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2019 DAE 83 - Dispositifs "Paris Commerces" - compte-rendu annuel d'activité.


 

M. Patrick BLOCHE, adjoint, président. - Nous arrivons maintenant au projet de délibération DAE 83 relatif aux dispositifs "Paris Commerces", compte rendu annuel d'activité. La parole est à Alexandre VESPERINI.

M. Alexandre VESPERINI. - Merci, Monsieur le Président, mes chers collègues.

Un projet de délibération assez important, qui fait le point sur les différents dispositifs que met en place la Ville de Paris, en soutien à la diversité commerciale à Paris.

Je voudrais faire deux séries de remarques.

La première remarque concerne "Vital Quartier 2" et le contrat "Paris Commerces".

Je m'attarderai principalement sur "Vital Quartier 2", qui est un dispositif dont ont bénéficié un certain nombre de quartiers, notamment les quartiers du 5e et du 6e arrondissement au titre des commerces culturels, et c'est de ceux-là que je veux parler.

Comme vous le savez, les commerces culturels, en particulier les librairies, connaissent une crise depuis le début des années 2000, une baisse du nombre de magasins et des difficultés évidemment économiques, sociales, pour les libraires. Le salaire d'un libraire moyen en France, au début de sa carrière, c'est 1.500 euros brut. A la fin de sa carrière, il doit tourner autour de 3.000 ou pas beaucoup plus. Dans le 6e arrondissement où je suis élu, évidemment nous avons pris de plein fouet cette tendance, très négative, puisque comme avec le 5e arrondissement, nous étions l'arrondissement dans lequel il y a d'ailleurs toujours le plus de librairies et le plus de commerces culturels indépendants. Plus généralement, en quelques chiffres, moins 42 % sur la période 2000-2014 dans le 6e arrondissement concernant les librairies, et sur 2007-2017 moins 44 magasins pour l'ensemble du Quartier latin dont une grande partie, dans la partie 6e arrondissement, mais en réalité dans le 5e les problèmes sont exactement les mêmes. Voilà ce que je voulais dire. Une fois que j'ai dit cela, il n'y a pas non plus de fatalité. Un certain nombre de librairies arrivent à résister, diversifient leur offre, se spécialisent. Il y a une vraie mobilisation, et il faut aussi rappeler que les Français sont loin d'arrêter de lire, notamment des livres, 78 % des jeunes au collège continuent de lire en dehors des livres qu'ils lisent en période scolaire. Cela veut dire qu'il n'y a pas de fatalité, on peut se mobiliser, et je me félicite que la Ville de Paris se soit mobilisée à travers le dispositif "Vital Quartier", Vital Quartier 2", puisqu?en réalité il y avait déjà eu une première série de "Vital Quartier 1" en 2008. Je pense que ce dispositif fonctionne bien, il a fait ses preuves dans le 5e, dans le 6e, dans d'autres arrondissements également, pas seulement sur les commerces culturels. Je regrette évidemment, j'ai déjà eu l'occasion de le dire, qu'il n'y ait pas eu de proposition de la part de l'Exécutif pour que l'on puisse prolonger au-delà de 2021, alors que des projets étaient envisagés pour "Vital Quartier 3" par conséquent, même si je sais que la mandature s'arrête dans trois mois. On aurait pu envisager que l'action se poursuive, en tout cas soit envisagée pour l'après 2020. Je souhaite en tout cas qu'à l'avenir, les fonds alloués à ces initiatives soient considérablement augmentés, puisque cela marche, il faut le soutenir. Il ne faut pas oublier qu'il y a des problèmes de rentabilité pour ces commerces, il faut les soutenir davantage. 35 millions d'euros pour les avances remboursables, ce n'est pas suffisant, il faut aller plus loin, et je pense également qu'il faut augmenter très significativement les subventions d'exploitation pour ces commerces culturels, en particulier pour les librairies. On est à 4,8 millions d'euros au total. Je souhaite que l'on augmente considérablement, qu'on contingente les 10 millions d'euros, ce serait très apprécié, mais surtout très utile pour ces quartiers où la vitalité culturelle, la diversité commerciale doivent être soutenues, surtout quand on voit la difficulté d'assumer un modèle économique pour les commerces de pied d'immeuble. La deuxième remarque que je voudrais faire concerne le G.I.E. "Paris Commerces", là encore une initiative qui est intéressante parce que cela a amené les trois bailleurs sociaux de la Ville de Paris à s'associer afin de mieux gérer et de mieux valoriser les pieds d'immeuble du parc social de la Ville. 7.000 locaux, 10 % donc du commerce de pied d'immeuble, ce n'est pas rien, je me réjouis que les bailleurs sociaux affichent leur mobilisation en faveur de ces commerces de pied d'immeuble, que l'on sorte du modèle économique où l'on met un super marché au pied du parc social. C'est très rentable un supermarché en général, mais sur le plan culturel ou sur le plan de la diversité commerciale, les commerces de quartier, ce n'est pas toujours forcément le plus souhaitable. Ce G.I.E. "Paris Commerces" est bien accueilli. J'ai deux remarques à faire. La première, j'ai l'impression, mais l'adjointe aura certainement l'occasion de me contredire sur ce sujet, de me rassurer, que ce G.I.E. "Paris Commerces" travaille un peu trop au sud et à l'est de la capitale, et qu'il ne s'intéresse pas suffisamment, en tout cas pour l'arrondissement où je suis élu, aux arrondissements du centre. Je vais prendre un exemple tout simple. Je termine, j?ai 30 secondes.

