliers de certains Ministres et responsables de l'U.M.P., les uns et les autres ont connu un spectaculaire r�pit � la fin de l'�t�. Ce Gouvernement s'appr�tait � brader les retraites des Fran�ais, � remettre en cause les acquis de dizaines d'ann�es de lutte sociale et voil� que, pour une poign�e de secondes d'exposition m�diatique, certains n'ont pas h�sit� � bien �trangement employer leur �nergie au retour des vacances.

Nous avons m�me entendu une femme de gauche, para�t-il, que certains voient d�j� comme candidate � l'�lection pr�sidentielle s'inqui�ter du devenir des contributions des adh�rents de l'U.M.P. Avec ce protocole d'accord, si j'en crois une interview au journal "Lib�ration", ces cotisants de l'U.M.P. auraient �t� l�s�s. Ils auraient m�me, selon elle, �t� victimes d'un abus de confiance. D�fendre l'argent de Liliane BETTENCOURT et du premier cercle, voil� une bien �trange mani�re d'entamer une campagne pr�sidentielle pour une candidate de gauche !

On attend toujours d'ailleurs que cette m�me candidate � l'�lection pr�sidentielle, qui ne rate jamais l'occasion de faire la le�on aux uns et aux autres, bouge le petit orteil pour d�fendre les retraites des salari�s de notre pays. Mais il est vrai que chacun occupe son temps comme il l'entend et choisit ses priorit�s comme bon lui semble.

Et pourtant, malgr� l'�vidence de ces tours de passe-passe, un certain nombre de voix s'�l�ve toujours pour contester la valeur de ce protocole d'indemnisation. A la fin de l?�t�, ces voix se sont faites insistantes.

Dans ce moment qui est le n�tre, � un moment de d�fiance populaire, parfois de d�go�t, je veux mettre en garde, Sylvain, si tu le permets, certains de nos amis contre le risque qu'ils prennent.

M. LE MAIRE DE PARIS. - Vous concluez, Monsieur BROSSAT.

M. Ian BROSSAT. - Un risque qui nous menace tous, un risque qui porte un nom : le poujadisme. Entonnez ce refrain du "tous pourris", c?est offrir � la Droite, aujourd'hui emp�tr�e dans les affaires, une planche de salut qu'elle n'esp�rait m�me plus. Cette Droite qui ne r�ve m�me plus de faire croire qu'elle est honn�te. Cette Droite qui ne cherche m�me plus � faire croire qu'elle est plus honn�te que la Gauche.

(Manifestations dans l?h�micycle).

M. LE MAIRE DE PARIS. - Ce serait mieux que vous vous en teniez � votre temps de parole. C?�tait bien.

M. Ian BROSSAT. - Cette Droite qui cherche simplement � faire croire que la Gauche est aussi malhonn�te qu?elle. On voit bien � quelle d�rive vous nous conduisez. C'est la raison pour laquelle...

(Manifestations dans l?h�micycle).

M. LE MAIRE DE PARIS. - S'il vous pla�t !

M. Ian BROSSAT. - C'est la raison pour laquelle?

M. LE MAIRE DE PARIS. - Concluez.

M. Ian BROSSAT. - Si vous permettez que je termine, c?est la raison pour laquelle nous nous m�fions comme de la peste de cette d�rive qui consiste � consid�rer que tout homme, toute femme qui fait de la politique seraient par d�finition corrompu. Je pense que ce qu'on a entendu ces derni�res semaines y a largement contribu�.

Monsieur le Maire, vous l'aurez compris, nous voterons ce protocole d'accord.

Je vous remercie.

(Applaudissements sur les bancs des groupes Communiste et �lus du Parti de Gauche, socialiste, radical de gauche et apparent�s et "Les Verts").

M. LE MAIRE DE PARIS. - Merci.

Monsieur CONTASSOT, vous avez la parole.

M. Yves CONTASSOT. - Monsieur le Maire.

Depuis plus de vingt ans, des proc�dures judiciaires visant la p�riode pendant laquelle Jacques CHIRAC �tait Maire de Paris alimentent la chronique. Qu'il s'agisse de l'affaire de la S.E.M.P.A.P., des H.L.M. et de sa fameuse cassette dite "M�ry", des frais de bouche, de la fraude �lectorale ou aujourd'hui des emplois fictifs, tout renvoie toujours au m�me responsable.

Depuis plus de vingt ans, la Droite a tout fait pour �viter les proc�s, usant et abusant des proc�dures et cr�ant m�me un statut particulier pour le Pr�sident de la R�publique, voulant faire de son immunit� une impunit� pour la p�riode pass�e.

Et depuis plus de vingt ans, les �cologistes n?ont de cesse de demander des comptes sur ces affaires. H�las, ils ont �t� la plupart du temps bien seuls � porter plainte, � l'exception notable, et je la salue, de Lyne COHEN-SOLAL dans le 5e arrondissement.

M. Jean TIBERI, maire du 5e arrondissement. (Hors micro). - Vous voulez parler de Lille peut-�tre ?

M. Yves CONTASSOT. - Sans les �cologistes, point de plaintes pour fraude �lectorale, Monsieur TIBERI.

(Rires et applaudissements sur les bancs des groupes "Les Verts", socialiste, radical de gauche et apparent�s et Communiste et �lus du Parti de Gauche).

M. LE MAIRE DE PARIS. - Ne compliquez pas. Monsieur TIB�RI, ne compliquez pas. On �coute chaque orateur tranquillement.

M. Jean TIBERI, maire du 5e arrondissement. - C'est tr�s int�ressant !

M. LE MAIRE DE PARIS. - On reste sur ce protocole.

Allez-y, Monsieur CONTASSOT.

M. Yves CONTASSOT. - Sans les �cologistes, Monsieur TIBERI, point de plaintes pour fraude �lectorale d�s 1987, point de plaintes pour les emplois fictifs depuis 1998 !

Vous comprendrez que nous consid�rons que nous avons une certaine l�gitimit� pour parler de ces dossiers et porter un jugement sur le d�roulement des proc�dures.

Que nous propose-t-on aujourd'hui ? De clore l'intervention de tiers dans un de ces proc�s, laissant quelques mis en cause, seuls, face � la Justice et � un procureur ayant d�j� annonc� qu'il demanderait la relaxe.

Ce protocole soul�ve des questions �videntes sur son contenu et son opportunit�. Ainsi, on nous annonce un remboursement d'un peu plus de 2 millions d'euros pour 19 emplois fictifs. Si on d�duit les int�r�ts et les frais d'avocat, il reste en r�alit� un peu moins de 1,5 million d'euros pour les seuls salaires.

