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2006, DASES 85 - Autorisation à M. le Maire de Paris de signer une convention avec l’AP-HP pour la réalisation d’une étude relative aux troubles des apprentissages du langage écrit. - Attribution d’une subvention correspondante. - Montant : 70.000 euros.


M. Eric FERRAND, adjoint, pr�sident. - Nous passons � l?examen du projet de d�lib�ration DASES 85.

Madame DUBARRY est inscrite et vous avez la parole.

Mme V�ronique DUBARRY. - Je vous remercie, Monsieur le Maire.

Chers coll�gues, il s?agit ici de voter la prolongation d?une �tude �pid�miologique concernant les troubles du langage �crit, qui a �t� entam�e il y a � peu pr�s un an aupr�s de 1.000 enfants scolaris�s en CE1, en �cole �l�mentaire donc.

Cette �tude, comme cela nous est pr�cis� dans le projet de d�lib�ration, vise � �valuer la proportion de mauvais lecteurs, � d�terminer parmi eux combien pr�sentent les crit�res diagnostics de la dyslexie et � �valuer les effets d?un entra�nement audiovisuel en milieu scolaire. Elle devrait �tre compl�t�e par une analyse des donn�es socioculturelles et cognitives comportementales, une �valuation de la durabilit� des effets des entra�nements et l?�tude de corr�lats biologiques et comportementaux des d�terminants socio�conomiques.

Il n?est, bien �videmment pour moi, pas question de remettre en cause la validit� scientifique d?une telle �tude, d?autant que la lecture de ce projet de d�lib�ration est peu ais�e car elle use et abuse d?un certain langage scientifique. Il y a cependant un certain nombre de questions qui me laissent quelque peu dubitative. Je reprendrai tout simplement quelques-uns des termes du rapport, tel qu?il nous est pr�sent� dans l?annexe au pr�sent projet de d�lib�ration.

?Les enfants en difficult� en primaire ont un risque important de rester de mauvais lecteurs tout au long de leur scolarit� et � l?�ge adulte, p�nalisant souvent leur int�gration socioprofessionnelle et pouvant entra�ner des situations de pr�carit�, voire de violence. Une partie du d�calage en lecture pourrait �tre expliqu� par un d�ficit de ces comportements phonologiques, la conscience phonologique et le niveau socio�conomique �tant directement corr�l�s. Pour pouvoir mieux analyser les facteurs c�r�braux pr�cis�ment en cause dans les difficult�s de lecture, en particulier chez les enfants en milieu pr�caire, un programme en imagerie fonctionnelle? Il s?agit donc de comparer les dysfonctionnements observ�s en I.R.M. des enfants de l?�tude mauvais lecteurs en milieu d�favoris� et bilingue, � ceux dyslexiques afin de valider ou d?infirmer l?hypoth�se d?un dysfonctionnement similaire?.

Lorsque j?ai lu ces phrases, ces propos, cela m?a f�cheusement rappel� ce que j?avais pu vous lire il y a un peu moins d?un an, � savoir des extraits du rapport de l?INSERM, d?ailleurs il se trouve que ces chercheurs sont �galement affili�s � l?INSERM, sur les troubles du comportement chez les enfants de moins de 3 ans.

Ce rapport a fait, comme chacun d?entre vous le sait, couler beaucoup d?encre. Il a mobilis� contre lui les travailleurs sociaux et la communaut� scientifique, puisqu?il pr�nait une d�tection tr�s pr�coce des troubles comportementaux chez l?en-fant, troubles cens�s annoncer un parcours vers la d�linquance, bien �videmment, et invitait les professionnels � rep�rer des facteurs de risque pr�nataux et p�rinataux g�n�tiques, environnementaux et li�s au temp�rament et � la personnalit�.

Je vous avoue que ce type de posture me fait fr�mir. Il s?agit ici d?�tudier ?les corr�lats biologiques et comportementaux des d�terminants socio�conomiques?. Dans le contexte actuel, il est impossible de ne pas s?interroger sur les fondements m�thodologiques et id�ologiques - je p�se le mot - de cette approche, puisqu?elle s?inscrit dans la droite ligne du rapport INSERM pr�c�dent, que je viens de citer, qui tend � m�dicaliser la pauvret� et � trouver des causes neurobiologiques aux enfants pr�sentant des troubles de l?apprentissage issus de milieux socio�conomiques d�favoris�s.

Bien s�r, il s?agit d?une hypoth�se de recherche, qui reste donc � v�rifier, normalement, mais je trouve qu?elle entretient une dangereuse confusion entre cat�gories m�dicales et actes sociaux.

Cette �tude s?inscrit de la m�me fa�on dans la droite ligne des recherches anglo-saxonnes d?inspiration n�olib�rale, contre lesquelles nous nous sommes ici m�me tr�s souvent insurg�s.

Il est hors de question pour moi, je le r�p�te, de remettre en cause la validit� et les postulats scientifiques. Je souhaiterais n�anmoins que nous restions tr�s prudents quant au r�sultat de cette �tude et surtout � l?utilisation qui pourrait en �tre faite. D?autant que ce qui est pr�vu � l?issue de cette �tude, c?est que cela pourrait mener � mettre en place un dispositif p�dagogique, appropri� et �valu�, de lutte contre l?illettrisme. Or, en l?occurrence et par ailleurs, parmi les chercheurs qui vont mener cette �tude, il n?y a aucun enseignant associ�. Peut-�tre que ce sera fait plus tard mais pour le moment, il n?y a aucun enseignant. Il n?y a aucun psychiatre, psychologue associ�. Cela me pose un vrai probl�me parce que cela donne quand m�me une ligne de conduite que je r�prouve et que nous r�prouvons souvent ensemble sur les bancs de cette Assembl�e.

