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37 - 2011, I - Question d'actualité de M. GOUJON au nom du groupe U.M.P.P.A. relative à la légalisation du cannabis.

37 - 2011, I - Question d'actualit� de M. GOUJON au nom du groupe U.M.P.P.A. relative � la l�galisation du cannabis.

M. LE MAIRE DE PARIS. - Nous commen�ons par M. Philippe GOUJON.

M. Philippe GOUJON, maire du 15e arrondissement. Merci, Monsieur le Maire.

Plus fort que la d�p�nalisation, la l�galisation contr�l�e.

Le vote par votre majorit�, Monsieur le Maire, de l'ouverture de salles de "shoot" � Paris constituait donc bien le pr�alable � l'organisation par l'Etat de la production sur des dizaines de milliers d'hectares et de la vente de haschisch dans des "cannabistrots" ouverts avec l'aval des douanes, le tout supervis� par une agence nationale sur le mod�le de la SEITA.

Certes, l�galiser et donc l�gitimer, justifier et, in fine, encourager l'usage de stup�fiants ne fait pas l'unanimit� dans vos rangs. "Cela va � l'encontre de mes valeurs" a d�clar� Emmanuel VALLS, tout en s?interrogeant : "Si, demain, le crack, l?h�ro�ne, la coca�ne prennent la m�me ampleur, cela veut-il dire qu'il faudra aussi l�galiser les drogues dures ?"

S�gol�ne ROYAL consid�re tout autant que si on d�p�nalise le cannabis, le trafic se fera sur des drogues plus dures.

Arnaud MONTEBOURG rappelle quant � lui que les pays qui ont d�p�nalis� r�visent leur jugement et c'est effectivement vrai pour l'Espagne, le Royaume-Uni, les Pays-Bas et m�me la Suisse.

Alors, Monsieur le Maire, vous qui savez si bien vous affranchir des questions embarrassantes, chacun s?interroge, dans ce d�bat ambigu qui agite le P.S., sur un sujet essentiel pour l'avenir de notre jeunesse. Briserez-vous avec M. VAILLANT le tabou de l'interdit, dont on sait pourtant qu'il incite au moins la moiti� des jeunes non consommateurs � renoncer et croyez-vous que parce que la lutte contre les stup�fiants est difficile, il faut l'abandonner ? Ne pensez-vous pas, au contraire, que si la consommation est l�galis�e, elle augmentera, car son acc�s sera plus facile et son co�t r�duit ? Etes-vous pr�t, Monsieur le Maire, � prendre le risque d?atteindre des chiffres identiques � ceux du tabac ou de l'alcool ? Faites-vous l'impasse sur l?attrait pour les organisations criminelles du commerce parall�le des produits licites comme les cigarettes et sur leur capacit� � g�rer des strat�gies d'adaptation en se tournant, par exemple, vers d'autres trafics ou vers les mineurs ?

Enfin, ne voyez-vous pas le paradoxe d'accro�tre la disponibilit� d'un produit dont la dangerosit� est de plus en plus av�r�e, au moment m�me o� la politique globale men�e par la France sous tous les Gouvernements d?ailleurs, quelle que soit leur couleur politique, et associant �troitement pr�vention, soin, r�duction des risques et application ferme de la loi, a permis de r�duire, et de fa�on sensible, le nombre des exp�rimentateurs de cannabis ?

Alors, Monsieur le Maire, puisque le Parti socialiste a d�cid� d'ouvrir ce d�bat pour 2012, est-ce l� son programme pour la jeunesse ?

Votre message � vous, Monsieur le Maire, votre message � la jeunesse sera-t-il celui de la d�mission et de la compromission ou celui de l'espoir et du courage politique ?

Je vous remercie.

M. LE MAIRE DE PARIS. - Mme Myriam EL KHOMRI a la parole.

Mme Myriam EL KHOMRI, adjointe. - Merci, Monsieur le Maire.

Monsieur le d�put�-maire, la question du statut du cannabis dans notre pays me semble exc�der tr�s largement les pr�rogatives et les comp�tences de notre collectivit�.

Le probl�me de la consommation de cannabis se pose avec une intensit� qui n'a sans doute jamais �t� aussi importante qu'aujourd'hui dans tous nos d�partements, en m�tropole comme en outre-mer, des agglom�rations aux zones rurales en passant par les zones p�riurbaines.

Ce probl�me constitue clairement un enjeu de politique nationale et g�n�rale. A ce titre, il est normal et sain qu'il suscite au niveau des partis et d'un certain nombre de responsables politiques des prises de position.