Pauvres salari�s si maltrait�s par la Mairie de Paris de l'�poque, songez que pour le seul salaire de M. BLONDEL, c'�tait pr�s de 300.000 euros et que la Cour de Versailles a d�cid�, pour une seule salari�e, de condamner le R.P.R. � rembourser pr�s de 900.000 euros. On est tr�s loin du compte et personne de bonne foi ne pourrait imaginer qu'avec 1,5 million d'euros on d�dommage r�ellement les contribuables parisiens.

Certes, ce sont des �valuations d'un juge d'instruction, mais la Mairie n'aura aucun mal � d�montrer que le pr�judice est tr�s sensiblement sup�rieur, si l?on prend en compte, ce qui n'a pas �t� fait, l'ensemble des charges salariales et la dur�e r�elle des emplois fictifs. Nous ne m�connaissons pas le principe de la prescription, mais nous aurions aim� qu'un protocole de transaction int�gre cette r�alit�.

Bravo encore � la Droite pour arriver � minorer ainsi les sommes dues. Cela rappelle d'ailleurs curieusement les d�tournements des H.L.M. qui ont permis au R.P.R. d'encaisser des dizaines de millions d'euros sans qu'aucun de ses responsables ne soit inqui�t�. Belle continuit� dans la d�fense des int�r�ts du parti !

Alors, certes, le paiement m�me partiel par l'ancien Maire de Paris le fait passer de la pr�somption d'innocence � une soi-disant reconnaissance de culpabilit�. Mais cela reste virtuel, car le tribunal pourrait encore le relaxer et il serait alors de nouveau pass� au travers des mailles du filet. Et personne n?aurait le droit de dire qu?il a reconnu une quelconque culpabilit�.

Alors, quant � l?opportunit� d?un tel protocole, c?est �videmment ce qui nous choque le plus. Dans le pr�c�dent jugement sur ces emplois fictifs, la Cour avait d�nonc�, je cite, "l'existence d'un syst�me g�n�ralis�".

Si certains protagonistes ont �t� jug�s, il n'en reste pas moins que la clef de vo�te sans laquelle rien ne tient doit aussi �tre trait�e comme tous les justiciables.

Le contexte actuel de l?affaire, il faut bien l?appeler "WOERTH, BETTENCOURT, SARKOZY", o� l?on d�couvre chaque jour les connivences entre certains milieux d'affaires et le financement politique, montre que, pour la Droite, rien n'a r�ellement chang� et que tout est bon dans ce domaine.

Faut-il rappeler au passage que c'est le procureur en charge de l'enqu�te pr�liminaire dans ce dossier qui a class� sans suite l'affaire des frais de bouche ?

La Droite reste la Droite, avec ses m�thodes, et nous ne pouvons, selon nous, trouver un accord avec elle lorsque la loi p�nale n'est pas respect�e.

Contrairement � ce qui a pu �tre dit, il n'y a aucune haine, aucun esprit de vengeance, aucun acharnement dans notre d�marche, simplement le refus d'une Justice � deux vitesses.

Quand tous les m�dias encore ind�pendants consid�rent que cela accr�dite l'id�e que, d�cid�ment, les politiques ne sont pas jug�s comme les autres, on sait bien � qui cela profite.

Notre groupe votera donc contre ce protocole, dont la fiabilit� juridique est par ailleurs sujette � discussion. Nous ne voulons pas un jour �tre comptables d?un �ventuel abus de bien social ou de recel.

Mais surtout, c'est parce que pour nous il y a une �thique et une morale, oui, une �thique et une morale en politique, et qu'il n'est pas possible de les transgresser au profit d?un parti politique ayant de telles pratiques.

Nous savons d'ailleurs que ce point de vue est largement partag�, malgr� les disciplines de parti. Nous en appelons donc � chacune et � chacun pour que l'honneur de la politique ne soit pas sacrifi�.

Je vous remercie.

M. LE MAIRE DE PARIS. - La parole est � M. Pascal CHERKI.

M. Pascal CHERKI, maire du 14e arrondissement. - Mes chers coll�gues, depuis que Bertrand DELANO� est Maire de Paris, notre Municipalit�, tournant le dos � des pratiques anciennes et contestables, a adopt� une ligne de conduite coh�rente et transparente face aux affaires.

Nous nous constituons partie civile pour concourir � la manifestation de la v�rit� et nous d�fendons les int�r�ts mat�riels de Paris et des Parisiens, y compris, le cas �ch�ant, en concluant des protocoles d'indemnisation.

Face � un procureur de la R�publique, que l'on avait connu plus diligent en d'autres circonstances, l'action r�solue de la Ville de Paris a contribu� � convaincre le magistrat instructeur d'ordonner le renvoi de Jacques CHIRAC devant le tribunal correctionnel.

Notre mission est remplie, ce proc�s aura lieu. Le reste ne nous appartient pas.

Il appartiendra en revanche aux juges, parfaitement �clair�s par le dossier, de rendre le moment venu leur d�cision, le d�sistement ou la pr�sence de la partie civile � l'audience n'ayant aucun effet en droit sur l'�tablissement ou non de la culpabilit� du pr�venu.

J'ajoute, mes chers coll�gues, que ce protocole d'indemnisation apporte une contribution majeure � la manifestation de la v�rit�.

En effet, indemniser autrui c'est reconna�tre que l'on a commis � son encontre un pr�judice qui appelle r�paration. C'est admettre que l'on engage sa responsabilit�.

A ceux qui feignent encore d'en douter, je les invite � me pr�senter un seul, oui mes chers coll�gues, je les invite � me pr�senter un seul innocent qui ait accept�, en toute innocence, de verser plusieurs centaines de milliers d'euros en r�paration d'une faute p�nale qu'il n'aurait pas commise.

Pour ma part, je n'ai jamais rencontr� un tel cas dans toute ma carri�re d'avocat. Les amoureux de la v�rit� peuvent donc vous remercier, Monsieur le Maire.

Enfin, et ce n'est pas le moins important pour la partie civile que nous sommes, ce protocole d'indemnisation assure la r�paration int�grale du pr�judice commis par le R.P.R. et Jacques CHIRAC � l'encontre de Paris et des Parisiens, tel qu'il est d�termin� dans l'ordonnance de renvoi du juge d'instruction.

Ceci n'est contest� s�rieusement par personne. Aussi, les int�r�ts moraux et mat�riels de Paris et des Parisiens ont �t� en l'esp�ce, comme � chaque fois dans ce genre d'affaires, parfaitement d�fendus par le Maire de Paris.

Monsieur le Maire, les Parisiens qui dans leur �crasante majorit� regardent avec beaucoup de distance et de d�tachement nos joutes politiciennes, Monsieur le Maire, les Parisiens vous savent gr� de ne pas avoir m�lang� les genres. Ils vous savent gr� de ne pas avoir confondu la Justice et la vengeance. Ils vous sont gr� de ne pas avoir sombr� dans de vaines gesticulations qui, sous couvert de procurer une notori�t� m�diatique �ph�m�re, d�veloppe une d�sagr�able et inopportune confusion.