M. Patrick BLOCHE, adjoint, président. - Non, une phrase.

M. Alexandre VESPERINI. - Je regrette par exemple que dans mon arrondissement au pied d'immeuble on ait un magasin de souvenirs, alors que l'on n'a pas de recyclerie dans le 6e arrondissement. Il y aurait de quoi redynamiser ce G.I.E.

M. Patrick BLOCHE, adjoint, président. - Merci, Alexandre VESPERINI.

La parole est à Joëlle MOREL.

Mme Joëlle MOREL. - Merci, Monsieur le Maire.

En tant que présidente de la SEMAEST, je ne participerai pas au vote de ce projet de délibération.

La politique commerciale de la Ville, notre accompagnement des commerçants et des artisans sont des éléments essentiels pour la vie de nos quartiers. En cette période où la régulation de l'espace public est un enjeu important, les commerçants et les artisans jouent un rôle de plus en plus important d'animateurs de la vie de quartier.

Comme l'année dernière, je regrette que la Ville ait fait le choix de présenter à la fois le bilan du G.I.E. et celui de la SEMAEST dans un même projet de délibération, au risque de ne pas aborder l'ensemble des questions qui sont spécifiques à chacune de ces entités juridiques différentes.

C'est un projet de délibération trop dense, qui nous donne une vision confuse des actions menées par la Ville, mises en place par les deux structures différentes, complémentaires, mais qui méritent l'une et l'autre beaucoup plus d'attention. La complémentarité de ces deux entités se cherche depuis deux ans. Elle reste à construire pour que l'expertise des services de la SEMAEST soit valorisée et mieux partagée au sein de "Paris Commerces". Je me permets de rappeler que la SEMAEST est le premier opérateur économique en France ayant acquis une connaissance précise des quartiers parisiens et un réel savoir-faire. Elle est sollicitée aujourd'hui par un grand nombre de collectivités en France dans la métropole, mais aussi en Europe. Le contrat "Vital Quartier 2" agit pour préserver les commerces culturels, en particulier les librairies du Quartier latin, mais ce contrat "Vital Quartier 2" se termine en 2021. Je l'ai dit, je le dis à nouveau, l'opération "Vital Quartier" doit être prolongée ou renouvelée, car de nombreux commerçants sont très inquiets. Laissez-moi vous alerter sur ce calendrier et vous dire que les compétences de la SEMAEST, outil qui s'est construit depuis 2004, doivent être soutenues. L'expertise de la SEMAEST doit pouvoir se poursuivre à la prochaine mandature, la Ville de Paris a réellement besoin d'une politique commerciale dynamique, capable de se projeter dans l'avenir. Je vous remercie.

M. Patrick BLOCHE, adjoint, président. - Merci, Joëlle MOREL.

Mme Danielle SIMONNET a la parole.

Mme Danielle SIMONNET. - C'est un projet de délibération qui englobe deux dispositifs différents, qui agissent de manière différente, parce qu'entre la SEMAEST qui va avoir son action particulière dans certains quartiers pour sauver des libraires, dans d'autres quartiers entre les problèmes de monoactivité ou de soutien particulier à avoir sur la diversité commerciale, ce n'est pas la même chose que l'autre dispositif G.I.E. "Paris Commerces", qui lui, concerne notamment les bailleurs et l'accompagnement des bailleurs sur la commercialisation des locaux en pied d'immeuble.

Je dirais surtout qu'il y a, pour moi? Est-ce une hypocrisie, est-ce? Je ne dirai pas une schizophrénie, j'aimerais bien trouver un autre terme, je n'aime pas utiliser ces analogies qui empruntent à la psychiatrie.

Mais franchement, d'un côté on a les outils pour défendre la diversité des commerces, parce que cela joue un rôle essentiel dans l'animation d'une vie locale, cela répond à des besoins dans la vie de quartier des habitants, et de l'autre côté, on sait pertinemment que Paris a été l'objet d'une guerre de grandes enseignes commerciales mais de dingues, sur ces trois dernières mandatures.