A ce titre, il est normal et sain qu'il fasse d�bat dans notre pays.

Pour autant, il me semble absurde de demander � un Ex�cutif municipal de prendre position sur ce sujet. Reposez votre question dans deux jours � l'Assembl�e nationale, elle y a bien davantage sa place qu?au Conseil de Paris.

Peut-�tre est-ce justement au Conseil de Paris que vous avez souhait� la poser, pour instruire le sempiternel proc�s en laxisme, auquel vous vous plaisez � assigner notre Ex�cutif.

Ce proc�s en laxisme est bien mal inspir�, �manant d'une majorit� dont la d�cennie pass�e au pouvoir aura correspondu � l?explosion du nombre de consommateurs r�guliers et � une forme de faillite polici�re et sanitaire.

Dans un pays qui compte plus de 4 millions de consommateurs et plus de 12 millions d'exp�rimentateurs d'une substance, dont je vous accorde volontiers qu'elle est loin d'�tre anodine pour la sant�, il ne me semble ni illogique ni dangereux de questionner une l�gislation qui met hors-la-loi un cinqui�me de la population.

D'autres pays europ�ens ont engag� cette r�flexion, optant pour des solutions diff�rentes des n�tres, des solutions raisonn�es et respectables, dont il serait audacieux de dire qu?elles sont moins efficaces que les n�tres.

C'est donc bien le souci de l'ordre et non la passion du laxisme qui est au fondement de la r�flexion engag�e sur cette question, un ordre mis � mal avec 600.000 nouveaux consommateurs depuis 1999 et un prix � l'achat qui ne diminue pas, malgr� la hausse continue des saisies qu'orchestre bien le Gouvernement, un ordre injuste �galement, puisqu?il a abouti � une hausse des condamnations pour d�tention et usage et � une baisse des condamnations pour offre et cession, c'est-�-dire pour trafic.

La collectivit� parisienne, confront�e � une recrudescence des violences li�es au trafic de stup�fiants, consid�re que le d�bat sur le statut du cannabis est un d�bat l�gitime, le genre de d�bat d�mocratique et responsable qui honore la politique et au terme duquel devront se red�finir les �quilibre de s�curit� et de sant� publique en France.

Nous poursuivons tous les m�mes objectifs : une baisse de la consommation de cannabis pour am�liorer la sant� et la s�curit�. Ne n�gligeons aucun chemin pour atteindre ces objectifs.

M. LE MAIRE DE PARIS. - Tr�s bien, Myriam EL KHOMRI.

Pas de commentaires ?

Que voulez-vous, Monsieur GOUJON ?

M. Philippe GOUJON, maire du 15e arrondissement. L'orateur peut reprendre la parole pendant deux minutes, apr�s le Pr�fet de police, peut-�tre.

M. LE MAIRE DE PARIS.- Vous avez pos� votre question au Maire de Paris. Le Maire de Paris, c?est moi.

�tez-moi d?un doute, je suis Maire de Paris ou non ?

Si vous voulez, je peux donner la parole � M. le Pr�fet de police, s'il le souhaite et tr�s bri�vement, mais votre question m'�tait adress�e.

Monsieur GOUJON, soyez coh�rent.

Vous avez envie d'entendre le point de vue tr�s bref de M. le Pr�fet de police, c'est bien volontiers, s'il en a envie.

M. LE PR�FET DE POLICE. - Monsieur le Maire, la question vous est adress�e, mais puisque j'ai entendu Mme Myriam EL KHOMRI qui parlait de faillite polici�re, je me sens un peu concern�.

Dans cette affaire, j'ai coutume de dire que, par principe, les services de police n'ont pas � commenter la loi ni � la modifier. Il y aura, comme cela vient d'�tre indiqu� � la fois par celui qui pose la question et par Mme EL KHOMRI qui lui a r�pondu, un d�bat.

De ce d�bat, il r�sultera des textes et la Pr�fecture de police, l� comme ailleurs, appliquera la loi. C'est d'ailleurs ce qu'elle fait. Des institutions de notre R�publique ne s'empressent pas autant, si vous voyez ce je veux dire, d'appliquer la loi.

Puisque l'on parle de faillite polici�re, vous savez que, depuis que j'ai pris mes fonctions, j?ai manifest� � plusieurs reprises l'int�r�t port� � la lutte contre la drogue, dans la mesure o� je consid�re que c'est un fl�au tout � fait important pour la vie en soci�t� dans notre ville et dans votre ville, Monsieur le Maire, comme ailleurs.

