Vœu déposé par les groupes Communiste - Front de Gauche et "Génération.s" relatif à la Maison des peuples. Vœu déposé par Mme SIMONNET relatif à la Flèche d'Or. Vœu déposé par l'Exécutif.
M. Nicolas NORDMAN, adjoint, président. - Nous passons à l'examen de v?ux non rattachés. Les v?ux référencés nos 167, 168 et 168 bis sont relatifs à la Maison des peuples.
Je donne d?abord la parole à Mme Raphaëlle PRIMET.
Mme Raphaëlle PRIMET. - Nous présentons ce v?u qui a été adopté au Conseil du 20e arrondissement. C'est un v?u que l'on présente avec "Génération.s".
Suite à ce qu'il s'est passé à la Flèche d'Or, il y a quelques jours, cela a remis sur le devant de la scène, la question de la Flèche d'Or, un lieu inoccupé depuis deux ans, racheté par le groupe Keys Asset Management.
Nous demandons d?abord que la Ville de Paris interpelle le Préfet de police, concernant les violences qui ont eu lieu et l'irrégularité de l'évacuation du lieu par des personnes non identifiables comme force de l?ordre. Par ailleurs, que soit mise en place une consultation citoyenne pour le futur de ce lieu qui associe les habitants, les collectifs du 20e, la Ville et la mairie du 20e, que la vocation du lieu soit déterminée, qu?en attendant un tiers lieu, soit étudiée avec une gestion par un collectif d'habitants ou une association du 20e, et que tout soit mis en ?uvre pour que le lieu garde sa vocation culturelle et devienne un lieu d?intérêt collectif, d?échange et de partage pour les habitants. Je vous remercie.
M. Nicolas NORDMAN, adjoint, président. - Merci.
La parole est à Mme Danielle SIMONNET.
Mme Danielle SIMONNET. - Ce soir, il y aura, ou pas, une réunion des enseignants en grève interprofessionnelle. Je dis bien qu?il y aura une réunion, ou pas, parce qu?on attend toujours un feu vert, et ce feu vert n'arrive toujours pas. Cela montre bien toute la difficulté qu'il y a, dans l'ensemble de nos arrondissements : est-ce que les mobilisations sociales ont des lieux pour se réunir et pour pouvoir s'auto-organiser ?
L'espoir de cette réquisition citoyenne de la Flèche d?Or incarnait tout cela : la volonté de pouvoir se réapproprier des lieux où on puisse se réussir et où on puisse collectivement décider d'actions communes.
La Flèche d'Or a été un lieu historique pour le 20e, où il y avait à la fois des concerts engagés, mais aussi beaucoup de réunions publiques qui permettaient à des forces politiques, mais aussi à des syndicats, des collectifs citoyens de pouvoir se réunir. Le lieu a été fermé pendant longtemps.
La réquisition révèle une volonté d'appropriation pour en faire une Maison des peuples, un lieu d'autogestion, un lieu où la liberté d'expression, où l?organisation, où la solidarité peut s'organiser. Nous, permettons-nous cela ou pas ? Pourquoi, quand le lieu était en vente, la Ville n'a pas préempté ? Alors qu?il me semble que la mairie du 20e le souhaitait, pourquoi l'Exécutif ne l'a-t-il pas fait ? Aujourd?hui, quels sont tous les moyens possibles de pouvoir soit préempter, soit exproprier pour faire en sorte que durablement, dans le 20e, il y ait un lieu à la fois culturel et citoyen, avec une possible appropriation collective de l?animation de ce lieu avec l'ensemble des habitants ? Voilà le sens de la réquisition citoyenne qui, hélas, a été réprimée, évacuée par les forces de l'ordre, dans des cadres pas forcément légaux. Nous aimerions, à travers ce v?u, qu?il y ait une recherche d?une forme juridique ou économique, de nature à garantir cette réappropriation par la préemption, l?expropriation ou la négociation.
Je vous remercie.
M. Nicolas NORDMAN, adjoint, président. - Pour vous répondre, je donne la parole à Mme Karen TAÏEB, puis à Mme la représentante du Préfet de police.
Mme Frédérique CALANDRA, maire du 20e arrondissement. - J?étais inscrite normalement pour?
M. Nicolas NORDMAN, adjoint, président. - Vous avez la parole comme maire d?arrondissement. Allez-y.
Mme Frédérique CALANDRA, maire du 20e arrondissement. - Mes chers collègues, je suis extrêmement surprise, comme je l?ai dit d?ailleurs dans mon Conseil du 20e, par ce v?u déposé par MM. Frédéric HOCQUARD, membre du groupe "Génération.s" et par M. BAUDRIER, membre du groupe Communiste - Front de Gauche.