Que ce soient les grandes enseignes de la grande distribution, qui se font toutes la course et hélas la Ville n'a été finalement pas du tout en mode de résistance par rapport à cet assaut des grandes enseignes commerciales, mais finalement les a accompagnées.

Quand vous voyez le développement des centres commerciaux qu'il a pu y avoir, que ce soit l'agrandissement des Halles, que ce soit le projet de centre commercial sur la gare du Nord, que ce soit le centre commercial sur la Villette, le paysage parisien a connu une augmentation à la fois des centres commerciaux et de l'implantation des grandes enseignes, et non, je ne trouve pas que sur Paris, on préserve tant que cela la diversité du petit commerce et du commerce indépendant.

Je sais bien que l'on a une adjointe qui se bat sur ces sujets, je ne nie pas son combat, mais quand elle se bat, elle, sur ce terrain, vous avez un Jean-Louis MISSIKA avec de nombreux autres dispositifs qui, j'estime, vont justement dans la direction totalement opposée de ce qui est annoncé par les uns.

Et donc, cela amène à des résultats totalement contradictoires.

Donc, j'attire votre attention, on est sur de grandes capitales qui visent à s'uniformiser de plus en plus au niveau des grandes enseignes commerciales. Le débat, on l'aura à nouveau sur la question du travail du dimanche et du travail de nuit, cela n'aide pas, parce que c'est bien une stratégie de la part des grandes enseignes de tuer le petit commerce, de jouer sur la dérégulation de l'organisation du travail dans le secteur du commerce.

Elles ne le font pas simplement pour vendre plus de choses, parce que d'ailleurs cela ne marche pas, elles ne vendent pas plus de choses en ouvrant le dimanche et en soirée. Elles ouvrent le dimanche et en soirée pour pouvoir imposer une hégémonie et tuer leurs concurrents, et parmi leurs concurrents, les petits commerces indépendants.

Donc, comprenez bien mon intervention, je ne dis pas que nous n'avons rien fait avec la SEMAEST et le G.I.E. "Paris Commerces", mais ce que l'on fait dans une direction est annulé ou contrecarré par une logique inverse dans une autre direction. Par ailleurs, tant que la Ville n'assumera pas d'augmenter et de pérenniser sa municipalisation des sols, ce qui inclut sa capacité de municipaliser des baux commerciaux et des locaux commerciaux, on n'arrivera pas de manière pérenne à maintenir un commerce indépendant diversifié dans la capitale. La lutte contre la spéculation immobilière doit être adossée à la volonté que la SEMAEST assume de garder durablement et pas de manière temporaire les locaux et baux commerciaux. Et sur les bailleurs, excusez-moi, mais on commence à voir par les bailleurs sociaux se développer également des locaux, de "l'open-space". Des commerçants m'ont remonté des difficultés d'avoir accès aux locaux commerciaux pour des activités économiques, parce qu'ils sont de plus en plus loués en mode "open-space" et de façon tout aussi lucrative que le privé. Il y a un souci, une problématique sur ce sujet, où il faut regarder de près ce que font aussi les bailleurs sociaux. Mes chers collègues, attention, la diversité des commerces parisiens, oui, je pense qu'elle est menacée à Paris comme dans l'ensemble des grandes villes, par une spatialisation du capitalisme où les grandes enseignes, elles y vont et elles y vont à fond.

M. Patrick BLOCHE, adjoint, président. - Merci, Danielle SIMONNET. Je donne la parole à Olivia POLSKI pour répondre aux interventions.

Mme Olivia POLSKI, adjointe. - Oui, depuis 2001 la Ville de Paris fait de la préservation de la diversité, et je tiens bien à la question de la diversité commerciale, un objectif prioritaire avec des résultats visibles, puisque Paris est une ville dont la densité commerciale est indéniable et l'attractivité économique toujours forte.

Ce dynamisme n'empêche pas, et c'est pour cette raison que nous avons mené un certain nombre d'actions, certaines fragilités qui ont nécessité depuis 2004 la mise en place de l'opération d'abord "Vital Quartier 1", puis en 2008 de "Vital Quartier 2", et en 2017 du contrat "Paris Commerces".

"Vital Quartier 2" a été mis en ?uvre sur cinq secteurs avec pour mission la lutte contre la vacance, la mono-activité et effectivement cela a été évoqué, la protection du commerce culturel et plus particulièrement des librairies.

La Ville a délégué à la SEMAEST son droit de préemption et avait versé un financement de 31,8 millions d'euros.

C'est une opération que l'on suit avec beaucoup d'attention, que l'on a d'ailleurs renforcée en début de mandature, puisqu'on a étendu le périmètre Lancry dans le 10e arrondissement et nous avons versé un apport complémentaire de 1,8 million d'euros à cette occasion.