Monsieur le Maire, c'est donc avec la conscience sereine et tranquille que le groupe socialiste votera cette d�lib�ration qui ratifie ce protocole d'indemnisation.

Mes chers coll�gues, je vous remercie.

M. LE MAIRE DE PARIS. - La parole est � M. �ric H�LARD.

M. Eric H�LARD. - Monsieur le Maire, mes chers coll�gues.

Le protocole d'indemnisation de la Ville de Paris qui nous est soumis aujourd'hui n'a fait l'objet d'aucune n�gociation, son p�rim�tre d�coulant strictement de l'information judiciaire et plus particuli�rement de l?ordonnance de renvoi de la juge d'instruction ou de tout autre d�cision judiciaire, ainsi que vous l?avez justement rappel�, Monsieur le Maire.

Aussi, loin de nous l'id�e de nous faire juges d'une telle d�cision, c'est l� un mauvais r�le dont nous refusons l'attribution.

S'il s'agit � coup s�r d'un sujet d�licat sur le plan �thique, qui fait appel � notre sens moral, il n'en fait pas moins �cho � notre sens politique ainsi qu'� notre souci de servir l'int�r�t g�n�ral.

Quelle est la situation ? D'un c�t�, il y a la position constante de la Ville de Paris, rappelant que le dommage subi doit �tre int�gralement r�par�, et de l'autre M. Jacques CHIRAC qui souhaite mettre fin � une pol�mique pr�judiciable � Paris et ses habitants, toutes opinions politiques confondues, en proposant le remboursement int�gral des montants litigieux.

Nous nous f�licitons que les lois de moralisation de 1988 et de 1995 puissent d�sormais mettre un frein � des pratiques contestables, en contradiction avec les imp�ratifs de probit� qui doivent gouverner toute action publique.

En �dictant les premi�res r�gles de financement de la vie politique, en r�servant le financement public aux seules formations de l'Assembl�e et du S�nat et en reconnaissant aux candidats aux �lections l�gislatives et pr�sidentielles la possibilit� de recevoir des dons, tout en instituant le plafonnement des d�penses �lectorales ainsi que le contr�le des comptes de campagne, la loi du 11 mars 1988 a pos� la premi�re pierre du vertueux �difice de la transparence financi�re de la vie politique.

La loi du 19 janvier 1995 a quant � elle sonn� le glas des relations opaques avec le monde des affaires, en interdisant le financement des campagnes �lectorales par une personne morale, � l'exception des partis ou groupements politiques.

C'est donc une page du pass� qu'il nous appartient de tourner. Ce dossier est ancien, il remonte � 1998 et une tr�s longue s�rie de proc�dures n'a pas permis d'y mettre un terme d�finitif.

Monsieur le Maire, vous avez choisi de prendre en compte le pr�c�dent constitu� par le protocole d'accord entre la Ville de Paris et la Conf�d�ration g�n�rale du travail Force Ouvri�re, unanimement vot� ici m�me en Conseil de Paris en f�vrier 2003 et sign� le 17 mars de la m�me ann�e.

Cette �galit� de traitement s'inscrit dans une d�marche logique et continue de r�paration des pr�judices subis par les Parisiens. C?est aux Parisiens que le groupe Centre et ind�pendants pense au moment de voter ce protocole d'accord, tout en comprenant leurs l�gitimes interrogations.

Nous leur disons que seules deux attitudes sont possibles. L'une est excessive et conduit � l'impasse, l'autre est raisonnable et permet � la Ville de Paris d'�tre rembours�e � l'euro pr�s.

La premi�re est �videmment facile. Elle consiste � pousser des cris d'orfraie, � se draper dans les exc�s de la dignit� et de la vertu, � se r�fugier dans l'affrontement brutal et st�rile entre deux camps.

C'est une posture uniquement dict�e par des consid�rations politiciennes. Elle est � nos yeux pass�iste et nous sommes certains que les Parisiens et les Fran�ais en g�n�ral n'y souscrivent pas.

La seconde attitude, au contraire, est celle qui consiste � prendre de la hauteur, � faire preuve de sang-froid en laissant pour une fois les querelles partisanes au vestiaire et en se demandant ce qu'il y a de mieux pour l'int�r�t g�n�ral.

C'est le sens de notre d�marche, c'est la raison pour laquelle nous voterons ce protocole d'indemnisation et, au moment de le faire, permettez-moi �galement de dire que ce vote constitue l?occasion d?�crire le g�n�rique de fin d'un interminable et mauvais feuilleton, une sorte de rocher de Sisyphe judiciaire qui s?acharne, qu?on le veuille ou non, sur un homme exceptionnel qui a beaucoup donn� � Paris, � la France et � son rang sur la sc�ne internationale.

M. LE MAIRE DE PARIS. - Monsieur Jean-Fran�ois MARTINS, vous avez la parole.

M. Jean-Fran�ois MARTINS. - Monsieur le Maire, chers coll�gues.

Permettez-moi un avant-propos puisque, � l'�coute des orateurs pr�c�dents, il semblerait qu?�tre contre ce protocole est �tre anim� d?un sentiment de vengeance.

J'aimerais vous rappeler, en guise d?avant-propos, que je n?�tais m�me pas �lecteur et m�me pas en �ge de l?�tre � aucune des �lections de Jacques CHIRAC et en aucun cas, je n'ai �t� impliqu� dans la vie politique locale de ces ann�es-l�. Je n'ai donc pas de passif, ni personnel, ni politique, ni �motionnel avec Jacques CHIRAC. Les raisons que je vais exposer de mon opposition � ce protocole n?ont rien � voir avec la vengeance. Permettez-moi de d�velopper ce point.

Depuis le d�but de cette affaire de protocole, Monsieur le Maire, je crois que la v�rit� est un tout petit peu d�tourn�e et que la pr�sentation est l�g�rement fauss�e. Il ne s'agissait pas uniquement, comme vous l'affirmez aujourd'hui pour justifier votre choix, d'obtenir r�paration pour les Parisiens mais bien d'obtenir, et c?est le sens du proc�s p�nal, la v�rit� et la justice. En faisant le choix de n�gocier le retrait de la Ville de son r�le de partie civile, vous commettez, � mon sens, une double erreur, Monsieur le Maire, tout simplement parce que ce protocole est autant un renoncement qu'une r�gression civique.