Effectivement, entre 2017 et 2018, ces deux élus, pourtant déjà en situation à l'Hôtel de Ville, respectivement comme délégué puis adjoint à la vie nocturne et à l?économie culturelle pour l?un, et en tant que délégué auprès de M. MISSIKA sur les questions d?urbanisme pour l'autre, aucun de ces deux élus n'a trouvé le temps, ni visiblement l'intérêt, de répondre à mes courriers en date du 2 juin 2017 et du 4 juillet 2018, que je tiens à la disposition de cette noble Assemblée, ainsi qu?à mes demandes répétées par téléphone de préemption de la Flèche d'Or.
Ils étaient en copie de ces courriers, j?y ai veillé, je demandais simplement que la Ville préserve la dimension culturelle de ce site. Je tiens donc à votre disposition mes interventions de l'époque.
La Ville a décidé, comme elle l'avait fait pour l'immeuble du 94, avenue Gambetta, l'ancien rectorat, sans me prévenir, sans répondre à mes interventions, de ne pas user de son droit de préemption, à un moment où elle en avait la possibilité légalement.
Or, que propose aujourd'hui ce v?u ? Rien de moins qu'empêcher un propriétaire de développer un projet dans un bien qu?il a acquis légalement. Nous sommes probablement tous ici en désaccord avec ce projet. En tout cas, moi-même, j'ai exprimé mes réserves auprès de ce propriétaire.
Mais expliquez-moi quels moyens légaux vous comptez mettre en ?uvre pour permettre à ce v?u d'avoir un semblant d'efficacité, de concrétisation, alors que la Ville n'a pas usé de son droit de préemption lorsqu?elle en avait la possibilité, et que, pardonnez-moi, le droit de propriété, me semble-t-il, est encore inscrit dans la Constitution française ?
Imposer à un propriétaire légal, un projet qui n'est pas le sien, voire l?exproprier s'il ne veut pas, pardonnez-moi, mais pour les motifs que vous invoquez, cela me paraît juridiquement extrêmement douteux, nous ne sommes pas encore en dictature. J'étais contre le projet porté par ce propriétaire, je l'ai fait savoir à l'époque, j'ai d?ailleurs même précédemment, en 2017, fait savoir à l?acheteur précédent, la société "O?Sullivan" qui n'avait alors signé qu'une promesse d'achat, que je combattrai son projet. C'est pourquoi la société, à l?époque, avait renoncé à son achat, grâce à mon intervention auprès d?elle. Je dis un mot sur l'évacuation de la Flèche d'Or. J'attends que quiconque prouve ici l'irrégularité que vous dénoncez. Squatter un bien privé, jusqu?à preuve du contraire, c'est toujours illégal. Si le propriétaire demande, dans le temps légal, la réquisition des forces de l'ordre, les choses sont faites légalement. De manière totalement scandaleuse, certains militants, attisés par ailleurs par des partis politiques, collent des affiches depuis, sur le mobilier urbain, toujours bien évidemment dans le respect de nos personnels, pour appeler à se venger de la Flèche d'Or contre le Mama Shelter. Imaginez les salariés du Mama Shelter, qui est en face de la Flèche d?Or, qui sont mort d'inquiétude, ce sont eux qui m'ont saisie parce que des gens ont appelé à investir le Mama Shelter. Des personnes gagnent leur vie en travaillant là-bas, et elles sont menacées par des hurluberlus violents qui disent qu'il faut se venger de M. TRIGANO. Vous comprendrez que j'appelle à voter contre ce v?u qui est la manifestation de la totale irresponsabilité qui règne dans certains de nos groupes, aujourd'hui.
M. Nicolas NORDMAN, adjoint, président. - Merci.
Pour répondre à l'ensemble des oratrices et orateurs, je donne la parole à Mme Karen TAÏEB, puis à Mme la représentante du Préfet de police.
Mme Karen TAÏEB, adjointe. - Merci aux différents intervenants sur la question de la Flèche d'Or.
Pour rappel, vous l'avez dit, ce site est inoccupé depuis deux ans, il a été racheté par le groupe "Keys Asset Management" en 2018. Depuis les 16 et 17 novembre derniers, une occupation pacifique s'est mise en place dans l?ancien site de la Flèche d?Or, rassemblant de nombreuses associations et collectifs citoyens sous le nom de "Maison des peuples".
Nous pouvons déplorer l'évacuation brutale de ce lieu, dans l'après-midi du 17 novembre 2019, par la police, repoussant indistinctement les personnes venues apporter leur soutien. Dans le v?u de l'Exécutif, nous interpelons d?ailleurs le Préfet de police concernant les conditions de l?évacuation et l'usage disproportionné de la force qui ont eu lieu ce jour-là.
