2019 DVD 80 - Appel à Projets Urbains Innovants "Réinventer Paris - Les dessous de Paris" sur l’espace viaire sous viaduc ligne 6 (13e) - Convention d’occupation temporaire du domaine public.
M. Patrick BLOCHE, adjoint, président. - Nous passons donc au projet de délibération DVD 80 relatif à un appel à projets urbains innovants "Réinventer Paris - Les dessous de Paris" sur l?espace viaire sous viaduc ligne 6, 13e arrondissement - Convention d?occupation temporaire du domaine public.
La parole est à Mme Marie ATALLAH.
Non, la parole est à Mme Danielle SIMONNET.
Marie ATALLAH est là.
Quand on vous appelle, n?hésitez pas à vous rasseoir à votre place, à chausser vos lunettes, à allumer votre micro, à retrouver votre intervention.
Mme Marie ATALLAH. - Tout à fait. Ça y est. J?y suis.
M. Patrick BLOCHE, adjoint, président. - Prenez votre temps. Pas d?essoufflement.
Mme Marie ATALLAH. - J?y suis, j?y suis, j?y suis. Merci, Monsieur le Maire.
M. Patrick BLOCHE, adjoint, président. - DVD 80.
Mme Marie ATALLAH. - Merci, Monsieur le Maire.
M. Patrick BLOCHE, adjoint, président. - Je vous en prie. C?est à vous.
Mme Marie ATALLAH. - Mes chers collègues, par le présent projet de délibération, vous nous proposez de valider le projet dénommé "Station Blockpark" porté par la société lauréate "ARKOSE&CO" issue de l?appel à projets "Réinventer Paris 2 - Les dessous de Paris". Pour créer ce projet, vous nous demandez d?autoriser Mme la Maire à signer avec la société lauréate une convention d?occupation temporaire d?un domaine public situé dans le 13e arrondissement pour une durée de 20 ans.
Il s?agit, en effet, d?une parcelle de 1.700 mètres carrés d?espace viaire sous le viaduc du métro de la ligne 6 dans le 13e arrondissement. La société "ARKOSE&CO" s?engage à créer sur cette parcelle un équipement qui accueillera plusieurs activités : un restaurant bar, un espace d?exposition artistique, de l?agriculture urbaine, et humaine peut-être, et un mur d?escalade.
Notre groupe Ecologiste n?est pas opposé au projet en tant que tel. C?est un beau projet qui comporte des caractéristiques innovantes, tant sur le plan des activités qu?il propose, notamment sur son mur d?escalade en extérieur, que par rapport à l?architecture originale de la structure en bois et en verre qui s?intègre bien dans le paysage du viaduc du métro. Mais, malgré les bons aspects cités, nous souhaitons tout de même exprimer ici nos réserves très sérieuses quant à d?autres aspects importants du projet qui nous obligent à voter contre ce projet de délibération.
Premièrement, nous savons que les habitants du 13e arrondissement n?ont pas eu droit à une véritable concertation sur ce projet. Une simple présentation du projet a été organisée dans le cadre d?une réunion de conseil de quartier. Sachant que ce type de projet aurait pu être une occasion unique pour faire vivre la participation des habitants et les acteurs du quartier afin de les impliquer dans un processus d?émergence d?un projet qui répond aux besoins de leur quartier. Le deuxième point : nous savons que les Parisiennes et les Parisiens sont de plus en plus attachés aux espaces publics de leur ville, souhaitent les investir et être les acteurs de leur aménagement, en lien avec leur bien-être collectif dans les quartiers.
Les élus que nous sommes, avons la responsabilité et le pouvoir de protéger ces espaces publics pour qu?ils restent facilement accessibles à toutes et à tous, et favoriser la convivialité, la mixité et le lien social dans la ville. Ce qui nous amène à penser que les habitants du 13e arrondissement auraient peut-être préféré ne pas livrer l?espace viaire sous le viaduc du métro de la ligne 6, actuellement dédié aux piétons, à une société privée qui va proposer des activités de loisir payantes.
A titre d?exemple, nous savons que l?accès au mur d?escalade est fixé à 15 euros, alors qu?un peu plus loin, sur l?espace viaire, nous avons le plaisir de rappeler ici que les terrains de basket, en place depuis très longtemps, sont toujours très investis par les gens du quartier car gratuits et accessibles à tout le monde.
Vous aurez compris, Monsieur le Maire, que nous ne pouvons pas accepter de valider l?opération de privatisation de l?espace viaire sous le viaduc de la ligne 6 dans le 13e arrondissement pour une durée de 20 ans. Nous votons contre ce projet de délibération en disant ici haut et fort : stop à la politique de privatisation et de marchandisation de nos espaces publics dans le quartier du 13e arrondissement.
Je vous remercie.