Un renoncement, parce qu'il s'agit ici non pas d'un proc�s civil et d?une r�paration entre deux parties mais bien d'un proc�s p�nal et la Ville, en se portant partie civile, avait tr�s judicieusement fait le choix de concourir � la v�rit�, de concourir � la justice et de poursuivre cette qu�te de justice et de v�rit�, autant que son simple int�r�t � obtenir r�paration.

Au nom des Parisiens, vous nous proposez donc aujourd'hui, contre 2,2 millions d'euros, d'abandonner notre r�le dans cette recherche de la v�rit� et notre besoin de justice. A la lumi�re de l'histoire de notre ville et de ses habitants, vous devriez le savoir, la soif de v�rit� et de justice des Parisiens, elle ne s?ach�te pas, elle ne se brade pas, elle ne se n�gocie pas.

Cette d�lib�ration est bien plus qu?un accord juridique, c'est l'essence d'une conception politique. Les Parisiens sont-ils plus attach�s � l'argent ou � leurs convictions ? Sont-ils plus anim�s par le sentiment de r�paration court-termiste ou par le d�sir de justice d�finitive ?

Car, pour dire la v�rit�, et en admettant qu'il faille absolument et au plus vite r�cup�rer ces 0,03 % de notre budget annuel, ce protocole, s'il constitue un aveu,et si vous �tes tous convaincus que ce protocole constitue un aveu, alors allons au bout de la proc�dure et c'est la Justice qui donnera r�paration. Cette Justice, quand c'est elle qui annonce � la fois le r�sultat et la r�paration, alors c'est irr�vocable ; alors, il n'y a plus aucun soup�on ; alors, effectivement, les reproches d'impartialit� ne pourront plus nous �tre faits.

Ce renoncement est d?autant plus regrettable, Monsieur le Maire, que je partage avec vous au moins une conviction, celle que nous devons tourner la page de ce proc�s, tourner la page de cette histoire et surtout ne pas �tre dans l?inquisition permanente � l'�gard du pass�.

Mais justement, il n?y a que deux choses qui peuvent en r�alit� permettre de tourner la page d�finitivement : c'est la v�rit� et la Justice.

Cette Justice doit �tre prononc�e de mani�re �quilibr�e, impartiale, dans un proc�s p�nal o� tout le monde joue son r�le, et notamment la partie civile.

Je vous l?ai dit, Monsieur le Maire, je consid�re cela comme un renoncement mais �galement comme une r�gression civique.

Le renoncement, il aurait pu constituer � lui seul une bonne raison de voter contre ce projet, mais il y a une dimension dont je vous demande de mesurer � quel point elle constitue un danger civique. A l'heure de la d�gradation de la confiance des citoyens dans la classe politique, � l?heure des scandales �thiques et civiques du Gouvernement, il faut mesurer le sentiment croissant de nos concitoyens qu'il y aurait dans ce pays deux cat�gories de Fran�ais : ceux d'un c�t�, le plus grand nombre, qui sont soumis � la loi commune et, de l'autre c�t�, les puissants qui, du fait de leur richesse, de leur pouvoir, de leur influence peuvent s'astreindre de la loi commune. De Bernard TAPIE � Liliane BETTENCOURT, les Fran�ais constatent chaque jour qu?�tre riche ou ami du pouvoir permet d'�viter la loi commune.

Ce sentiment et ce climat, chers coll�gues, nous obligent.

Ils nous obligent � l'exemplarit�. Ils nous obligent � d�montrer plus que jamais que nous sommes attach�s � la m�me justice pour tous, � l'application de la r�gle commune et qu?en tant qu'�lus, nous croyons en cette justice, nous croyons en la machine judiciaire et qu?elle seule peut affirmer une v�rit� d�finitive.

Imaginons juste, quelques secondes, le regard que nos concitoyens peuvent porter sur cette histoire en raison des faits, tr�s simplement. Un maire, socialiste, va accorder � un ancien pr�sident de la R�publique, dont il a combattu la politique et les m�thodes pendant plus de 20 ans, le moyen d'�tre confront� � un proc�s o� plus personne ne plaidera � charge. Pour parfaire ce roman sombre, cet accord sera financ� par le parti majoritaire que ce m�me maire combat et d�nonce au quotidien. Si vous ajoutez � ce tableau l'intervention d'un chef de l'Etat en place, vous �tes face � un drame d�mocratique, une r�gression civique, o� ce mauvais sc�nario laisse � penser que les pires opposants sont en r�alit� complices et connivents quand il s'agit de se prot�ger de la loi commune.

Imaginez le regard des citoyens il y a quelques minutes qui suivent ce d�bat o�, quand un maire d'arrondissement attaque une adjointe sur des emplois fictifs � Lille, nous sommes dans l?hilarit� g�n�rale ! Quel est le sentiment que peuvent avoir les citoyens en regardant cela ?

Je refuserai donc, Monsieur le Maire, chers coll�gues, cet accord et je vous invite � en faire de m�me car, contre un ch�que, je ne veux pas abandonner mon espoir de justice et celui des Parisiens. Contre un lot de consolation, je ne veux pas renoncer � participer et � savoir la v�rit�, car, par mon vote, je ne validerai jamais l'accord des puissants entre eux pour leur �viter la justice commune de tous les autres.

M. LE MAIRE DE PARIS. - Monsieur, il vous sera sans doute tout � l'heure r�pondu mais, sur un point de fait, je voudrais vous faire remarquer que refuser � Jacques CHIRAC la r�paration pr�vue dans le Code et que nous avons accept�e pour Marc BLONDEL serait rompre le principe d'�galit� et serait, pour lui, faire un traitement sp�cial stigmatisant, alors que la loi pr�voit cette disposition et que nous l'avons accept�e dans un pr�c�dent, celui de Marc BLONDEL.

Donc, ce que vous me demandez, ce n'est pas l'�galit� de tous devant la loi, c?est l?in�galit� pour une des personnes mises en cause.

La parole � M. Georges SARRE.

M. Georges SARRE, adjoint. - Monsieur le Maire de Paris, chers coll�gues.

Si j'ai souhait� intervenir dans ce d�bat, c'est parce que ce que je lis depuis quelques semaines de la part de certains coll�gues me semble si ridicule et si politicien que je m'en voudrais de garder le silence.

Ceux qui cherchent � instrumentaliser politiquement les affaires et, a fortiori, les proc�dures judiciaires s'assoient sur la s�paration des pouvoirs et confondent la politique avec un concours de boules puantes. En r�alit�, il y a beaucoup d'hypocrisie de la part des adversaires de ce protocole.

Qu?a fait le Maire de Paris, � l'�vidence ? Il a agi de sorte que les Parisiennes et les Parisiens obtiennent r�paration : r�paration des salaires injustement vers�s par la Ville et des frais de proc�dure engag�s. C'est l� son r�le de maire, garant des int�r�ts de Paris. C'est aussi simple que cela.