Il est important de rappeler le rôle de médiation que joue la Ville dans cette situation, en s?appuyant notamment sur la charte en faveur de l'occupation temporaire, signée le 26 août dernier aux Grands Voisins, pour accompagner les acteurs au déploiement d'une occupation temporaire. Dans ce contexte, une rencontre entre l'Exécutif et les représentants du groupe Keys Asset Management s'est tenue le 4 décembre dernier, au vu de l'inquiétude légitime des habitants concernant le futur usage de la Flèche d'Or. Nous avons rappelé au propriétaire que le lieu devait garder sa vocation culturelle, associative, festive, un lieu d?intérêt collectif, d?échange et de partage. Lors de ce rendez-vous, il a été décidé qu?une occupation temporaire soit mise en place sous la forme d'un appel à projets, en y associant les propriétaires, les habitants, les collectifs citoyens du 20e et les associations culturelles. Afin de nous faire un point sur cette occupation temporaire, un appel à projets sera élaboré avant les fêtes de fin d'année. Le lieu doit garder les critères suivants : culturel, associatif et festif. L'occupation temporaire pourra se tenir entre février et septembre. Un jury se tiendra fin janvier, avec la participation des personnes que je viens de citer. Pour toutes les raisons évoquées, je vous propose de retirer vos v?ux et de voter favorablement le v?u de l'Exécutif qui vous a été remis.
M. Nicolas NORDMAN, adjoint, président. - Merci.
Mme la Représentante du Préfet de police, vous avez la parole.
Mme LA REPRÉSENTANTE DU PRÉFET DE POLICE. - Merci, Monsieur le Maire.
Je ne reviendrai que sur ce qui relève de la compétence du Préfet de police dans cette affaire. Evidemment, certains termes des v?ux qui ont été déposés m'interpellent. De quoi parle-t-on exactement ? On parle de l'introduction par effraction de 65 personnes dans un lieu privé. C'est illégal, aujourd'hui en France, de s'introduire par effraction dans un lieu privé, qui ne nous appartient pas. Le propriétaire a déposé plainte - parce que c?est comme cela que cela se passe dans un Etat de droit - immédiatement pour dégradation volontaire de biens privés. Il a requis le concours de la force publique pour récupérer son bien, dans les plus brefs délais.
Le Préfet de police, en plein accord avec le Procureur de la République - parce que nous sommes dans un Etat de droit et c'est sous le contrôle de la justice que notre action se réalise - a demandé le concours de la force publique qui lui a été accordé et qui a été mis à exécution.
Un adjoint à la Maire de Paris était présent lors de l?évacuation, il était dans les lieux et il tentait une médiation, c'est tout à son honneur, mais manifestement, le propriétaire n'était pas dans le même état d'esprit et ne souhaitait pas s'engager dans la moindre médiation avec les occupants illicites. Cet adjoint a été invité à quitter les lieux, ce qu?il a fait.
Puis nous avons évacué un à un les occupants de ce lieu, qui ne nous ont pas facilité la tâche puisqu?ils ont tout fait pour se maintenir à l'intérieur. Mais il n?y a pas eu de violence, et s'il y a eu violence, dans ce cas, il y a des moyens de recours légaux pour faire valoir les droits des occupants s'ils estiment avoir été molestés par la police, ou s?ils estiment que leur évacuation n'était pas légale. Il n'y a d?ailleurs eu aucune interpellation à l?occasion de cette évacuation.
A la fin de l?évacuation, lorsque toutes les personnes avaient été évacuées et étaient dans la rue, rejointes par d'autres individus, elles ont tenté d'entraver l'action des policiers, de leur barrer la route et de les empêcher de travailler. Les policiers ont dû faire usage de trois grenades lacrymogènes pour pouvoir les disperser et les refouler. Je précise qu'aucune plainte n'a été déposée contre les policiers et contre le travail de la police. Là encore, c'est le droit de ceux qui estiment avoir été maltraités de le faire s'ils le souhaitent. La Préfecture de police ne souscrit absolument pas aux termes de votre v?u. La Préfecture de police continuera à faire respecter la loi devant laquelle nous sommes tous égaux et en toutes circonstances. La Préfecture de police continuera à faire respecter le droit de propriété, qui est inscrit dans la Constitution de la République française. Je crois que cela n'est que justice que de rendre hommage aux forces de l'ordre dans cette mission qui est au service de tous.
M. Nicolas NORDMAN, adjoint, président. - Sur les v?ux n° 167 et n° 168, l'Exécutif a déposé le v?u n° 168 bis. Je vais d'abord demander au groupe Communiste - Front de Gauche s'il maintient son v?u au profit de celui de l'Exécutif ? Il est retiré. Le v?u n° 168 de Mme SIMONNET est maintenu.