M. Patrick BLOCHE, adjoint, président. - Merci, Marie ATALLAH.
La parole est à Mme Danielle SIMONNET.
Mme Danielle SIMONNET. - Je ne suis pas d?accord avec ce projet et j?appelle l?ensemble des collègues à voter contre. Parce que, qu?est-ce que c?est que cet appel à projets urbains et innovants, une fois de plus, "Réinventer Paris" ? Eh bien, oui, c?est un projet de privatisation de l?espace public, un urbanisme dérogatoire qui brade le bien commun pour permettre à des entreprises privées de se faire du cash. Et tout cela se fait sans aucune concertation et implication démocratique des habitants du quartier.
De quoi s?agit-il ? On est sur les dessous de Paris, sur l?espace viaire sous le viaduc du métro de la ligne 6 dans le 13e arrondissement, et il est proposé une convention d?occupation temporaire du domaine public. Enfin, temporaire, temporaire, pas si temporaire que cela puisque cela va durer 20 ans. Pendant 20 ans, on va permettre à une entreprise privée "ARKOSE&CO" de porter le projet "Station Blockpark".
De quoi s?agit-il ? Il s?agit d?une programmation mixte d?équipements sportifs, c?est-à-dire un mur d?escalade à 15 euros l?entrée, un espace de restauration, qui, j?imagine, va être très lucratif - on ne connaît pas les prix, les tarifs proposés -, un espace d?exposition - pour qui, pour quoi, je n?en sais rien -, de l?agriculture urbaine - pour qui, pour quoi, je n?en sais rien. Rien n?est précisé là-dedans.
Concrètement, je vais quand même vous lire un extrait de ce projet de délibération. "Les garanties apportées par le groupe sont solides. Expérience dans ce domaine d?activité, forte croissance - 8 millions d?euros de chiffre d?affaires - et levée de fonds de 10 millions d?euros en cours. L?investissement est cohérent et bien qu?avec un chiffre d?affaires ambitieux, le modèle économique du projet est également cohérent.
En effet, même avec un chiffre d?affaires divisé par 2 - sous-entendu, même si l?entreprise a surévalué le chiffre d?affaires qu?elle pourrait faire - même si l?on divise par 2 par rapport à l?estimation faite à 5 ans, la société dégagerait un résultat excédentaire, et donc serait en capacité d?honorer la redevance". La redevance, oui. Donc, il y a bien une redevance annuelle qui est prévue à 9 % du chiffre d?affaires hors taxes, donc qui est avec un minimum garanti fixé à 117.000 euros.
En clair, on a un espace public qui servait jusqu?à présent aux piétons. Bien. Si l?on pensait que l?on pouvait transformer cet espace public pour en faire autre chose, quelle aurait dû être la démarche ? Réunissons le conseil de quartier. Discutons avec les habitants et les associations. Quels sont les besoins et les usages sur ce bien commun qui appartient aux Parisiennes et aux Parisiens ? Là, on aurait pu avoir de nombreux projets qui auraient pu émerger et l?on aurait pu penser un équipement public sur ce bien commun, qui reste un équipement public bien commun pour satisfaire des usages.
S?il y avait eu besoin d?avoir un lieu de restauration, on aurait pu trouver une association d?économie sociale et solidaire, avec de l?insertion par exemple. Vu que, là, on voit qu?une boîte privée peut dégager tellement de cash que même si l?on divise son chiffre d?affaires par 2, on peut encore faire rentrer plus de 117.000 euros dans les caisses de la Ville, cela veut dire qu?il y avait les marges pour pouvoir monter un projet d?une économie sociale et solidaire, avec une démarche beaucoup moins lucrative, et que l?on aurait pu, du coup, répondre à l?intérêt général.
Mais voilà, c?est toujours tout et son contraire. Un coup, vous allez nous faire une délibération où vous allez vanter le soutien de l?économie sociale et solidaire, à l?insertion, aux associations, et puis, de l?autre, en fait, quand il y a du foncier disponible, on cherche à en faire une machine à cash. Mais, par ailleurs, c?est une machine à cash même pas tant que cela pour la Ville, mais surtout une machine à cash pour les intérêts privés. Parce que la "Station Blockpark" va rentrer beaucoup et beaucoup de cash puisque l?on anticipe que même si elle divise par 2 son chiffre d?affaires, elle va s?en mettre plein les poches.
Donc, la logique de l?urbanisme dérogatoire de "Réinventer Paris", eh bien, non, il faut que cela cesse. Ce n?est pas possible. Ce sujet doit être mis au c?ur de la campagne des municipales. Parce que, dans ce Conseil, finalement, il n?y a jamais eu de vrai débat à ce sujet. Il y a eu des débats projet sur projet, mais jamais on a eu un vrai débat sur quelle conception on a de l?urbanisme. Est-ce que l?on estime que les élus sont là pour penser l?aménagement du territoire, et donc le co-fabriquer avec les habitants, avec les associations, ou est-ce que l?on pense que ce sont aux intérêts privés de décréter des usages de la Ville dans une logique purement privée, purement de marchandisation, purement lucrative ? Je suis contre cette privatisation de l?espace public, même sous un métro, là où des piétons passent. Ce n?est pas aux intérêts privés de décréter ce dont nous avons besoin. J?invite tous les collègues à voter contre ce projet de délibération.