Le Maire n'a pas � aller au-del�, il n'a pas � confondre son r�le avec celui d'un procureur.

Dans la R�publique fran�aise, la r�paration civile est une chose, la justice p�nale en est une autre. Je sais bien que la mode est � la confusion, certains ou certaines faisant volontiers valoir leur image de juge d'instruction pour concourir � la pr�sidentielle. On voit fuser des paroles qui rel�vent d'une confusion des genres assez lamentable. Je cite : "Tel homme politique, je le connais bien, je l'ai mis en examen" ou encore "le protocole que le Maire de Paris veut signer peut constituer un d�lit p�nal". Qui parle ? Le juge ou le responsable politique ?

Cette confusion des genres, je le dis, n?est pas r�publicaine.

Revenons � l'essentiel.

Il appartient au Maire Bertrand DELANO� et � la Mairie de Paris de d�fendre les int�r�ts civils de la Ville, comme ils l'ont fait en tant que partie civile et comme ils continuent � le faire, manifestement avec succ�s, � travers ce protocole. Et il revient, en revanche, � la justice p�nale de dire la morale publique par le droit.

Je voterai donc en faveur de cette d�lib�ration, en consid�rant que les critiques outranci�res et d�magogiques qu'elle peut soulever sur les franges au Front national et sur quelques-uns des bans de cet h�micycle sont d�risoires.

Je vous remercie, Monsieur le Maire.

M. LE MAIRE DE PARIS. - La parole est � M. Sylvain GAREL.

M. Sylvain GAREL. - Merci, Monsieur le Maire.

L'honn�tet� et la probit� avec lesquelles vous dirigez cette Municipalit� depuis maintenant pr�s de 10 ans sont l'un des �l�ments qui fondent notre appartenance � cette majorit�. Parce que cela correspond � notre �thique de la politique : nous sommes �lus pour servir, pas pour nous servir ; parce que cela rompt avec les pratiques trop longtemps en cours dans ces lieux, outre des emplois fictifs � la pelle, des d�tournements d'argent massifs qui ont aliment� les fonds du R.P.R. et les articles de journaux pendant trop d'ann�es.

C'est, nous le savons tous, une des principales raisons de la victoire de l'alliance de la gauche et des �cologistes en mars 2001.

C'est pour cela aussi que cet accord entre la Ville, Jacques Chirac et l'U.M.P. nous choque profond�ment. Elle ne remet pas en cause votre honneur, Monsieur le Maire, ni votre honn�tet�, mais elle entache notre image dans un domaine de plus en plus sensible, d'autant plus que cet accord a �t� r�alis� en pleine affaire "WOERTH-BETTENCOURT-SARKOZY" qui alimente la presse tous les jours ; dernier �pisode en date : le procureur g�n�ral de la cour de cassation demande qu?un juge d?instruction soit nomm�, ce dont on peut se f�liciter.

Il y a �galement un probl�me de forme avec ce protocole, un probl�me de concertation au sein de notre majorit�, alors que c?est un militant "Vert" qui, � la fin des ann�es 1990, a eu le courage de se porter partie civile dans cette affaire. Sans lui, cette affaire aurait �t� prescrite. En 2001, vous lui avez propos� l�gitimement que la Ville, la nouvelle majorit� se substitue � lui. Il a accept�. Et vous d�cidez de retirer votre partie civile sans m�me nous en informer, sans m�me nous pr�venir, cela est inacceptable.

Puisque nous parlons de notre majorit�, j'en profite pour informer mes camarades Ian BROSSAT et Georges SARRE qu?attaquer Eva JOLY dans cette affaire montre que vous �tes pr�ts � utiliser n'importe quel argument pour justifier l'injustifiable.

Monsieur le Maire, vous nous dites pour justifier cet accord que des arrangements similaires ont eu lieu dans deux autres affaires d'emplois fictifs, l'une concernant Alain JUPP�, l'autre Marc BLONDEL.

Ce n'est pas exact. Dans le cas d'Alain JUPP�, l'accord est post�rieur au jugement, ce qui change tout.

En ce qui concerne Marc BLONDEL, je vous conseille de relire l?excellente intervention de notre ex-coll�gue Marie-Pierre MARTINET, qui parlait au nom des ?Verts?. Elle pr�cisait bien que cet accord devait demeurer pour nous une exception et surtout ne pas devenir une r�gle, ce dont vous avez pris acte.

D'autre part, il s'agissait d'un seul emploi, pas fictif d'ailleurs, et Marc BLONDEL n'�tait ni un ancien maire de Paris, ni un ancien pr�sident de la R�publique, ni l'ordonnateur d'une corruption, mais un simple b�n�ficiaire. Ce n'est donc pas tout � fait comparable.

Tout cela nous fait mal, Monsieur le Maire, fait mal � notre majorit�, et on le voit aujourd'hui, fait mal � la politique en g�n�ral. Car effectivement, cela renforce le sentiment ex�crable du "tous pourris".

Nous vous demandons donc solennellement de retirer ce protocole d'accord du vote. Sinon, nous appellerons � voter contre par un vote public qui engagera chacun de nous.

Je vous remercie.

M. LE MAIRE DE PARIS. - Monsieur GAREL, vous dites que je ne vous ai pas inform�s? Cela fait plus de deux ans que j'�cris et dis la m�me chose et je sais que vous me lisez. Cet argument n'est donc � mon avis pas valable.

Deuxi�mement, vous parlez de l'affaire BETTENCOURT, etc., je vais vous dire mon sentiment. Mon sentiment est que lorsqu?on a des principes, on ne peut les faire varier, ni en fonction des personnes, ni en fonction du climat, voil� ! Sinon, ce n'est pas de la morale et de la justice ; c'est mon sentiment.

C'est pourquoi je ne veux pas, justement, sur une question de morale, d'�thique et de justice, �tre influenc� par la qualit� de la personne, son appartenance politique ou les circonstances dans lesquelles on se trouve. Sinon, ce n'est plus de la justice.

(Applaudissements sur les bancs des groupes socialiste, radical de gauche et apparent�s, Communiste et �lus du Parti de Gauche et "Les Verts").

La parole est � M. Alexis CORBI�RE.

M. Alexis CORBI�RE. - Monsieur le Maire, Mesdames et Messieurs les Conseillers de Paris, j'interviens en mon nom et au nom de ma coll�gue Danielle SIMONNET, assise � mes c�t�s et responsable nationale, comme moi, du Parti de Gauche.

Tout � l'heure, tous les deux, nous voterons contre le protocole qui est aujourd'hui soumis � notre jugement.