Nous avons lanc� ce plan drogue d�s octobre 2007. Dans le cadre de l'agglom�ration, il est aujourd'hui appliqu� dans les trois d�partements et je pense qu'il est un peu exag�r� de parler de faillite polici�re.

Je fais simplement deux ou trois r�flexions. La premi�re, c'est que le plan drogue que nous avons engag�, n'est pas motiv� par la recherche d'un tableau de chasse, mais tout simplement par la n�cessit� de faire que les gens vivent mieux, notamment dans les halls d'immeuble.

Deuxi�mement, nous avons de forts risques, ce sera un sujet compliqu� si l?on doit l�galiser, avec la mise en place d'un nouveau dispositif de vente � l'image du tabac, mais, � l'image du tabac, il y a fort � parier, puisque c'est ce que l'on vit actuellement, que s'il y a l�galisation, il y aura des trafics sur des mauvais produits.

A l'heure actuelle, il faut avoir � l'esprit - et nous le regrettons tous - qu'au-del� du cannabis, d'autres drogues sont pr�sentes, � Paris comme ailleurs : la coca�ne sous forme de crack, par exemple, l?h�ro�ne ou les drogues de synth�se.

Il suffit de se r�f�rer � ce qui s'est pass� hier dans le 19e arrondissement pour s'apercevoir que les trafiquants sont multicartes. Dans une saisie, hier, dans le 19e arrondissement, il y avait de l?herbe, 2,9 kilos de crack (ce qui n'est pas rien) et d'autres substances. Voil� ce que je peux dire, sous l'angle r�pressif.

Sous l'angle de la pr�vention, comme vous le savez, Monsieur le Maire, puisque j'ai eu l'occasion de vous le dire, ainsi qu'� M. Georges SARRE et � Mme Myriam EL KHOMRI, nous ne sommes pas rest�s bras ballants � la Pr�fecture de police dans le cadre du contrat parisien de s�curit�.

Il ne nous appartient pas � nous, Pr�fecture de police, de pr�voir la politique sanitaire, mais l?on peut s?y associer avec intelligence.

J'ai amen�, parce que je subodorais que j?allais peut-�tre �tre appel� � intervenir, deux documents que j'ai diffus�s aux �lus de Paris - et je souhaite qu'ils soient lus - sur les effets du cannabis et de la coca�ne.

C?est un probl�me tr�s grave pour notre pays, qui constitue un v�ritable danger, notamment pour les enfants et les adolescents.

Les documents que l'on a �labor�s ne sont pas des documents de policiers, ce sont des m�decins, des p�dopsychiatres, des psychiatres, des sociologues ou des assistantes sociales qui se sont exprim�s.

Comme il m'arrive de parler avec mon cerveau unique, qui me sert pour la fonction et � titre personnel, je consid�re que c'est un danger tr�s important, mais c'est un petit �l�ment dans un d�bat dont j'ai conscience qu'il me d�passe.

M. LE MAIRE DE PARIS. - Merci.

Monsieur GOUJON ?

M. Philippe GOUJON, maire du 15e arrondissement. Nous avons entendu le Pr�fet de police, nous avons entendu la parole de Mme EL KHOMRI que je ne n�glige pas du tout, bien au contraire, mais il aurait �t� int�ressant pour l'ensemble des Parisiens et de leurs repr�sentants de conna�tre votre point de vue personnel, �tant donn� qu'il y a un d�bat, c'est vrai, mais qui a �t� lanc� par l?un des membres importants de votre majorit�. C'est m�me un maire d'arrondissement.

D�s lors qu?un maire d?arrondissement lance le d�bat, souffrez que les autres maires d?arrondissement aussi puissent donner leur point de vue. C?est fait, pour ce qui concerne un certain nombre d?entre eux. Les deux points de vue sont l�, d'autant que vous avez l'habitude de d�battre aussi de sujets d'ordre national, qui ne sont pas forc�ment adapt�s � cette enceinte.

Face � la r�ponse qui consiste � dire que c'est un d�bat qu'il faut avoir � l'Assembl�e nationale, je ferais valoir qu'on peut l?avoir ici aussi, d'autant plus que c?est l'un d'entre vous, et pas des moindres, qui l?a lanc�.

C'est vrai que le combat de la drogue n?est pas perdu, dans ce pays, bien au contraire d?ailleurs, parce que le niveau de la consommation de cannabis a retrouv� celui de 2002 et qu?il baisse depuis 2003.