Avant de mettre les deux v?ux aux voix, je donne la parole à Mme Léa FILOCHE, pour une explication de vote.
Mme Léa FILOCHE. - Monsieur le Maire, sur cette histoire de la Flèche d'Or, il y a beaucoup de réponses que je voudrais faire. Comme j?ai une minute, je vais essayer d?être très brève. D?abord, Madame la Préfète, bien entendu on n'est pas là pour remettre en cause le cadre illégal d'occupation d'un lieu privé. Par contre, le fait qu?un bâtiment vide depuis deux ans soit inoccupé, c'est aussi un problème. C'est une chose contre laquelle il faut que l'on se mobilise, au vu en particulier de la pression foncière parisienne. Ensuite, Madame la maire du 20e arrondissement, sur votre demande de préemption, je n'ai plus toutes les dates en tête, mais on peut peut-être poser la question à l'ancien adjoint en charge des finances de la Ville qui n'a pas répondu à l'époque. Puis sur la question du projet porté aujourd'hui, on est dans une occupation temporaire, cela a été très bien expliqué par l'Exécutif, qui est travaillée avec les habitants, avec les associations et qui a vocation à pouvoir co-construire, y compris avec le propriétaire actuel du lieu, un projet d'occupation temporaire dans les cadres légaux aujourd'hui déterminés par la charte de la Ville de Paris. C'est aussi ce qui nous va nous permettre d'aboutir à un projet intelligent, intéressant et constructif. Nous voterons donc le v?u de l'Exécutif.
M. Nicolas NORDMAN, adjoint, président. - Merci.
Monsieur BARGETON, vous avez été interpelé.
M. Julien BARGETON. - Les courriers de la maire du 20e arrondissement sur la Flèche d'Or, il y en a un de juillet 2018. Il ne vous aura pas échappé qu?en juillet 2018, je n'étais plus adjoint aux finances. Je sais bien que c'est la grande méthode de cet Exécutif qui est de toujours rejeter la faute sur les autres, de trouver des responsables, parce que c?est tellement plus facile? C'est une vieille méthode en politique, mais je ne la partage pas. Celui de juin 2017 n'a jamais été porté à l'arbitrage, c?est-à-dire que jamais les adjoints concernés n'ont sollicité qui que ce soit pour savoir s'il fallait ou pas préempter la Flèche d'Or. Il y a un moment où les "fake news", je le dis franchement, cela suffit ! Il faut aussi rétablir la vérité. Si c'est comme cela que vous fonctionnez, ce n'est pas mon cas. Tout n'est pas possible. Madame FILOCHE, tout n'est pas possible !
M. Nicolas NORDMAN, adjoint, président. - Merci. Il faut que chacun se calme. S?il vous plaît, ne vous interpellez pas. Je pense que ce n'est pas très utile pour faire avancer le débat.
J'ai une nouvelle demande d'explication de vote de M. Jérôme GLEIZES.
Monsieur GLEIZES ?
M. Jérôme GLEIZES. - Les Ecologistes regrettent les désaccords entre socialistes et ex-socialistes qui nous ont empêchés de préempter la Flèche d'Or, qui était une demande ancienne des Ecologistes depuis longtemps. On est assez déçu qu?on ne soit pas arrivé à cela. Pour répondre à Mme la Préfète, a priori, l'occupation s'est faite de manière tout à fait légale, au sens où il aurait fallu avoir une décision du Tribunal administratif pour entraîner la réquisition des forces de l'ordre. Vous savez qu?il y a un délai par rapport à des bâtiments inoccupés, qui sont occupés par des occupants illégaux. Il n?empêche que normalement, il aurait fallu avoir une décision du juge administratif pour ordonner la réquisition, parce que le bâtiment était occupé depuis plus de 48 heures. Heureusement que nous avons déjà occupé des bâtiments et aujourd'hui, on est bien content que ces bâtiments soient dans le domaine public, parce que justement, il y a eu des réquisitions par rapport à des bâtiments abandonnés. Nous maintenons notre droit à occuper des bâtiments abandonnés.
M. Nicolas NORDMAN, adjoint, président. - Merci.
Nous passons au vote. Le v?u n° 167 est retiré.
Le v?u n° 168 de Mme SIMONNET est maintenu avec un avis défavorable de l'Exécutif.
Je mets donc aux voix, à main levée, la proposition de v?u déposée par Mme SIMONNET, assortie d'un avis défavorable de l'Exécutif.
Qui est pour ? Contre ? Abstentions ?
La proposition de v?u est repoussée.
Je mets aux voix, à main levée, le projet de v?u déposé par l'Exécutif.
Qui est pour ? Contre ? Abstentions ?
Le projet de v?u est adopté. (2019, V. 562).