Je vous remercie.

M. Eric FERRAND, adjoint, pr�sident. - Merci, Madame DUBARRY.

Monsieur LHOSTIS, vous avez la parole pour y r�pondre.

M. Alain LHOSTIS, adjoint, au nom de la 6e Commission. - Je suis tr�s �tonn� de ce discours, moi qui ai sign� parmi les premiers la p�tition dont Mme DUBARRY vient de faire �tat.

Je rappelle quand m�me que l?INSERM, qui vient d?�tre englob�e dans un opprobe g�n�ral, regroupe des milliers de chercheurs dont la comp�tence et la qualit� sont reconnues nationalement et internationalement.

Je trouve donc que l?amalgame est dangereux, puisqu?on nous parlait de dangerosit�. Je pense que si Mme DUBARRY et le groupe ?Les Verts? pensent cela de cette �tude, il faut qu?ils votent contre, parce que personnellement, je ne l?aurais pas soumise si tel �tait bien le cas.

Ceci �tant - mais on y reviendra peut-�tre dans le dossier suivant -, le probl�me avec les scientifiques, c?est qu?ils v�rifient des hypoth�ses de recherche. Si nous devons par avance leur prescrire le r�sultat obligatoire de la recherche, on tombe dans des m�thodes que nous r�prouvons et qui viennent d?�tre �voqu�es. Donc, voil�. J?ai ce probl�me.

Mme DUBARRY m?a fait savoir qu?elle voulait que je sois s�rieux dans ma r�ponse, mais j?ai l?habitude d?�tre s�rieux, et surtout avec elle. De plus, comme on se voit tr�s souvent, je pr�f�re �tre le plus s�rieux possible.

La lecture est un enjeu majeur et les difficult�s de lecture en d�but de primaire peuvent s�rieusement demeurer tout au cours de la scolarit�. C?est un constat. Ce n?est pas un jugement sur les pauvres. Quand des enfants qui entrent en 6e ne savent ni lire ni �crire, c?est un vrai probl�me. Il s?agit donc d?un enjeu scolaire, mais aussi d?un enjeu social majeur.

L?�tude dont vous parlez a d�j� commenc�. Elle n?a pas provoqu� jusqu?� pr�sent de difficult�. Ce ne sont pas des chercheurs en biologie qui observent des choses microscopiques. Ils sont en relation avec le service de sant� scolaire et l?Acad�mie.

L?objectif �tait de faire le point sur la proportion de mauvais lecteurs, de d�terminer la part de dyslexie et d?�valuer une m�thode d?apprentissage par entra�nement audiovisuel. Ce sont les objectifs fix�s au d�part. Nous voulions identifier une m�thode p�dagogique susceptible de lutter contre l?illettrisme, mais je pense que cet objectif-l� ne saurait �tre mis en cause.

Que s?est-il pass� ? Un rapport interm�diaire est remis qui fait �tat pour plus de 90 % des �l�ves, de r�sultats comparables d?une �cole � l?autre ind�pendamment de l?environnement socioculturel et p�dagogique. C?est un constat. Par ailleurs, pour 10 % des �l�ves qui sont les plus en difficult�, la r�partition est tr�s d�pendante du milieu socioculturel d?origine. C?est �galement un constat. Donc ind�pendamment de l?environnement, la plupart des enfants apprennent ; c?est un constat.

A ce moment-l�, ce n?est pas moi qui propose, ce sont �videmment les services concern�s qui s?interrogent : ?Est-ce que l?on fait simplement ce constat ou essaie-t-on d?approfondir la r�flexion pour voir quelles sont les causes ??

A la lumi�re de ces r�sultats, on a pens� compl�ter l?�tude en cours pour mieux identifier les causes et les difficult�s. L?�tude sera conduite par le service de r��ducation neuro-p�diatrique de Bic�tre, dont la comp�tence universitaire est reconnue. Elle vise � croiser les donn�es des neurosciences concernant une population s�lectionn�e de dyslexiques et les donn�es socioculturelles, qui concernent l?apprentissage tous milieux confondus. Tout cela pour mettre en place une r�ponse p�dagogique appropri�e qui n?incombe pas aux auteurs de l?�tude mais, � la lumi�re de ces r�sultats, aux p�dagogues qui seront charg�s d?�laborer et de r�aliser cette r�ponse en �cole ordinaire et donc accessible � tous les enfants, notamment les dyslexiques et mauvais lecteurs.

Vous pouvez � partir de l� consid�rer que cela n?offre pas d?int�r�t parce que vous voyez derri�re cela un amalgame avec l?utilisation qui a �t� faite de conclusions de chercheurs � des fins politiques par le Ministre de l?Int�rieur. Certaines conclusions que je ne partage pas et auxquelles je me suis oppos�.

Pour terminer, je dirai : ni exc�s d?honneur ni indignit�, une volont� d?aller jusqu?au bout pour voir comment nous pouvons am�liorer une situation.

M. Eric FERRAND, adjoint, pr�sident. - Merci, Monsieur LHOSTIS.

Je mets donc aux voix, � main lev�e, le projet de d�lib�ration DASES 85.

Qui est pour ?

Qui est contre ?

Abstentions ?

Le projet de d�lib�ration est adopt�. (2006, DASES 85).

Septembre 2006
Débat
Conseil municipal
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