Simplement, nous aurions aim�, ici, dans cette enceinte, que l'ensemble des forces politiques de notre Conseil puissent soutenir la politique men�e par tous les gouvernements, de gauche comme de droite, de pr�vention, de soins, de r�duction des risques, men�e contre le cannabis.

Merci.

M. LE MAIRE DE PARIS. - Monsieur GOUJON, d'abord, vous �tes un peu impatient et il faut savoir attendre un peu.

Bien s�r, je vais vous donner mon sentiment, mais je voulais laisser s'exprimer le d�bat, �couter chacun, vous deux fois !

Deuxi�mement, si nous voulons tenir ici, au Conseil de Paris, tous les d�bats int�ressants dans notre pays, il faut fusionner le Conseil de Paris � l'Assembl�e nationale ou au S�nat. Mais, le S�nat, cela va �tre compliqu� !

Donc, ayons la modestie, de temps en temps, de nous comporter en Assembl�e locale.

M. Philippe GOUJON, maire du 15e arrondissement. C'est vous qui l'avez lanc�.

M. LE MAIRE DE PARIS. - Vous permettez ?

M. Daniel VAILLANT, comme vous l?avez dit, est parlementaire. Il y a des instances parlementaires, mais puisque vous y tenez, je vais vous donner quelques �l�ments.

D'abord, vous avez qualifi� Daniel VAILLANT d'un de mes amis proches. Vous avez raison et je ne compte pas mettre de distance.

Mais vous savez, entre amis proches, on peut avoir parfois des appr�hensions de sujets de fond, compliqu�s, qui ne sont pas identiques. D'ailleurs, j'ai cru voir sur d'autres sujets, qui n'�taient pas tr�s id�ologiques, certaines diff�rences parmi vous.

Mais l�, c'est une question qui, vraiment, interpelle.

Je vais vous rappeler d'abord quelque chose.

Lorsque M. PASQUA �tait Ministre de l'Int�rieur, il avait recommand� que soit ouvert un grand d�bat sur la question. Malheureusement, il n'a pas �t� entendu et le m�rite principal du rapport de Daniel VAILLANT, c'est de demander que s'ouvre un grand d�bat national sur ce sujet.

Sur ce sujet, je suis compl�tement d'accord avec Daniel VAILLANT.

Vous permettez ? Je vous ai �cout�, qu?est-ce que vous avez ?...

Eh bien, voil�, cela peut arriver !

Je ne suis pas sectaire, comme vous, moi !

Je pense que le principal m�rite de son rapport, c?est que la soci�t� fran�aise a besoin d'un d�bat sans tabou, complet sur ce sujet.

Deuxi�me remarque que je voudrais faire, c'est que le statu quo n?est absolument pas satisfaisant. Vous avez fait allusion � tous les gouvernements. D'accord, tous les gouvernements, en attendant, la situation actuelle ne convient pas.

Personnellement, je consid�re ce sujet comme un sujet de sant� publique et c'est pourquoi je serais peut-�tre moins cat�gorique que mon ami Daniel VAILLANT sur les solutions qu'il pr�conise, notamment en mati�re de l�galisation.

En revanche, il y a une question que je me pose ; ne le prenez pas comme une mani�re de clore le d�bat ! Je me demande, sur la p�nalisation des consommateurs, s?il ne vaudrait pas mieux que nos forces de police, que j'estime beaucoup, soient consacr�es � autre chose qu'� r�primer les fumeurs de joints. Vous voyez ! Parce qu?il y a beaucoup de boulot et ce n?est, d?ailleurs, pas ce qu?ils font le plus.

Une intervenante. - Ils ne font pas que cela !

M. LE MAIRE DE PARIS. - C?est marrant, vous voulez des d�bats et vous refusez que les gens s'�coutent !

J'essaie de vous donner un sentiment ouvert, mesur�, pas sectaire et vous voulez absolument crisper.

Moi non !

Donc, dans les enceintes qui conviennent, c'est-�-dire sans doute l'Assembl�e nationale, le S�nat et au-del�, je souhaite effectivement qu?il y ait un grand d�bat sur ce sujet et un d�bat qui, je l'esp�re, nous fera avancer.

Mais, bien entendu, si vous souhaitez qu'on en reparle, on verra dans la conf�rence d'organisation s'il faut organiser un d�bat prioritaire sur le cannabis.

Juin 2011
Débat
Conseil municipal
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