Nous avons adopté en Conseil de Paris de septembre dernier, un v?u de l'Exécutif indiquant que pour la clôture de "Vital Quartier 2" qui aura lieu en 2021, nous souhaitions une étude sur la commercialité des secteurs couverts par cette opération, pour envisager éventuellement une prolongation de l'intervention ou un autre dispositif.

Cette analyse pourra être menée par les services de la Ville, la SEMAEST, et éventuellement l'APUR qui suit déjà l'évolution de ces périmètres dans le cadre de la banque de données commerces.

Quoi qu'il en soit, et c'est pour répondre à M. VESPERINI, je rappelle que le contrat permet le rachat par la Ville des locaux culturels, c'est déjà une clause, et que la Maire a réaffirmé d'ailleurs cet engagement dans une lettre qu'elle a adressée à l'ensemble des libraires concernés en février dernier, cela afin de les rassurer, pour répondre à Mme Joëlle MOREL.

Le contrat "Paris Commerces", qui a été créé en 2017, a été lui doté de 37 millions d'euros et permet d'intervenir sur de nouveaux territoires, essentiellement situés dans les quartiers populaires, mais évidemment aussi ceux toujours fragiles qui étaient précédemment dans le "Vital Quartier 1".

A l'issue de cette deuxième année, le dispositif a permis la maîtrise de 64 locaux, dont 21 par acquisition.

Alors pourquoi aussi présenter dans ce compte rendu annuel d'activité celui du G.I.E. ?

L'idée est de montrer que ces deux dispositifs sont complémentaires. Le contrat "Paris Commerces", les "Vital Quartier" permettent de la préemption dans le privé et la mise en place du G.I.E. avec les bailleurs sociaux nous permet aussi d'avoir une action maintenant beaucoup plus ambitieuse avec les locaux commerciaux des bailleurs sociaux. L'idée est donc de montrer que nous avons un levier à la fois par de la préemption dans le privé et dans les locaux commerciaux de nos bailleurs, et que c'est un dispositif qu'il faut concevoir comme une seule et même action. D'ailleurs, on a travaillé maintenant à la mutualisation par exemple du service communication, et le G.I.E et la SEMAEST travaillent de plus en plus ensemble dans une très bonne entente et avec des objectifs communs, qui sont ceux d'installer des commerces de proximité et de veiller à la diversité commerciale. En tout cas, je pense que l'on peut se féliciter de ce qui a été mis en place, le G.I.E. est maintenant à près de 340 locaux qui ont été signés en même pas deux ans, et on a d'excellents retours. Je ne sais pas d'où vous tirez cette idée que maintenant on a mis des "open-spaces" partout, c'est faux. Si vous avez des chiffres, je suis preneuse, ce ne sont pas les chiffres que j'ai moi, donc je ne sais pas sur quelle réalité ils se fondent. Au sujet de la préemption des baux, compte tenu du fait que c'est un dispositif qui est quand même très complexe, puisque nous ne pouvons pas obliger dans ce cadre-là, le propriétaire des murs à baisser le loyer, nous ne pouvons pas obliger le propriétaire à modifier la destination du local, la rétrocession obligatoire du bail doit se faire au bout de deux ans, donc faire la préemption des baux n'est pas quelque chose de si magique que tout le monde veut bien le faire croire. En tout cas, nous avons d'ores et déjà pris un engagement qui est celui de faire une expérimentation, et il y a plusieurs difficultés notamment dans les 10e et 18e qui pourraient correspondre à des objectifs, donc l'idée est qu'une étude soit lancée, parce qu'il faut qu'on le fasse sur des rues très précises. Par ailleurs, cette mise en ?uvre du droit de préemption commerciale suppose le respect d'une procédure qui est très précise, très complexe avec une étude de l'état du commerce du secteur, l'avis de la Chambre du commerce et d'industrie de Paris, l'avis de la Chambre des métiers, le vote d'une délibération et des mesures de publicité et d'information. L'idée est que l'on puisse mener cette expérimentation; donc ne vous inquiétez pas, et évidemment que ces outils ne vont pas pouvoir répondre aux seuls défis imposés à la fois par la digitalisation et les G.A.F.A., mais chacun peut constater que notre action de régulation permet efficacement le maintien et le développement d'un commerce de proximité et de qualité. Je vous invite donc, mes chers collègues, à adopter ce projet de délibération.

M. Patrick BLOCHE, adjoint, président. - Merci beaucoup, Olivia POLSKI.

Je mets aux voix, à main levée, le projet de délibération DAE 83.

Qui est pour ?

Contre ?

Abstentions ? Le projet de délibération est adopté. (2019, DAE 83).

 

Décembre 2019
Débat
Conseil municipal
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