Le d�bat que nous avons ce matin est un moment important de la mandature. Toutefois, il a lieu sur un point qui ne constitue en rien un engagement que nous avons pris devant les Parisiens. La parole et le vote de chacun doivent donc �tre libres et je vous remercie, Monsieur le Maire, d'avoir donn� la possibilit� � chacune des forces politiques pr�sentes dans cette Assembl�e de s'exprimer.

J'irai � l'essentiel ; nous sommes contre ce protocole car nous souhaitons que la Ville de Paris reste partie civile dans le proc�s qui va avoir lieu dans quelques mois.

Ce proc�s va mettre en cause M. Jacques CHIRAC en sa qualit� d'ancien maire de la capitale dans l'affaire dite des emplois fictifs. Danielle SIMONNET et moi voulons que la Ville reste partie civile car c'est elle qui a engag� la proc�dure, et par coh�rence nous pensons qu'elle doit le rester jusqu'au bout. D'ailleurs, un protocole d'indemnisation aurait pu exister sans que la Ville de Paris se retire.

On nous r�pondra que les dommages que la Ville a subits sont d�sormais rembours�s : pourquoi aller plus loin ? Le proc�s aura lieu, quoi qu'il arrive.

Certes.

Il faut donc d'abord dire quelques mots de ce protocole dit d'indemnisation. � sa lecture, il nous appara�t comme un document curieux, hybride en quelque sorte. Ce protocole nous dit, je le cite : "M. CHIRAC n'est responsable d'aucun d�lit mais il accepte malgr� tout de rembourser la Ville"... On se pince !

Dans cette affaire, une question s?impose : M. CHIRAC est-il innocent ou coupable ? Il ne peut �tre les deux � la fois.

S'il est innocent, ce protocole n'a aucun sens, � moins de consid�rer l'U.M.P. comme une association de g�n�reux donateurs philanthropes, ce que franchement on ignorait. M. CHIRAC et la Droite, sans reconna�tre leur culpabilit�, accepteraient de verser 2,2 millions d?euros simplement "dans le souci d'apaiser une source de pol�miques pr�judiciable � Paris et � ses habitants".

On pourrait presque rire de cette phrase. Je voudrais signaler � mes coll�gues de l'U.M.P. que leur politique actuelle, en remettant en cause la retraite � 60 ans et en faisant manifester 3 millions de personnes il y a encore quelques jours, est aussi une source grave de pol�miques pr�judiciable aux Fran�ais ! Ont-ils alors pr�vu de verser � chacun des Fran�ais 2,2 millions d?euros ? Tout cela est-il bien s�rieux ?

Si CHIRAC est coupable, alors ce protocole est une insulte � l'intelligence des Fran�ais ! Ce n'est pas ainsi que l'on r�gle une telle affaire ! Ce proc�s mettant en cause un Pr�sident pour la premi�re fois dans l'histoire de la Ve R�publique n'est pas un proc�s ordinaire. Il sera observ� par tous nos concitoyens qui veulent savoir si la Justice est bien la m�me pour tout le monde.

Il fait quelque part d�sormais partie de l'histoire de France. S?il est coupable, cela signifie qu?il a utilis� la Ville de Paris pour construire un appareil qui lui a permis d'�tre �lu aux plus hautes fonctions. Il a ainsi modifi� l'histoire de notre pays.

Je repose donc la question : M. CHIRAC est-il coupable ou innocent ? Les Fran�ais, et pas seulement les Parisiens, attendent une r�ponse claire. Nous savons que cette question, ce n'est pas � nous, mais c'est � la Justice d?y r�pondre. Mais notre vote et votre vote peuvent l'aider � y voir clair ou non.

Et pr�cis�ment, il faut dire un mot du proc�s qui va avoir lieu. Il est un fait qu'aucun d'entre vous ici pr�sent ne peut ignorer que le procureur M. Jean-Claude MARIN, fait inhabituel, a d'ores et d�j� fait savoir qu'il demanderait la relaxe.

Quand on conna�t le dossier et quand on sait que plusieurs personnalit�s proches de M. CHIRAC ont d�j� �t� condamn�es, cette attitude du procureur ne peut que choquer. Personne, ici pr�sent, ne peut ignorer cette r�alit�.

Voici le tableau : un procureur peu scrupuleux, et peut-�tre une partie civile absente si nous adoptons ce protocole? Le proc�s qui s'annonce risque de ne pas �tre digne de la gravit� des faits qui vont �tre jug�s.

Pour nous, militants de gauche, M. CHIRAC a �t� un grand adversaire, un grand dirigeant de la Droite fran�aise : il m�rite un proc�s � sa hauteur. Un grand homme m�rite un grand proc�s o� chaque acteur est � sa place, rien que sa place, mais toute sa place, pour permettre � la v�rit� de se faire jour.

Nous entendons dire aussi de la part de certains qui ne voudraient pas d'acharnement?

M. LE MAIRE DE PARIS. - S'il vous pla�t, du calme !

M. Alexis CORBI�RE. - ? mais en quoi le fait de s?exprimer devant la Justice serait un acharnement ? Dr�le de raisonnement, en v�rit�. En quoi le fait de faire la clart� devant la Justice est-il un acharnement ? La Justice ne serait-elle l� que pour les gens modestes ? Serait-elle indigne pour les puissants ?

Qui ne voit pas les effets d�vastateurs d?une telle logique ? Nous, nous disons non ! La Justice doit �tre la m�me pour tous. Je le dis devant les repr�sentants de l'U.M.P. qui ne cessent de r�p�ter qu'ils veulent l?impunit� z�ro, la tol�rance z�ro, qui ne cessent de durcir les lois qui frappent les plus modestes, quel que soit leur �ge.

Nous avons bien compris l'int�r�t de l'U.M.P. � proposer � la Ville un tel accord. Il suffit de lire "Le Parisien" de ce matin pour y retrouver les propos du pr�sident du groupe de l?U.M.P. : "Vite, vite, il faut tourner la page".

Mais avant de la tourner, il faut l'�crire, cette page ! Et seule la Justice doit l?�crire, et notre vote peut l?aider ou pas.

Enfin, je termine : malgr� la passion que nous mettons � d�fendre notre position, nous n'oublions pas, Monsieur le Maire, que c?est la Gauche, notamment sous votre impulsion qui, depuis 2001, a assaini la vie politique.

Et je n'oublie pas non plus que ce que nous disons est dans la continuit�, d�s la mandature de 1998, du combat qu'avaient men� Sylvie SCHERER et Martine BILLARD : nous en somme la continuit�.

Je termine avec modestie et solennit� : Danielle et moi, nous entendons �tre la voix de ceux qui subissent la politique brutale de la Droite d?hier et d?aujourd'hui. Ils veulent la justice sociale et la justice tout court.