M. Patrick BLOCHE, adjoint, président. - Merci, Danielle SIMONNET.
Jérôme COUMET a souhaité intervenir en tant que maire du 13e arrondissement.
Il a la parole.
M. Jérôme COUMET, maire du 13e arrondissement. - Je suis très étonné par la teneur de ce que je viens d?entendre, d?autant plus que c?est en total décalage avec nos débats du conseil d?arrondissement. Et d?ailleurs, plus cela va, plus cela me pose un problème d?entendre un décalage entre ce qui se passe au niveau de l?arrondissement et ce qui se passe au niveau du Conseil de Paris.
De mémoire, je parle sous le contrôle de Mme ATALLAH qui était présente ce soir-là. Je crois que ce projet a été voté à l?unanimité, le soir du Conseil d?arrondissement. On a même eu droit à une intervention de l?opposition municipale louant le fait que l?on travaillait sous les espaces du métro aérien, que l?on essayait d?inventer des choses nouvelles sous le métro aérien.
En l?occurrence, il s?agit effectivement d?une activité d?escalade, avec un bar, un lieu d?animation. Et là, je me retrouve face à des débats qui sont totalement éloignés de ce que nous avons vécu, avec des porteurs de projets qui ont essayé de travailler en amont avec les habitants. Ces projets ont été évidemment présentés aux habitants au moment de chacune des étapes, comme tous les autres "Réinventer Paris". Et là, on a l?impression que c?est le capitalisme international qui s?installe sous le métro aérien. Enfin, bon, voilà. On est quand même très loin des réalités. Je voulais simplement en témoigner avant que notre Conseil, très sereinement, vote ce projet.
M. Patrick BLOCHE, adjoint, président. - Merci, Monsieur le maire du 13e arrondissement.
Pour répondre, la parole est à M. Christophe NAJDOVSKI.
M. Christophe NAJDOVSKI, adjoint. - Merci, Monsieur le Maire.
Merci, chers collègues, pour vos interventions.
C?est Jean-Louis MISSIKA qui pilote le dispositif "Les dessous de Paris", mais comme il ne peut être présent pour vous répondre, il m?a demandé de le faire à sa place en vous priant de l?excuser pour son absence.
Ce projet de "Réinventer Paris 2" est intéressant, car il montre comment on peut activer un espace public, un dessous, en l?occurrence un dessous de métro. Nous avons nombre d?espaces comme celui-ci dans Paris, qui sont parfois des délaissés urbains et se prêtent, on va dire, à une activation et une animation, que l?on peut utiliser pour des activités sportives ou artistiques. Le projet est ici proposé par "ARKOSE&CO", qui dispose déjà de plusieurs salles d?escalade à Paris ou en proche couronne.
Je pense à des salles qui existent dans le 20e arrondissement, rue des Grands-Champs, ou encore à Montreuil. Je vous invite d?ailleurs à y aller. Vous verrez que ce sont des lieux qui attirent beaucoup de monde et dans une grande diversité. Ce projet consiste à installer le premier bloc d?escalade en plein air dans Paris. Le projet a été adapté au quartier, avec de la restauration, de l?agriculture urbaine et un espace d?exposition pour du "street art". La Ville de Paris a été très attentive à ce que ces installations ne coupent ni le paysage, ni les continuités piétonnes, et elle a demandé qu?il y ait des porosités dans le site.
C?est un projet léger, qui utilise des structures modulables, qui végétalise le site et introduit de l?agriculture urbaine. Enfin, il ne vous aura pas échappé qu?il s?agit d?une convention d?occupation temporaire, et non d?une vente de l?espace public. Certes, c?est une convention sur une certaine durée, dans la mesure où il y a quand même des investissements conséquents, mais la Ville reste maîtresse de ce foncier et ce projet est totalement réversible. Les tarifs seront, par ailleurs, accessibles afin que les habitants du quartier puissent en profiter. Ce genre d?espace animé sous métro est développé partout dans le monde et c?est une forme très intéressante d?urbanisme tactique qui mérite aussi d?exister à Paris.
Je vous remercie.
M. Patrick BLOCHE, adjoint, président. - Merci, Christophe NAJDOVSKI.
Je mets aux voix, à main levée, le projet de délibération DVD 80.
Qui est pour ?
Contre ? Abstentions ? Le projet de délibération est adopté. (2019, DVD 80).