Ce proc�s n'appartient pas qu'aux Parisiens, il concerne tous les Fran�ais ; nous sommes convaincus qu?ils nous demandent de voter contre, c?est ce que nous ferons au moment du vote, avec gravit� mais avec une grande d�termination.

Merci.

(Applaudissements sur les bancs des groupes Communiste et �lus du Parti de Gauche, socialiste, radical de gauche et apparent�s et "Les Verts").

M. LE MAIRE DE PARIS. - La parole est � M. Michel CHARZAT.

(Mouvements divers).

S'il vous pla�t, respectez-vous au moins tous !

M. Michel CHARZAT. - Mes chers coll�gues, je pense que dans cette affaire, il faut garder raison?

M. LE MAIRE DE PARIS. - Excusez-moi de vous interrompre, il n?y a pas d?accord conclu entre Jacques CHIRAC et moi, il y a une proposition de r�paration ; je n'ai conclu aucun accord. D?ailleurs, je n?ai discut� avec personne.

M. Michel CHARZAT. - La proposition d'accord conclue entre Bertrand DELANO� et Jacques CHIRAC est incontestablement licite et n?est pas d�pourvue d?arguments qui plaident en sa faveur.

Cet "accord" met un terme � une s�quence pr�judiciable � la r�putation de la vie municipale parisienne et � celle de l'institution pr�sidentielle.

Le Maire de Paris a rappel� � juste titre que le ressentiment ne doit pas �tre le ressort de la vie publique. Il a montr� �galement qu'il �tait capable de privil�gier l'apaisement avec ses adversaires, sinon avec certains de ses amis.

Enfin, la Ville de Paris va �tre int�gralement rembours�e par l'U.M.P. du pr�judice subi.

Pour autant, il nous sera difficile d'approuver cet accord. Il intervient, en effet, au terme d'une transaction, au risque d'appara�tre � beaucoup comme une affaire d'initi�s. Surtout, il fait pr�valoir le choix de l'�thique de la responsabilit�, au d�triment de l'�thique de la conviction. Or, plus que jamais, il importe de faire pr�valoir cette �thique de la conviction, au moment o� la vie publique p�tit du discr�dit, g�n�rateur de d�sinvestissement civique et d?essor du populisme sur fond de scandales et de crise morale.

Beaucoup de nos concitoyens, quelles que soient leurs convictions, et notamment dans les jeunes g�n�rations, sont d��us par ce protocole qui tranche avec le nouveau cours de la transparence et de la rigueur instaur� depuis 2001.

Enfin, la Justice, qui sait faire preuve de sagesse, aurait pu et d� conclure cette affaire, alors que cet accord peut donner le sentiment qu'elle fonctionne � deux vitesses.

"Il est, dans la vertu, un charme invincible", nous rappelle "L?Ing�nu" de Voltaire ; en l'occurrence, la vertu aurait pu conna�tre une meilleure fortune.

En cons�quence, les deux �lus de "La gauche avant tout", Mme LOPEZ et moi-m�me, n'approuveront pas cette d�lib�ration.

M. LE MAIRE DE PARIS. - La parole est � M. Jean-Pierre CAFFET.

M. Jean-Pierre CAFFET. - Merci, Monsieur le Maire.

Mes chers coll�gues, dans ce d�bat, je crois que nous sommes � un moment de v�rit� sur nos conceptions respectives du service public et de la justice.

Je veux donc, pour commencer et au nom de mon groupe, exprimer notre part de v�rit� sur ces deux sujets majeurs.

Chacun conna�t notre conception du service public. Elle est exigeante et je crois pouvoir dire reconnue et appr�ci�e par une large majorit� de Parisiens. En tout �tat de cause, elle ne saurait tol�rer, bien entendu, des d�tournements de fonds publics, car c'est bien ce grief "d�tournement de fonds publics" qui, malgr� les r�quisitions du Parquet, a conduit au renvoi devant le tribunal correctionnel de Jacques CHIRAC et de quelques autres pr�venus.

C'est cette conception du service public, mais �galement l'�vidence de la spoliation financi�re des contribuables parisiens, qui a conduit, d�s 2001, la Ville de Paris � se constituer partie civile dans cette affaire d'emplois fictifs, et c'est � dessein que je parle de partie civile, car, fondamentalement, m�me si certains feignent de l'ignorer, le r�le d'une partie civile est d'obtenir r�paration, indemnisation d'un pr�judice subi, et non pas de requ�rir une condamnation p�nale - c'est le r�le du Parquet encore moins d'ailleurs de la prononcer - c'est le r�le du tribunal.

Cessons donc, une fois pour toutes, de confondre les responsabilit�s respectives des acteurs de la Justice.

Cela �tant dit, force est de constater que dans son r�le de partie civile, la Ville de Paris obtient pleinement satisfaction.

Tout d'abord, ce protocole d'indemnisation permet � la collectivit� parisienne, et donc au contribuable, d'�tre rembours�e au centime d'euro pr�s, int�r�ts et frais judiciaires compris, et ce dans le p�rim�tre de l'ordonnance de renvoi, le seul qui ait une existence juridique.

De ce point de vue, je m'�tonne des propos de ceux qui reprochent � la Ville, comme cela a �t� fait encore une fois ce matin, de ne pas avoir cherch� � obtenir plus en d�bordant ce p�rim�tre, afin d'obtenir une r�paration pour des faits d�clar�s prescrits par la Justice, mon cher Yves CONTASSOT, sauf, bien s�r, � entamer une n�gociation avec la partie adverse que, par ailleurs, ils d�noncent � corps et � cris comme une faute morale ; comprenne qui pourra.

Ensuite, ce protocole permet une indemnisation certaine et imm�diate � la fin du mois au maximum, en �chappant aux al�as judiciaires, notamment aux �ventuelles proc�dures d'appel.

Enfin, et ce n'est pas le moindre avantage de ce protocole, il a puissamment contribu� � la manifestation de la v�rit� comme l?a relev� avant moi Pascal CHERKI, car qui peut croire que des pr�venus et leur principal b�n�ficiaire, en l'occurrence le R.P.R., devenu U.M.P., acceptent de rembourser les r�mun�rations des emplois fictifs s'ils estimaient n'avoir rien � se reprocher ?

Bien s�r, j'ai entendu depuis la fin du mois d'ao�t les critiques et les arguments de ceux qui s'opposent � cette indemnisation, dont je m'�tonne qu'ils aient �t� peu �voqu�s ce matin. Ils m�ritent donc qu'on s'y attarde quelques instants, en ne relevant, bien s�r, que les principaux.

Premier argument : avec le retrait de la partie civile, le proc�s n'aura pas lieu. Rien n'est plus faux, le proc�s aura lieu, nous le savons d'ailleurs depuis le 30 octobre 2009, date de l'ordonnance de renvoi en correctionnelle prise par la juge d'instruction et nous saurons vendredi s'il se d�roulera en novembre ou en d�but de l'ann�e prochaine et si ce proc�s se tiendra, ce ne sera pas gr�ce au Parquet qui a tout fait pour l'�viter, ce sera gr�ce � l'opini�tret�, pour ne pas dire � l'acharnement de la Ville, qui a plaid�, vous l'avez rappel�, Monsieur le Maire, en ce sens � quatre reprises devant les Cours d'appel de Paris et de Versailles et par trois fois devant la Chambre criminelle de la Cour de cassation. Pourquoi passer ces faits sous silence, chers coll�gues ?

Deuxi�me argument, c'est une variante du premier : m�me si le proc�s a lieu, ce sera sans d�bat contradictoire et la Justice ne passera pas. Rien n'est plus insolite. Chers coll�gues, nous ne sommes pas dans un proc�s accusatoire sur le mod�le am�ricain. En France, ce ne sont pas les parties mais le juge qui m�ne les d�bats, qui interroge et qui confronte et c'est de ce qu'on appelle son "intime conviction" que na�tra la d�cision de Justice, car telle est la loi et telle est la r�gle en France, mes chers coll�gues. Quand au d�bat contradictoire, il aura lieu, ne serait-ce que par les pi�ces du dossier r�unies par l'instruction, vers�es par la Ville de Paris qui, ainsi, sera pr�sente � l'audience, quoi qu'on en dise, comme le reconna�t d'ailleurs ce week-end dans un magazine l'avocat de Jacques CHIRAC. Enfin, faut-il rappeler qu'en droit, la r�paration civile n'efface pas les sanctions p�nales, mais en droit, c'est au tribunal et � lui seul de les qualifier et de les prononcer.

Troisi�me argument, que j'ai beaucoup entendu : avec ce protocole d'accord, le contribuable va payer deux fois, puisque l'U.M.P.� b�n�ficie de fonds publics. Rien n'est plus absurde. C'est comme si on affirmait que lorsqu'un fonctionnaire �copait d'une contravention, c'�tait le contribuable qui la payait, au motif que ce fonctionnaire �tait r�mun�r� par des fonds publics. Ce raisonnement serait fond�, chers coll�gues, si le salaire du fonctionnaire se voyait major� du montant de la contravention. J'ai �t� fonctionnaire et j'ai eu des contraventions comme tout le monde, croyez-moi, et c'est bien mon pouvoir d'achat qui a �t� amput�. Il en sera de m�me pour la dotation publique de l'U.M.P., dont le montant ob�it � des crit�res pr�cis tels que le nombre d'�lus, les voix obtenues dans des �lections et dont je ne vois pas, et dont personne ne voit, par quel m�canisme miraculeux elle se verrait m�caniquement augmenter de 1,7 million dans les semaines ou dans les mois qui viennent. En l?occurrence, ce sont bien les moyens de l?U.M.P. qui seront amput�s d?autant, et ce n?est que justice.

Dernier argument, enfin : celui du "tous pourris". Je crois que rien n'est plus grave. Je veux mettre en garde, et je le dis avec une certaine gravit�. Je veux mettre en garde ceux qui, en pr�tendant combattre cette pens�e dominante selon eux, ne feraient au final que la renforcer, alors m�me qu?elle est essentiellement port�e par une force politique qui n'appartient pas � l?arc r�publicain et qui mine la d�mocratie. Chers coll�gues, c'est peut-�tre l� qu?est la v�ritable faute morale.

Pour conclure, je dirai que ce qui a gouvern� le choix de ce protocole n'est pas la vengeance mais la raison. Ce qui a pr�sid� � cette d�cision n'est pas le plaisir malsain de la chasse � l'homme mais la justice pour notre collectivit�.

De ce fait, j'invite nos d�tracteurs � r�fl�chir ensemble au vrai d�bat, car avec le projet du Pr�sident de la R�publique de supprimer le juge d?instruction et de confier les pouvoirs d'enqu�te au Parquet, cette affaire des emplois fictifs n'aurait tr�s probablement jamais vu le jour et les Parisiens n'auraient jamais sans doute �t� rembours�s. L�, me semble-t-il, est la vraie question, car cette r�forme marquerait la fin d'une garantie essentielle � la justice, celle de son ind�pendance.

A l'al�a judiciaire et � l'instrumentalisation, mes chers coll�gues, nous pr�f�rons donc et de loin la r�paration int�grale, compl�te et certaine � l'euro pr�s de tous les Parisiens. C'est pourquoi le groupe socialiste, radical de gauche et apparent�s votera sans h�sitation cette d�lib�ration et, j'ajoute, en souhaitant ardemment que tr�s prochainement, apr�s douze ans de proc�dure, la Justice passe.

(Applaudissements sur les bancs des groupes socialiste, radical de gauche et apparent�s, Communiste et �lus du Parti de Gauche et "Les Verts").

M. LE MAIRE DE PARIS. - Mes chers coll�gues, le d�bat a �t� complet et tous les points de vue qui voulaient s'exprimer se sont exprim�s. L'Ex�cutif ne voit rien � rajouter, y compris apr�s la derni�re intervention.

Un vote par scrutin public a �t� demand� et nous allons y proc�der par voie �lectronique. Pour proc�der � ce vote, les cartes nominatives vous sont distribu�es par les secr�taires de vos groupes. Je vous rappelle que chaque conseiller vote de sa place avec la carte, qu'il doit introduire en l'inclinant en biais.

(Rires dans l?h�micycle).

Je lis ce qui est �crit, qui est le fonctionnement �lectronique !

Chut?

Si le conseiller dispose d'une procuration, il vote de la m�me fa�on. Je vous rappelle que nul ne peut �tre porteur de plus d'un seul pouvoir �crit. On se donne quelques instants, sans interruption pour ne pas perdre de temps, pour que les cartes soient distribu�es et, dans quelques instants, je vous indiquerai quand le vote sera ouvert. Ce n'est pas encore le cas.

Je mets donc aux voix, au scrutin public, le projet de d�lib�ration DAJ 25.

Le scrutin est ouvert.

(Il est proc�d� au vote).

Tout le monde a-t-il vot� ? Oui.

(Les votes sont recueillis �lectroniquement).

Je d�clare le scrutin clos.

Je vous donne les r�sultats :

Oui : 147

Non : 13

Abstentions : 1

Le projet de d�lib�ration est adopt�. (2010, DAJ 25).

(Applaudissements).

Mes chers coll�gues, nous passons � la 5e Commission.

Ceux qui sortent le font rapidement et en silence. Et rendez les cartes, � commencer par moi ! Mes chers coll�gues, ceux qui sortent le font vite, s'il vous pla�t.

Septembre 2010
Débat
Conseil municipal
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